Chronologie de l'affaire
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 25 octobre 2012
Cour de cassation 28 janvier 2014

Cour de cassation, Troisième chambre civile, 28 janvier 2014, 13-10904

Mots clés réparation · société · préjudice · vente · reprise · contrat · travaux · préjudice moral · désordres · rejet · montant · indemnisation · réservés · procédure civile · ouvrage

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 13-10904
Dispositif : Rejet
Décision précédente : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 25 octobre 2012
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gadiou et Chevallier
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2014:C300122

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 25 octobre 2012
Cour de cassation 28 janvier 2014

Texte

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 octobre 2012), que M. et Mme X... ont conclu avec la société Les Bastides un contrat de construction de maison individuelle ; que se plaignant de désordres, les époux X... ont, après expertise, assigné la société Les Bastides en indemnisation de leurs préjudices ; qu'ils ont vendu leur bien en cours de procédure ;

Sur le premier moyen

:

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de ramener la condamnation de la société Les Bastides aux sommes de 6 000 euros à titre d'indemnité de jouissance et de 30 000 euros au titre de perte financière, alors, selon le moyen :

1°/ que les époux X... qui, dans l'acte de vente de leur maison, s'étaient réservés la charge de poursuivre à titre personnel la procédure les opposant au constructeur, soutenaient dans leurs écritures avoir droit à une réparation au moins égale au montant des travaux de reprise ; qu'en estimant toutefois que les maîtres de l'ouvrage ne sollicitaient pas d'indemnisation au titre du coût des travaux de reprise, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des époux X... et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°/ que la victime, qui a droit à la réparation intégrale de son préjudice, a la libre disposition des dommages-intérêts qui lui sont octroyés ; que le maître de l'ouvrage, qui vend son immeuble en l'état des malfaçons et non façons dont il est atteint, en se réservant la charge de poursuivre à titre personnel la procédure l'opposant au constructeur du fait de désordres réservés et non repris, a droit à une réparation équivalente au montant des travaux de reprise jugés nécessaires ; qu'en refusant toutefois d'évaluer le préjudice subi du fait des désordres constatés, dont la société Les Bastides avait reconnu la responsabilité, en fonction du montant des travaux de reprise qui avaient été jugés nécessaires, au motif inopérant que les acquéreurs étaient libres de réaliser ou non ces travaux de reprise, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

3°/ qu'en fixant à la somme de 30 000 euros le montant de la réparation allouée aux époux X... sans rechercher quel était le montant des travaux de reprise nécessaires à la réparation des désordres réservés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, sans dénaturation, que les époux X... ne demandaient pas d'indemnisation au titre du coût des travaux de reprise et qu'ils alléguaient un préjudice de perte de valeur lors de la vente de leur maison, la cour d'appel a souverainement retenu qu'il devait être évalué en fonction de l'incidence qu'avaient pu avoir les imperfections diverses sur le prix de revente ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen

:

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande en réparation de leur préjudice moral, alors, selon le moyen, que tout jugement doit être motivé ; que les premiers juges ont justifié le rejet de la demande en réparation du préjudice moral des époux X... en raison des réparations qu'ils accordaient par ailleurs au titre des autres préjudices subis et du risque de double indemnisation ainsi créé ; qu'en confirmant le rejet de cette demande sans autre motif, tout en réformant dans le même temps la décision entreprise s'agissant des autres préjudices subis, la cour d'appel, qui n'a pu adopter les motifs des premiers juges, a violé l'article 455 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a motivé sa décision en retenant, par motifs adoptés, que la demande des époux X... au titre d'un préjudice moral devait être rejetée pour éviter une double indemnisation des préjudices réparés ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

:

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les époux X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux X... à payer à la société Les Bastides la somme de 3 000 euros ; rejette la demande des époux X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les époux X...


PREMIER MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué :

D'AVOIR ramené la condamnation de la société Les Bastides au titre des désordres dénoncés aux seules sommes de 6.000 euros à titre d'indemnité de jouissance et 30.000 euros au titre des pertes financières ;

AUX MOTIFS QUE, même si le contenu du rapport d'expertise est exactement critiqué par le premier juge en ce qu'il ne reprend pas point par point les désordres réservés par les époux X... il ressort de la liste des désordres mentionnés dans les rapports amiables des 9 juin et 29 décembre 2004, qui ont été remis à cet expert et dont le contenu est rappelé dans le jugement de manière exhaustive, que ceux-ci sont essentiellement, comme le résume exactement néanmoins l'expert judiciaire et les maître d'ouvrage euxmêmes dans l'acte authentique de vente, des défauts de finition, d'équerrage, de réglage de menuiseries, d'humidité en sous-sol et, pour l'essentiel, un défaut d'aspect et d'alignement des enduits de façade, malgré la reprise effectuée par l'entreprise KOUTAICH, à la demande de la société LES BASTIDES qui avait accepté cette réserve ; qu'aucun de ces désordres ne caractérise une atteinte à la solidité de l'ouvrage ou à sa destination, y compris l'humidité en sous-sol, dont l'origine n'a pas été établie et l'assureur DO, comme d'ailleurs le garant de livraison visé au contrat (LE MANS CAUTION), n'ont pas été mobilisés ; que concernant les non-réalisations, le problème de non conformité de la construction par rapport aux plans du permis de construire n'est plus évoqué ; qu'il est d'ailleurs affirmé dans l'acte de vente ultérieur que les seules modifications à ce plan concernent un escalier extérieur (dont il n'est pas établi qu'il ait été réalisé par la société LES BASTIDES) et l'absence de auvent au dessus de la cuisine ; qu'à défaut de reprise de ces désordres ou non finitions dans le délai de parfait achèvement, les maîtres d'ouvrage peuvent rechercher la responsabilité de leur constructeur sur le fondement de la responsabilité contractuelle, dès lors qu'ils établissent que ce dernier a commis une faute dans l'exécution du contrat et que cette faute est en relation avec le préjudice de jouissance ou de perte de valeur qu'ils allèguent, puisque, du fait de la revente de la maison sans que les travaux de reprise aient été réalisés, ils ne demandent pas d'indemnisation au titre du coût des travaux de reprise ; qu'or, à l'énoncé des non finitions ou désordres qui sont essentiellement extérieurs ou mineurs, d'ordre esthétique ou de réglage, au point que l'expert a eu le plus grand mal, malgré plusieurs déplacements à les localiser, le trouble de jouissance subi par les époux X..., pendant les 60 mois d'occupation de la maison avant la vente, doit être fixé à 6.000 euros ; que par ailleurs, leur préjudice lors de cette vente doit être évalué, non pas en fonction du montant des travaux de reprise en façade et de pose de la margelle au dessus de la cuisine que les nouveaux acquéreurs sont libres de réaliser ou non, et encore moins sur la base du différentiel mentionné à l'initiative des vendeurs entre le prix « escompté » par ces derniers et le prix de vente effectif, mais en fonction de l'incidence qu'ont pu avoir ces imperfections diverses sur le prix de revente, incidence évaluée en l'espèce à 30.000 euros ; que la société LES BASTIDES qui a commis dans l'exécution de son contrat une faute en n'exécutant pas un ouvrage dénué de vices et en omettant d'exécuter l'intégralité des travaux prévus au contrat, doit être condamnée à payer ces sommes à Monsieur et Madame X..., en indemnisation des préjudices directement occasionnés à ces derniers par ces manquements ; que le jugement doit être infirmé sur les sommes allouées à ces derniers au titre de leur préjudice de jouissance et financier ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les époux X... qui, dans l'acte de vente de leur maison, s'étaient réservés la charge de poursuivre à titre personnel la procédure les opposant au constructeur, soutenaient dans leurs écritures avoir droit à une réparation au moins égale au montant des travaux de reprise (conclusions d'appel des exposants, pages 21 et 22) ; qu'en estimant toutefois que les maîtres de l'ouvrage ne sollicitaient pas d'indemnisation au titre du coût des travaux de reprise, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des exposants et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la victime, qui a droit à la réparation intégrale de son préjudice, a la libre disposition des dommages-intérêts qui lui sont octroyés ; que le maître de l'ouvrage, qui vend son immeuble en l'état des malfaçons et non façons dont il est atteint, en se réservant la charge de poursuivre à titre personnel la procédure l'opposant au constructeur du fait de désordres réservés et non repris, a droit à une réparation équivalente au montant des travaux de reprise jugés nécessaires ; qu'en refusant toutefois d'évaluer le préjudice subi du fait des désordres constatés, dont la société Les Bastides avait reconnu la responsabilité, en fonction du montant des travaux de reprise qui avaient été jugés nécessaires, au motif inopérant que les acquéreurs étaient libres de réaliser ou non ces travaux de reprise, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS, ENFIN et en tout état de cause, QU'en fixant à la somme de 30.000 euros le montant de la réparation allouée aux époux X... sans rechercher quel était le montant des travaux de reprise nécessaires à la réparation des désordres réservés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


SECOND MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR débouté les époux X... de leur demande en réparation de leur préjudice moral ;

AUX MOTIFS, à les supposer adoptés, QUE la SARL LES BASTIDES s'oppose en soulignant qu'elle attend depuis six ans le solde du contrat faisant valoir que la somme consignée par le maître de l'ouvrage comporte un manque de 454,90 ¿, qu'elle attend depuis six ans ; que les époux X... supportent depuis le même délai d'habiter une villa affectée de désordres caractérisés supra et ont subi la perte de valeur de leur villa, troubles qui ont perduré malgré les engagements de reprise mentionnés devant les divers experts intervenus ; qu'il appert des différents courriers déjà mentionnés mais aussi aux lettres avec RAR échangées avec le constructeur les 25 octobre, 4 et 8 et 29 novembre 2005, 7 et 21 mars 2006 que la SARL LES BASTIDES répond aux demandes de tenir ses engagements par d'autres promesses ; que cependant, en l'absence de toute autre justification tenant notamment aux effets sur leur santé pour les époux X... et dans le but d'éviter une double indemnisation des préjudices dont la réparation vient déjà d'être décidée, leur demande de ce chef sera rejetée ;

ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que les premiers juges ont justifié le rejet de la demande en réparation du préjudice moral des époux X... en raison des réparations qu'ils accordaient par ailleurs au titre des autres préjudices subis et du risque de double indemnisation ainsi créé ; qu'en confirmant le rejet de cette demande sans autre motif, tout en réformant dans le même temps la décision entreprise s'agissant des autres préjudices subis, la cour d'appel, qui n'a pu adopter les motifs des premiers juges, a violé l'article 455 du code civil.