Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 8 décembre 2022, 21/17650

Mots clés Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur · préjudice · société · rapport · perte de gains professionnels futurs · préjudice d'agrément · emploi · perte de chance · victime · indemnisation · perte · taux · permanent · temporaire

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro affaire : 21/17650
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Président : Monsieur Jean-Wilfrid NOEL

Texte

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

N°2022/464

N° RG 21/17650

N° Portalis DBVB-V-B7F-BIRK6

[P] [S]

C/

S.A. ALLIANZ IARD

Caisse CPAM DU VAR

Copie exécutoire délivrée le :

à :

-SELARL LIBERAS FICI & ASSOCIES

-SELARL LAMBERT ATIAS & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de DRAGUIGNAN en date du 30 Novembre 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 12/09505.

APPELANTE

Madame [P] [S]

Assurée 2 58 11 28 085 047

née le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 5] ([Localité 5]),

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Isabelle FICI de la SELARL LIBERAS FICI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et assistée par Me Thierry CABELLO, avocat au barreau de TOULON, plaidant.

INTIMEES

S.A. ALLIANZ IARD

Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Laure ATIAS de la SELARL LAMBERT ATIAS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et assistée par Me Colette BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant.

Caisse CPAM du VAR,

Assignée le 11/02/2022 à personne habilitée. Significatin de conclusions en date du 06/08/2022 à personne hablitée,

demeurant [Adresse 4]

Défaillante.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Octobre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, et Madame Anne VELLA, Conseillère, chargés du rapport.

Madame Anne VELLA, Conseillère, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président

Madame Anne VELLA, Conseillère

Madame Fabienne ALLARD, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Décembre 2022, prorogé au 08 Décembre 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022,

Signé par Madame Anne VELLA, Conseillère, pour le président empêché et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits et de la procédure

Mme [P] [S] expose que le 14 avril 2003 à [Localité 7] dans le Var, elle a été victime d'un accident de la circulation alors qu'elle traversait la rue à pied, impliquant un cyclomoteur conduit par M. [I] [G], alors mineur, et assuré auprès de la société Allianz.

Par jugement du 2 février 2003 le tribunal pour enfants de Draguignan a condamné le mineur et ses parents à lui verser une provision de 1000€.

Elle a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 12 avril 2005 a désigné le docteur [V] [L] pour évaluer les conséquences médico-légales de l'accident en allouant à la requérante une indemnité complémentaire et provisionnelle de 800€.

L'expert a déposé son rapport définitif le 30 mai 2005.

Par actes des 20 et 22 novembre 2012, Mme [S] a fait assigner la société Allianz devant le tribunal de grande instance de Draguignan pour la voir condamner à l'indemniser de son préjudice corporel et ce au contradictoire de la CPAM du Var.

Selon jugement du 20 décembre 2013 le tribunal de grande instance de Draguignan a ordonné, avant-dire droit une contre-expertise médicale, et il a attribué une provision complémentaire de 2000€ à la victime.

Le docteur [M] [X] a établi son rapport le 27 avril 2015 en fixant notamment le taux de déficit fonctionnel permanent à 2 %.

Le tribunal s'est estimé insuffisamment éclairé par ce rapport en l'absence d'état antérieur chez la victime et d'explication donnée par l'expert sur l'exclusion de tout lien entre la rupture du tendon sus épineux révélée par un arthroscanner du mars 2014 et l'accident. Une nouvelle expertise a été ordonnée et confiée au docteur [O] [Y].

L'expert a déposé son rapport définitif le 10 octobre 2017.

Suivant décision du 15 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Draguignan a jugé que l'ensemble des lésions observées à l'épaule gauche, et notamment la rupture du tendon sus épineux et toutes les conséquences qui en ont découlé sont à rattacher à l'accident de la circulation survenu le 14 avril 2003, car révélées à la suite de ce fait dommageable.

Le tribunal a donc confié un complément d'expertise au docteur [O] [Y] à la lumière du point de droit tranché et en le priant de prendre en compte l'invalidité globale de l'épaule gauche.

L'expert a déposé son rapport le 16 septembre 2020 relevant le taux de déficit fonctionnel permanent à 18 %.

Par jugement du 30 novembre 2021, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire a :

- prononcé la nullité de la note rectificative du 28 novembre 2020 du docteur [O] [Y],

- déclaré le jugement commun opposable à la CPAM du Var,

- dit que le droit à indemnisation de Mme [S] est entier,

- fixé à la somme totale de 151'852,41€ la réparation du dommage corporel de la victime, avant déduction d'une provision accordée à hauteur de 3800€,

- débouté Mme [S] de ses demandes d'indemnisation de la perte de gains professionnels actuels et futurs, de l'assistance par tierce personne à titre viager et du préjudice d'agrément ;

- condamné la société Allianz à payer à Mme [S] la somme de 145'395,72€ à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice corporel, avec capitalisation des intérêts ;

- condamné la société Allianz à payer à Mme [S] la somme de 2500€ par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que l'indemnité allouée porteront intérêts au double du taux légal pour la période du 15 décembre 2003 au 25 septembre 2018 inclus ;

- condamné la société Allianz aux entiers dépens avec distraction.

Le tribunal a prononcé la nullité de la note du 28 novembre 2020 du docteur [Y] se prononçant sur un besoin en aide humaine à titre viager à compter de la consolidation, en considérant que les droits de la défense avaient fait l'objet d'une violation grave.

Le tribunal a détaillé ainsi les différents chefs de dommage de la victime directe :

- dépenses de santé actuelles : 2674,80€, dont 2656,69€ pris en charge par l'organisme social, et donc la somme de 18,11€ revenant à la victime,

- frais d'assistance à expertise : 2900 €

- frais d'assistance par tierce personne temporaire sur la base d'un coût horaire de 17 € : 39'631,86€

- incidence professionnelle : 25'000€ au titre de la pénibilité accrue liée à la gêne fonctionnelle douloureuse de son épaule gauche

- déficit fonctionnel temporaire : 23'685,75€ sur la base mensuelle de 810€

- souffrances endurées : 15'000€

- préjudice esthétique temporaire : 3000€

- déficit fonctionnel permanent : 30'960€

- préjudice esthétique permanent : 4000€

- préjudice sexuel : 5000€.

Mme [S] a été déboutée de l'indemnisation :

- d'une perte de gains professionnels actuels au motif qu'à la date de l'accident elle était sans emploi et qu'elle ne démontre pas qu'elle avait une activité dans les années qui ont précédé, ni au cours des années qui ont suivi,

- d'une perte de gains professionnels futurs faute de justifier de la réalité de son préjudice,

- d'un besoin en aide humaine à titre permanent à raison de 3h par semaine, au motif que la note rectificatif de l'expert sur laquelle elle s'appuie a été annulée, et qu'elle ne caractérise pas la gêne importante démontrant le principe et le quantum de l'indemnisation qu'elle sollicite,

- d'un préjudice d'agrément faute de justifier de la pratique de sports d'activité de loisirs particuliers.

Le tribunal a sanctionné l'assureur au paiement du double des intérêts au taux légal du 15 décembre 2003, au 26 septembre 2018, date de la signification des conclusions comportant une offre d'indemnisation.

Par acte du 15 décembre 2021, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, Mme [S] a interjeté appel de cette décision qui a statué sur la perte de gains professionnels actuels, perte de gains professionnels futurs, incidence professionnelle, assistance par tierce personne permanente, souffrances endurées, et préjudice d'agrément, ainsi que sur la sanction du doublement du taux d'intérêt légal qui a condamné la société Allianz à lui verser la somme de 145'395,72€ avec capitalisation des intérêts et paiement d'un intérêt au double du taux légal pour la période du 15 décembre 2003 au 25 septembre 2018 inclus.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 4 octobre 2022

Prétentions et moyens des parties

Dans ses conclusions du 2 août 2022, Mme [S] demande à la cour de :

' la recevoir en son appel ;

' confirmer le jugement qui a jugé qu'elle doit être indemnisée de l'ensemble de ses préjudices sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 ;

' le confirmer en ses dispositions condamnant la société Allianz au paiement des sommes suivantes :

- dépenses de santé actuelles : 18,11€

- frais d'assistance à expertise : 2900€

- assistance par tierce personne temporaire : 39'631,86€

- incidence professionnelle : 25'000€

- déficit fonctionnel temporaire : 23'685,75€

- préjudice esthétique temporaire : 3000€

- déficit fonctionnel permanent 18 % : 30'960€

- préjudice esthétique 2,5/7 : 4000€

- préjudice sexuel : 5000€

- article 700 du code de procédure civile 2500€

- condamnation aux entiers dépens de première instance ;

' le réformer pour le surplus ;

' condamner en conséquence la société Allianz au paiement des sommes suivantes :

- perte de gains professionnels actuels : 59'971,25€

- perte de gains professionnels futurs : 413'972,74€

- assistance par tierce personne permanente : 698'379,55€

- souffrances endurées 4/7 : 20'000€

- préjudice d'agrément : 5000€ ;

' réformer le jugement en jugeant que le montant de l'indemnité totale qui sera allouée par la décision à intervenir produira intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter du 15 décembre 2013 jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif sur l'ensemble des dommages et intérêts avant imputation de la créance des organismes sociaux avec capitalisation des intérêts à compter de la date anniversaire de la demande en justice conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

' condamner la société Allianz à lui verser la somme de 3000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de son conseil.

Elle fait observer que si elle n'a pas interjeté appel du jugement qui a prononcé la nullité de la note rectificative de l'expert, même nulle pour vice de forme, une expertise judiciaire qui a été régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire des parties peut être prise en considération par le juge si elle est corroborée par d'autres éléments de preuve, ce qui est le cas en l'espèce pour évaluer le besoin en aide humaine à titre permanent, le déficit fonctionnel ayant été fixé à 18 %.

Elle demande l'application du barème de la Gazette du Palais 2020 taux 0%.

Elle présente les observations suivantes :

- la perte de gains professionnels actuels est réelle, puisqu'elle a exercé de 1994 jusqu'en juillet 2002 en qualité de monitrice d'auto-école et que si l'accident n'était pas survenu, elle aurait pu sans aucun doute trouvé un emploi et percevoir pour le moins un revenu égal au SMIC. On peut dès lors considérer qu'elle a perdu une chance à hauteur de 70 % de trouver un emploi ce qui correspond à une perte de 99'155,01€, montant dont il convient de déduire des indemnités journalières qu'elle a perçues de la CPAM du Var à hauteur de 1955,80€, outre des salaires perçus de 2005 à 2009 pour 11'526€. Il est constant que même si elle était au chômage au moment de l'accident, la période qui s'est écoulée entre l'accident et la consolidation a duré huit ans et demi. C'est son état de santé qu'il ne lui permettait pas de retrouver un emploi et sa perte de chance et réelle,

- elle subit une perte de gains professionnels futurs compte tenu de l'importance des séquelles qu'elle présente qui ne lui ont pas permis de retrouver un emploi et en tout état de cause de conserver les emplois qu'elle avait pu trouver en précisant qu'elle avait 52 ans au moment de la consolidation. Elle est fondée à prétendre qu'elle aurait au moins pu occuper un emploi rémunéré au SMIC et ce jusqu'à l'âge de la retraite. Pour la période écoulée jusqu'au présent arrêt, sa perte est totale, et pour la période à échoir, il convient de retenir une perte de chance à hauteur de 70 % et un indice viager pour une personne âgée de 62 ans,

- dans sa note rectificative, l'expert a retenu un besoin en aide humaine à raison de 3h par semaine. Pour fixer le déficit fonctionnel permanent imputable à hauteur de 18 %, l'expert a retenu les doléances de la victime justifiant une aide pour la toilette l'habillement, le ménage et courses, l'impossibilité d'éplucher les légumes, une aide pour la conduite automobile et d'autres difficultés qui viennent démontrer qu'au quotidien cette aide est indispensable compte tenu des séquelles qu'elle présente. Elle a eu recours à un ergothérapeute qui a réalisé un bilan situationnel récent au 3 mai 2022 qui retient un besoin hebdomadaire de 16h, soit 2h30 par jour et elle sollicite l'application d'un coût horaire de 22€,

- les souffrances endurées évaluées par l'expert à 4/7 justifient une indemnisation à hauteur de 20'000€,

- son préjudice d'agrément est réel car ses activités sont limitées dans l'accomplissement de la natation, dans les activités ludiques ou sportives nécessitant l'usage de son bras dominant ce qui regroupe de très nombreuses activités.

Elle demande l'application de la sanction du double taux car elle n'a jamais été destinataire d'une offre provisionnelle. L'offre d'indemnisation définitive l'a été par voie de conclusions du 26 septembre 2018 alors que le rapport de l'expert a été déposé le 10 octobre 2017. Au surplus cette offre est manifestement insuffisante et incomplète puisque l'assureur refuse de prendre en compte l'entier dommage.

La sanction aura pour date-butoir celle à laquelle l'arrêt à intervenir deviendra définitif.

Dans ses conclusions d'appel incident du 22 septembre 2022, la société Allianz demande à la cour de :

' déclarer Mme [S] mal fondée en son appel ;

' confirmer le jugement qui a :

- prononcé la nullité de la note rectificative du docteur [Y] du 28 novembre 2020,

- fixé le préjudice sur les postes suivants :

dépenses de santé restées à charge de la victime : 18,11€

frais d'assistance à expertise : 2900€

assistance par tierce personne temporaire : 39'631,86€

perte de gains professionnels actuels : rejet

perte de gains professionnels futurs : rejet

incidence professionnelle : 25'000€,

assistance par tierce personne permanente : rejet et à titre subsidiaire fixer le montant à la somme de 77'395,86€,

déficit fonctionnel temporaire : 23'685,75€

préjudice esthétique temporaire : 3000€

souffrances endurées : 15'000€

déficit fonctionnel permanent : 30'960€

préjudice esthétique permanent : 4000€

préjudice sexuel : 5000€

préjudice d'agrément : rejet

' le réformer en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière par application de l'article 1343-2 du code civil et en ce qu'il a dit en outre que l'indemnité allouée portera intérêts au double du taux légal pour la période du 15 décembre 2003 au 25 septembre 2018 inclus ;

statuant à nouveau

' débouter Mme [S] de sa demande tendant à voir juger que le montant de l'indemnité totale qui sera allouée par la décision à venir produira intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter du 15 décembre 2003 jusqu'au jour de la décision devenue définitive sur l'ensemble des dommages et intérêts avant imputation des créances des organismes sociaux et avec capitalisation des intérêts à compter de la date anniversaire de la demande ;

' la débouter de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

' la condamner au paiement d'une somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés devant la cour, et la condamner aux entiers dépens d'appel.

Elle présente les observations suivantes :

- la perte de gains professionnels actuels n'est pas démontrée. En effet, Mme [S] était âgée de 44 ans au moment de l'accident et elle était au chômage. Elle ne peut soutenir qu'elle aurait pu trouver un emploi et percevoir un revenu égal au moins au SMIC. Comme le premier juge l'a souligné, dans les dernières années qui ont précédé l'accident, elle n'a que très peu travaillé. Pendant la période où elle prétend avoir enseigné en qualité de monitrice auto-école, ses revenus ont été très limités. Elle ne peut donc se prévaloir d'une perte de chance et le jugement sera confirmé,

- la perte de gains professionnels futurs n'est pas démontrée alors que l'expert n'a pas retenu ce poste de préjudice en déclarant Mme [S] apte à la reprise du travail,

- l'assistance par tierce personne à titre permanent n'est pas démontrée. Elle souligne le fait que jusqu'alors, Mme [S] avait sollicité une indemnisation de ce poste à raison de 3h par semaine et qu'elle est passée à 2h30 par jour. Le rapport de l'ergothérapeute ne présente aucun caractère contradictoire et il ne peut s'imposer à la cour. Il est curieux de constater qu'il a indiqué que son intervention a eu lieu à la médiathèque de [Localité 6] car Mme [S] ne possède pas de logement actuellement. Dans ces conditions comment a-t-il pu évaluer le besoin sans avoir visité le logement et sans connaître l'environnement ' À titre subsidiaire elle propose une indemnisation à raison de 3h par semaine en fonction d'un coût horaire de 15€ et selon la table de capitalisation de la Gazette du Palais 2018,

- le préjudice d'agrément doit être rejeté, puisque Mme [S] ne produit aucune pièce à l'appui de sa demande.

Elle rappelle que le docteur [Y] a déposé son rapport le 10 octobre 2017 dont elle a eu dans le meilleur des cas connaissance le 12 octobre 2017 et elle disposait donc au minimum d'un délai expirant le 12 mars 2018 pour présenter une offre. Par courrier du 1er février 2018 elle a adressé une proposition d'indemnisation en retenant tous les éléments du préjudice fixé par l'expert. Mme [S] ne peut donc se prévaloir ni d'une absence d'offre, ni d'une offre insuffisante résultant des conclusions du 25 septembre 2018. D'ailleurs cette proposition d'indemnisation n'était pas insuffisante. Mme [S] sera donc déboutée de sa demande.

La CPAM du Var, assignée par Mme [S], par acte d'huissier du 11 février 2022, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

Par courrier adressé au greffe de la cour d'appel le 1er avril 2022 elle a fait connaître le montant définitif de ses débours pour 14'245,37 €, correspondant à :

- des prestations en nature : 5010,38€

- des frais futurs : 9234,99€.

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.


Motifs de la décision


L'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue, et le barème de capitalisation utilisé sera celui publié à la Gazette du palais du 15 septembre 2020, taux d'intérêt 0,30%, qui apparaît approprié, eu égard aux données démographiques et économiques actuelles.

Sur le préjudice corporel

L'expert, le docteur [Y], et dans son rapport du 16 septembre 2020, indique que Mme [S] a présenté une contusion de l'épaule gauche et une contusion du rachis dorso lombaire et qu'elle conserve comme séquelles une invalidité globale de l'épaule gauche, membre dominant chez la victime.

Il a conclu à :

- perte de gains professionnels actuels : Mme [S] était au chômage au moment du fait accidentel

- un déficit fonctionnel temporaire total de 8 jours

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 75 % de 95 jours

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % de 142 jours

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % de 2799 jours

- un besoin en aide humaine à titre temporaire qu'il a chiffré notamment à 5h par semaine jusqu'à la date de la consolidation le 12 août 2011,

- une consolidation au 12 août 2011,

- des souffrances endurées de 4/7

- un préjudice esthétique temporaire de 2,5 /7

- un déficit fonctionnel permanent de 18 % englobant les lésions non macro-traumatique découverte dans les suites de l'accident au niveau du tendon sus épineux et celles liées à la prise en charge thérapeutique d'un état antérieur constitutionnel mais asymptomatique jusqu'à la survenue de l'accident,

- pas de perte de gains professionnels futurs à envisager, et imputable au fait accidentel,

- incidence professionnelle : aptitude à la reprise du travail à la consolidation avec une pénibilité accrue liée à la gêne fonctionnelle douloureuse de son épaule gauche

- un préjudice esthétique permanent de 2,5 /7

- un préjudice d'agrément : il existe une gêne, sans contre-indication à pratiquer la natation et toutes les activités nécessitant l'utilisation du membre supérieur dominant lié à la limitation fonctionnelle douloureuse de l'épaule,

- un préjudice sexuel hédonique en lien avec une gêne à la gymnastique du corps.

Son rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime, née le [Date naissance 3] 1958, de son absence d'activité au moment de l'accident, âgée de 52 ans à la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles 5028,49€

Ce poste correspond aux :

- frais d'hospitalisation, frais médicaux et pharmaceutiques, actes de radiologie, massages pris en charge par la CPAM soit la somme de 5010,38€

- frais restés à la charge de la victime soit la somme de 18,11€, montant non contesté.

- Frais divers 2900€

Le montant des frais d'assistance à expertise évalué par le premier juge à la somme de 2900€, ne donne lieu à aucune discussion.

- Perte de gains professionnels actuels 21.907,25€

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.

La société Allianz fait valoir que Mme [S] était sans emploi et/ou demandeur d'emploi au moment où l'accident s'est produit et qu'ainsi elle n'a subi aucune perte de gains professionnels actuels.

Mme [S] ne conteste pas cet état de fait mais elle explique qu'elle vivait en Corse lorsqu'elle a obtenu le 4 juillet 2002 un renouvellement de l'autorisation d'enseigner en qualité de monitrice d'auto-école, puis en raison des difficultés pour trouver un emploi elle est venue s'installer sur le continent dans le Var. C'est quelques mois plus tard et le 14 avril 2003 qu'elle a été victime de l'accident pour lequel elle sollicite son indemnisation. Elle ajoute que de 2006 à 2009, elle a occupé quelques emplois qui ne lui ont procuré que de faibles revenus.

Pour évaluer sa perte réelle, et en l'absence de revenu salarial fixe, il convient de se référer à celui qui était le sine dans les trois années qui ont précédé l'accident, et donc au cours des années 2000, 2001, et 2002. Sur le relevé de carrière qu'elle produit en pièce 15 de son dossier, on peut lire qu'en 2000 elle a perçu de son activité professionnelle la somme de 9316 Frs, soit environ 1420€, en 2001 celle de 13.805 Frs soit environ 2105€ et en 2002, aucun revenu. En 2003 et au plus près des faits traumatiques, ses revenus n'ont été constitués que d'une allocation de 684€ pour une formation professionnelle.

Dans l'optique d'indemniser Mme [S] de sa perte intégrale, il convient d'admettre que l'accident lui a fait perdre l'éventualité favorable de trouver un emploi rémunéré au SMIC. Toutefois le taux de la perte de chance qui a été la sienne, doit être mesuré à l'aune de son potentiel réel à occuper et vouloir occuper un poste stable dans les proches années ayant précédé l'accident, et que la cour évalue à 25% de la valeur d'un SMIC, soit en considérant le tableau fiable qu'elle reproduit dans ses écritures et tenant compte de l'évolution annuelle du SMIC jusqu'à la consolidation une somme de 99.155€, dont il convient de déduire les revenus perçus de 2005 à 2009 pour 11.526€, soit 87.629€, et donc en fonction d'une perte de chance de 25%, la somme de 21.907,25€.

Des indemnités journalières lui ont été servies à hauteur de 1955,80€.

En vertu du droit de priorité de la victime il revient à Mme [S] la somme de 21.907,25€ (87.629€, montant de l'assiette du poste - 1955,80€ montant du recours de la CPAM, et dans la limite du montant indemnisable par le tiers responsable de 21.907,25€) et donc aucune somme ne revenant à l'organisme social (21.907,25€ indemnisable par le tiers responsable - 21.907,25€ revenant à la victime.

- Assistance de tierce personne 39'631,86€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 39'631,86€ sur la base d'un coût horaire de 17€ ne donne lieu à aucune discussion.

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Dépenses de santé futures 9234,99€

Ce poste vise les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation et incluent les frais liés soit à l'installation de prothèses soit à la pose d'appareillages spécifiques nécessaires afin de suppléer le handicap physiologique.

Il est constitué des frais futurs prévus par l'organisme social à hauteur de 9234,99€

- Perte de gains professionnels futurs 32.013,98€

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Mme [S] expose que pendant la période qui s'est écoulée entre la consolidation et le prononcé du présent arrêt, elle n'a eu aucune activité professionnelle, si bien que sa perte doit être intégralement indemnisée sur la base d'un SMIC.

Le parcours professionnel de Mme [S] a été examiné lors de l'évaluation de la perte de gains professionnels actuels, et il ressort que son activité a toujours été sporadique et en tout état de cause faiblement rémunératrice, ne serait-ce que par rapport au SMIC, ce qui a conduit à ne retenir pour la période antérieure à la consolidation qu'une perte de chance modérée. Depuis la consolidation acquise, les séquelles qu'elle conserve sont par nature moins invalidantes ou en tout état de cause équivalentes aux blessures et complications qu'elle a subies précédemment.

L'expert a conclu qu'elle était apte à la reprise du travail à la consolidation avec une pénibilité accrue liée à la gêne fonctionnelle douloureuse de son épaule gauche, et qu'elle disposait donc d'une capacité à percevoir des gains d'une activité professionnelle.

Ces données conduisent donc à évaluer sa perte de gains pour la période échue en retenant une perte de chance et non pas une indemnisation intégrale.

En effet et de ce chef, la portée des différentes décisions de jurisprudence citées par la victime ne conduit pas à retenir, dans tous les cas, un droit à une indemnisation totale de la perte de gains professionnels futurs, dès lors que la victime n'a eu aucune activité professionnelle entre la consolidation et la liquidation. Mais elle interdit de limiter l'indemnisation d'une perte de gains à une perte de chance, lorsque la perte de l'emploi est la conséquence directe et certaine du fait traumatique que ce soit sur la période antérieure ou postérieure à la consolidation et jusqu'au prononcé de l'arrêt en liquidation, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Dans ses écritures, Mme [S] demande à la cour d'évaluer sa perte de gains professionnels futurs à échoir en considérant l'indice de rente viager pour une femme accédant à la retraite à l'âge de 62 ans. Or il s'avère qu'elle a atteint cet âge de la retraite le 16 novembre 2020, et qu'ainsi sa perte n'est qu'une perte échue.

Mme [S] sera donc indemnisée de sa perte de gains professionnels futurs à titre échu en fonction d'une perte de chance évaluée à 25% de la valeur d'un SMIC et selon le tableau fiable qu'elle a reproduit dans ses écritures pour la période du 12 août 2011 jusqu'au 31 décembre 2019, 115.130,45€, montant augmenté de la perte du 1er janvier 2020 jusqu'au 16 novembre 2020, date de son accession à la retraite à 62 ans, soit 12.925,50€ (1231 x 10,5m) et donc au total 128.055,95€.

En retenant la perte de chance de 25%, sa perte de gains s'établit à 32.013,98€ (128.055,95€ x 25%).

- Incidence professionnelle 25'000€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 25'000€ ne donne lieu à aucune discussion.

- Assistance de tierce personne 98.297,34€

Mme [S] présente d'une part la note rectificative du docteur [Y] qui a fait l'objet d'une annulation par le premier juge, la décision devenue définitive en l'absence d'appel portant sur ce chef du dispositif, et qui concluait à un besoin en aide humaine à titre viager de 3h par semaine. D'autre part, elle produit un bilan réalisé par un ergothérapeute qui a été réalisé hors le contradictoire de la société Allianz et qui fixe un besoin en aide humaine à raison d'une moyenne de 2h30 par jour.

Il est constant que la veille de la date de la consolidation, l'expert avait fixé de façon contradictoire le besoin en aide humaine à 5h par semaine. Il est tout aussi constant que le déficit fonctionnel permanent a été évalué à 18 %, correspondant à des séquelles atteignant la mobilité de l'épaule gauche, membre supérieur dominant chez Mme [S], ce qui conduit à admettre le principe d'un besoin en aide humaine à titre viager. En effet l'état de la victime ne peut nécessiter un besoin en aide humaine à raison de 5h par semaine jusqu'à la consolidation, et qui disparaîtrait du jour au lendemain.

C'est donc sans qu'il soit nécessaire de s'appuyer sur les documents dont la société Allianz conteste la portée, que la cour estime avoir suffisamment d'éléments pour fixer ce besoin en aide humaine à raison de 3h par semaine et moyennant un coût horaire de 18€, et donc un besoin annuel sur 52,14 semaines (365j/ 7j = 52,14s) de 2815,56€ (52,14s x 3h x 18€).

L'indemnité s'établit de la façon suivante :

- pour la période écoulée entre le 12 août 2011 et le prononcé du présent arrêt le 8 décembre 2022, et pendant 643 semaines, la somme de 34.722€ (643 x 3h x 18€),

- pour la période à échoir, sur la base d'un euro de rente viager de 22,580, pour une femme âgée de 64 ans révolus à la liquidation, la somme de 63.575,34€ (2815,56€ x 22,580),

et au total 98.297,34€.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire 23'685,75€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 23'685,75€ ne donne lieu à aucune discussion.

- Souffrances endurées 20.000€

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison du traumatisme initial et des complications apparues dans les suites de l'accident ; évalué à 4/7 par l'expert, il justifie l'octroi d'une indemnité de 20.000€.

- Préjudice esthétique temporaire 3000€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 3000€ ne donne lieu à aucune discussion.

permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent 30'960€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 30'960€ ne donne lieu à aucune discussion.

- Préjudice esthétique 4000€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 4000€ ne donne lieu à aucune discussion.

- Préjudice d'agrément 1000€

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

L'expert a retenu une gêne, sans contre-indication à pratiquer la natation et toutes les activités nécessitant l'utilisation du membre supérieur dominant lié à la limitation fonctionnelle douloureuse de l'épaule.

La domiciliation de Mme [S] à [Localité 6], et donc en toute proximité du bord de mer, permet de retenir, sans qu'il soit nécessaire qu'elle produise des attestations de ses proches, qu'elle a comme loisir ponctuel celui de se baigner notamment en Méditerranée, ce qui justifie de retenir la gêne à la pratique de la natation et de lui allouer à ce titre une indemnité de 1000€.

- Préjudice sexuel 5000€

Le montant alloué par le premier juge à hauteur de 5000€ ne donne lieu à aucune discussion.

Le préjudice corporel global subi par Mme [S] s'établit ainsi à la somme de 321.659,66€ soit, après imputation des débours de la CPAM (14.245,37€), une somme de 307.414,29€ lui revenant qui, en application de l'article 1231-7 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 30 novembre 2021à hauteur de 148.052,41€, déduction faite de la provision de 3800€et du prononcé du présent arrêt soit le 8 décembre 2021 à hauteur de 155.561,88€.

Sur le double taux

Mme [S] demande à la cour de dire que les sommes lui revenant porteront intérêts au double du taux légal en l'absence d'offre, et ce à compter du 15 décembre 2003, soit huit mois après l'accident, jusqu'au jour de la décision devenue définitive, aucune offre n'ayant été présentée avant le 26 septembre 2018, et alors que l'offre contenue dans ces écritures est incomplète et manifestement insuffisante.

En vertu de l'article L 211-9 du code des assurances, l'assureur est tenu de présenter à la victime qui a subi une atteinte à sa personne une offre d'indemnité, qui comprend tous les éléments indemnisables du préjudice, dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident, laquelle peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime ; l'offre définitive doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

La sanction de l'inobservation de ces délais, prévue par l'article L 211-13 du même code, réside dans l'octroi des intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

Or il s'avère que l'assureur a adressé une première offre d'indemnisation le 26 septembre 2018, donc tardivement.

Pour interrompre le cours du doublement des intérêts au taux légal, cette offre doit d'une part être complète, c'est à dire contenir des offres sur chacun des postes de préjudice retenu par l'expert, outre les postes qui se déduisent des éléments du rapport et d'autre part contenir des propositions d'indemnisation qui ne soient pas manifestement insuffisantes, c'est à dire ne pas représenter moins du tiers des montants alloués.

Les offres contenues dans les écritures du 26 septembre 2018 sont manifestement insuffisantes, notamment au titre de l'indemnisation des postes d'assistance par tierce personne temporaire, du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées et du déficit fonctionnel permanent, et elle est assimilée à une absence d'offre.

Les propositions chiffrées selon conclusions signifiées le 1er juin 2021 devant le tribunal judiciaire ont été sensiblement augmentées par la société Allianz, en revanche, elles ne portaient pas sur l'indemnisation du préjudice d'agrément, et donc incomplètes, elles sont assimilées à une absence d'offre.

Devant la cour et en l'état de ses conclusions signifiées le 22 septembre 2022, la société Allianz a présenté des offres sur l'ensemble des postes mais en concluant à la confirmation du jugement qui a rejeté la demande d'allocation formulée au titre du préjudice d'agrément, pourtant retenue par l'expert, et sans former de subsidiaire. Cette offre n'est donc pas complète.

En conséquence, la sanction du doublement des intérêts au taux légal est justifiée au titre de la tardiveté et du caractère incomplet et/ou insuffisant des offres formalisées. En conséquence, la société Allianz est condamnée au doublement de cet intérêt au taux légal sur la période du 15 décembre 2003, jusqu'au jour où le présent arrêt deviendra définitif, et sur la somme de 321.659,66€, intégrant la créance du tiers payeur.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime sont confirmées.

La société Allianz qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des entiers dépens d'appel. L'équité ne commande pas de lui allouer une somme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité justifie d'allouer à Mme [S] une indemnité de 2500€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs



La Cour,

- Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l'indemnisation de la victime et les sommes lui revenant, et sur la somme objet du doublement du taux d'intérêt légal,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Fixe le préjudice corporel global de Mme [S] à la somme de 321.659,66€ ;

- Dit que l'indemnité revenant à cette victime s'établit à 307.414,29€ ;

- Condamne la société Allianz à payer à Mme [S] les sommes de :

* 307.414,29€, correspondant à :

- dépenses de santé actuelles 18,11€

- frais d'assistance à expertise : 2900€

- perte de gains professionnels actuels 21.907,25€

- assistance par tierce personne temporaire : 39.631,86€

- perte de gains professionnels futurs 32.013,99€

- incidence professionnelle : 25.000€

- assistance par tierce personne permanente : 98.297,34€

- déficit fonctionnel temporaire : 23.685,75€

- souffrances endurées : 20.000€

- préjudice esthétique temporaire : 3000€

- déficit fonctionnel permanent : 30.960€

- préjudice esthétique permanent : 4000€

- préjudice d'agrément : 1000€

- préjudice sexuel : 5000€,

sauf à déduire les provisions versées, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 30 novembre 2021à hauteur de 148.052,41€, déduction faite de la provision de 3800€et du prononcé du présent arrêt soit le 08 décembre 2022 à hauteur de 155.561,88€ ;

* 2500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

- Condamne l'assureur au paiement des intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur la période du 15 décembre 2003, jusqu'au jour où le présent arrêt deviendra définitif, et sur la somme de 321.659,66€, intégrant la créance du tiers payeur ;

- Déboute la société Allianz de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles exposés en appel ;

- Condamne la société Allianz aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER P/LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ