Vu la procédure suivante
:
Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2024, M. A C, représenté par Me Balima, demande au juge des référés :
1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 24 septembre 2024 par lequel le préfet de la Côte-d'Or lui a interdit, pour une durée de six mois, d'exercer les fonctions mentionnées aux articles
L. 212-1,
L. 223-1,
L. 322-3 et
L. 322-7 du code du sport, et d'intervenir auprès de mineurs au sein des établissements d'activités physiques et sportives mentionnés à l'article
L. 322-1 du code du sport, et mentionne que, dans le cas où l'intéressé ferait l'objet de poursuites pénales, la mesure d'interdiction temporaire d'exercer auprès des mineurs s'appliquera jusqu'à l'intervention d'une décision définitive rendue par la juridiction compétente ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles
L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne l'urgence :
- elle est établie, dès lors que son absence due à la décision préfectorale priverait les pratiquants des associations où il enseigne de repères et qu'il serait privé de revenu et dans l'incapacité de faire face à ses charges ;
En ce qui concerne le doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées :
- les décisions sont entachées d'une incompétence de l'auteur de l'acte ;
- elles sont entachées d'une insuffisance de motivation à la fois en fait et en droit dans la mesure où le préfet de la Côte-d'Or n'évoque que très peu la situation personnelle du requérant ; qu'il ne précise pas qui sont les pratiquants qu'il entend protéger ; qu'il cite l'article
L. 212-13 du code du sport sans établir en quoi le maintien en activité du requérant présenterait un danger pour la santé ou la sécurité des participants ; que la situation personnelle du requérant n'a pas été prise en compte et que la sanction est disproportionnée ; que le préfet ne précise pas suffisamment les faits et qu'il n'établit pas en quoi le requérant représenterait un danger ; que le préfet se borne à utiliser une formule stéréotypée ;
- elles sont entachées d'une erreur de droit dans la mesure où elles méconnaissent la présomption d'innocence, les droits de la défense, les dispositions de l'article
L. 212-13 du code du sport en ne caractérisant pas le danger à l'égard des personnes majeures et mineures, les dispositions de l'article
L. 322-3 du code du sport en ne précisant pas l'existence d'un réel danger ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et disproportionnées dans la mesure où les faits n'ont pas été commis dans le cadre de l'exercice des fonctions d'animateur sportif ; qu'il n'est pas besoin de suspension pour une enquête administrative ; que la décision visant à protéger des mineures se fondent sur des faits concernant une personne majeure ; que la décision le prive de subsides ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les faits reprochés n'ont pas été commis dans l'exercice de ses fonctions, et d'une inexactitude matérielle des faits ;
- elles sont entachées d'une absence de saisine de la commission en l'absence d'urgence à prononcer l'interdiction d'exercer ;
- la décision d'interdiction d'intervenir auprès des mineurs est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que l'administration n'établit pas que le requérant présenterait un danger pour la santé ou la sécurité physique ou morale des seuls pratiquants ;
- la décision d'interdire l'exercice des fonctions pour une durée de six mois à compter de la notification de l'arrêté est entachée d'une erreur de droit dans la mesure où les textes autorisaient à prononcer une interdiction et non une suspension, que l'administration n'a pas limité l'interdiction d'exercer aux seuls mineurs et que cette interdiction d'exercer est dépourvue de toute limite dans le temps.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2024, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée le 2 décembre 2024 au rectorat de l'académie de Dijon, qui n'a pas produit d'observations.
Vu :
- la requête enregistrée le 1er décembre 2024 sous le numéro 2404029 par laquelle M. C demande l'annulation de la décision attaquée ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du sport ;
- le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. Nicolet en qualité de juge des référés, en vertu des dispositions de l'article
L. 511-2 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique, tenue en présence de la greffière :
- le rapport de M. Nicolet, juge des référés,
- les observations de Me Balima, représentant M. C, a qui repris les conclusions, faits et moyens exposés dans sa requête.
- et les observations de M. B représentant le préfet de la Côte-d'Or, qui a produit un mandat au début de l'audience qui a été communiqué à Me Balima. Il a repris également les conclusions, faits et moyens exposés dans le mémoire en défense.
Considérant ce qui suit
:
1. M. A C, né en 1999, exerce des fonctions d'éducateur sportif rémunéré au sein des associations Foyer rural à Savigny-le-Sec, ASC Varois et Chaignot et AS Quetigny Judo. Le service départemental à la jeunesse, à l'engagement et aux sports de la direction académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Côte-d'Or a été destinataire le 24 septembre 2024 d'un signalement le concernant relatif à un dépôt de plainte pour viol. Le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Dijon a confirmé le même jour la mise en examen de l'intéressé pour des faits de viol en date du 11 août 2024, de son placement sous contrôle judiciaire le 14 août 2024, l'interdisant d'entrer en contact avec la victime et de paraître en certains lieux, ainsi que d'une obligation de soins. Par un arrêté, en date du 24 septembre 2024, le préfet de la Côte-d'Or a interdit à M. C, pour une durée de six mois, d'exercer toutes les fonctions mentionnées aux articles
L. 212-1,
L. 223-1,
L. 322-3 et
L. 322-7 du code du sport, d'intervenir auprès de mineurs au sein des établissements d'activités physiques et sportives mentionnés à l'article
L. 322-1 du code du sport et indiqué que, dans le cas où l'intéressé ferait l'objet de poursuites pénales, la mesure d'interdiction temporaire d'exercer auprès des mineurs s'appliquera jusqu'à l'intervention d'une décision définitive rendue par la juridiction compétente. Par sa requête, M. C demande au juge des référés de suspendre l'exécution de l'arrêté du 24 septembre 2024.
Sur les conclusions à fin de suspension :
En ce qui concerne l'urgence :
2. Aux termes de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ". Et le premier alinéa de l'article
R. 522-1 du même code dispose que : " La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit () justifier de l'urgence de l'affaire ".
3. Il résulte des dispositions précitées des articles
L. 521-1 et
R. 522-1 du code de justice administrative que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte-tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et globalement, le cas échéant au terme d'un bilan des intérêts privés et publics en présence et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire à la date à laquelle le juge des référés se prononce.
4. M. C fait valoir que l'urgence à suspendre l'arrêté attaqué est établie, dès lors que son absence, résultant de l'exécution de la décision en litige, priverait de repères les pratiquants des associations dans lesquelles il enseigne, et qu'il serait privé de revenus et, par conséquent, dans l'incapacité de faire face à ses charges. Toutefois, eu égard à l'extrême gravité des faits de viol en date du 11 août 2024 pour lesquels le requérant a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire le 14 août 2024 avec interdiction d'entrer en contact avec la victime, interdiction de paraître dans certains lieux définis et une obligation de soins, l'urgence à exécuter la décision contestée, au regard de l'intérêt public qui s'attache à garantir la sécurité des pratiquants suivis par l'intéressé, prime sur l'urgence à en décider la suspension. Par suite, la condition d'urgence, qui s'apprécie objectivement et globalement, requise par les dispositions précitées de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative, n'est en l'espèce pas remplie.
5. Il résulte de ce qui précède que l'une des conditions cumulatives posées par l'article
L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner si les moyens soulevés sont de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, les conclusions aux fins de suspension de l'exécution de cette décision doivent être rejetées.
Sur les conclusions au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le requérant demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête présentée par M. A C est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C et à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or et au recteur de l'académie de Dijon.
Fait à Dijon, le 19 décembre 2024.
Le juge des référés,
P. Nicolet
La République mande et ordonne à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,