TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 21 Mai 2015
3ème chambre 1ère section N° RG : 14/14665
DEMANDERESSES Société ADIDAS AG 1 Adi-Dassler-Strasse D-91074 Herzogenaurach (ALLEMAGNE)
Société ADIDAS FRANCE SARL [...] 67700 LANDERSHEIM représentées par Maître Emmanuel LARERE de l'Association GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #T03
DEFENDERESSE Société SUN DA SRL SARL Via dell’'Omo, 161, 00155 ROME (ITALIE) défaillante
COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C. Vice-Présidente Camille LIGNIERES. Vice-Présidente Julien RICHAUD, Juge assistés de Léoncia BELLON, Greffier,
DÉBATS A l'audience du 24 Mars 2015 tenue publiquement devant Marie- Christine C et Julien RICHAUD, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article
786 du Code de Procédure Civile
JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Réputé contradictoire en premier ressort
EXPOSE DU LITIGE La société de droit allemand ADIDAS AG, qui crée et commercialise des articles de sports dans le monde entier, est propriétaire des marques suivantes :
la marque communautaire figurative n° 3517588, déposée le 3 novembre 2003 et renouvelée en dernier lieu le 8 décembre 2013,pour désigner le produit de vêtements relevant de la classe 25 de la classification internationale, et constituée selon la description figurant au dépôt de trois bandes équidistantes, parallèles, de même taille et de même largeur, apposées sur un vêtement de dessus, ces bandes s'étendant sur un tiers ou plus de la longueur latérale de la manche du vêtement :
la marque communautaire Figurative n° 3517661, déposée le 3 novembre 2003 et renouvelée en dernier lieu le 8 décembre 2013. pour désigner le produit de vêtements relevant de la classe 25 de la classification internationale, et constituée selon la description figurant au dépôt de trois bandes parallèles, de même taille et de même largeur, apposées sur un pantalon ou un short, ces bandes faisant un tiers ou plus de la longueur latérale du pantalon ou du short.La SARI. A FRANCK, immatriculée au RCS de SAVERNE sous le n° 085 480 069 le 16 novembre 1989, assure en FRANCE la commercialisation et la distribution des articles de sports du groupe ADIDAS dont elle est une filiale.
La SARL SUN DA SRL, société de droit italien inscrite à la chambre de commerce sous le numéro RM 126 82 22, et dont le siège social est situé à ROME en ITALIE, a pour activité des services divers aux particuliers.
Le 2 septembre 2014, la Brigade de Surveillance Intérieure des Douanes de MENTON notifiait à la SARL ADIDAS FRANCE la retenue en douanes de 920 pantalons de joggings et ensembles de survêtements à deux bandes présumés contrefaire les marques déposées. La SARL ADIDAS FRANCE confirmait le caractère contrefaisant des marchandises retenues et sollicitait des Douanes le 8 septembre 2014 communication des informations prévues à l'article I. 716-8 alinéa 6 du code de la propriété intellectuelle.
Les éléments fournis par les Douanes le 9 septembre 2014 révélaient que l'expéditeur des 920 pantalons de joggings et ensembles de survêtements litigieux était la société « SUNDA SRL, Via dell'Omo. 161. 00155 Roma (Italie) » et que le destinataire de ces marchandises était la société «Marseille. [...]. 13014 Marseille (France)». La société de droit allemand ADIDAS AG et la SARL ADIDAS FRANCE expliquent qu'elles n'ont pu identifier le destinataire des marchandises litigieuses, quinze établissements différents étant domiciliés à l'adresse indiquée ([...]), aucun élément ne leur permettant de déterminer quelle société en était le destinataire, et lasociété « MARSEILLE » domiciliée à MARSEILLE, telle que mentionnée sur les documents douaniers, n'existant pas.
Par ordonnance du 9 septembre 2014, le président du tribunal de grande instance de PARIS autorisait la société de droit allemand ADIDAS AG à procéder à une saisie-contrefaçon. Les opérations de saisie-contrefaçon se sont déroulées 12 septembre 2014.
Par exploit d'huissier du 8 octobre 2014, la société de droit allemand ADIDAS AG et la SARL ADIDAS FRANCE ont assigné la société de droit italien SUN DA SRL devant le tribunal de grande instance de PARIS, la première en contrefaçon de ses marques déposées à titre principal et réparation de l'atteinte à ses marques renommées à titre subsidiaire, la seconde en concurrence déloyale et parasitaire.
Dans leur acte introductif d'instance auquel il sera renvoyé pour un exposé de leurs moyens conformément à l'article
455 du code de procédure civile, la société de droit allemand ADIDAS AG et la SARL ADIDAS FRANCE demandent au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et au visa des articles 9 du Règlement communautaire CE n° 207/2009, L 716-1 et suivants, L 716-9 et suivants, L 716-14 et L 717-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, et
1382 du code civil, de: A titre principal : Dire et juger que la détention et l'importation de pantalons et ensembles de survêtements revêtus de signes imitant illicitement les marques communautaires n° 3517661 et n° 3517588 de la société Adidas AG, par Sun Da, constituent des actes de contrefaçon au sens des dispositions légales précitées ; En conséquence, Condamner Sun Da à payer à la société Adidas AG la somme forfaitaire de quatre-vingt mille euros (80.000 €) en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de ses marques communautaires n° 3517661 et n° 3517588 ; Condamner Sun Da à payer à la société Adidas AG la somme de vingt mille euros (20.000 €) en réparation de son préjudice moral résultant des actes de contrefaçon ; Subsidiairement : Dire et juger qu'en utilisant des signes portant atteinte aux marques renommées communautaires n° 3517661 et n° 3517588 de la société Adidas AG, Sun Da a exploité, de façon injustifiée, les marques précitées et leur ont porté préjudice, de sorte qu'elle a engagé sa responsabilité au regard des articles
L. 717-1 du Code de la propriété intellectuelle et de l'article 9 du Règlement communautaire n° 207/2009 tel qu'ils doivent être appliqués conformément à la jurisprudence de la CJUE; En conséquence, Condamner Sun Da à payer à la société Adidas AG la somme de quatre-vingt mille euros (80.000 €) en réparation du préjudice subi dufait de l'atteinte à ses marques communautaires n° 3517661 et n° 3517588; En tout état de cause : Dire et juger qu'en important et détenant des pantalons et ensembles de survêtements contrefaisant les marques d'Adidas AG, Sun Da a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Adidas France ; Condamner Sun Da à payer à la société Adidas France la somme de cinquante mille euros (50.000 €) en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire ; Faire interdiction à Sun Da d'apposer ou de faire apposer sur des vêtements des signes imitant les marques communautaires n° 3517661 et n° 3517588, d'importer, de détenir, de promouvoir, d'offrir à la vente et de vendre des produits portant l'imitation illicite de ces marques et ce, sous astreinte définitive de cent cinquante euros (150 €) par infraction constatée à compter de la signification de la décision à intervenir ; Ordonner le rappel, aux frais de Sun Da et sous astreinte de cinq cents euros (500 €) par jour de retard à compter du dixième jour suivant la signification du jugement à intervenir, de l'ensemble des produits litigieux, publicités et autres matériels de vente imitant les marques communautaires n° 3517661 et n° 3517588 de la société Adidas AG et, en la possession de Sun Da ou de tout tiers, ainsi que leur remise à la société Adidas AG ; Ordonner la destruction, aux frais de Sun Da, sous contrôle d'un huissier de justice, de l'ensemble des produits contrefaisants et, le cas échéant, des publicités et autres matériels de vente imitant les marques communautaires n° 3517661 et n° 3517588 de la société Adidas AG; Dire et juger que le Tribunal de grande instance de Paris sera compétent pour connaître de la liquidation des astreintes qu'il aura ordonnées ; Ordonner la publication, aux frais de Sun Da, du jugement à intervenu-dans trois journaux ou magazines au choix de Adidas AG, dans la limite de cinq mille euros hors taxe (5.000 € H.T.) par insertion ; Condamner Sun Da à verser aux sociétés Adidas AG et Adidas France la somme de quinze mille euros (15.000 €) chacune au titre de l'article
700 du Code de procédure civile ; Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans constitution de garantie ; Condamner Sun Da aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Emmanuel Larere, avocat, conformément à l'article
699 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture était rendue le 10 mars 2015. La société de droit italien SUN DA SRL n'ayant pas constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera réputé contradictoire conformément à l'article
472 alinéa
3 du code de procédure civile.
EXPOSE DES MOTIFSEn application de l'article
472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. 1°) Sur la contrefaçon des marques communautaires de la société de droit allemand ADIDAS AG
a) Sur les actes de contrefaçon
Conformément à l'article 9 «droit conféré par la marque communautaire » du Règlement CE n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif opposable aux tiers à compter de la publication de l'enregistrement de la marque. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires, d'un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque.
En vertu des dispositions combinées des articles 14 «application complémentaire du droit national en matière de contrefaçon», 101 « droit applicable » et 102 « sanctions » de ce règlement, si les effets de la marque communautaire sont exclusivement déterminés par les dispositions du règlement, les atteintes à une marque communautaire et leurs sanctions sont régies par le droit national concernant les atteintes à une marque nationale.
A cet égard, conformément à l'article
L 717-1 du code de propriété intellectuelle, constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10,11 et 13 du règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire.
En application du droit interne interprété à la lumière de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres conformément au principe posé par l'arrêt Von Colson et Kamann c. Land Nordhein-Westfalen du 10 avril 1984 ou en application du règlement communautaire visé, la méthode d'appréciation du risque de confusion est identique que la marque soit française ou communautaire.
Le risque de confusion doit faire l'objet d'une appréciation abstraite par référence au dépôt d'une part en considération d'un public pertinent correspondant au consommateur des produits et services concernés normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et d'autre part par comparaison entre le signe litigieux utilisé et la marque protégée par référence à son enregistrement indépendamment de ses conditions d'exploitation mais également par comparaison desservices et produits visés dans l'enregistrement et des produits et services commercialisés sous le signe litigieux. Le risque de confusion est en outre analysé globalement : tous les facteurs pertinents, dont la notoriété de la marque et l'importance de sa distinctivité, doivent être pris en considération, l'appréciation globale de la similitude de la marque et du signe litigieux devant être fondée sur l'impression d'ensemble qu'ils produisent au regard de leurs éléments distinctifs et dominants.
Il ressort des coupures de presse produites que les trois bandes caractéristiques des marques françaises et communautaires déposées sont utilisées sur le côté des manches et des pantalons des vêtements de sport depuis le début des années 60. Elles sont visibles sur l'ensemble des photographies de vedettes et de sportifs connus qui portent les vêtements de la marque qui, depuis la fin des années 1990, est de celle que les jeunes français préfèrent, un sondage réalisé par LH2 en 2008 la plaçant en outre en tête des marques favorites des Français toutes générations confondues.
Ces pièces suffisent à établir tant la notoriété des marques françaises et communautaires sur le territoire français, siège de l'appréciation de l'existence des actes de contrefaçon allégués et de détermination du public pertinent, que leur forte distinctivité qui découle des proportions, du positionnement et de la visibilité de ces trois bandes équidistantes et parallèles apposées verticalement sur le côté du vêtement et dont la couleur contraste avec celle de ce dernier.
Aux termes du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 12 septembre 2014 et des photographies produites, complétées par les exemplaires soumis au tribunal, la masse dite contrefaisante se compose de 820 pantalons de jogging et 100 ensembles de survêtements (vestes et pantalons), soit au total 920 produits, décrits comme suit : - 100 pantalons de joggings molletonnés comportant deux bandes parallèles, de même longueur, de même largeur apposées latéralement le long de la jambe, ces pantalons se déclinant en plusieurs coloris: Pantalons gris clair avec des bandes bleu marine ; Pantalons noir avec des bandes blanches ; Pantalons gris anthracite avec des bandes bleu marine : Pantalon bleu marine avec des bandes blanches ; - 160 pantalons de joggings satinés comportant deux bandes parallèles, de même longueur, de même largeur apposées latéralement le long de la jambe du pantalon, ces pantalons se déclinant en plusieurs coloris : Pantalons bleu marine avec des bandes blanches : Pantalons gris anthracite avec des bandes blanches ; Pantalons noir avec des bandes blanches ; - 50 ensembles de survêtements molletonnés (vestes et pantalons) comportant deux bandes parallèles, de même longueur, demême largeur apposées latéralement le long de la jambe des pantalons et le long de la manche des vestes, ces survêtements se déclinant en plusieurs coloris : Survêtements noirs avec des bandes blanches ; Survêtements bleu marine avec des bandes blanches ; Survêtements gris clair avec des bandes blanches ; Survêtements gris anthracite avec des bandes blanches :
Ainsi, les pantalons de joggings et ensembles de survêtements (vestes et pantalons) décrits sont des produits identiques aux produits visés aux dépôts des marques communautaires figuratives n° 3517661 et n° 3517588. En outre, les deux bandes, qui comportent les mêmes caractéristiques que les trois bandes protégées et contrastent systématiquement avec la couleur du vêtement sur lequel elles sont apposées latéralement, le long de la jambe du pantalon ou le long de la manche de la veste, sont similaires aux signes déposés, la circonstance qu'une bande soit manquante ne modifiant pas l'impression visuelle d'ensemble qui se dégage de leur examen.
L'identité des produits et la grande similarité des signes dont la notoriété et la grande distinctivité sont établies génèrent un risque de confusion dans l'esprit du consommateur d'attention moyenne de vêtements de sports.
Il ressort en outre du courrier du 9 septembre 2014, adressé par la Brigade de Surveillance Intérieure des Douanes de MENTON à la société ADIDAS FRANCE, portant communication des informations visées à l'article
L. 716-8 du code de la propriété intellectuelle, que l'expéditeur des marchandises retenues, dont le destinataire n'a pu être précisément identifié par les demanderesses, est la société de droit italien SUN DA SRL.
La société « MARSEILLE » domiciliée à MARSEILLE, telle que mentionnée sur les documents douaniers, n'existant pas, la société de droit italien SUN DA SRL est responsable de l'entrée des marchandises litigieuses sur le territoire français et en est donc l'importateur. Elle en demeure par ailleurs le détenteur tant que celles-ci n'ont pas été livrées à leur destinataire.
En conséquence, en important et en détenant 820 pantalons et 100 ensembles de survêtements sur lesquels sont apposés les signes litigieux, la société de droit italien SUN DA SRL a commis des actes de contrefaçon par imitation des marques communautaires figuratives n° 3517588 et n° 3517661 dont est titulaire la société de droit allemand ADIDAS AG.
b) Sur les mesures réparatrices
Les dispositions des articles
L 716-8 à
L 716-15 du code de propriété intellectuelle sont applicables aux atteintes portées au droit dupropriétaire d'une marque communautaire en vertu de l'article L 717-2 du même code.
En application de l'article
L716-14 du code de propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 1 0 Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ; 2° Le préjudice moral causé à cette dernière ; 3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon. Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.
Et, en vertu de l'article
L 716-15 du code de propriété intellectuelle, en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants et les matériaux et instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée. La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu'elle désigne, selon les modalités qu'elle précise. Les mesures mentionnées aux deux premiers alinéas sont ordonnées aux frais du contrefacteur.
Un l'espèce, la société de droit allemand ADIDAS AG a opté pour une indemnisation forfaitaire en vertu de l'alinéa 2 de l'article
L.716-14 du code de la propriété intellectuelle. Le calcul du gain manqué et des bénéfices réalisés par le contrefacteur prévus à l'alinéa 1er ne sera donc pas abordé.
Le signe contrefait est protégé par deux titres de propriété intellectuelle auxquels il a été porté atteinte. Pour autant, le fait générateur de la contrefaçon est unique et les préjudices invoqués par la société de droit allemand ADIDAS AG sont identiques. Dès lors, le cumul des fondements permettant d'asseoir la protection des droits sur un même signe n'emportant pas multiplication des préjudices, l'indemnisation ne portera que sur un préjudice unique.
Ce dernier réside dans l'atteinte aux marques déposées, toute violation des droits privatifs sur le signe commandant réparation, et à leur valeur distinctive par leur banalisation qui cause une baisse deleur valeur patrimoniale. L'importation et la détention des 820 pantalons et 100 ensembles de survêtements litigieux en vue d'une revente en France constituent certes des actes de contrefaçon, toutefois aucun préjudice commercial n'en est résulté pour la société de droit allemand ADIDAS AG, du fait de leur retenue par les douanes.
En conséquence, en l'absence de commercialisation des produits litigieux, l'atteinte portée aux marques communautaires figuratives n° 3517588 et n° 3517661 sera indemnisée par l'allocation de la somme de 5.000 euros par marque.
La société de droit allemand ADIDAS AG, qui se contente d'indiquer qu'elle « sollicite également une indemnité en réparation de son préjudice moral », n'explicite pas quel serait le préjudice moral dont elle souffrirait du fait des actes de contrefaçon commis par la société SUN DA SRL, et sera en conséquence déboutée de sa demande à ce titre.
Il sera fait droit aux demandes d'interdiction et de destruction sans toutefois que le prononcé d'une astreinte n'apparaisse nécessaire en application de l'article
L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, les marchandises contrefaisantes n'étant pas matériellement détenues par la société de droit italien SUN DA SRL. En revanche, les demandes de rappel et de remise seront rejetées, les vêtements litigieux étant entre les mains des douanes et aucune preuve de la commercialisation d'autres marchandises contrefaisantes n'étant rapportée. Enfin, le préjudice étant intégralement réparé, la mesure de publication ne sera pas ordonnée.
2°) Sur la concurrence déloyale
Connexe à l'action relative aux marques litigieuses, la demande au titre de la concurrence déloyale est recevable.
En vertu des dispositions des articles
1382 et
1383 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pus l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.
L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits intégrantnotamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.
La SARL ADIDAS FRANCE, distributeur des produits ADIDAS en France, et la société de droit italien SUN DA SRL sont en situation de concurrence pour être des acteurs intervenant sur le même marché français de vente de vêtements de sports.
Toutefois, les produits litigieux n'ayant pas été commercialisés sur le territoire français du fait de la retenue opérée par les douanes, aucun acte de concurrence déloyale ne peut être reproché à la société de droit italien SUN DA SRL.
En conséquence, la SARL ADIDAS FRANCE sera déboutée de sa demande au titre de la concurrence déloyale.
3°) Sur les demandes accessoires
Compatible avec la nature et la solution du litige, l'exécution provisoire de la présente décision sera ordonnée en application de l'article
515 du code de procédure civile mais ne portera pas sur la mesure de destruction.
Succombant au litige, la société de droit italien SUN DA SRL supportera les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article
699 du code de procédure civile et sera condamnée à payer à la société de droit allemand ADIDAS AG la somme de 5 000 euros en application de l'article
700 du code de procédure civile. La SARL ADIDAS FRANCE sera déboutée de sa demande au titre de l'article
700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort et mis à la disposition par le greffe le jour du délibéré,
Condamne la société de droit italien SUN DA SRL à payer à la société de droit allemand ADIDAS AG la somme de CINQ MILLE EUROS (5 000 €) en réparation du préjudice causé par l'atteinte à ses droits sur la marque communautaire figurative n° 3517588 :
Condamne la société de droit italien SIN DA SRL à payer à la société de droit allemand ADIDAS AG la somme de CINQ MILLE EUROS (5 000 €) en réparation du préjudice causé par l'atteinte à ses droits sur la marque communautaire figurative n° 3517661 ;
Déboute la société de droit allemand ADIDAS AG de sa demande au titre du préjudice moral résultant des actes de contrefaçon :Interdit à la société de droit italien SUN DA SRL d'apposer ou de faire apposer sur des vêtements des signes imitant les marques communautaires figuratives n° 3517588 et n° 3517661, d'importer, de détenir, de promouvoir, d'offrir à la vente et de vendre les produits litigieux ainsi que toutes autres vêtements revêtus de signes imitant cette marque ;
Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte à ce titre ;
Ordonne la destruction une fois le présent jugement devenu définitif, aux frais de la société de droit italien SUN DA SRL, sous contrôle d'un huissier de justice, de l'ensemble des 820 pantalons de jogging et 100 ensembles de survêtements (vestes et pantalons) objets de la retenue en douanes ;
Rejette les demandes de rappel et de remise des marchandises contrefaisantes ainsi que de publication de la décision :
Déboute la SARL ADIDAS FRANCE de sa demande au titre de la concurrence déloyale et parasitaire;
Condamne la société de droit italien SUN DA SRL à payer à la société de droit allemand ADIDAS AG la somme de CINQ MILLE EUROS (5 000 €) en application de l'article
700 du code de procédure civile:
Déboute la SARL ADIDAS FRANCE de sa demande au titre de l'article
700 du code de procédure civile;
Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision en toutes ses dispositions exceptées celles portant sur la destruction des marchandises contrefaisantes ;
Condamne la société de droit italien SUN DA SRL à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article
699 du code de procédure civile par Maître Emmanuel LARERE, avocat.