ARRÊT DU
22 Octobre 2008
D. M. / I. F.
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RG N : 07 / 01047
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Huguette X... épouse Y...
C /
S. A. GAN ASSURANCES
ASSURANCES GENERALES DE FRANCE
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Aide Juridictionnelle
ARRÊT no899 / 08
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé à l'audience publique le vingt deux Octobre deux mille huit, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, assisté de Nicole CUESTA, Greffier,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Madame Huguette X... épouse Y...
née le 23 Mars 1932 à BEZERIL (32130)
Demeurant...
32130 BEZERIL
représentée par la SCP J. et E. VIMONT, avoués
assistée de la SCP SEGUY-BOURDIOL-DAUDIGEOS-LABORDE, avocats
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2007 / 4245 du 12 / 10 / 2007 accordée par le bureau d'Aide Juridictionnelle de AGEN)
APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 18 Avril 2007
D'une part,
ET :
S. A. GAN ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est 2 rue Pillet Will
75448 PARIS CEDEX 09
représentée par la SCP GUY NARRAN, avoués
assistée de Me Mathieu GENY, avocat
ASSURANCES GENERALES DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est 87 Rue de Richelieu
B. P. 66
75113 PARIS CEDEX 02
représentée par la SCP HENRI TANDONNET, avoués
assistée de Me Hélène PLENIER, avocat
INTIMEES
D'autre part,
a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 17 Septembre 2008, devant Bernard BOUTIE, Président de Chambre, Dominique NOLET, Conseiller et Dominique MARGUERY, Conseiller (laquelle, désignée par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable), assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
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EXPOSE DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Les faits ont été exposés par les premiers juges en des termes auxquels la cour se réfère étant rappelé que Madame Huguette Y... a fait assigner en mars 2006 les compagnies GAN Assurances et AGF afin d'obtenir leur garantie pour les désordres constatés sur la maison d'habitation dont elle est propriétaire à BEZERIL (32), imputables, selon elle, aux périodes de sécheresse qualifiées de catastrophes naturelles par les arrêtés des 3 mai 1995, 26 mai 1998 et 30 avril 2002.
Par Jugement du 18 avril 2007 le Tribunal de Grande Instance d'AUCH a :
- déclaré les demandes présentées par Madame Y... prescrites et par suite irrecevables,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article
700 du Code de Procédure Civile,
- laissé les dépens à la charge de Madame Y....
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Dans des conditions de forme et de délai non contestées, Madame Y... a relevé appel de cette décision par déclaration du 9 juillet 2007.
Aux termes de conclusions en date du 7 juillet 2008 elle demande à la cour d'infirmer la décision déférée exposant que la prescription biennale prévue à l'article
L. 144-2 du code des assurances a été interrompue et qu'en toute hypothèse, les AGF ne pouvaient l'invoquer. Par ailleurs, bien qu'elle ne puisse produire le contrat la liant au GAN, elle maintient avoir été assurée auprès de cette compagnie de mai 1989 à juin 1994.
Elle soutient également que l'expert désigné par l'ordonnance du 16 septembre 2003 retient la sécheresse comme cause principale des désordres. Ce rapport n'a fait l'objet d'aucun dire ou contestation. Compte tenu de la nécessité de reprise en sous- œ uvre, en l'absence de chiffrage par l'expert, Madame Y... a fait établir des devis par des entreprises spécialisées. Elle subira par ailleurs un préjudice de jouissance important. Elle demande donc à la cour de :
- condamner solidairement les AGF et le GAN à lui payer :
. 242. 736, 64 € au titre de la reprise des désordres,
. 3. 000 € au titre du trouble de jouissance,
- dire que ces sommes porteront intérêts capitalisés au taux légal à compter du 22 novembre 2006,
- subsidiairement, ordonner une expertise sur le chiffrage des travaux si la cour s'estime insuffisamment informée,
- condamner solidairement le GAN et AGF, dans cette hypothèse, à lui verser une provision de 10. 000 €,
- condamner solidairement le GAN et AGF en toute hypothèse à lui payer une somme de 4. 000 € en application de l'article
700 du Code de Procédure Civile.
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Par conclusions en date du 4 février 2008, la compagnie GAN expose que ne pouvant justifier d'un contrat d'assurance la liant au GAN, Madame Y... n'a pas d'intérêt à agir, sa demande doit donc être déclarée irrecevable.
Quant à la prescription biennale, l'ordonnance du 21 juin 2004 prorogeant le délai imparti à l'expert est une mesure d'administration judiciaire qui ne saurait l'interrompre. Elle demande donc à la cour, à titre principal, de confirmer la décision des premiers juges.
A titre subsidiaire, elle fait observer que le rapport d'expertise n'apporte aucune certitude sur l'origine du sinistre et que les demandes de Madame Y... ne sont pas fondées. Elle sollicite en conséquence qu'elle en soit déboutée.
Enfin, la compagnie GAN demande que l'appelante soit condamnée à lui payer une indemnité de 2. 500 € en application de l'article
700 du Code de Procédure Civile.
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Dans des conclusions en date du 25 août 2008, la compagnie AGF, développant une argumentation identique à celle du GAN quant à la prescription de l'action de Madame Y..., l'origine des désordres et l'évaluation du préjudice demande à la cour de confirmer la décision des premiers juges et de condamner l'appelante à lui payer une somme de 2. 000 € en application de l'article
700 du Code de Procédure Civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 9 septembre 2008.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'inopposabilité de la prescription :
Selon l'appelante, la prescription biennale ne peut lui être opposée car les AGF ne justifient pas avoir respecté l'article
R. 112-1 du code des assurances et doivent être déchues de leur droit à invoquer cette prescription.
L'article sus visé prévoit que les polices d'assurances doivent rappeler les dispositions de la loi concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance. L'inobservation de ces dispositions est sanctionnée par l'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté à l'article
L. 114-1 du code des assurances.
L'examen des pièces versées au dossier permet cependant de constater que Madame Y... atteste avoir reçu le 3 août 1998 en annexe au contrat d'assurance concernant sa maison d'habitation un exemplaire des conditions générales parmi lesquelles figuraient, à la rubrique " le fonctionnement de votre contrat " un paragraphe 2 intitulé " le délai pour se prévaloir du contrat " (prescription) ainsi libellé : " Ni vous, ni nous ne pouvons nous prévaloir de ce contrat pour exercer nos droits respectifs passé le délai de deux ans … à compter de l'évènement qui leur a donné naissance (articles
L. 114-1 et
L. 114-2 du code des assurances). Bien entendu, cette prescription peut être interrompue par tout moyen de droit commun ou par lettre recommandée avec accusé de réception ".
Il convient donc de constater que la compagnie AGF justifie avoir informé l'appelante de la prescription biennale et ne peut se voir opposer la déchéance de son droit à invoquer ladite prescription. Ce moyen sera donc rejeté.
Sur la prescription de l'action de Madame Y... :
Il est constant que Madame Y... s'est vu refuser la garantie de PFA, son assureur multirisque habitation, à la suite des arrêtés interministériels des 3 mai 1995 et 26 mai 1998 qui constataient l'état de catastrophe naturelle sur la commune de BEZERIL.
Elle a fait une nouvelle déclaration de sinistre auprès des AGF (anciennement PFA) à la suite de l'arrêté interministériel du 30 avril 2002 et le nouvel expert mandaté par la compagnie a conclu que la sécheresse n'apparaissait pas comme la cause principale des désordres. Par acte du 3 juillet 2003, l'appelante a assigné en référé les AGF et la compagnie GAN en vue de la nomination d'un expert. Par ordonnance du 16 septembre 2003, Monsieur Z... a été désigné pour examiner les désordres allégués. Au vu de son rapport, le GAN et les AGF ont été assignés les 2 et 9 mars 2006 devant le Tribunal de Grande Instance d'AUCH.
C'est avec pertinence que les premiers juges rappellent que la décision de désignation de l'expert a interrompu le délai biennal mais que la prescription recommence à courir à compter de cette désignation
Selon l'appelante, la prescription biennale a été de nouveau interrompue par la décision du 21 juin 2004 du Président du Tribunal de Grande Instance d'AUCH prorogeant le délai imparti à l'expert pour déposer son rapport.
Force est cependant de constater que cette mesure, prise à la demande de l'expert, insusceptible d'appel, ne peut être considérée comme une décision juridictionnelle interrompant la prescription biennale.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré les demandes de Madame Y... irrecevables.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les dépens seront à la charge de Madame Y..., partie succombante.
L'équité ne commande pas de faire application de l'article
700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare l'appel recevable,
Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Condamne Madame Huguette Y... aux entiers dépens,
Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du Code de Procédure Civile,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article
700 du Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Bernard BOUTIE, Président de Chambre et par Nicole CUESTA, Greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier, Le Président,