Cour d'appel de Paris, Chambre 5-1, 28 septembre 2011, 09/28356

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    09/28356
  • Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Décision précédente :Tribunal de Grande Instance de PARIS, 27 novembre 2009
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/6162b6204785972364720407
  • Président : Monsieur Didier PIMOULLE
  • Avocat(s) : Maître Jean-Louis LAGARDE
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2014-06-18
Cour de cassation
2014-06-18
Cour d'appel de Paris
2011-09-28
Tribunal de Grande Instance de PARIS
2009-11-27

Texte intégral

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT

DU 28 SEPTEMBRE 2011 (n° , 10 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 09/28356. Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Novembre 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/13542. APPELANTE : S.A.R.L. AKG-IMAGES PARIS prise en la personne de son gérant, ayant son siège social [Adresse 1], représentée par Maître Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour, assistée de Maître Jean-Louis LAGARDE, avocat au barreau de PARIS, toque D 127. INTIMÉ : Monsieur [P] [L] demeurant [Adresse 2], représenté par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour, assisté de Maître Stéphane COLOMBET plaidant pour le Cabinet VIVIEN & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque R 210. COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 14 juin 2011, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Didier PIMOULLE, Président Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère Madame Anne-Marie GABER, Conseillère qui en ont délibéré Greffier : lors des débats : Monsieur NGUYEN. ARRÊT : - Contradictoire - rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Madame DESTRADE, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire. ***** Vu l'appel interjeté le 17 décembre 2009 par la société AKG-IMAGES PARIS (SARL), ci-après la société AKG, du jugement contradictoire rendu le 27 novembre 2009 par le tribunal de grande instance de Paris statuant dans le litige l'opposant à [P] [L] ; Vu les ultimes écritures de la société appelante, signifiées le 30 mai 2011; Vu les dernières conclusions de [P] [L], intimé, signifiées le 23 mai 2011; Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 31 mai 2011

; SUR CE,

LA COUR, Considérant qu'il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, au jugement déféré et aux écritures des parties ; Qu'il suffit de rappeler que suivant contrat en date du 22 juillet 1999, [P] [L], exerçant depuis 1951 la profession de photographe indépendant, a cédé à titre exclusif et définitif, l'intégralité de ses droits d'exploitation 'sur un stock de photographies, de négatifs, de tirages d'exposition et de documentation photographique' à la société AKG qui s'engageait en contrepartie à lui verser 50 000 francs à la signature du contrat, 50 000 francs encore le 15 janvier 2000, puis, pendant une période de 7 ans (soit 84 mois), la somme mensuelle de 6000 francs ou son équivalent en euros, elle devait en outre, prendre à sa charge, à concurrence de 2000 francs par mois, le loyer afférent au local où étaient entreposées les photographies et régler au photographe, pour tout tirage d'exposition ou de collection réalisé à sa demande, une somme de 600 euros ; Que le contrat, jusque là exécuté, fut remis en cause par [P] [L] qui adressa le 31 mai 2006 à la société AKG, une lettre recommandée avec avis de réception lui faisant part de la nécessité de 'redessiner (...) une nouvelle ligne professionnelle encadrée par les lois en vigueur respectant les droits d'un auteur photographe' ; Que, dans ces circonstances, les parties ont engagé des négociations, le 10 juillet 2006 à [Localité 3], respectivement en présence de leur conseil puis seules, le 24 juillet 2006 au domicile du photographe à [Localité 4], et conclu le 11 septembre 2006 un protocole d'accord transactionnel aux termes duquel la société AKG, souhaitant 'poursuivre l'exploitation et la mise en diffusion des images du fonds sans pour autant acquiescer aux demandes et analyses de M. [P] [L]' , s'engageait à proroger de deux années, soit rétroactivement du 1er juillet 2006 au 1er juin 2008, les versements mensuels prévus au contrat du 22 juillet 1999, tandis que [P] [L], exprimant le 'désir de continuer le contrat du 22 juillet 1999 et de percevoir une rémunération complémentaire' reconnaissait la validité de ce contrat, les parties stipulant en outre que la cession des droits serait limitée à la durée de la propriété littéraire et artistique et qu'une rémunération proportionnelle égale à 1% du produit, net de frais, de l'exploitation des photographies, hors ouvrages d'édition, serait allouée à l'auteur ; Que [P] [L] ayant refusé à la société AKG d'accéder à l'atelier où se trouvaient encore des tirages et négatifs de ses photographies, s'est vu ordonner par le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon, le 25 août 2008, de remettre à cette dernière, dans le mois de la signification de la décision et sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, 'l'ensemble des supports de photographies dont il a concédé les droits d'exploitation par le contrat du 22 juillet 1999, la société AKG IMAGES PARIS devant lui verser, en contrepartie de cette remise, la somme de 2744, 07 euros' ; Qu'il a dans ces conditions, assigné la société AKG, suivant acte d'huissier de justice du 25 septembre 2008, devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir, pour l'essentiel, prononcer la nullité pour vice du consentement, contravention aux dispositions d'ordre public du droit des obligations et atteinte aux droits d'auteur, du protocole d'accord transactionnel du 25 septembre 2006 ainsi que du contrat du 22 juillet 1999, remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient antérieurement à la signature du contrat du 22 juillet 1999, condamner la société AKG à lui verser la somme de 150 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi des suites de l'exploitation de son état de vulnérabilité lors et depuis la signature des contrats litigieux, à titre subsidiaire, déclarer lésionnaire la somme qui lui été versée à la date jugement, réévaluer la somme due par la société AKG à 3 millions d'euros sauf à parfaire après expertise, lui allouer à titre provisionnel la somme de 300 000 euros ; Que, selon le jugement entrepris, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal, se prononçant d'abord sur la validité du protocole transactionnel du 11 septembre 2011, a écarté tout vice du consentement mais retenu une atteinte au principe d'inaliénabilité du droit moral de l'auteur emportant la nullité de la convention dans son entier, examinant ensuite le contrat de cession de droits du 22 juillet 1999, l'a annulé au motif qu'il stipulait en son article 3 une cession des droits à titre exclusif et définitif, sans limitation de durée, et contrevenait ainsi aux dispositions d'ordre public de l'article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle, remis en conséquence les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la signature du contrat du 22 juillet 1999, condamné la société AKG à payer à [P] [L] la somme de 150 000 euros à titre de dommages-intérêts outre celle de 5000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et rejeté enfin, le surplus des demandes ; Que, devant la cour, la société AKG, poursuivant l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, soutient, nouvellement, que [P] [L] serait irrecevable, par l'effet de la prescription quinquennale de l'article 1304 du Code civil, à dénoncer le contrat du 22 juillet 1999, elle maintient par ailleurs, qu'il serait également irrecevable à attaquer la transaction du 11 septembre 2006, revêtue de l'autorité de la chose jugée, et conclut en toute hypothèse, sur le fond, à la validité des contrats respectifs, à titre subsidiaire, si les contrats devaient être annulés, elle demande essentiellement que la réparation du préjudice de [P] [L] soit fixée à 18 270 euros et que ce dernier, qui ne saurait prétendre à la restitution des fruits, soit condamné à lui rembourser la somme de 262.031,50 euros correspondant aux dépenses exposées pour l'acquisition, la numérisation, la conservation, la mise en exploitation du fonds photographique ; Que [P] [L], pour l'essentiel, prie la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré nuls les contrats litigieux, de porter à 600 000 euros le montant, à parfaire le cas échéant après expertise, des dommages-intérêts lui revenant au titre de la réparation d'une part, du préjudice résultant de la contrainte qui lui a été infligée, d'autre part, de la privation de l'exploitation de ses oeuvres depuis le 22 juillet 1999, subsidiairement, de dire que les sommes reçues en exécution du contrat sont lésionnaires et les réviser au juste montant de 3 millions d'euros, à parfaire à l'aide d'un expert, en toute hypothèse, ordonner une mesure de publication judiciaire ; Sur la validité du protocole transactionnel du 11 septembre 2006, Considérant que [P] [L] persiste à invoquer la nullité du protocole d'accord transactionnel du 11 septembre 2006 en invoquant, en premier lieu, le vice du consentement, en second lieu, la violation de diverses dispositions d'ordre public ; Sur le vice du consentement, Considérant que [P] [L] soutient, au fondement des dispositions des articles 1109 et 1111 du Code civil, qu'il se trouvait, au jour de la signature de l'acte, dans un état de santé très dégradé ainsi que dans une situation financière très précaire, que ces épreuves ont produit l'effet d'une contrainte morale, assimilable à la violence, dont la société AKG a abusé pour lui extorquer son consentement ; Considérant que l'article 2044 du Code civil définit la transaction comme un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ; que l'article 2052 du même Code dispose qu'un tel contrat a entre les parties , l'autorité de la chose jugée en dernier ressort et ne peut être attaqué pour cause d'erreur de droit ni pour cause de lésion ; qu'il peut être néanmoins rescindé, selon l'article 2053, dans tous les cas où il y a dol ou violence ; Considérant qu'il y a violence, selon l'article 1112 du Code civil, lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. On a égard, en cette matière, à l'age, au sexe et à la condition des personnes ; Considérant qu'il est constant que [P] [L], né en 1928, a connu en 1997 de graves problèmes de santé qui lui ont valu de subir en mars 1999, avant de contracter avec la société AKG le 22 juillet suivant, une opération du coeur et de devoir cesser son activité professionnelle, qu'il a par ailleurs, tout au long de sa carrière, rencontré des difficultés financières et ne dispose aujourd'hui d'aucune retraite faute d'avoir cotisé ; Qu'il s'avère toutefois, au vu des pièces de la procédure et notamment de l'ensemble des correspondances échangées entre les parties depuis leur entrée en relation au début de l'année 1999, que les problèmes de santé invoqués n'ont jamais altéré la parfaite lucidité de [P] [L] ainsi qu'il résulte, en particulier, d'une lettre du 13 février 1999 dans laquelle il indique que son intérêt commande de prévoir, pour la cession 'la cession de ses archives à AKG' , deux types de contrats : 'a) en cas de proche mortalité (décès pendant l'opération de mars 1999) , b) en cas de joyeuse survie !' et propose selon le cas des modalités de rémunération précises et pertinentes, ni atteint sa force mentale ainsi qu'il ressort des formules vigoureuses et des pointes d'humour qui émaillent ses courriers ; Que, s'agissant de sa situation économique, il était, certes, au jour de la signature du protocole, dépendant des seuls revenus que lui versait la société AKG en exécution du contrat du 22 juillet 1999, mais non démuni puisqu'il avait d'ores et perçu, le 15 janvier 2000, deux versements de 50 000 francs chacun et, à compter du 1er août 1999, un versement mensuel, prévu pour 7 années, de 8000 francs (comprenant à hauteur de 2000 francs la participation de AKG à la location de l'atelier de l'artiste) ; Que, loin d'avoir soulevé au cours de l'exécution du contrat la moindre contestation, il s'est toujours félicité de ses relations avec la société AKG, 'une bonne maison' selon son courrier du 26 août 1999, à laquelle il écrivait encore le 9 janvier 2006 'un grand merci [W], pour les somptueux almanachs reçus à l'instant' et ce n'est que le 31 mai 2006, soit deux mois seulement avant le terme contractuel des paiements mensuels précédemment évoqués, qu'il a pris l'initiative, par une lettre recommandée dans laquelle il indique expressément bénéficier des conseils d'un avocat, de remettre en cause la validité du contrat ; Qu'il ne dément pas avoir rencontré, dans le cadre des pourparlers engagés en vue de trouver une solution amiable au litige, [W] [D], responsable de la société AKG, le 10 juillet 2006 en présence des conseils respectifs et qu'il est établi, au vu du courrier adressé à son interlocuteur le 20 juillet 2006 avec pour objet 'la paix des armes', que c'est à sa demande que la négociation s'est poursuivie le 24 juillet 2006 hors la présence des conseils : '[W], Veux-tu accepter que nous ayons un tête-à-tête rapidement à [Localité 3]. Bien à toi, [P]' ; Qu'il ne produit par ailleurs aucune pièce susceptible de révéler la teneur des échanges qui ont abouti à la signature le 11 septembre 2006 du protocole litigieux et ne fournit pas davantage d'élément de nature à accréditer ses affirmations selon lesquelles [W] [D] se serait présenté directement chez lui avec un contrat 'clefs en mains' non négociable, à prendre ou à laisser ; Que force est de conclure de l'ensemble de ces observations que [P] [L] ne justifie aucunement de la faiblesse ou de la nécessité qui l'aurait contraint à accepter les conditions de la société AKG, qu'il ne démontre pas davantage en quoi la société contractante, abusant de son état, aurait extorqué par une quelconque forme de violence son consentement à la signature du protocole d'accord transactionnel du 11 septembre 2006 ; Que la demande en nullité formée de ce chef se trouve en conséquence dénuée de fondement; Sur la violation de dispositions d'ordre public, Considérant que [P] [L] fait en outre valoir que le contrat du 11 septembre 2006 est, en toute hypothèse, privé de tout effet, en ce qu'il transige sur des droits indisponibles et inaliénables, méconnaît les dispositions relatives à la rémunération des auteurs, manque d'objet déterminé au sens des dispositions de l'article 1129 du Code civil faute de définir la liste des oeuvres concernées par la cession ; Or considérant, sur ce dernier point, que le protocole d'accord transactionnel stipule à l'article 2 que la société AKG est pleinement propriétaire de tous les supports matériels des photographies objet du contrat du 22 juillet 1999, tels que négatifs noir et blanc ou couleur, tirage d'époque, inversibles couleurs, documents, et que [P] [L] s'engage à (lui) remettre l'intégralité, sans exception, de tous ces supports photographiques encore en sa possession, et ce en trois livraisons avant le 31 décembre 2006, date de rigueur, et s'interdit, sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard d'en différer la remise (...) ; qu'il ajoute que la cession des droits d'exploitation des droits figurant au contrat du 22 juillet 1999 est pure et simple et totale au sens de l'article L.122-7 du Code de la propriété intellectuelle (...) Et comprend la cession totale du droit de reproduction de chacune des images du fonds photographique, la cession totale du droit de représentation de chacune des images de ce même fonds ; qu'il rappelle enfin, en préambule, que [P] [L] ne souhaitant pas exploiter lui-même le fonds photographique important (...) constitué au cours de sa carrière a exprimé l'intention de céder ce fonds à une agence en qui il pourrait investir sa confiance pour gérer, diffuser, faire rayonner ses oeuvres ; que pour sa part, la société AKG, spécialisée dans l'exploitation et la diffusion de fonds photographiques (...), a manifesté son intérêt pour ce fonds et son désir de l'acquérir, tant en ce qui concerne la propriété incorporelle qu'en ce qui concerne la propriété des supports matériels des photographies ; Qu'il suit de ces dispositions, claires, précises et exemptes de toute ambiguïté, corroborées par les courriers échangés entre les parties, en particulier d'une lettre adressée le 30 juillet 1999 par [P] [L] à la société AKG dans les termes suivants : 'défendez ce qui est devenu votre territoire d'art . Faites reconnaître mes droits devenus vôtres!', que celles-ci ont entendu manifestement faire porter la cession (supports matériels et droits incorporels) sur l'intégralité du fonds photographique de [P] [L], dont la liste exhaustive n'a pu être établie, en l'absence de tout inventaire effectué par le photographe au cours de ses cinquante années d'activité professionnelle, et sera, ainsi que ce dernier le reconnaît dans une correspondance du 12 juillet 2000, très très difficile à réaliser ; Que, par voie de conséquence, l'accord des parties n'est pas critiquable au regard de l'article 1129 du Code civil qui exige que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce ; Considérant que [P] [L] conteste, en deuxième lieu, la validité des dispositions énoncées à l'article 5 du protocole aux termes desquelles le photographe se voit allouer, en complément du prix prévu au contrat de cession du 22 juillet 1999, une rémunération proportionnelle égale à 1% du produit net de frais de toutes les recettes produites par l'exploitation des photographies, hors ouvrages d'édition ; Qu'il fait à cet égard valoir que la rémunération proportionnelle, qui ne sera payée, selon le protocole, qu'à partir du moment où son montant cumulé depuis le 22 juillet 1999 dépassera les sommes versées par AKG à l'occasion du contrat du 22 juillet 1999 (à titre indicatif 117 690 E soit 772 000 francs) et de la présente transaction ( à titre indicatif 29 272,56 E soit 192 015 francs) est soumise à une condition potestative au sens de l'article 1174 du Code civil, ce d'autant que la société AKG se réserve la possibilité d'effectuer ou non la reddition des comptes qui seule permet de vérifier si le seuil ainsi fixé est atteint, que, par ailleurs, le taux dérisoire de 1% équivaut à une absence de rémunération en contravention avec les dispositions d'ordre public de l'article L.131-4 du Code de la propriété intellectuelle en vertu desquelles la cession par l'auteur de ses droits doit comporter au profit de ce dernier la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation ; Mais considérant que [P] [L] ne conteste pas avoir reçu par application du contrat de cession du 22 juillet 1999 et du protocole transactionnel du 11 septembre 2006, la somme totale de 146 962,56 euros, dont il est précisé à l'article 5 du protocole qu'elle constitue un à-valoir non récupérable par AKG, définitivement acquis à [P] [L] ; qu'il ne dément pas avoir eu communication le 27 mai 2008 du relevé d'exploitation de ses oeuvres affichant un produit total depuis le contrat de cession du 22 juillet 1999 de 73 317,06 euros ; qu'il n'est pas fondé dans ces conditions à invoquer le caractère potestatif de la rémunération convenue ; Considérant que [P] [L] n'établit pas davantage que le taux de 1% serait vil ou lésionnaire force étant de relever que le produit de l'exploitation de ces oeuvres n'atteignait au 27 novembre 2009 que 97 364 euros, montant bien inférieur à la rémunération de 146 962, 56 euros, versée dans le même temps par la société AKG, et à la dépense de 262 031 euros exposée pour la mise en exploitation ( transports, classement, numérisation ); Considérant qu'il suit de ces éléments que la clause de rémunération proportionnelle stipulée au protocole transactionnel du 11 septembre 2006 dans le cadre de concessions réciproques des parties, n'est pas critiquable ; Considérant que [P] [L] soutient enfin que les dispositions de l'article 2 de la transaction contreviennent au principe d'inaliénabilité du droit moral de l'auteur au respect de son oeuvre ; Qu'il critique à cet égard, en premier lieu, l'article 2-2 en ce qu'il dispose que la cession des droits d'exploitation comprend 'le droit d'adapter tout ou partie chaque image (sic), et, ensemble ou séparément, le cadrage, le légendage en toute langue, par toute modification graphique, virtuelle ou de synthèse, par réduction ou agrandissement, changement ou suppression de couleurs, d'éclairage, de cadre, du parti artistique, du sujet, de la composition, et par l'incrustation d'autres images et messages de toutes sortes, virtualisation, animation, insertion, déformation, modification de légendes' ; Mais considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 1161 du Code civil, Toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier ; Qu'il est à cet égard relevé que les parties ont entendu, par la transaction du 11 septembre 2006, confirmer la validité de toutes les dispositions du contrat du 22 juillet 1999 (article 2-1) et poursuivre l'exécution de ce contrat ; que les deux contrats, ensemble, portent cession à la société AKG des droits d'exploitation du fonds photographique de [P] [L]; que, selon le contrat initial (article 2), les droits d'exploitation comprennent le droit de reproduction et le droit de représentation ainsi que les droits d'utilisation secondaire et dérivés relatifs aux photographies, (...) Le droit d'adaptation littéraire et graphique d'utilisation même à des fins publicitaires, étant en outre précisé que la reproduction des photographies est autorisée sur tous supports, en tous formats, par tous procédés techniques et la représentation entière et par fragments ; que, le protocole conclu ensuite, évoque les mêmes droits de reproduction, de représentation et d'adaptation sauf à développer les diverses applications susceptibles d'en être faites ; Qu'il s'infère de ces stipulations que les droits conférés à la société cessionnaire, exhortée dans un courrier de [P] [L] à faire rayonner (son) oeuvre , s'inscrivent dans la volonté de l'auteur d'assurer à son fonds photographique, jusque là méconnu et peu rentable ainsi que le montrent les éléments de la procédure, l'exploitation la plus large possible ; que la cession, telle que convenue, des droits d'exploitation n'emporte pas pour autant une aliénation par l'auteur de son droit moral force étant d'observer que le contrat du 22 juillet 1999 énonce expressément à l'article 2-B que ces droits sont cédés sous réserve du droit moral du cédant et que, selon l'article 6-2°) du protocole du 11 septembre 2006, le cessionnaire s'engage au respect des droits moraux de l'auteur dont le photographe demeure titulaire en intégralité ; Considérant, de plus fort, que les conventions sont conclues et exécutées de bonne foi ; qu'il n'est pas permis, en l'état de ce principe, de regarder les dispositions contractuelles contestées comme caractérisant un abandon préalable et général des prérogatives que le photographe tient de son droit moral et partant, une violation de la règle légale d'incessibilité du droit moral de l'auteur; qu'il ressort par ailleurs des correspondances régulièrement échangées entre les parties que l'auteur a toujours été informé des diverses exploitations de son oeuvre et que loin d'avoir eu à se plaindre d'une dénaturation ni, plus généralement, d'une quelconque atteinte au respect dû à son oeuvre il s'est toujours félicité des actions entreprises par la société AKG et de la bienheureuse qualité des relations entretenues avec celle-ci (courrier du 1er mars 2000) ; Considérant que [P] [L] conteste, en second lieu, l'article 2-4 du protocole en ce qu'il prévoit que la cession totale consentie à AKG par le photographe comprend, pour toutes les photographies du fonds de l'auteur, divulguées ou non, la cession et le transfert au cessionnaire du droit exclusif, qui appartenait à l'auteur, d'exploiter chacune de ses oeuvres sous quelque forme que ce soit et d'en tirer un profit pécuniaire, dans le monde entier et pour toute la durée de la propriété artistique, soit jusqu'à la fin de la soixante-dixième année qui suivra l'année civile du décès du photographe et constituerait ainsi une appropriation par la société cessionnaire du droit conféré à l'auteur de divulguer son oeuvre ; Mais considérant que ces dispositions doivent être interprétées au regard de la convention prise dans son ensemble d'où il ressort que l'auteur a cédé ses droits d'exploitation sur l'intégralité de son fonds photographique (supports et droits) ainsi que des circonstances de la cause d'où il résulte que ce fonds, composé de plus de cinquante mille clichés, n'a jamais fait l'objet d'un quelconque inventaire ; Qu'il se déduit de ces éléments qu'en faisant porter la cession de ses droits d'exploitation sur tout le fonds photographique, sans stipuler la moindre exception, [P] [L] a nécessairement recherché la communication de son oeuvre au public et accepté par avance sa divulgation ; Que force est de conclure, par voie de conséquence, que le droit de divulgation, dont rien n'interdit qu'il puisse être exercé de façon anticipée pourvu qu'il le soit sans équivoque, a été consenti en toute connaissance de cause par l'auteur dès lors que celui-ci a cédé en exploitation l'intégralité de son fonds ; Considérant qu'il suit de ces observations que c'est à tort que les premiers juges ont fait grief au protocole transactionnel du 11 septembre 2006 de porter atteinte au droit moral de l'auteur et annulé, à raison de cette atteinte, le protocole dans son entier ; que le jugement sera réformé de ce chef ; Sur la contestation visant le contrat du 22 juillet 1999, Considérant qu'il appert des développements ci-avant que le protocole d'accord transactionnel du 11 septembre 2006, exempt de tout vice, doit produire entre les parties son plein effet comme revêtu de l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ; Considérant que [P] [L] a expressément reconnu aux termes de l'article 2-1 du protocole que toutes les dispositions du contrat du 22 juillet 1999 sont valables, légales et valides et renoncé aux termes de l'article 8 à toute instance et à toute action nées de l'interprétation du contrat du 22 juillet 1999 ; Qu'il s'ensuit que la demande de [P] [L] visant à voir prononcer la nullité du contrat de 22 juillet 1999 est irrecevable ; Sur la demande fondée sur la lésion, Considérant que [P] [L] demande à la cour, à titre subsidiaire, de constater que le montant total des sommes reçues de la société AKG en exécution des contrats litigieux est lésionnaire et qu'il convient de le réviser ; Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.131-5 du Code de la propriété intellectuelle, En cas de cession du d'exploitation, lorsque l'auteur aura subi un préjudice de plus de 7/12èmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l'oeuvre, il pourra provoquer la révision des conditions de prix du contrat . Cette demande ne pourra être formée que dans le cas où l'oeuvre aura été cédée moyennant une rémunération forfaitaire . La lésion sera appréciée en considération de l'ensemble de l'exploitation par le cessionnaire des oeuvres de l'auteur qui se prétend lésé ; Or considérant, à supposer [P] [L] recevable à agir pour lésion dès lors que la rémunération instituée à son bénéfice est proportionnelle et non pas forfaitaire, que la demande n'est manifestement pas fondée au regard des critères d'appréciation posés par le texte précité ; Considérant qu'il doit être encore rappelé que [P] [L] s'est vu remettre à compter de la signature du contrat du 22 juillet 1999 et compte arrêté en novembre 2009, une somme totale de 146 962, 56 euros au titre de sa rémunération ; Qu'il ne conteste pas que ses revenus s'élevaient antérieurement à la signature du contrat de cession du 22 juillet 1999, alors qu'il avait pour partenaire l'agence RAPHO, au montant annuel de 11 577 francs, soit mensuellement, 964 francs ; Que la société AKG établit avoir dépensé outre la rémunération de l'auteur, une somme de 262 031, 50 euros pour la mise en exploitation du fonds photographique comprenant les transports, examens visuels, pré-classements par thème, documentation et catalogues, numérisation, retouches, restauration, soit un investissement total à ce jour de 408 992 euros ; Qu'il s'avère de la comparaison de l'investissement exposé et de la recette d'exploitation de 97 364 euros jusqu'ici obtenue, que l'opération est à ce jour déficitaire pour la société AKG ; Qu'il suit de ces éléments que la lésion invoquée n'est pas caractérisée ; Que [P] [L] est en définitive mal fondé en toutes ses prétentions ; Sur la demande en procédure abusive, Considérant que le droit d'ester en justice n'est susceptible de dégénérer en abus ouvrant droit à réparation que s'il est exercé de mauvaise foi, par intention de nuire ou par légèreté blâmable équipollente au dol, toutes circonstances qui ne sont pas établies à la charge de [P] [L] qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits ; que la société AKG doit être en conséquence déboutée de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive ; Que par ailleurs, l'équité ne commande pas de faire droit à sa demande au titre des frais irréppétibles ;

PAR CES MOTIFS

, INFIRME le jugement déféré, DÉBOUTE [P] [L] de toutes ses demandes, DÉBOUTE la société AKG de ses demandes en procédure abusive et au titre des frais irrépétibles, CONDAMNE [P] [L] aux dépens de l'instance qui seront, pour ceux afférents à la procédure d'appel, recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile . LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,