Vu la procédure suivante
:
Par une requête enregistrée le 9 octobre 2024, Mme C A, représentée par Me Cavalier, demande au juge des référés :
1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du 3 juillet 2024 par laquelle le président de l'
université d'Angers l'a affectée sur un emploi à l'unité de formation et de recherche de lettres, langues et sciences humaines de l'
université d'Angers pour la coordination des examens des étudiants avec aménagements d'études ;
2°) de mettre à la charge de l'
université d'Angers la somme de 2 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la décision attaquée emporte un changement d'affectation au sein de l'université lui faisant ainsi perdre le poste qu'elle occupait et les missions qui lui sont attachées alors que celles attachées au poste sur lequel elle est nommée sont restreintes autour de tâches de secrétariat qui ne correspondent pas à son grade ; ce changement de poste, qui s'inscrit dans un climat professionnel très dégradé, aggrave son état de santé affecté par les conditions de travail actuelles ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :
* Le changement d'affectation constitue une mesure de harcèlement moral ; ses conditions de travail se sont dégradées lors de l'arrivée d'un nouveau directeur général des services qui a décidé la suppression de son poste en novembre 2023 ; elle est désormais affectée sur un poste situé à 7,5 kilomètres de son domicile, difficile d'accès, alors que son ancien poste était situé au siège de l'
université d'Angers à 2,5 kilomètre de son domicile et desservi par les transports en commun ; le poste sur lequel elle est désormais affectée ne correspond pas à son grade et aux missions qu'elle exerçait précédemment mais à des tâches d'exécution assignées à un fonctionnaire de catégorie C ou B alors qu'elle est attachée d'administration de catégorie A ; les reproches qui lui sont formulés ne sont pas établis ; elle a été suspendue de ses fonctions à titre conservatoire pendant une durée supérieure à quatre mois sans qu'une sanction disciplinaire soit prise ; en parallèle de cette mesure de suspension, son employeur a tenté de la placer en congé maladie de longue durée d'office ; aucune explication n'a été donnée pour expliquer ou justifier le changement d'affectation ;
* Cette décision constitue une sanction disciplinaire déguisée puisqu'elle s'inscrit dans la suite de la mesure de suspension de fonction à titre conservatoire prononcée par la rectrice de l'académie de Nantes le 26 février 2024 ; aucun conseil de discipline n'a été saisi à la suite de cette mesure de suspension ; la circonstance que la procédure disciplinaire n'ait pas été respectée est un indice du caractère déguisé de la sanction ; elle n'a pas été invitée à consulter son dossier antérieurement à l'édiction de la décision, ni mise en mesure de présenter des observations ou de les préparer en amont de la décision ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2024, l'
université d'Angers, représentée par Me Boucher, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que soit mis à la charge de Mme A une somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête en référé est irrecevable, faute pour Mme A d'avoir joint à celle-ci la requête tendant à l'annulation au fond de la décision attaquée ;
- la requête est irrecevable dès lors qu'elle est dirigée contre une mesure d'ordre intérieur ; il ne s'agit pas d'une sanction déguisée ; elle n'emporte que peu de changements nonobstant une légère baisse de son régime indemnitaire de l'ordre de 100 euros brut par mois ;
- la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que l'intéressée, qui a pris connaissance de la décision du 3 juillet 2024 le 5 juillet suivant, a attendu le 9 octobre 2024 pour déposer sa requête en référé suspension ; elle était toutefois informée depuis l'automne 2023 de l'intention du l'
université d'Angers de procéder à la suppression de son poste ; les raisons lui ont été explicitées dès l'automne 2023 et au plus tard en février 2024 ;
- aucun des moyens soulevés par Mme A, n'est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :
* la décision ne s'inscrit pas dans un contexte de harcèlement dès lors que Mme A ne pouvait ignorer la suppression de son poste qui lui a été annoncée à l'automne 2023 ; elle n'a cependant pas cherché à trouver, en concertation avec l'université, une solution ; l'université l'a incitée à rechercher un emploi au sein de de ses services correspondant à son grade et lui a proposé un emploi en février 2024, ce qu'elle a violemment refusé ;
* elle ne constitue pas non plus une sanction disciplinaire déguisée ; la circonstance qu'elle ait été suspendue à titre conservatoire entre février et août 2024 relève d'une décision de la rectrice de l'académie de Nantes et fait suite au comportement violent et menaçant qu'elle a adopté lors de la réunion du 14 février 2024 avec le directeur général des services et la directrice des ressources humaines et qui avait pour objet de lui présenter une offre de poste au sein de l'université ;
* si la juridiction devait considérer que la décision n'est pas une mesure d'ordre intérieur, elle constituerait alors une simple mutation dans l'intérêt du service ;
* la dégradation progressive de l'état de santé mentale de Mme A a inquiété tant ses supérieurs que ses collègues et a incité la direction générale des services à saisir à deux reprises le comité médical ; Mme A a refusé de se soumettre à une visite médicale ; eu égard au comportement qu'elle a adopté entre le 9 juillet et le 27 août 2024, il a été nécessaire de solliciter son placement en congé maladie d'office ce qui fut fait par décision de la rectrice de l'académie de Nantes du 27 septembre 2024 ;
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la requête enregistrée le 9 octobre 2024 sous le numéro 2415748 par laquelle Mme A, demande l'annulation de la décision attaquée.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. Huin, premier conseiller, pour statuer sur les demandes de référé en application de l'article
L. 511-2 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 24 octobre 2024 à 14 heures 30 :
- le rapport de M. Huin, juge des référés,
- les observations de Me Cavalier, représentant Mme A, qui précise que le délai mis à déposer sa requête en référé trouve son origine dans la circonstance qu'elle a été suspendue à titre conservatoire et qu'elle a pris ses congés annuels ensuite ; son conseil rappelle qu'elle a vécu le changement d'affectation au sein de l'université comme une éviction de ses fonctions, non justifiée et s'inscrivant dans un contexte de harcèlement moral et ponctuant une période de mise à l'écart progressive dans son univers professionnel et de retrait des missions qui lui étaient confiées ; la décision emporte en outre des changements importants dès lors que sa nouvelle affectation est plus éloignée que l'ancienne, que les missions qui lui sont confiées relèvent de tâches d'exécution et ne sont pas adaptées à son grade d'attaché d'administration ; elle ne peut donc pas être considérée comme une mesure d'ordre intérieur ; elle conteste les propos qui lui sont prêtés et résumés dans le compte-rendu de l'entretien du 14 février 2024 qu'elle n'a pas signé ; la décision constitue à tout le moins une sanction disciplinaire déguisée dès lors qu'elle a été prise alors qu'elle était suspendue à titre conservatoire ; la procédure disciplinaire n'a pas été suivie ni respectée puisqu'elle n'a pas pu consulter son dossier administrative ou présenter des observations préalables en méconnaissance des droits de la défense ;
- et les observations de Me Boucher, représentant l'
université d'Angers qui précise que le changement d'affectation résulte de la suppression du poste précédemment occupé par Mme A en conséquence d'une réorganisation du service et du recrutement d'une directrice des affaires financières qui a repris une partie des missions ;
La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.
Considérant ce qui suit
:
1. Mme C A, attachée d'administration affectée au sein de l'
université d'Angers, demande au juge des référés, sur le fondement de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision du 3 juillet 2024 par laquelle le président de l'
université d'Angers l'a affectée sur un emploi à l'unité de formation et de recherche de lettres, langues et sciences humaines de l'
université d'Angers pour la coordination des examens des étudiants avec aménagements d'études.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative :
2. Aux termes de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ".
3. Aucun des moyens invoqués par Mme A, tels qu'énoncés dans les visas de cette ordonnance, ne paraît, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision par laquelle l'
université d'Angers l'a affectée sur un emploi à l'unité de formation et de recherche de lettres, langues et sciences humaines de l'
université d'Angers pour la coordination des examens des étudiants avec aménagements d'études. Il y a lieu, en conséquence, de rejeter la requête de Mme A en toutes ses conclusions.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par l'
université d'Angers et d'examiner la condition d'urgence, que la requête de Mme A doit être rejetée en toutes ses conclusions.
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A, la somme demandée par l'
université d'Angers au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'
université d'Angers tendant à l'application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme C A et à l'
université d'Angers.
Fait à Nantes, le 29 octobre 2024.
Le juge des référés,
F. HUIN
La greffière,
M. BLa République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,