COUR D'APPEL DE PARIS ARRÊT DU 19 Mars 2021
Pôle 5 - Chambre 2 Numéro d'inscription au répertoire général : n° RG 20/07294 - n° Portalis 35L7-V-B7E-CB3JD Jonction avec le dossier n°20/7416
Décision déférée à la Cour : ordonnance du juge de la mise en état du 31 janvier 2020 – Tribunal judiciaire de PARIS - 3ème chambre 3ème section - RG n°18/14422
APPELANTES et INTIMEES
Société PIASTEN GmbH, société de droit allemand, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé Piastenstrasse 1 91301 FORCHHEIM ALLEMAGNE Représentée par Me L D M de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 0018 Assistée de Me A L B plaidant pour l'AARPI BIRD & BIRD, avocate au barreau de PARIS, toque R 255
S.A.S.U. LUTTI, prise en la personne de son président domicilié en cette qualité au siège social situé Zone industrielle de Ravennes les Francs 262, avenue Albert Calmette 59910 BONDUES Représentée par Me M V de la SCP GRV ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, toque L 0010 Assistée de Me J B, avocat au barreau de PARIS, toque B 260
INTIMEES
Société M I, société de droit américain, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé 6885 Elm Street McLean VA 22101 ETATS-UNIS D'AMERIQUE
S.A.S.U. M W C F, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé 3, chemin de la Sandlach 67501 HAGUENAU Immatriculée au rcs de Strasbourg sous le numéro 494 887 584 Représentées par Me M B de la SELARL LEXAVOUE PARIS- VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477Assistées de Me A C plaidant pour la SELARL CLERY - DEVERNAY, avocat au barreau de PARIS, toque D 70, Me C D plaidant pour la SELARL CLERY - DEVERNAY, avocate au barreau de PARIS, toque D 70, Me M B plaidant pour la SELARL CLERY - DEVERNAY, avocat au barreau de PARIS, toque D 70
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles
805 et
907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme B C, Présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme B C a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme B C, Présidente Mme L L, Conseillère Mme A M, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme C T
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile
Signé par Mme B C, Présidente, et par Mme C T G présente lors de la mise à disposition.
Vu l'ordonnance contradictoire rendue le 31 janvier 2020 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris qui, pour l'essentiel, a :
- rejeté l'exception de nullité de l'assignation du 22 août 2019 délivrée par la société Mars France,
- déclaré le tribunal de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété),
- renvoyé les sociétés Mars Inc et Mars France à mieux se pourvoir sur ces prétentions,- rejeté l'exception d'incompétence du tribunal de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de l'annulation des renonciations des marques françaises n°1296438 et n°93498883,
- dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer dans l'attente de la décision allemande sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
- laissé aux parties la charge des dépens de l'incident.
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par la société Piasten GmbH (de droit allemand) suivant déclaration d'appel remise au greffe de la cour le 12 juin 2020 (n°RG: 20/7294), l'ordonnance rendue sur requête le 25 juin 2020 par le magistrat délégataire du premier président autorisant la société Piasten GmbH, au visa des articles 84 et suivants du code de procédure civile, à assigner à jour fixe les sociétés Mars Inc, Mars Wrigley Confectionery France (SAS) et Lutti (SAS), l'assignation pour plaider devant la cour à jour fixe le 27 janvier 2021, délivrée par la société Piasten GmbH suivant actes des 30 juillet et 3 août 2020 aux sociétés Mars Inc ( Etats-Unis d'Amérique), Mars Wrigley Confectionery France (SAS) et Lutti (SAS).
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par la société Lutti (SAS) suivant déclaration d'appel remise au greffe de la cour le 16 juin 2020 (N°RG 20/7416), l'ordonnance rendue sur requête le 25 juin 2020 par le magistrat délégataire du premier président autorisant la société Lutti (SAS), au visa des articles 84 et suivants du code de procédure civile, à assigner à jour fixe les sociétés Mars Inc, Mars Wrigley Confectionery France (SAS) et Piasten GmbH, l'assignation pour plaider devant la cour à jour fixe le 27 janvier 2021, délivrée par la société Lutti (SAS) le 28 août 2020 aux sociétés Mars Inc, Mars Wrigley Confectionery France (SAS) et Lutti (SAS).
Vu l'ordonnance rectificative du 19 juin 2020 qui constatant les omissions matérielles affectant l'ordonnance précitée du juge de la mise en état, a :
- dit qu'il sera ajouté dans le dispositif de la décision :
'Ordonnons le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la marque n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque',- dit que la disposition disant 'n'y avoir lieu à surseoir à statuer dans l'attente de la décision allemande sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068" est remplacée par la disposition complétée suivante :
' Disons n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533 et sur l'annulation des renonciations de Mars France aux marques n°126438 et n°93498883, dans l'attente de la décision allemande sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068".
Vu les dernières conclusions de la société Piasten Gmbh, appelante et intimée, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 janvier 2021, demandant à la cour, au fondement du Règlement (UE) n°2015/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale et plus particulièrement ses articles 4,6,7,8, 24 et 30, les articles 74 et suivants, 83 et suivants, 378 et suivants du code de procédure civile, les articles
L. 411-4, L. 712-6, L. 714-2, R.411-19 et suivants, R. 714- 1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, les articles D. 211-1, D.311-1, D.311-8 et les T I et XVI annexés du code de l'organisation judiciaire, de :
I- déclarer irrecevables les appels incidents formés par les sociétés Mars Inc et Mars Wrigley Confectionery France à l'encontre des chefs suivants de l'ordonnance rendue le 31 janvier 2020 et rectifiée le 19 juin 2020 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris :
Déclarons le tribunal de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété),
Ordonnons le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la marque n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque,
A titre subsidiaire, si la cour déclarait recevables les appels incidents des sociétés Mars,
II- confirmer les chefs sus-visés de l'ordonnance déférée,
III- infirmer l'ordonnance déférée des chefs suivants :Déclarons le tribunal de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété), uniquement en ce que ce chef de dispositif de l'ordonnance exclut la demande formée par la société Mars Inc de condamnation de la société Piasten GmbH 'à lui payer la somme de 5.000.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, sauf à parfaire',
Rejetons l'exception d'incompétence du tribunal de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de l'annulation des renonciations des marques françaises n°1296438 et n°93498883,
Disons n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533 et sur l'annulation des renonciations de Mars France aux marques n°126438 et n°93498883, dans l'attente de la décision allemande sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068,
Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
Disons que les parties supporteront les dépens de l'incident,
Et statuant à nouveau,
1- Sur l'incompétence du tribunal pour connaître des demandes de Mars France,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris est incompétent au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître des demandes suivantes formées par la société Mars France :
Annuler les renonciations n°710801 et 710802 publiées au Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle 2017-48 de la société Mars France et ordonner le rétablissement subséquent des marques 'TREETS fond dans la bouche et pas dans la main' n°1296438 et TREETS n°93498883,
Dire que mention de ces (...) annulations sera notifiée à l'INPI pour inscription au Registre des marques, à la requête de la partie la plus diligente,
En conséquence,
- renvoyer la société Mars France à mieux se pourvoir et à saisir la cour d'appel de Colmar et lui enjoindre d'informer la société Piasten GmbH dans un délai de 8 jours à compter du recours,- disjoindre ces demandes des autres demandes des sociétés Mars Inc et Mars France,
2- Sur l'incompétence du tribunal pour connaître des demandes de Mars Inc,
A titre principal,
- dire et juger que les juridictions étatiques françaises et le tribunal judiciaire de Paris sont incompétents pour statuer sur la demande suivantes formée par Mars Inc au profit des juridictions allemandes compétentes :
Condamner la société Piasten à payer à la société Mars Inc la somme de 5.000.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, sauf à parfaire,
- prendre acte de ce que la société Mars Inc modifie la demande indemnitaire dont elle a initialement saisi le tribunal judiciaire de Paris, en ce qu'elle n'invoque plus un prétendu préjudice subi à travers le monde, mais uniquement sur le territoire français,
En conséquence,
- renvoyer la société Mars Inc à mieux se pourvoir et à saisir les juridictions allemandes devant être désignées en application des règles de compétence applicables pour statuer sur les demandes indemnitaires ne visant pas la France,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris n'est compétent que pour connaître d'une demande indemnitaire pour le préjudice prétendument subi par Mars Inc sur le territoire français,
- disjoindre ces demandes des autres demandes de Mars Inc,
3- Sur le sursis à statuer,
- disjoindre et surseoir à statuer sur l'ensemble des autres demandes des sociétés Mars Inc et Mars France qui ne relèvent pas de la compétence des juridictions allemandes ou de la cour d'appel de Colmar, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes et de la cour d'appel de Colmar,
En tout état de cause,
- débouter les sociétés Mars de l'ensemble de leurs demandes,- les condamner solidairement à payer à la société Piasten GmbH la somme de 130.000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions de la société Lutti (SAS), appelante et intimée, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 janvier 2020, demandant à la cour, au fondement des articles 4§1, 7§2 et 24§4 du Règlement (UE) n°1215/2012 dit 'Bruxelles I bis', des articles 49, 51,74 et suivants ainsi que les articles 83 et suivants, 378 et suivants du code de procédure civile, D.411-19-1, R.411-19 et suivants, L. 712-6 et L. 411-4 et suivants du code de la propriété intellectuelle, des articles
D.311-1 et
D.311-8 du code de l'organisation judiciaire ainsi que les tableaux n°IV et XVI en annexe, de :
I- déclarer irrecevables les appels incidents formés par les sociétés Mars Inc et Mars Wrigley Confectionery France à l'encontre des chefs suivants de l'ordonnance rendue le 31 janvier 2020 et rectifiée le 19 juin 2020 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris :
Déclarons le tribunal de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété),
Ordonnons le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la marque n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque,
A titre subsidiaire, si la cour déclarait recevables les appels incidents des sociétés Mars,
II- confirmer les chefs sus-visés de l'ordonnance déférée, sauf en ce que le premier de ces chefs a implicitement rejeté l'exception d'incompétence concernant la demande indemnitaire de Mars Inc portant sur la somme de 5.000.000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de son préjudice, sauf à parfaire,
III- infirmer l'ordonnance déférée des chefs suivants: Déclarons le tribunal de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété), uniquement en ce que ce chef de dispositif de l'ordonnance exclut la demande formée par la société Mars Inc de condamnation de la société Piasten GmbH ' à lui payer la somme de5.000.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, sauf à parfaire',
Rejetons l'exception d'incompétence du tribunal de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de l'annulation des renonciations des marques françaises n°1296438 et n°93498883,
Disons n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533 et sur l'annulation des renonciations de Mars France aux marques n°126438 et n°93498883, dans l'attente de la décision allemande sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068,
Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
Disons que les parties supporteront les dépens de l'incident,
IV- statuant à nouveau,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris est incompétent au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître des demandes suivantes formées par la société Mars France :
Annuler les renonciations n°710801 et 710802 publiées au Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle 2017-48 de la société Mars France et ordonner le rétablissement subséquent des marques 'TREETS fond dans la bouche et pas dans la main' n°1296438 et TREETS n°93498883,
Dire que mention de ces (...) annulations sera notifiée à l'INPI pour inscription au Registre des marques, à la requête de la partie la plus diligente,
En conséquence,
- renvoyer la société Mars France à mieux se pourvoir et à saisir la cour d'appel de Colmar et lui enjoindre d'informer la société Piasten GmbH dans un délai de 8 jours à compter du recours,
- disjoindre ces demandes des autres demandes des sociétés Mars Inc et Mars France,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris est incompétent pour statuer sur la demande suivantes formée par Mars Inc au profit des juridictions allemandes compétentes :Condamner la société Piasten à payer à la société Mars Inc la somme de 5.000.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, sauf à parfaire,
- renvoyer la société Mars Inc à mieux se pourvoir et à saisir les juridictions allemandes devant être désignées en application des règles de compétence applicables pour statuer sur les demandes indemnitaires ne visant pas la France,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris n'est compétent que pour connaître d'une demande indemnitaire pour le préjudice prétendument subi par Mars Inc sur le territoire français,
- disjoindre ces demandes des autres demandes de Mars Inc,
Subsidiairement,
- prendre acte de ce que la société Mars Inc modifie la demande indemnitaire dont elle a initialement saisi le tribunal judiciaire de Paris, en ce qu'elle n'invoque plus un prétendu préjudice subi à travers le monde, mais uniquement sur le territoire français,
En conséquence,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris n'est compétent que pour connaître d'une demande indemnitaire pour le préjudice prétendument subi par Mars Inc sur le territoire français,
En toute hypothèse,
- surseoir à statuer sur l'ensemble des autres demandes des sociétés Mars Inc et Mars France qui ne relèvent pas de la compétence des juridictions allemandes ou de la cour d'appel de Colmar, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et de la cour d'appel de Colmar sur les demandes en annulation des renonciations n°710801 et 7108802 de la société Mars France,
- débouter les sociétés Mars de l'ensemble de leurs demandes,
- les condamner solidairement à payer à la société Lutti la somme de 65.000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction.
Vu les dernières conclusions des sociétés Mars Inc (de droit américain) et Mars Wrigley Confectionery France (SAS), ci-après Mars France, intimées et appelantes incidentes, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 janvier 2021, demandant à la cour, au fondement des articles 24-4 et 7-2 duRèglement Bruxelles I bis,
46 du code de procédure civile, l'indivisibilité du litige, la commission des faits litigieux sur le territoire français et l'impossibilité pour les 'juridictions allemandes' de connaître d'une action en transfert de marque résultant d'un dépôt frauduleux,
1240 du code civil et
L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle, de : - prononcer la jonction des instances enrôlées sous les n° 20/7294 et n°20/7416,
I- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
- déclaré le tribunal de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété),
- renvoyé les sociétés Mars Inc et Mars France à mieux se pourvoir sur ces prétentions,
- ordonné le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la marque n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque,
Statuant à nouveau,
- dire et juger que le tribunal judiciaire de Paris est compétent pour connaître de l'action en transfert de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 et ses demandes accessoires (communication d'un état comptable, paiement provisionnel de 100.000 euros et transfert de propriété),
- enjoindre aux sociétés Piasten et Lutti de conclure au fond pour la première audience utile du tribunal sur ces demandes,
Subsidiairement,
- rejeter toute demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur la revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068,
Plus subsidiairement, dans l'hypothèse d'un éventuel sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la marque n°1368068, le prononcer 'dans l'attente de la décision de la juridiction allemande à venir sur la demande de transfert de ladite marque, sauf à ce que les sociétés Mars abandonnent ce moyen, auquel cas la cause dudit sursis aura disparu',II- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
- rejeté l'exception d'incompétence du tribunal de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de l'annulation des renonciations des marques françaises n°1296438 et n°93498883,
- dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533 et sur l'annulation des renonciations de Mars France aux marques n°126438 et n°93498883,
III- en tout état de cause,
- débouter les sociétés Piasten et Lutti de l'ensemble de leurs demandes,
- condamner les sociétés Piasten et Lutti à verser aux intimées la somme de 100.000 euros chacune sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction.
SUR CE, LA COUR :
La demande des sociétés Mars aux fins de jonction des procédures enrôlées sur les appels respectifs des sociétés Piasten et Lutti sous les n°20/7294 et 20/7416 n'est pas contestée. Il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de procéder à cette jonction sous le n°20/7294 et de statuer par un seul et même arrêt.
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision déférée et aux écritures, précédemment visées, des parties.
Il suffit de rappeler que le groupe Mars, créé en 1911 aux Etats-Unis, est un acteur important de l'industrie agro-alimentaire, spécialisé notamment dans la confiserie. Il a commercialisé jusqu'en 1986, dans de nombreux pays, les confiseries 'TREETS' constituées d'une cacahuète enrobée de chocolat et de sucre. La société Mars Inc a déposé des marques internationales et de l'Union européenne 'TREETS' et la société Mars France, le 21 décembre 1984 et le 29 décembre 1993, les marques françaises verbales 'TREETS fond dans la bouche pas dans la main' n°1296438 et 'TREETS' n°93498883 pour des produits de la classe 30.
Le 6 juin 2017, la société Mars France a déclaré au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle renoncer aux deux marques françaises précitées. Les renonciations totales de la société Mars France à ses marques ont fait l'objet d'une inscription au Registre national des marques le 2 novembre 2017, respectivementsous les n° 0710801 et n°0710802, et d'une publication au Bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI) le 1er décembre 2017.
La société Piasten, créée en Allemagne en 1923, est également spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de confiseries. Elle soutient s'être assurée que la dénomination 'TREETS' était libre de droit avant de déposer le 17 août 2017, la marque internationale verbale 'TREETS' n°1368068, désignant notamment la France et, le 19 avril 2018, la marque internationale semi-figurative 'TREETS the peanut company' n°1413533, désignant notamment la France, les deux pour distinguer en classe 30, notamment, les 'friandises (sucreries) ; confiseries à base d'arachides; pastilles (confiseries) ; confiseries ; confiseries au chocolat ; (...) amandes enrobées ; chocolats enrobés (...)'.
La société Lutti est le distributeur en France des produits de la société Piasten et, en particulier, depuis le mois de juin 2018, de bonbons à base de cacahuète enrobée de chocolat et de sucre marqués 'TREETS'.
Suivant acte d'huissier de justice du 10 décembre 2018, la société Mars Inc, s'estimant victime de dépôts de marques frauduleux, a fait assigner la société Piasten devant le tribunal de grande instance de Paris pour revendiquer, sur le fondement de l'article
L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle, la propriété de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 et des fruits afférents et pour demander la nullité de la partie française de la marque internationale 'TREETS the peanut company' n°1413533. Concernant la première de ces marques, elle formait, subsidiairement à la demande en revendication de propriété, une demande en nullité de la marque.
Suivant actes d'huissier de justice des 7 et 22 août 2019, la société Mars France a fait assigner la société Piasten et la société Lutti devant le même tribunal, demandant qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'associe aux demandes de la société Mars Inc et, en particulier à sa revendication de la partie française de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068, subsidiairement, s'il n'était pas fait droit à la revendication de la société Mars Inc, qu'il soit fait droit à sa demande en revendication de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 ainsi que des fruits afférents et ordonner le transfert à son profit de la partie française de cette marque. Invoquant un vice de son consentement, la société Mars France demandait en outre du tribunal qu'il annule les renonciations aux marques françaises 'TREETS' n°93498883 et 'TREETS fond dans la bouche pas dans la main' n°1296438 et ordonne le rétablissement subséquent de ces marques.Les procédures initiées par les sociétés Mars Inc et Mars France ont été jointes le 10 septembre 2019.
La société Piasten, par voie d'incident, a saisi le juge de la mise en état, d'une contestation, au visa du Règlement (UE) n°2015/2012 du 12 décembre 2012, de la compétence des juridictions françaises au profit des juridictions de l'Etat membre où elle a son siège, à savoir les juridictions allemandes pour connaître de l'action des sociétés Mars en revendication de la propriété de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 et de ses demandes accessoires, ainsi que de la demande de la société Mars en paiement de la somme de 5.000.000 d'euros à parfaire à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice . La société Piasten a, en outre, contesté, au visa des articles
L. 411-4 et suivants du code de la propriété intellectuelle, la compétence du tribunal de grande instance de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de la demande de la société Mars France en annulation de ses renonciations aux marques françaises n°93498883 et n°1296438. Elle demandait enfin, au juge de la mise en état, de disjoindre ces demandes des sociétés Mars de leurs autres demandes et, concernant ces dernières, d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 et dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable de la cour d'appel de Colmar sur la demande en annulation des renonciations aux marques françaises n°93498883 et n°1296438.
La société Lutti s'est associée à l'incident soulevé par la société Piasten, formulant les mêmes exceptions d'incompétence et les mêmes demandes.
Les sociétés Mars ont conclu, essentiellement, au rejet des exceptions d'incompétence opposées par les parties adverses ainsi que des demandes subséquentes de disjonction et de sursis à statuer.
Aux termes de son ordonnance du 31 janvier 2020, telle que complétée par son ordonnance rectificative du 19 juin 2020, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068 ainsi que des demandes accessoires de communication d'un état comptable certifié des quantités de sachets de bonbons 'TREETS' vendus en France et des chiffres d'affaires afférents, de paiement provisionnel de 100.000 euros au titre des fruits liés à l'exploitation de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068, de transfert de propriété et, sur ces prétentions, renvoyé les sociétés Mars à mieux se pourvoir.Le juge de la mise en état a rejeté, en revanche, l'exception d'incompétence du tribunal judiciaire de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de la demande d'annulation des renonciations aux marques françaises n°1296438 et n°93498883.
Concernant les demandes de disjonction et de sursis à statuer, le juge de la mise en état a ordonné le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la marque n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque. En revanche, il a dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur la demande d'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533, ni sur la demande d'annulation des renonciations de la société Mars France aux marques n°126438 et n°93498883, dans l'attente de la décision des juridictions allemandes sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068".
La société Piasten, et la société Lutti de même, ont relevé appel, dans les formes et modalités prévues aux articles 83 et suivants du code de procédure civile, de l'ordonnance du juge de la mise en état en ses dispositions :
-rejetant implicitement l'exception d'incompétence des juridictions françaises au profit des juridictions allemandes pour connaître de la demande de la société Mars Inc en paiement de la somme de 5.000.000 euros à parfaire à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice,
- rejetant l'exception d'incompétence du tribunal judiciaire de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître de l'annulation des renonciations aux marques françaises n°1296438 et n°93498883,
- disant n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur la demande d'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533, ni sur la demande d'annulation des renonciations de la société Mars France aux marques n°126438 et n°93498883, dans l'attente de la décision des juridictions allemandes sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068".
Les sociétés Mars, par voie d'appel incident, concluent à l'infirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état en ses dispositions :
- déclarant le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître de leur action en revendication de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 ainsi que des demandes accessoires de communication d'un état comptable certifié des quantités de sachets de bonbons 'TREETS' vendus en France et des chiffres d'affaires afférents, de paiement provisionnel de100.000 euros au titre des fruits liés à l'exploitation de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 , de transfert de propriété,
- ordonnant le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque.
Sur l'appel incident des sociétés Mars,
Les sociétés Piasten et Lutti contestent la recevabilité des demandes formées par voie d'appel incident par les sociétés Mars et tendant à l'infirmation des chefs de l'ordonnance ci-dessus rappelés.
1 - Concernant la demande d'infirmation du chef de l'incompétence des juridictions françaises pour connaître de l'action en revendication de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 ainsi que des demandes accessoires, les sociétés Piasten et Lutti font valoir qu'il appartenait aux sociétés Mars d'interjeter appel de ce chef en se conformant aux dispositions des articles 83 et suivants du code de procédure civile applicables à l'appel des décisions statuant exclusivement sur la compétence, ainsi qu'elles-mêmes s'y sont conformées pour contester celles des dispositions de l'ordonnance statuant sur la compétence qui leur faisaient grief. Ainsi, les sociétés Mars ne sont pas recevables, selon elles, à demander, par des conclusions d'appel incident, l'infirmation de la disposition de l'ordonnance déclarant le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître de leur action en revendication de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 et de leurs demandes accessoires.
Les sociétés Mars soutiennent en réplique que le décret n°2017-891 du 6 mai 2017 a mis fin à la procédure autonome du contredit pour instituer, à l'encontre des décisions statuant exclusivement sur la compétence, la voie de recours ordinaire de l'appel dont le régime procédural et les effets sont définis par les articles 542 et suivants du code de procédure civile et, en particulier, l'article 550 qui prévoit que l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Selon elles, les dispositions des articles 83 et suivants, applicables à l'appelant principal, n'apportent aucune dérogation au régime procédural de l'appel et donc à la possibilité, pour l'intimé, de former un appel incident par voie de conclusions.
Selon les dispositions de l'article
83 du code de procédure civile, ' Lorsque le juge s'est prononcé sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision peut faire l'objet d'un appel dans les conditions prévues par le présent paragraphe'.L'article 84 fixe le délai d'appel à 15 jours à compter de la notification du jugement à laquelle il est procédé par le greffe, aux parties mais également, dans le cas d'une procédure avec représentation obligatoire, aux avocats. Ce même article prévoit que, 'en cas d'appel, l'appelant doit, à peine de caducité de la déclaration d'appel, saisir dans le délai d'appel, le premier président en vue, selon le cas, d'être autorisé à assigner à jour fixe ou de bénéficier d'une fixation prioritaire de l'affaire'.
L'article 85 dispose en son alinéa 2 que 'nonobstant toute disposition contraire, l'appel est instruit et jugé comme en matière de procédure à jour fixe si les règles applicables à l'appel des décisions rendues par la juridiction dont émane le jugement frappé d'appel imposent la constitution d'avocat'.
Ces dispositions nouvelles, issues du décret n°2017-891 du 6 mai 2017, sont applicables à l'appel dirigé contre la décision de toute juridiction du premier degré se prononçant sur la compétence sans statuer sur le fond du litige et le sont, en conséquence, à l'appel d'une ordonnance du juge de la mise en état qui, telle l'ordonnance déférée, se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond.
Elles prévoient que 'nonobstant toute disposition contraire' l'appel d'une décision statuant exclusivement sur la compétence relève, lorsque les parties sont tenues de constituer un avocat, de la procédure à jour fixe et qu'en ce cas, l'appelant doit saisir, dans le délai d'appel, le premier président de la cour d'appel en vue d'être autorisé à assigner l'intimé à jour fixe et instituent ainsi une procédure spécifique à l'appel des décisions statuant sur la compétence qui se distingue de l'appel du droit commun en imposant, notamment, un délai d'appel réduit et le recours à la procédure à jour fixe.
Il s'ensuit que ces dispositions dérogatoires doivent prévaloir sur les dispositions générales de l'article 550 qui permettent, sous réserve des 905-2, 909 et 910, de former appel incident ou appel provoqué en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal.
En l'espèce, l'ordonnance du juge de la mise en état a écarté la compétence du tribunal judiciaire de Paris pour connaître de l'action des sociétés Mars en revendication de la propriété de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°136808 et des demandes accessoires, mais a retenu la compétence de ce tribunal pour connaître de la demande de la société Mars France en annulation de ses renonciations à ses marques françaises 'TREETS'n°126438 et n°93498883.L'appel de chacun de ces deux chefs de l'ordonnance relève des dispositions spécifiques des articles 83 et suivants du code de procédure civile qui imposent à l'appelant de saisir le premier président afin d'être autorisé à assigner à jour fixe. Il appartenaient aux sociétés Mars de s'y conformer pour déférer à la cour le chef de décision déclarant le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître de leur action en revendication sur la partie française de la marque internationale n°136808 et de leurs demandes accessoire, tout comme les sociétés Piasten et Lutti s'y sont conformées pour déférer à la cour l'ordonnance en celles de ses dispositions statuant sur la compétence qui leur font grief.
En conséquence, les sociétés Mars, qui ne peuvent s'affranchir des dispositions applicables à l'appel des décisions statuant sur la compétence en formant un appel incident sur l'appel principal de sociétés Piasten et Lutti, sont irrecevables en leur appel de l'ordonnance du juge de la mise en état en ce qu'elle a déclaré le tribunal judiciaire incompétent pour statuer sur leur revendication de la partie française de la marque internationale 'TREETS' n°1368068 et leurs demandes accessoires. 2 - Par leur appel incident, les sociétés Mars demandent en outre, l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a ordonné le sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la partie française de la marque internationale n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque.
Les sociétés Piasten et Lutti soutiennent que les sociétés Mars sont irrecevables à former un appel incident sur cette décision de sursis à statuer car il leur incombait, par application des dispositions des articles
795 et
380 du code de procédure civile, de solliciter du premier président de la cour d'appel qu'il les autorise à former un appel immédiat, une telle autorisation étant au demeurant soumise à la justification d'un motif grave et légitime.
Selon les dispositions de l'article
795 du code de procédure civile, les ordonnances du juge de la mise en état ne peuvent être frappées d'appel ou de pourvoi en cassation qu'avec le jugement statuant sur le fond. Toutefois, elles sont susceptibles d'appel dans les cas et conditions prévus en matière d'expertise ou de sursis à statuer.
L'article
380 du code de ce même code prévoit que la décision de sursis peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime.
En l'espèce, force est toutefois de constater que si les sociétés Mars demandent l'infirmation de la décision de sursis à statuer sur la demande subsidiaire en annulation de la partie française de la marque internationale n°1368068, elles se gardent de soutenir que letribunal devrait statuer sur cette demande subsidiaire avant que la demande principale en revendication de la propriété de la marque n'ait été définitivement jugée par la juridiction allemande compétente. Elles reconnaissent même que 'la décision de sursis à statuer n'est que la conséquence de la décision d'incompétence' avec laquelle elle 'entretient un lien de dépendance évident'. Le sort de la demande subsidiaire des sociétés Mars en annulation de la marque dépend en effet du sort de leur demande principale en revendication de cette même marque, car la demande subsidiaire se trouverait privée d'objet s'il était fait droit à la demande principale.
En conséquence, dès lors que les sociétés Mars sont irrecevables à critiquer la décision d'incompétence du tribunal judiciaire de Paris pour connaître de leur action en revendication, le sursis à statuer sur leur demande subsidiaire en annulation de la partie française de la marque internationale n°1368068, dans l'attente d'une décision définitive et irrévocable des juridictions allemandes sur les demandes principales en revendication de la partie française de cette même marque, ne peut qu'être confirmé.
Les sociétés Mars font valoir qu'elles sont libres de saisir ou non le juge allemand et qu'il ne faudrait pas qu'à défaut d'une telle saisine, et par là-même, à défaut de décision du juge allemand, le sursis à statuer ne perdure indéfiniment. Elles demandent à la cour de préciser que la cause du sursis aura disparu si la revendication de la propriété de la marque devait être abandonnée.
Or, il est rappelé que selon les dispositions de l'article
379 du code de procédure civile, le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge et il appartiendra au tribunal judiciaire de Paris, saisi de la demande subsidiaire en annulation de la partie française de la marque internationale n°1368068, de tirer les conséquences d'un éventuel abandon par les sociétés Mars de leur demande principale en annulation de la partie française de cette marque, le juge pouvant en outre, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai.
Il n'y a pas lieu dès lors pour la cour d'apporter la précision demandée et l'ordonnance est confirmée sur ce chef de décision.
Sur l'appel principal des sociétés Piasten et Lutti,
1 - Les sociétés Piasten et Lutti, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, poursuivent l'infirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état en sa disposition rejetant l'exception d'incompétence du tribunal judiciaire de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître des demandes de la société Mars France en annulation de ses renonciations aux marques françaises 'TREETS'n°126438 et n°93498883 et aux fins de rétablissement de ces marques.Elles soutiennent que la demande de la société Mars France tend à voir annuler des décisions du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle statuant sur ses demandes de renonciation à ses marques et qu'elle est en conséquence soumise aux dispositions de l'article
L. 411-4 du code de la propriété intellectuelle applicables aux recours formés contre les décisions que prend le directeur général de l'INPI à l'occasion de la délivrance, du rejet ou du maintien et qui attribuent la compétence pour connaître directement de ces recours aux cours d'appel désignées à l'article R.411-19 .
Selon les dispositions de l'article
L. 714-2 du code de la propriété intellectuelle, 'l'auteur d'une demande d'enregistrement ou le titulaire d'une marque enregistrée peut renoncer aux effets de cette demande ou de cet enregistrement pour tout ou partie des produits ou services auxquels s'applique la marque'.
L'article R. 714-1 dispose que pour être recevable la déclaration de renonciation doit 1° émaner du titulaire de la marque inscrit, au jour de la déclaration, sur le registre national des marques, ou de son mandataire, 2° être accompagnée de la justification du paiement de la redevance prescrite.
Il est prévu à l'article
R.714-1-1 de ce même code, que le directeur général de l'INPI statue sur la déclaration de renonciation dans un délai de six mois à compter de son dépôt.
Les sociétés Piasten et Lutti prétendent vainement que le recours en annulation de la décision du directeur général du l'INPI statuant sur une déclaration de renonciation à la marque 'permettrait de répondre aussi à la question de l'éventuel vice du consentement' alors qu'il résulte des dispositions qui précèdent qu'il revient au directeur général de l'INPI statuant sur une déclaration de renonciation de s'assurer que les conditions de recevabilité prévues aux dispositions précitées de l'article R.714-1 sont satisfaites .
En revanche, il est pertinemment observé par les sociétés Mars que l'acte par lequel le propriétaire de la marque déclare renoncer, totalement ou partiellement, à ses droits sur la marque, ainsi qu'il est prévu à l'article
L. 714-2 du code de la propriété intellectuelle, constitue au sens des dispositions de l'article
1100-1 du code civil un acte juridique unilatéral qui manifeste une volonté de son auteur destinée à produire des effets de droit et qui encourt la nullité dans les conditions prévues au code civil pour cause de vice du consentement.
Les sociétés Mars qui demandent la nullité de la renonciation de la société Mars France à ses marques françaises 'TREETS'n°126438 et n°93498883 comme entachée d'un dol caractérisé par des manœuvres frauduleuses de la société Piasten sans lesquelles ellen'aurait pas consenti à un tel acte renonciation, sont fondées à voir appliquer les règles de compétence juridictionnelle de droit commun qui confèrent au tribunal judiciaire compétence pour connaître de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n'est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction.
L'ordonnance du juge de la mise en état est en conséquence confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence du tribunal judiciaire de Paris au profit de la cour d'appel de Colmar pour connaître des demandes de la société Mars France en annulation de ses renonciations aux marques françaises 'TREETS'n°126438 et n°93498883.
2 - Les sociétés Piasten et Lutti demandent encore l'infirmation de la disposition de l'ordonnance rejetant implicitement l'exception d'incompétence des juridictions françaises au profit des juridictions allemandes pour connaître de la demande de la société Mars Inc en paiement de la somme de 5.000.000 euros à parfaire à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice.
Cependant, force est de constater que dans le même dispositif de leurs dernières conclusions elles indiquent prendre acte que la société Mars Inc modifie la demande indemnitaire dont elle a initialement saisi le tribunal judiciaire de Paris, en ce qu'elle n'invoque plus un prétendu préjudice subi à travers le monde, mais uniquement sur le territoire français et demandent de renvoyer la société Mars Inc à mieux se pourvoir et à saisir les juridictions allemandes devant être désignées en application des règles de compétence applicables pour statuer sur les demandes indemnitaires ne visant pas la France, le tribunal judiciaire de Paris n'étant compétent que pour connaître d'une demande indemnitaire pour le préjudice prétendument subi par Mars Inc sur le territoire français.
Les sociétés Mars rappellent avoir précisé, selon le dispositif de leurs premières conclusions au fond devant le tribunal, notifiées le 15 novembre 2019, que la demande de dommages-intérêts de la société Mars Inc à l'encontre des sociétés Piasten et Lutti à hauteur de 5.000.000 euros est formée en réparation du préjudice causé en suite de leurs agissements frauduleux, et qu'une telle prétention s'analyse en une demande de réparation d'un préjudice commis en France par une société allemande (Piasten) et une société française (Lutti) en raison d'actes frauduleux et de l'exploitation en France de marques internationales visant la France déposées frauduleusement . Une telle demande relève selon elles de la compétence du tribunal judiciaire de Paris par application des articles 24-4 et 7-2 du Règlement Bruxelles I bis pour ce qui concerne la société Piasten et
46 du code de procédure civile pour ce qui concerne la société Lutti.Il résulte des observations qui précèdent que les sociétés Piasten et Lutti ne contestent pas, en définitive, la compétence du tribunal judiciaire de Paris pour connaître de la demande en dommages- intérêts de 5.000.000 euros formée par la société Mars Inc en réparation de son préjudice et qu'il n'y a pas lieu à infirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état en ce qu'elle aurait 'implicitement' rejeté l'exception d'incompétence au profit des juridictions allemandes soulevée de ce chef.
3 - Les sociétés Piasten et Lutti demandent enfin l'infirmation de la disposition de l'ordonnance disant n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur la demande d'annulation de la partie française de la marque internationale n°1413533, ni sur la demande d'annulation des renonciations de la société Mars France aux marques n°126438 et n°93498883, dans l'attente de la décision des juridictions allemandes sur l'action en revendication de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068", soutenant que l'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en ce qui concerne l'ensemble des demandes des sociétés Mars qui ne relèvent pas de la compétence des juridictions allemandes et de la cour d'appel de Colmar, de disjoindre et surseoir à statuer.
Il n'y a pas lieu de faire droit à de telles demandes qui ne sont d'aucune pertinence dès lors que les marques litigieuses sont différentes et qu'un risque de contrariété avec la décision qui pourrait être rendue par les juridictions allemandes statuant sur l'action en revendication de la propriété de la partie française de la marque internationale TREETS n°1368068" n'est pas établi.
Sur les autres demandes,
La confirmation de l'ordonnance en ses dispositions soumises à la cour conduit à la confirmer pareillement en ses dispositions relatives à l'application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile et aux dépens.
L'équité commande en revanche de condamner in solidum les sociétés Piasten et Lutti à payer aux sociétés Mars une indemnité globale de 25.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel et de les débouter de leurs demandes formées à ce même titre.
Les sociétés Piasten et Lutti, succombant à leur appel principal, supporteront les dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
:Ordonne la jonction des procédures enrôlées sur les appels respectifs des sociétés Piasten et Lutti sous les n°20/7294 et 20/7416 et dit qu'il est statué sur les procédures désormais jointes sous le n°20/7294 par le présent arrêt,
Statuant dans les limites de l'appel recevable,
Confirme l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris du 31 janvier 2020 telle que rectifiée et complétée par son ordonnance du 19 juin 2020,
Ajoutant,
Condamne in solidum les sociétés Piasten et Lutti à payer aux sociétés Mars une indemnité globale de 25.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel et les déboute de leurs demandes formées à ce même titre,
Condamne in solidum les sociétés Piasten et Lutti aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente