Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 13 mai 2003, 00-12.481

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2003-05-13
Cour d'appel de Paris (5e chambre, section A)
2000-02-09

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen

unique, pris ses deux branches ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 février 2000), que, la société Immobilière Expansion (la société IE) a cédé des locaux commerciaux à la société Financière Eurobail (société Eurobail) qui les lui a redonnés en location suivant contrat de crédit-bail conclu le 22 octobre 1992 ; que par jugement du 22 février 1993, la société IE a été mise en redressement judiciaire ; que le 27 juillet 1993, l'administrateur judiciaire, M. X... et le représentant des créanciers, Mme Y... ont assigné la société Eurobail en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice né, selon eux, du refus du crédit bailleur d'exécuter ses obligations et de la rupture unilatérale du contrat qui en serait résulté ; que la société Eurobail a demandé reconventionnellement que soit constatée la résiliation du contrat avec effet au 7 février 1994 soit un mois après la délivrance d'un commandement de payer visant la clause résolutoire ; que par arrêt confirmatif du 2 décembre 1994, la cour d'appel a constaté le jeu de la clause résolutoire et condamné l'administrateur judiciaire, ès qualités, à payer des sommes à titre de loyers, indemnité de résiliation et indemnité d'occupation ; que le pourvoi formé à l'encontre de cet arrêt a été rejeté par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de Cassation (arrêt du 22 octobre 1996, n° 1508, pourvoi n° F 94-21.380) ; que l'administrateur judiciaire et le représentant des créanciers ont alors fait assigner la société Eurobail en restitution des indemnités liées à la résiliation du contrat dont elle avait reçu paiement au motif que ces sommes n'avaient pas été déclarées au passif de la société IE ;

Attendu que l'administrateur judiciaire et le représentant des créanciers font grief à

l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable la demande formée par la société IE, et son administrateur judiciaire en vue d'obtenir la restitution des diverses indemnités, dont la société Eurobail avait reçu paiement, en réparation du préjudice causé par la rupture d'un contrat en cours, alors, selon le moyen : 1 / que l'autorité de la chose jugée ne peut pas être opposée lorsque la demande est fondée sur une cause différente de celle qui a donné lieu au jugement ou lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ; qu'il s'ensuit que l'arrêt de la cour d'appel du 9 décembre 1994 condamnant M. X... à payer à la société Eurobail, diverses indemnités en réparation du préjudice causé par la résiliation du contrat de crédit-bail consenti à la société Immobilière Expansion, n'interdit pas à son administrateur judiciaire de se prévaloir de l'extinction de sa dette, pour une cause postérieure à sa condamnation, serait-elle passée en force de chose jugée, faute pour la société Eurobail d'avoir déclaré au passif de la société Immobilière Expansion, les indemnités de résiliation du contrat de crédit-bail, ainsi que l'article 37, alinéa 4, de la loi du 25 janvier 1985 lui en faisait l'obligation, après que la Cour de Cassation eut décidé, par substitution de motifs, dans son arrêt du 22 octobre 1996, que M. X... avait renoncé tacitement à la continuation du contrat de crédit-bail ;

qu'en décidant

le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble les articles 37, alinéa 4, et 40 de la loi du 25 janvier 1985, l'article 1376 du Code civil, et le principe de légalité des créanciers chirographaires d'un débiteur en redressement judiciaire ; 2 / qu'en cas de rejet du pourvoi par substitution de motifs, l'autorité attachée à la chose jugée par la Cour de Cassation, prive de toute autorité, les énonciations de l'arrêt attaqué qui sont incompatibles avec le motif substitué par la Cour de Cassation, même si elles n'ont pas été critiquées par le demandeur au pourvoi ; qu'il s'ensuit, qu'en l'état du rejet du pourvoi en cassation de M. X... contre l'arrêt de la cour d'appel du 9 décembre 1994, par la Cour de Cassation qui a décidé, par substitution de motifs, que la résiliation du contrat de crédit-bail immobilier aux torts exclusifs de la société Immobilière Expansion, était justifiée par la renonciation tacite de M. X..., à en poursuivre l'exécution, l'arrêt attaqué a donc perdu toute autorité de chose jugée, non seulement en ce qu'il avait décidé, à l'inverse de la Cour de Cassation, que la société Immobilière Expansion avait pris elle-même la décision de poursuivre le contrat en cours, mais aussi, en ce que les juges du fond, avaient tiré toutes les conséquences de la continuation du contrat, en énonçant que les indemnités de résiliation d'un contrat poursuivi par le débiteur en redressement judiciaire bénéficiaient de la priorité de paiement instituée par l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, même s'ils ont statué ainsi par des motifs non critiqués par le pourvoi en cassation de M. X... ; qu'en décidant que l'autorité de chose jugée attachée la décision du 9 décembre 1994 constituait une fin de non-recevoir à l'action formée par M. X... qui n'avait pas reproché aux juges du fond, à l'occasion du pourvoi en cassation formé contre cette décision, d'avoir fait application de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, aux indemnités de résiliation du contrat de crédit-bail qui aurait été poursuivi, selon eux, la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée attachée à la décision de la Cour de Cassation qui a écarté implicitement mais nécessairement l'application de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, aux indemnités de résiliation du contrat de crédit-bail qui auraient dû être déclarées au passif de la société Immobilière Expansion, conformément à l'article 37, alinéa 4, de la loi du 25 janvier 1985, dès lors que la Cour de Cassation a décidé, par substitution de motifs, que M. X... avait renoncé tacitement à la poursuite de ce contrat ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles 620, alinéa 1 et 480 du nouveau Code de procédure civile, ensemble I'article 1351 du Code civil, et les dispositions précitées de la loi du 25 janvier 1985 ; Mais attendu qu'à la suite du rejet du pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel du 2 décembre 1994, les condamnations prononcées par cette décision sont devenues définitives ; que la cour d'appel qui a déclaré irrecevable les demandes des mandataires judiciaires en raison de l'autorité de chose jugée attachée à son arrêt du 2 décembre 1994, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X... et Mme Y..., ès qualités, aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... et Mme Y..., ès qualités d'administrateur judiciaire et de représentant des créanciers de la société Immobilière Expansion à payer à la société financière et foncière Eurobail la somme de 1 800 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille trois.