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Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 mars 1993, 92-82.845

Mots clés
(sur le 1er moyen) juridictions correctionnelles • droits de la défense • dépôt de pièces • conditions • possibilité de prendre connaissance • préparation de la défense suffisante • (sur le 2e moyen) urbanisme • permis de construire • construction sans permis ou non conforme • bâtiment construit différent de celui prévu au permis de construire • continuation des travaux malgré un arrêté ministériel • exploitation illicite d'un magasin de détail sans autorisation de la commission départementale • (sur le 5e moyen) urbanisme • mise en conformité • astreinte • montant maximum • juridictions correctionnelles • urbanisme

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
17 mars 1993
Cour d'appel de Fort-de-France
9 avril 1992

Synthèse

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Résumé

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Partie demanderesse
Personne physique anonymisée
Partie défenderesse
Société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN

Suggestions de l'IA

Texte intégral

Sur le rapport de M. le conseiller Jean SIMON, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;

Statuant sur le pourvoi formé par

: - X... Georges, contre l'arrêt de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE, chambre correctionnelle, en date du 9 avril 1992, qui l'a condamné, pour construction sans permis et poursuite des travaux au mépris d'un arrêté en ordonnant l'interruption, à 100 000 francs d'amende et, pour contraventions d'exploitation illicite d'un commerce de détail sans autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial, à 240 amendes de 500 francs chacune, a ordonné la mise en conformité des lieux sous astreinte ainsi que la publication de la décision ; Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen

de cassation, pris de la violation des articles 400, 417, 427, 520, 592 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs et manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ; "en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité du jugement en date du 20 novembre 1991 du tribunal correctionnel de Fort-de-France puis d'évoquer au fond ; "alors que l'arrêt attaqué ne pouvait ainsi refuser de prononcer la nullité du jugement puis statuer en adoptant les motifs des premiers juges ainsi que la plus grande partie du dispositif de leur décision ; qu'en effet, il résulte des propres termes de l'arrêt attaqué que les premiers juges ont expressément fait état, à l'appui de leur décision, de documents versés au dossier de la procédure une semaine avant l'audience et qui n'avaient pas été communiqués à la défense, laquelle avait pourtant précédemment demandé une copie intégrale du dossier ; qu'en l'état de cette méconnaissance flagrante du principe du contradictoire, le prévenu n'ayant pu disposer du temps et des facilités nécessaires pour examiner les pièces de la procédure et préparer utilement sa défense, les juges d'appel devaient annuler cette décision, évoquer au fond et statuer par motifs propres" ; Attendu que la juridiction du second degré était saisie de conclusions du prévenu soutenant que le jugement devait être annulé au motif que les juges s'étaient fondés sur deux pièces, versées au dossier le 10 septembre 1991, dont son conseil n'avait pu avoir connaissance ; Attendu que, pour écarter cette demande, les juges retiennent que le conseil du prévenu avait eu la possibilité de prendre connaissance des pièces déposées le 10 septembre 1991, l'affaire, appelée à l'audience du 11 septembre, ayant été renvoyée, à sa demande, au 18 septembre 1991 et qu'aucune disposition n'interdit de verser aux débats des pièces parvenues après délivrance de la copie du dossier ; Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que la preuve n'est pas apportée que le prévenu, informé de manière détaillée par la citation de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui, n'ait pu disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ;

D'où il suit

que le moyen doit être écarté ; ( Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 480-4, L. 421-1, L. 480-5 et 7 du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'avoir exécuté des travaux de construction immobilière sans avoir obtenu au préalable de permis de construire ; "aux motifs qu'il résulte des constatations précises et circonstanciées du procès-verbal de contravention du 12 octobre 1990 de la direction départementale de l'Equipement que le gros oeuvre de la construction entreprise par X... se différencie du projet autorisé pour la modification des façades, son volume et son agencement intérieur, développant une surface hors oeuvre nette pour toute la construction, variant entre 5 000 et 5 500 m2 ; que, de plus, domine encore la détermination affichée par l'intéressé d'affecter son établissement à usage de supermarché ; "alors, d'une part, que les énonciations des procès-verbaux dressés par les agents de la direction département de l'Equipement ne font foi que jusqu'à preuve du contraire ; qu'en refusant de s'expliquer et de prendre en considération les éléments versés aux débats par X..., et notamment les déclarations du maire de la commune sur le territoire de laquelle le bâtiment litigieux a été construit, desquels il ressortait que le corps du bâtiment respectait rigoureusement les prescriptions du permis de construire délivré le 30 janvier 1989, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ; "alors, d'autre part, qu'il résulte des énonciations du jugement entrepris, auquel la cour d'appel s'est expressément référée pour exposer les circonstances de fait de l'espèce, que X... avait sollicité et obtenu en janvier 1989 l'autorisation de construire un entrepôt d'une surface hors oeuvre nette de 5 121 m2 ; qu'en fondant sa décision de condamnation sur le fait que la surface hors oeuvre nette de la construction édifiée par le prévenu varierait entre 5 000 et 5 500 m2, la cour d'appel n'a pas mis la chambre criminelle en mesure d'exercer son contrôle sur l'élément matériel constitutif de l'infraction ; "alors, enfin, que l'article L. 480-4 du Code de l'urbanisme vise à réprimer toute construction effectuée sans permis de construire ou en méconnaissance des prescriptions d'un permis sans tenir compte de la destination réservée au bâtiment ; qu'ainsi, en se fondant sur le fait que X... voulait affecter l'entrepôt à un usage de supermarché, circonstance étrangère à la question de savoir si le bâtiment édifié l'avait été conformément aux prescriptions du permis de construire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ; Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'exécution de travaux de construction immobilière sans permis, la juridiction du second degré retient que Georges X..., qui avait obtenu un permis de construire pour édifier un entrepôt de stockage de matériels et de produits agricoles, a construit un bâtiment destiné à l'exploitation d'un supermarché et que la forme, l'aspect architectural et le volume de ce bâtiment sont différents de ceux autorisés ; Attendu qu'en cet état, et abstraction faite du motif hypothétique mais surabondant critiqué par la deuxième branche du moyen, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli

Sur le troisième moyen

de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1 et L. 480-3 du Code de l'urbanisme, 388 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, ensemble, excès de pouvoir ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'avoir, fin 1990 et courant ler semestre 1991, poursuivi des travaux de construction immobilière d'un supermarché nonobstant un arrêté municipal d'interruption des travaux en date du 19 octobre 1990 ; "aux motifs que si l'arrêté d'interruption des travaux ne lui a pas été notifié, X... ne peut sérieusement contester en avoir eu connaissance, en l'état des déclarations visées dans sa lettre à la direction départementale de l'Equipement du 31 octobre 1990 ; que le prévenu ne peut davantage se prévaloir du fait que dans son procès-verbal du 12 octobre 1990, l'agent verbalisateur constatait que le bâtiment proprement dit était pratiquement achevé, ni de l'attestation de l'architecte indiquant que les travaux avaient été réceptionnés le 22 octobre 1990 ; qu'en effet, X... ne conteste pas qu'il a poursuivi les travaux incriminés, lesquels doivent s'entendre de tous les travaux destinés à rendre l'ouvrage propre à l'usage illicite auquel le destinait le prévenu ; "alors, d'une part, que les juridictions correctionnelles ne peuvent statuer sur des faits autres que ceux qui leur sont déférés et ne doivent rien changer ni ajouter aux faits de la prévention qui doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine ; qu'en l'espèce, il était reproché à X... d'avoir "poursuivi des travaux de construction immobilière" nonobstant un arrêté ordonnant la cessation de ces travaux ; qu'en ne contestant pas qu'à la date de l'arrêté, les travaux du bâtiment proprement dit étaient achevés et en ne retenant à l'encontre du prévenu que le fait d'avoir effectué des travaux d'agencement intérieur, lesquels étaient de nature mobilière, la cour d'appel, qui n'a pas demandé à X... s'il acceptait d'être jugé pour ces faits non visés par la saisine, a outrepassé ses pouvoirs et violé l'article 388 du Code de procédure pénale ; "alors, d'autre part, et en tout état de cause, que la cour d'appel a dénaturé les termes de l'arrêté municipal du 19 octobre 1990 qui ne concernait que les travaux immobiliers de construction de l'entrepôt, et non pas les opérations d'agencement mobilier lesquelles ne sont pas concernées par l'arrêté litigieux ; qu'ainsi, la décision de condamnation n'est pas légalement justifiée" ;

Attendu que pour déclarer le

prévenu coupable d'avoir poursuivi les travaux au mépris de l'arrêté du maire du 19 octobre 1990 en ordonnant l'interruption, les juges d'appel retiennent que, malgré cet arrêté dont il avait parfaitement connaissance, Georges X... a poursuivi les travaux nécessaires pour rendre l'ouvrage propre à l'usage auquel il le destinait et qu'il les a en outre continués postérieurement à la décision lui refusant le permis modificatif qu'il avait sollicité ; Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit

que le moyen ne peut être admis ;

Sur le quatrième moyen

de cassation, pris de la violation des articles 29 de la loi du 27 décembre 1973, 27-2 du décret du 28 janvier 1974 modifié par décret du 24 février 1988 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'avoir exploité, du 15 mars au 20 novembre 1991, sans autorisation de la CDUC, un magasin à grande surface présentant une superficie de plancher hors oeuvre supérieure au seuil de 2 000 m2 prévu par l'article 29 de la loi du 27 décembre 1973 ; "alors, d'une part, que pour déterminer la surface de plancher hors oeuvre du magasin, la cour d'appel s'est référée à la surface hors oeuvre nette de tout le bâtiment sans tenir compte, comme l'avaient fait les agents de la direction départementale de l'Equipement et de la brigade de répression des fraudes dont les rapports sont pourtant visés par l'arrêt attaqué, du fait que l'étage de ce bâtiment était totalement vide et vacant ; qu'ainsi, en tenant compte de la superficie de ces locaux qui n'étaient pas affectés à l'usage du magasin, la cour d'appel a violé l'article 29 de la loi du 27 décembre 1973 ; "alors, d'autre part, que dans ses écritures d'appel, X... faisait valoir qu'après avoir reçu notification du procès-verbal dressé dès l'ouverture de son magasin par un agent de la direction départementale de l'Equipement relevant une surface hors oeuvre de plancher de 2 240 m2 incluant la surface de vente et celle des deux dépôts communiquant avec le supermarché, il avait transféré les marchandises qui se trouvaient dans l'un de ces dépôts de sorte que la surface hors oeuvre de plancher devenait inférieure au seuil de 2 000 m2 prévu par l'article 29 de la loi du 27 décembre 1973 précité ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces circonstances pourtant essentielles et en tenant compte, pour déterminer la surface hors oeuvre de plancher exploitée, d'un local inutilisé, la cour d'appel a violé les dispositions du texte susvisé" ;

Attendu que pour déclarer le

prévenu coupable de contraventions d'exploitation illicite d'un magasin de commerce de détail sans autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial, les juges retiennent, par motifs propres et adoptés, que la surface de plancher hors oeuvre du magasin est supérieure au seuil de 2 000 m2 prévu dans les communes, comme celle considérée dont la population est inférieure à 40 000 habitants et que Georges X... reconnaît que cette surface est de 5 113 m ; Attendu qu'en cet état, le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Sur le cinquième moyen

de cassation, pris de la violation des articles 29 de la loi du 27 décembre 1973, 27-2 du décret du 28 janvier 1974, 5 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a condamné X... à la peine de 100 000 francs d'amende pour les délits d'urbanisme et à 240 amendes de 500 francs chacune, soit 120 000 francs pour les contraventions d'urbanisme commercial ; "alors que si la règle du non-cumul des peines n'est pas applicable en matière contraventionnelle, une seule peine doit cependant être prononcée lorsque des contraventions et des délits sont compris dans la même poursuite et quand les faits de la prévention procèdent de la même action coupable ; qu'en l'espèce, c'est un même fait -la construction en vue de l'exploitation d'un magasin de grande surface- qui était visé par les trois chefs de prévention de sorte que la condamnation du prévenu à des peines distinctes pour les délits d'une part, et les contraventions d'autre part, procède d'une violation des dispositions de l'article 5 du Code pénal ; qu'en raison de l'indivisibilité existant entre la déclaration de culpabilité et la peine, l'annulation doit s'étendre à toutes les dispositions de l'arrêt ; Attendu que les contraventions retenues se rapportent à l'exploitation illicite, à compter du 15 mars 1991, d'un magasin de commerce de détail ; que ces faits ne procèdent pas de la même action coupable que les délits de construction sans permis et de poursuite des travaux au mépris d'un arrêté en ordonnant l'interruption ;

D'où il suit

que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen

relevé d'office et puis de la violation de l'article L. 480-7 du Code de l'urbanisme ;

Vu

ledit article ; Attendu que les juges, après avoir condamné le bénéficiaire d'une construction irrégulièrement édifiée à la mise en conformité des lieux dans un délai qu'ils déterminent, ne peuvent, pour le contraindre à exécuter la mesure prescrite, fixer une astreinte d'un montant supérieur au maximum fixé par la loi ; Attendu qu'après avoir déclaré Georges X... coupable de construction sans permis et de poursuite des travaux au mépris d'un arrêté en ayant ordonné l'interruption, la juridiction du second degré a ordonné la remise en état des lieux sous astreinte de 1 500 francs par jour de retard ;

Mais attendu

qu'en prononçant une astreinte d'un montant supérieur au maximum de 500 francs fixé par l'article L. 480-7 p susvisé, la cour d'appel a méconnu les dispositions de ce texte ; Que la cassation est dès lors encourue de ce chef ;

Par ces motifs

; CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Fort-de-France en date du 9 avril 1992 mais seulement en ce qu'il a fixé le montant de l'astreinte à la somme de 1 500 francs, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ; Fixe le montant de l'astreinte à la somme de 500 francs par jour de retard ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

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