Cour d'appel de Paris, 1 février 2011, 09/11673

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2011-02-01
Tribunal de grande instance de Paris
2009-04-08
Tribunal de grande instance de Paris
2008-05-28

Texte intégral

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT

DU 1er FÉVRIER 2011 (no 56, 5 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 09/11673 Décision déférée à la Cour : jugement du 8 Avril 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 07/02684 APPELANTE: S.C.I. NATY agissant en la personne de son représentant légal 53 avenue des Flandres Hall 7 75019 PARIS représentée par la SCP PETIT LESENECHAL, avoués à la Cour assistée de Maître Ruben GARCIA, avocat au barreau de PARIS, toque : B 884, plaidant pour la SELARL GARCIA INTIMES: Monsieur Mourad Z... ... 94300 VINCENNES représenté par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour assisté de Maître Serge PEREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P 198, plaidant pour la SCP PEREZ-SITBON Maître Catherine B... ... 75011 PARIS représenté par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour assisté de Maître Stéphanie BACH, avocat au barreau de PARIS, toque P 499, plaidant pour la SCP RONZEAU ET ASSOCIES COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 novembre 2010, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de : Monsieur François GRANDPIERRE, Président de Chambre Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller qui en ont délibéré Greffier, lors des débats : Melle Guénaëlle PRIGENT ARRÊT : - contradictoire - rendu par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, Greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire. *** La Cour,

Considérant

qu'à la suite de l'acquisition de deux lots de copropriété et reprochant à Mme Catherine B..., notaire à Paris, de lui avoir caché cette situation et, en particulier, d'avoir omis de mentionner dans l'acte l'arrêté de péril affectant l'appartement voisin ou, à tout le moins, de ne pas avoir effectué de plus amples recherches lorsqu'elle a reçu la réponse du questionnaire adressé au syndic, la société civile immobilière Naty a saisi le Tribunal de grande instance de Paris qui, après intervention de M. Mourad Z..., vendeur, et par jugement du 8 avril 2009, a : - déclaré irrecevables les demandes formées par la S.C.I. Naty contre M. Z..., - débouté la S.C.I. Naty de ses demandes dirigées contre Mme B..., - débouté Mme B... et M. Z..., chacun de sa demande de dommages et intérêts, - condamné la S.C.I. Naty à payer à Mme B... et M. Z..., chacun la somme de 3.000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, - condamné la S.C.I. Naty aux dépens ; Considérant qu'appelante de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, la S.C.I. Naty demande que Mme B... et M. Z... soient condamnés in solidum à lui payer, d'une part, la somme de 60.000 euros en réparation, à l'égard de Mme B..., de sa perte de chance de ne pas avoir été placée en position de renoncer à l'acquisition ou de solliciter la réduction du prix, et à l'égard de M. Z..., en réparation de la révision du prix eu égard aux vices cachés affectant le bien, et, à titre subsidiaire, en réparation du préjudice consécutif au manquement à l'obligation de délivrance imputable à M. Z..., et, d'autre part, la somme de 30.000 euros au titre de son préjudice de jouissance ; Qu'à ces fins, la S.C.I. Naty soutient que le notaire s'est abstenu de l'informer de la situation de péril signalée par le syndic et de la présence de plomb, ni de procéder à la moindre collecte d'informations à la suite de la note transmise le 19 octobre 2006 par le syndic ; qu'elle fait également valoir que Mme B..., sur qui pèse la charge de la preuve, ne démontre pas avoir rempli son obligation d'information et son devoir de mise en garde en se référant à des clauses « stéréotypées et classiques » de l'acte authentique selon lesquelles l'acquéreur avait connaissance de la note du syndic alors que la suspicion d'une situation de péril exigeaient que les parties en fussent informées de façon à émettre un consentement éclairé ; qu'après avoir ajouté que Mme B... n'a pas accompli toutes les diligences et vérifications destinées à assurer l'efficacité de l'acte, elle en déduit que, ne démontrant pas qu'elle aurait consenti en toute connaissance de la situation de l'appartement, elle a engagé sa responsabilité professionnelle ; Que la S.C.I. Naty soutient également que M. Z... est tenu des vices cachés sur le fondement de l'article 1641 du Code civil et, subsidiairement, qu'il a manqué à son obligation de délivrance du bien vendu ; Qu'enfin, la S.C.I. Naty expose que l'appartement était inhabitable puisque existait un risque d'effondrement des plafonds et qu'au jour des dernières conclusions, il était encore inhabitable en vertu d'un arrêté de péril du 5 février 2008 ; Considérant que Mme B... conclut à la confirmation du jugement aux motifs qu'elle n'a eu connaissance de la note du syndic qu'après la vente alors que les renseignements d'urbanisme et une lettre d'un géomètre ne faisaient état d'aucun arrêté de péril et qu'en revanche, la S.C.I. Naty avait connaissance de l'état comprenant diverses informations sur la copropriété et ce, alors que l'arrêté de péril du 21 juin 2006 ne visait pas l'appartement acquis et préalablement visité par M. Z... ; que, s'agissant des risques d'exposition au plomb, elle fait valoir que les mentions de l'acte sont complètes ; Que l'intimée déduit de ce qui précède qu'elle n'a commis aucune faute ; qu'elle ajoute que la S.C.I. Naty ne fait la preuve d'aucun préjudice certain, la restitution de tout ou partie du prix de vente ne constituant pas un préjudice indemnisable, ni d'un lien de causalité entre les prétendues fautes et le préjudice allégué ; Qu'à titre subsidiaire, Mme B... sollicite la garantie de M. Z... ; Qu'estimant la procédure abusive, Mme B... demande que la S.C.I. Naty soit condamnée à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ; Considérant que M. Z... conclut à la confirmation du jugement en faisant valoir que l'action directement dirigée par la S.C.I. Naty contre lui a été rejetée par la Cour et qu'à cet égard sa demande est irrecevable comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée ; qu'il soutient également qu'il n'a commis aucun dol au préjudice de la S.C.I. Naty qui, de surcroît, n'est pas recevable à invoquer les dispositions des articles 1641 du Code civil ou le défaut de délivrance dès lors qu'elle avait déjà développé une argumentation identique au cours de la procédure qui a abouti à l'arrêt du 28 mai 2008 ; qu'en outre, il fait valoir que le grief tiré de l'absence d'indication de recherche de plomb manque en fait ; Qu'enfin, M. Z... fait valoir que le préjudice allégué par la S.C.I. Naty n'est pas démontré alors surtout que des travaux ont été entrepris dans l'appartement qui a été transformé en studio ; Qu'après avoir demandé que la S.C.I. Naty soit condamnée à lui verser la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice né de la procédure qu'il estime abusive et déloyale ; Qu'enfin, M. Z... sollicite, à titre subsidiaire, la garantie de Mme B... ; En fait : Considérant que, par acte reçu le 20 octobre 2006 par Mme B..., notaire, M. Z... a vendu à la société civile immobilière Naty les lots nos 30 et 57 dépendant de l'immeuble sis ... (20ème arrondissement), soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, les deux lots consistant l'un en un appartement situé au deuxième étage, porte face droite, d'une superficie de 26,50 m2, et comprenant une salle à manger, une chambre et une salle d'eau, outre le droit aux toilettes communes de l'étage, et une cave, moyennant le prix de 90.000 euros ; que le financement de cette acquisition a été fait à l'aide d'un prêt bancaire ; Qu'auparavant et par arrêté du 21 juin 2006, le préfet de police de Paris a interdit l'occupation de deux logements situés aux premier et deuxième étage, à droite, de l'immeuble dont il s'agit ; que, par arrêté du 4 août 2006, il a pris une décision identique portant sur le logement du troisième étage droite ; qu'il a notifié les deux arrêtés au syndic et aux seuls propriétaires concernés ; que l'un des arrêtés s'appliquait à l'appartement immédiatement voisin de l'appartement acquis par la S.C.I. Naty ; Considérant que, par arrêt du 28 mai 2008, la Cour de céans a confirmé le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Paris qui a débouté la S.C.I. Naty de sa demande dirigée contre M. Z... et tendant à l'annulation de la vente ; Considérant que, le 22 septembre 2009, le préfet de police, faisant suite à une injonction datée du 5 février 2008 et portant injonction d'effectuer des travaux de sécurité, a notifié à la S.C.I. Naty et à tous les copropriétaires un arrêté d'insalubrité et qu'ensuite, l'assemblée générale des copropriétaires a voté une résolution approuvant les travaux d'un montant de 632.636,63 euros, hors taxe ; Sur la responsabilité du notaire : Considérant que, comme l'ont décidé les premiers juges en de plus amples motifs qu'il convient d'adopter, qu'au moment de la signature de l'acte de vente, Mme B... disposait de la réponse à la demande de renseignements d'urbanisme en date du 5 septembre 2006 qui ne mentionnait aucun arrêté de péril s'appliquant aux lots no 30 et no 57 et d'une lettre émanant du cabinet Poulaud-Jathières, géomètre expert, et datée du aux termes de laquelle l'immeuble sis ... (20ème arrondissement) n'était pas frappé d'un arrêté de péril ; Qu'en outre, l'acte de vente stipule, à la page 16, que « l'état contenant les informations prévues par l'article 5 du décret du 17 mars 1967 issu du décret numéro 2004-479 du 27 mai 2004 sur la copropriété a été délivré par le syndic à la date du 26 septembre 2006 », que « l'acquéreur déclare avoir pris parfaite connaissance de cet état tant par la lecture qui lui en a été faite par le notaire soussigné que par les explications qui lui ont été données par ce dernier », et que « cet état est demeuré ci-joint et annexé aux présentes » ; que, même si, en réalité, l'état délivré par le syndic a été transmis au notaire, non pas le 26 septembre 2006 mais le 19 octobre de la même année, cette erreur de date est dépourvue de toute conséquence sur le contenu des informations données par le notaire à l'acquéreur au moment de la vente ; Considérant que les arrêtés préfectoraux des 21 juin 2006 et 4 août de la même année ne visaient pas le bien vendu et que, s'il appartenait au notaire de donner à l'acquéreur des informations complètes sur les caractéristiques des lots vendus au regard des règles d'urbanisme ou autres, il ne lui incombait pas d'effectuer une recherche sur les lots ou immeubles voisins, ni de se rendre sur place afin de visiter le bien que la Cour, en son arrêt du 28 mai 2008, a regardé comme étant dans un tel état de délabrement que cette caractéristique ne pouvait pas échapper à un acquéreur normalement avisé alors surtout qu'en l'occurrence, le représentant de la S.C.I. l'avait visité plusieurs fois et qu'il a accepté de payer un prix conforme à l'état du bien ; Considérant qu'était également annexé à l'acte un constat de risque d'exposition au plomb en date du 22 août 2006 et qu'il est fait mention dans l'acte lui-même des « facteurs de dégradation » affectant l'immeuble et de l'engagement de l'acquéreur de prendre en charge le coût des travaux nécessaires pour y remédier ; Que, munie des documents nécessaires, Mme B... a valablement reçu l'acte authentique de vente et qu'à cette occasion, elle n'a commis aucune manquement à son obligation d'information ; Qu'à cet égard, il convient de confirmer le jugement ; Sur les demandes formées contre M. Z... : Considérant que, comme l'ont décidé les premiers juges, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt rendu le 28 mai 2008, confirmatif du jugement rendu le 31 mai 2007 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a débouté la S.C.I. Naty de sa demande dirigée contre M. Z... et tendant à l'annulation de la vente pour dol et, subsidiairement, à sa résolution pour vices cachés, s'oppose à ce qu'elle sollicite, à nouveau, l'anéantissement de cette même vente sur le fondement de la garantie des vices cachés ou, subsidiairement, sur l'obligation de délivrance du bien vendu et ce, en invoquant les mêmes circonstances de fait ; Que, sur ce point, le jugement sera également confirmé ; Sur les demandes de garantie : Considérant que, compte tenu de la solution donnée au litige, il n'y a pas lieu de statuer sur les actions en garantie formées par Mme B... et M. Z..., l'une contre l'autre ; Sur les autres demandes : Considérant qu'il n'est pas démontré que la S.C.I. Naty ait agi contre Mme B... et M. Z... dans des conditions fautives et préjudiciables ; Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce que les premiers juges ont débouté Mme B... et M. Z..., chacun de sa demande de dommages et intérêts ; Et considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que, succombant en ses prétentions et supportant les dépens, la S.C.I. Naty sera déboutée de sa réclamation ; qu'en revanche, elle sera condamnée à payer à Mme B... et à M. Z..., chacun les frais qui, non compris dans les dépens d'appel, seront arrêtés, en équité, à la somme de 5.000 euros ;

PAR CES MOTIFS

, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 avril 2009 par le Tribunal de grande instance de Paris au profit de Mme Catherine B... et de M. Mourad Z... ; Déboute la société civile immobilière Naty de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamne, par application de ce texte, à payer à Mme B... et à M. Z..., chacun la somme de 5.000 euros ; Condamne la S.C.I. Naty aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés par les avoués des intimés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.