AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société MG Diffusion international, société anonyme, dont le siège est 57, rue Alexandre Goupil, 44700 Orvault,
2 / la société Noelky Shoes, société de droit espagnol, dont le siège est Antonio Maura, 16 Atico B, 03600 Elda, Espagne,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 janvier 1998 par la cour d'appel de Metz (chambre civile), au profit :
1 / de la société Accessoire, société anonyme, dont le siège est boulevard Etienne Blanchon, 69590 Saint-Symphorien-sur-Coise, anciennement dénommée Etablissement Billard, intervenant tant en son nom propre qu'au nom de la société International Design company - IDC, dans les droits de laquelle elle est subrogée,
2 / de M. Claude Nanterme, demeurant 1, place Saint-Nizier, 69001 Lyon, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société Accessoire,
3 / de M. Jean-Paul Barriol, demeurant 8, rue du Jour, 75001 Paris,
4 / de M. Laurent Biordi, exerçant le commerce sous l'enseigne "Avant Garde", demeurant 6, place Claude Arnould, 57100 Thionville,
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article
L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 novembre 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Garnier, conseiller rapporteur, M. Poullain, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Garnier, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat des sociétés MG Diffusion international et Noelky shoes, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la société Accessoire, de M. Nanterme ès qualités et de M. Barriol, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 29 janvier 1998), que M. Barriol, créateur du modèle de chaussure "Bebop", son employeur, la société International Design Company (société IDC), cessionnaire de ce modèle, et la société Etablissements Billard, actuellement dénommée société Accessoire, qui fabrique et diffuse le modèle, ont, après saisie-contrefaçon dans le magasin exploité par M. Biordi, qui offrait à la vente un modèle de chaussure fabriqué par la société Noelky Shoes et commercialisé par la société MG Diffusion International (société MGDI), sous la dénomination "Laura B.", assigné ceux-ci en contrefaçon et atteinte au droit moral de l'auteur ;
Attendu que les sociétés MGDI et Noelky font grief à l'arrêt de les avoir condamnées au paiement de dommages-intérêts pour contrefaçon et d'avoir prononcé à leur encontre diverses interdictions, alors, selon le moyen :
1 / que dès lors que la société Accessoire et M. Barriol agissaient en contrefaçon de leur modèle Bebop non déposé, il leur appartenait, en tant que demandeurs à l'action, de prouver l'antériorité du modèle sur lequel ils fondaient leurs droits, par rapport au modèle qu'ils arguaient de contrefaçon ; que la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles
1315 du Code civil et
L. 511-2 du Code de la propriété intellectuelle ;
2 / que la preuve de l'antériorité d'un modèle peut se faire par tous moyens ; qu'aucune règle n'exige qu'elle se fasse par des documents ayant date certaine ; qu'en exigeant de tels modes de preuve de la part des titulaires du modèle Laura B., la cour d'appel a violé les articles
1315,
1341,
1328 du Code civil,
L. 511-1 et
L. 511-2 du Code de la propriété intellectuelle ;
3 / qu'en ne précisant pas si elle rejette les éléments de preuve fournis au prétexte erroné de leur irrecevabilité ou pour défaut de force probante, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
4 / que faute de rechercher si, en fait, le modèle 2425 de la société Noelky, dant elle reconnaît l'antériorité, serait identique au modèle Bebop revendiqué par la société Accessoire, au vu notamment des patrons de ce modèle fournis devant elle et sur lesquels s'appuyaient les conclusions et le jugement qu'elle infirme, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;
Mais attendu, que c'est à celui qui conteste les nouveautés d'un modèle qu'il appartient de prouver qu'il est antériorisé ; qu'après avoir constaté que le modèle Bebop avait été créé en octobre 1991, examiné les documents produits, dont les patrons établis par M. Amato, styliste auteur de modèle diffusé par la société Noelki, et recherché une antériorité éventuelle du modèle Laura B. sur le modèle Bebop, l'arrêt relève que les sociétés Noelky et MGDI ne produisent aucun document probant établissant l'antériorité de leur modèle sur le modèle Bebop ;
que la cour d'appel, qui a ainsi légalement justifié sa décision, a pu statuer comme elle l'a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés MG Diffusion international et Noelky Shoes aux dépens ;
Vu l'article
700 du nouveau Code de procédure civile, les condamne à payer la somme de 12 000 francs à la société Accessoire, M. Nanterme ès qualités et M. Barriol ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille un.