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Conseil d'État, Juge des référés, 13 avril 2018, 419565

Mots clés
subsidiaire • principal • requête • service • statuer • interprète • procès-verbal • preuve • publication • recours • référé • rejet • transports • visa

Chronologie de l'affaire

Conseil d'État
13 avril 2018
Tribunal administratif de Mayotte
4 avril 2018

Synthèse

  • Juridiction : Conseil d'État
  • Numéro d'affaire :
    419565
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Publication : Inédit au recueil Lebon
  • Nature : Texte
  • Décision précédente :Tribunal administratif de Mayotte, 4 avril 2018
  • Identifiant européen :
    ECLI:FR:CEORD:2018:419565.20180413
  • Identifiant Légifrance :CETATEXT000036811197
  • Avocat(s) : GOLDMAN
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Résumé

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Parties demanderesses
Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE)
Association Cimade, service oecuménique d'entraide
Association Groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI)
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
Personne physique anonymisée
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Partie défenderesse
Ministère de l'intérieur

Suggestions de l'IA

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: L'association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), l'association Cimade, service oecuménique d'entraide, l'association Groupe d'information et de soutient des immigré.e.s (GISTI), Mme O...I..., Mme M...E..., Mme K...B...ou Ahamada, Mme F...A..., Mme D...C..., Mme N...G..., Mme J...et Mme H...L...E...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, de suspendre l'exécution des arrêtés en date des 22, 24 et 28 mars 2018 par lesquels le préfet de Mayotte a créé des zones d'attente et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de Mayotte d'équiper ces zones d'attente en sanitaires et points d'eau de sorte d'assurer l'hygiène des personnes qui y sont placées, de prévoir en faveur de ces dernières des promenades, de prévoir des mesures spécifiques pour les mineurs et d'assurer le plein exercice des droits prévus à l'article L. 221-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une ordonnance n° 1800537 du 4 avril 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté leur demande. Par une requête, enregistrée le 5 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par les associations ANAFE, GISTI et Cimade ainsi que Mmes I..., E..., B...ou Ahamada, A..., C..., MmeG..., Mmadi Mkatibou et L...E..., demandent au juge des référés du Conseil d'Etat : 1°) de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ; 2°) d'annuler cette ordonnance ; 3°) de faire droit à leur demande de première instance ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - les conditions d'accueil des femmes et des enfants maintenus dans la zone d'attente créée par arrêté du 24 mars 2018 dans la salle d'attente du centre de rétention ne permettent pas d'assurer la dignité humaine, le droit de ne pas subir de mauvais traitements et l'intérêt supérieur de l'enfant ; - l'ordonnance attaqué est entachée de dénaturation des faits pour avoir jugé que si les personnes en cause vivaient dans une pièce de 45 m2, celle-ci débouchait sur un patio alors qu'il était indiqué que les personnes ne pouvaient avoir accès à cet espace extérieur qu'une fois par jour selon la police et encore plus rarement selon le témoignage des intéressées ; - la zone d'attente en cause ne remplit pas les conditions prévues par l'article L. 221-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la circonstance que le maintien des intéressés en zone d'attente ait répondu à l'intérêt général de préserver leur intégrité physique ne pouvait légalement être prise en compte ; - le juge des référés a méconnu la portée des conclusions présentées à titre subsidiaire devant lui. - la condition d'urgence imposée par l'article L. 521-2 du code de la justice administrative est remplie. Par un mémoire en défense et des pièces complémentaires, enregistrés les 11 et 12 avril 2018, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête, à titre principal, pour non-lieu à statuer dès lors que l'ensemble des arrêtés créant les zones d'attente ont été abrogés et que les personnes qui y avaient été placées les ont quittées et, à titre subsidiaire, comme non fondée. Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, les associations ANAFE, Cimade, GISTI et ainsi que MmesI..., E..., B...ou Ahamada, A..., C..., MmeG..., Mmadi Mkatibou et L...E..., et d'autre part, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur ; Vu le procès-verbal de l'audience publique du jeudi 12 avril 2018 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus : - Me Goldman, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des requérants ; - la représentante des requérants ; - les représentants des associations ANAFE et GISTI ; - les représentantes du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur ; et à l'issue de laquelle le juge des référés a prononcé la clôture de l'instruction ; Vu la note en délibéré, présentée le 12 avril 2018 après la clôture de l'instruction, par le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Considérant ce qui suit

: 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ... ". 2. Il résulte de l'instruction que par un arrêté du 21 mars 2018, le ministre de l'intérieur des Comores a décidé qu'" Il est interdit aux compagnies maritimes et aériennes d'embarquer au départ de Mayotte et à destination des trois autres îles de l'archipel des Comores les personnes de nationalité comorienne sans leurs consentements ", tandis qu'une circulaire prise le même jour par le secrétaire d'Etat aux transports de ce pays précisait qu'" En raison de la crise sociale qui prévaut dans l'île comorienne de Mayotte et pour des raisons de sureté et de sécurité, il est interdit aux compagnies maritimes et aériennes qui desservent cette île, d'embarquer à destination des autres îles soeurs toute personne considérée par les autorités qui administrent Mayotte, comme étant en situation irrégulière et ce jusqu'à nouvel ordre ". Sur la base de ces dispositions, les autorités Comoriennes ont, le 22 mars 2018, refoulé 96 ressortissants de cet Etat qui avaient fait l'objet d'arrêtés du préfet de Mayotte portant obligation de quitter le territoire français à destination de leur pays d'origine et qui ont fait l'objet, lors de leur retour en France le même jour, d'une part, de refus d'entrée, en application de l'article L. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et d'autre part, de placements en zone d'attente en application de l'article L. 221-3 du même code. Pour assurer l'exécution de ces dernières décisions, le préfet de Mayotte a créé plusieurs zones d'attente, par des arrêtés des 22, 24 et 28 mars 2018, sur les emprises de l'évaluation sanitaire de l'hôpital de Dzaoudzi-Labattoir et du quai Ballou situé dans la même commune, puis sur l'emprise de la salle d'attente de la Direction départementale de la police aux frontières (DDPAF) de Pamandzi, et enfin sur l'emprise des zones 2, 5 et 6 du centre de rétention administrative situé dans cette commune. 3. Les trois associations requérantes, qui ont pour objet de défendre les droits des personnes étrangères, et huit ressortissantes comoriennes qui font partie des 96 personnes placées en zone d'attente le 22 mars, ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, de suspendre l'exécution des arrêtés des 22, 24 et 28 mars 2018 créant les zones d'attente précitées et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de Mayotte d'équiper ces zones d'attente en sanitaires et points d'eau de sorte d'assurer l'hygiène des personnes qui y sont placées, de prévoir en faveur de ces dernières des promenades, de prévoir des mesures spécifiques pour les mineurs et d'assurer le plein exercice des droits prévus à l'article L. 221-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elles relèvent appel de l'ordonnance du 4 avril 2018 par laquelle leur demande a été rejetée. 4. Aux termes, d'une part, de l'article L. 221-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui arrive en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n'est pas autorisé à entrer sur le territoire français peut être maintenu dans une zone d'attente située dans une gare ferroviaire ouverte au trafic international figurant sur une liste définie par voie réglementaire, dans un port ou à proximité du lieu de débarquement ou dans un aéroport, pendant le temps strictement nécessaire à son départ/.../Les dispositions du présent titre s'appliquent également à l'étranger qui se trouve en transit dans une gare, un port ou un aéroport si l'entreprise de transport qui devait l'acheminer dans le pays de destination ultérieure refuse de l'embarquer ou si les autorités du pays de destination lui ont refusé l'entrée et l'ont renvoyé en France....". Aux termes de l'article L. 221-2 de ce code : " La zone d'attente est délimitée par l'autorité administrative compétente. Elle s'étend des points d'embarquement et de débarquement à ceux où sont effectués les contrôles des personnes. Elle peut inclure, sur l'emprise, ou à proximité, de la gare, du port ou de l'aéroport ou à proximité du lieu de débarquement, un ou plusieurs lieux d'hébergement assurant aux étrangers concernés des prestations de type hôtelier. Dans ces lieux d'hébergement, un espace permettant aux avocats de s'entretenir confidentiellement avec les étrangers est prévu. A cette fin, sauf en cas de force majeure, il est accessible en toutes circonstances sur demande de l'avocat./ Lorsqu'il est manifeste qu'un groupe d'au moins dix étrangers vient d'arriver en France en dehors d'un point de passage frontalier, en un même lieu ou sur un ensemble de lieux distants d'au plus dix kilomètres, la zone d'attente s'étend, pour une durée maximale de vingt-six jours, du ou des lieux de découverte des intéressés jusqu'au point de passage frontalier le plus proche./ La zone d'attente s'étend, sans qu'il soit besoin de prendre une décision particulière, aux lieux dans lesquels l'étranger doit se rendre soit dans le cadre de la procédure en cours, soit en cas de nécessité médicale./ Sont matériellement distincts et séparés les locaux qui ne relèvent pas de l'administration pénitentiaire et qui sont soit des zones d'attente, soit des zones de rétention mentionnées à l'article L. 551-1. ". Aux termes de l'article L. 221-2-1 de ce code : " Le dernier alinéa de l'article L. 221-2 n'est pas applicable à Mayotte pendant cinq ans à compter de la publication de l'ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 portant extension et adaptation à Mayotte du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (partie législative). / Lorsque le lieu d'hébergement prévu à l'article L. 221-2 est un lieu de rétention tel que mentionné à l'article L. 551-1, les étrangers maintenus en zone d'attente et les étrangers placés en rétention administrative dans le même lieu demeurent ...". Enfin aux termes de l'article R. 221-1 de ce code : " L'autorité administrative compétente pour délimiter la zone d'attente est le préfet du département et, à Paris, le préfet de police ". 5. Aux termes, d'autre part, de l'article L. 221-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le maintien en zone d'attente est prononcé pour une durée qui ne peut excéder quatre jours par une décision écrite et motivée d'un agent relevant d'une catégorie fixée par voie réglementaire. / Cette décision est inscrite sur un registre mentionnant l'état civil de l'intéressé et la date et l'heure auxquelles la décision de maintien lui a été notifiée. Elle est portée sans délai à la connaissance du procureur de la République. Lorsque la notification faite à l'étranger mentionne que le procureur de la République a été informé sans délai de la décision de maintien en zone d'attente, cette mention fait foi sauf preuve contraire ". Aux termes de l'article L. 221-4 du même code : " L'étranger maintenu en zone d'attente est informé, dans les meilleurs délais, qu'il peut demander l'assistance d'un interprète et d'un médecin, communiquer avec un conseil ou toute personne de son choix et quitter à tout moment la zone d'attente pour toute destination située hors de France. Il est également informé des droits qu'il est susceptible d'exercer en matière de demande d'asile. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend. Mention en est faite sur le registre mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 221-3, qui est émargé par l'intéressé. / En cas de maintien simultané en zone d'attente d'un nombre important d'étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s'effectue dans les meilleurs délais, compte tenu du nombre d'agents de l'autorité administrative et d'interprètes disponibles. De même, dans ces mêmes circonstances particulières, les droits notifiés s'exercent dans les meilleurs délais. / Lorsque l'étranger ne parle pas le français, il est fait application de l'article L. 111-7 ". Aux termes de l'article L. 222-1 du même code : " Le maintien en zone d'attente au-delà de quatre jours à compter de la décision initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention statuant sur l'exercice effectif des droits reconnus à l'étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 222-2 du même code : " A titre exceptionnel ou en cas de volonté délibérée de l'étranger de faire échec à son départ, le maintien en zone d'attente au-delà de douze jours peut être renouvelé, dans les conditions prévues au présent chapitre, par le juge des libertés et de la détention, pour une durée qu'il détermine et qui ne peut être supérieure à huit jours ". 6. S'il résulte des dispositions de l'article L. 221-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'à titre transitoire et jusqu'au 10 mai 2019, l'hébergement des étrangers placés en zone d'attente à Mayotte n'a pas à être assuré sous forme de prestations de type hôtelier, compte tenu de la situation particulière de ce département, il ne saurait, y compris en cas de créations de zones d'attentes temporaires justifiées par des circonstances exceptionnelles, porter atteinte à la dignité des personnes en cause et les exposer à des mauvais traitements. Il appartient, en application de l'article L. 222-1 du même code, au juge des libertés et de la détention, lorsqu'il examine une demande du préfet d'être autorisé à maintenir une personne en zone d'attente, au-delà de la durée initiale de quatre jours, de s'assurer du respect de ce droit. Le juge administratif est compétent, lorsqu'il est saisi en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, pour ordonner toute mesure provisoire, justifiée par l'urgence et nécessaire pour assurer la sauvegarde des libertés fondamentales de l'ensemble des personnes placées en zone d'attente, qu'il s'agisse notamment d'améliorer les conditions matérielles dans lesquelles elles sont hébergées ou de leur permettre d'exercer de manière effective les recours qui leur sont ouverts. 7. En l'espèce, il résulte de l'instruction et notamment des éléments recueillis lors de l'audience de référé qui s'est tenue au Conseil d'Etat, que, postérieurement à l'introduction de la présente requête, le préfet de Mayotte a, par arrêtés du 11 avril 2018, abrogé les arrêtés des 22, 24 et 28 mars 2018 créant les zones d'attente visées au point 2, après que les personnes qui y avaient été placées, dont les huit femmes requérantes, les avaient quittées et s'étaient vues délivrer le visa de régularisation temporaire prévu par l'article L. 224-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les conclusions tant principales que subsidiaires mentionnées au point 3 sont, dès lors, devenues sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer. 8. Dans les circonstances de l'espèce, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'admission provisoire des requérants au bénéfice de l'aide juridictionnelle, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 250 euros à chacun d'entre eux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

------------------ Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de suspension et d'annulation présentées par l'association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), l'association Cimade, service oecuménique d'entraide, l'association Groupe d'information et de soutient des immigré.e.s (GISTI), Mme O...I..., Mme M...E..., Mme K... B...ou Ahamada, Mme F...A..., Mme D...C..., Mme N...G..., Mme J...et Mme H...L...E.... Article 2 : L'Etat versera la somme de 250 euros à chacun des requérants en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association ANAFE, représentante désignée, pour l'ensemble des requérants, ainsi qu'au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

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