Vu la procédure suivante
:
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 janvier 2022 et 23 mars 2022, M. A B demande au tribunal d'annuler la décision du 1er décembre 2021 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé à son encontre et en urgence une interdiction temporaire d'exercer les fonctions mentionnées à l'article
L. 223-1 du code du sport pour une durée de six mois et lui a retiré sa carte professionnelle d'éducateur sportif de façon temporaire.
Il soutient que :
- la décision porte atteinte à la présomption d'innocence garantie par l'article 9 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le III de l'article préliminaire du code de procédure pénale dès lors qu'aucune condamnation n'a été prononcée à son encontre ;
- elle méconnait le champs d'application des articles
706-47 et
706-53-1 du code de procédure pénale, visés dans la décision et qui ne lui sont pas applicables ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation, dès lors qu'il n'entretient aucun contact avec des mineurs dans le cadre de ses fonctions d'arbitre et que la sanction est disproportionnée, l'ordonnance qui le place sous contrôle judiciaire ne lui faisant pas interdiction d'exercer ces fonctions d'arbitre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2022, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par une ordonnance du 17 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code du sport ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendues au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Monteagle, rapporteure,
- et les conclusions de M. Lebdiri, rapporteur public.
1. M. B exerce les fonctions d'arbitre auprès de la Fédération Française de Basket-Ball (FFBB). Le 18 novembre 2021, la FFBB informait le service départemental à la jeunesse, à l'engagement et aux sports des Hauts-de-Seine de la mise en examen et du placement sous contrôle judiciaire de M. B pour des faits d'atteintes sexuelles sur mineur survenus dans le cadre de son travail en qualité d'assistant d'éducation à l'école de danse de l'Opéra de Paris. Par un arrêté en date du 1er décembre 2021, le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé à l'encontre de M. B une interdiction d'exercer toutes les fonctions mentionnées à l'article
L. 223-1 du code du sport pendant une durée de six mois. Par la présente requête, ce dernier demande l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu
, la décision contestée ne constituant pas une sanction ayant le caractère d'une punition, mais une mesure de police administrative tendant à assurer le maintien de l'ordre public et de la sécurité, ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre d'une telle mesure les principes constitutionnels et conventionnels régissant la matière répressive dont le principe de la présomption d'innocence garanti par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le paragraphe 2 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen du requérant ne peut donc qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, le requérant soutient que les visas de la décision du préfet sont erronés en ce qu'ils mentionnent les articles L. 706-47 et L. 706-53-1 du code de procédure pénale qui ne lui sont pas applicables. Toutefois, une simple erreur dans les visas d'une décision administrative n'est pas de nature à en affecter la légalité. Au demeurant, la décision contestée vise les dispositions du code du sport applicables ainsi que, par ailleurs les considérations de fait qui en constituent le fondement et, précise les éléments d'appréciation que le préfet a entendu retenir pour prononcer une interdiction d'exercer toutes les fonctions mentionnées à l'article
L. 223-1 du code du sport pendant une durée de six mois. Ce moyen doit, dès lors et en tout état de cause, être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article
L. 212-13 du code du sport : " L'autorité administrative peut, par arrêté motivé, prononcer à l'encontre de toute personne dont le maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants l'interdiction d'exercer, à titre temporaire ou définitif, tout ou partie des fonctions mentionnées aux articles L. 212-1, L. 223-1 ou L. 322-7 ou d'intervenir auprès de mineurs au sein des établissements d'activités physiques et sportives mentionnés à l'article L. 322-1. / L'autorité administrative peut, dans les mêmes formes, enjoindre à toute personne exerçant en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 212-1 et des articles L. 212-2 et L. 322-7 de cesser son activité dans un délai déterminé. / Cet arrêté est pris après avis d'une commission comprenant des représentants de l'Etat, du mouvement sportif et des différentes catégories de personnes intéressées. Toutefois, en cas d'urgence, l'autorité administrative peut, sans consultation de la commission, prononcer une interdiction temporaire d'exercice limitée à six mois. Dans le cas où l'intéressé fait l'objet de poursuites pénales, la mesure d'interdiction temporaire d'exercer auprès de mineurs s'applique jusqu'à l'intervention d'une décision définitive rendue par la juridiction compétente. () ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour prendre sa décision d'interdiction d'exercice à l'encontre de M. B, le préfet, s'est fondé sur le signalement que lui a adressé la FFBB deux semaines auparavant et a pris connaissance de l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire pris à l'encontre de l'intéressé le 23 mars 2021. Cette dernière fait état de la mise en examen de M. B pour des faits d'atteinte et de corruption sexuelles sur plusieurs élèves mineurs, révélant en outre un abus de l'autorité qui lui était conférée sur ces derniers par ses fonctions d'assistant d'éducation. Au regard de la particulière gravité des faits qui lui sont reprochées, de la circonstance que M. B était encore placé sous contrôle judiciaire à la date de la décision, ainsi que du retentissement certain que sa mise en examen a suscité, la situation du requérant est bien de nature à justifier légalement la décision prise. La seule circonstance, alléguée par M. B, que son activité d'arbitre pour la FFBB ne le met en contact qu'avec des personnes majeures et n'entre donc pas en contradiction avec son ordonnance de placement sous contrôle judiciaire prohibant tout contact avec des personnes mineures, ne suffit pas établir que son maintien en activité ne porterait pas atteinte à la santé et à la sécurité des basketteurs, y compris majeurs, qu'il serait conduit à arbitrer dans ces conditions. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation ne pourra qu'être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé à son encontre et en urgence une interdiction temporaire d'exercer les fonctions mentionnées à l'article
L. 223-1 du code du sport pour une durée de six mois et lui a retiré sa carte professionnelle d'éducateur sportif de façon temporaire.
Par ces motifs
, le tribunal décide :
Article 1er : La requête de M. B est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A B et à la ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques.
Copie sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 29 juin 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Van Muylder, présidente,
Mme Monteagle et M. C, premiers conseillers,
Assistés de Mme Nimax, greffière.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.
La rapporteure,
signé
M. Monteagle La présidente,
signé
C. Van Muylder La rapporteure,
M. Monteagle La présidente,
C. Van Muylder
La greffière,
signé
S. Nimax
La République mande et ordonne à la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.