Conseil d'État, 17 décembre 2009, 317506

Synthèse

  • Juridiction : Conseil d'État
  • Numéro d'affaire :
    317506
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Publication : Inédit au recueil Lebon
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000021497571
  • Rapporteur : M. Olivier Talabardon
  • Rapporteur public :
    M. Keller Rémi
  • Président : M. Dandelot
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Texte intégral

Vu 1°), sous le n° 317506, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin 2008 et 15 janvier 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE BRICO DEPOT, dont le siège est 30-32 rue de la Tourelle à Longpont-sur-Orge (91310) ; la SOCIETE BRICO DEPOT demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 26 mai 2008 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SARL de Bricolage des Chalonges l'autorisation préalable requise en vue de l'extension de 2 157 m² d'une surface de vente de 5 843 m² d'un magasin spécialisé dans la vente d'articles de bricolage, de jardinage et associés, portant sa surface de vente totale à 8 000 m², exploité sous l'enseigne Mr Bricolage à Basse-Goulaine (Loire-Atlantique) ; Vu 2°), sous le n° 318859, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 juillet et 28 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA LEROY MERLIN FRANCE, dont le siège est rue de Chanzy à Lézennes (59260), représentée par son président directeur général ; la SA LEROY MERLIN FRANCE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler la décision du 26 mai 2008 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SARL de Bricolage des Chalonges l'autorisation préalable requise en vue de l'extension de 2 157 m² d'une surface de vente de 5 843 m² d'un magasin spécialisé dans la vente d'articles de bricolage, de jardinage et associés, portant sa surface de vente totale à 8 000 m², exploité sous l'enseigne Mr Bricolage à Basse-Goulaine (Loire-Atlantique) ; 2°) de mettre à la charge de la SARL de Bricolage des Chalonges la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code

de commerce ; Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SA LEROY MERLIN FRANCE, - les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public, La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SA LEROY MERLIN FRANCE ;

Considérant que

par décision du 26 mai 2008, la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SARL de Bricolage des Chalonges l'autorisation préalable requise en vue de l'extension de 2 157 m² d'une surface de vente de 5 843 m² d'un magasin spécialisé dans la vente d'articles de bricolage, de jardinage et associés, exploité sous l'enseigne Mr Bricolage au sein de l'ensemble commercial situé dans le pôle sud d'activités de la commune de Basse-Goulaine (Loire-Atlantique), portant la surface de vente totale de ce magasin à 8 000 m² ; que les requêtes visées ci-dessus, dirigées contre cette autorisation délivrée au même bénéficiaire et concernant une même opération commerciale, présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; Sur les moyens relatifs à la régularité de la décision attaquée et de la procédure suivie devant la commission nationale d'équipement commercial : Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe, que les décisions de la commission nationale d'équipement commercial doivent comporter des mentions attestant que les membres de la commission ont reçu avec leur convocation, selon la procédure décrite à l'article R. 752-38 du code de commerce alors en vigueur, l'ensemble du dossier soumis à leur examen ; qu'il ressort par ailleurs du dossier que les documents nécessaires ont été portés à la connaissance des membres de la commission ; Considérant que si, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de la commission nationale d'équipement commercial, les décisions qu'elle prend doivent être motivées, cette obligation n'implique pas que la commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect par le projet qui lui est soumis de la méthode et de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables ; qu'en l'espèce, en motivant sa décision relative à l'extension du magasin Mr Bricolage à Basse-Goulaine au regard, notamment, du dynamisme démographique de la région, de la densité en grandes et moyennes surfaces spécialisées dans l'équipement de l'habitat, des caractéristiques de la zone de chalandise du projet, rectifiée à sa demande par rapport au dossier initial, de l'animation de la concurrence principalement entre grandes enseignes spécialisées, de la création attendue d'emplois en complément des emplois existants dans le magasin, du choix et du confort offerts aux consommateurs, la commission nationale a satisfait à cette exigence ; Sur les moyens tirés d'insuffisances et d'inexactitudes du dossier de demande d'autorisation : Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce : La demande d'autorisation prévue aux articles L. 752-1 à L. 752-5 est présentée soit par le propriétaire de l'immeuble, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain ou à exploiter commercialement l'immeuble. ; qu'il ressort des pièces du dossier que la société pétitionnaire a produit les pièces nécessaires à l'établissement de la maîtrise foncière du projet ; que la parcelle cadastrée AP 437 est propriété de la SCI Maphi et que, par suite, l'usage de la voie qu'elle supporte dénommée Rue Kerguelen , qui n'est pas une dépendance du domaine public communal, ne nécessite pas d'autorisation domaniale de la commune de Basse-Goulaine ; qu'en outre, les autorisations accordées par les propriétaires des parcelles d'assise du projet à la SARL de Bricolage des Chalonges pour qu'elle puisse déposer un dossier devant la commission départementale d'équipement commercial confèrent au pétitionnaire qualité pour présenter devant la commission nationale d'équipement commercial, après refus de la commission départementale, la demande d'autorisation du projet contesté ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les informations complémentaires fournies par le pétitionnaire pour compléter le dossier initial de demande et les compléments d'étude des services instructeurs ayant suivi la rectification de la zone de chalandise, notamment en ce qui concerne l'offre commerciale existante, le marché disponible, le taux d'emprise du projet et l'effet de sa réalisation sur l'emploi, ont permis à la commission, s'agissant en l'espèce d'un projet d'extension d'un magasin existant, de disposer de données suffisantes pour apprécier l'impact de la réalisation du projet sur la zone de chalandise rectifiée ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la commission a disposé des éléments suffisants lui permettant d'apprécier l'impact prévisible du projet au regard des critères fixés par le législateur, notamment sur l'emploi et sur les conditions de circulation ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le magasin sous enseigne Mr Bricolage matériaux est exploité par la SARL de Bricolage des Chalonges sur le territoire de la commune de Vertou, qu'il est clairement distinct du magasin dont l'extension est demandée, figure au nombre des surfaces détenues par le pétitionnaire dans la zone de chalandise mentionnées dans le dossier et a fait l'objet d'observations spécifiques dans le rapport du commissaire du gouvernement devant la commission nationale ; que le moyen tiré d'un vice de procédure concernant les déclarations de surface et d'une inexacte qualification du projet au regard de la notion d'ensemble commercial figurant à l'article L. 752-3 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, manque donc en fait ; Sur les moyens tirés d'erreurs de droit et d'appréciation de la commission nationale d'équipement commercial : Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce dans la rédaction applicable à l'espèce, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux, et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ; Considérant qu'en prenant en compte la densité d'équipement dans la zone de chalandise calculée sur la base du recensement provisoire effectué sur la période 2004-2007, lequel portait sur la très forte majorité de la population de cette zone, la commission nationale d'équipement commercial, qui a comparé cette densité avec celles, calculées sur les mêmes bases, du niveau national et départemental, et a au demeurant disposé également des densités établies à partir du recensement de 1999, n'a commis ni erreur de fait ni erreur de droit ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise rectifiée serait, dans le secteur bricolage-jardinerie, après la réalisation du projet, comparable à celle existant au niveau national, et nettement inférieure à celle constatée au niveau départemental ; que, dans ces conditions, et compte tenu également du dynamisme démographique de cette zone, la commission nationale d'équipement commercial, en estimant que la réalisation de l'extension du magasin existant à l'enseigne Mr Bricolage ne serait pas de nature à affecter l'équilibre entre les différentes formes de commerce, n'a pas fait une inexacte application des dispositions analysées ci-dessus ; que, dès lors, les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de sa décision ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de la SARL de Bricolage des Chalonges, qui n'est pas la partie perdante, les sommes demandées par la SOCIETE BRICO DEPOT et par la SA LEROY MERLIN FRANCE en application de ces dispositions ; qu'il y a lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SOCIETE BRICO DEPOT et de la SA LEROY MERLIN FRANCE une somme de 2 000 euros à verser chacune à la SARL de Bricolage des Chalonges ;

D E C I D E :

-------------- Article 1er : Les requêtes de la SOCIETE BRICO DEPOT et de la SA LEROY MERLIN FRANCE sont rejetées. Article 2 : Les sociétés BRICO DEPOT et LEROY MERLIN FRANCE verseront chacune 2 000 euros à la SARL de Bricolage des Chalonges au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE BRICO DEPOT, à la SA LEROY MERLIN FRANCE, à la SARL de Bricolage des Chalonges, à la commission nationale d'aménagement commercial et à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.