Vu la procédure suivante
:
Par une requête, enregistrée le 20 août 2024, l'association Grand Ouest Association Lyonnaise Football Club (Goal FC), représenté par Me Braillard, demande au juge des référés, saisi sur le fondement de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution des décisions de publication des poules de championnat de National 1 et de National 2 pour la saison 2024-2025, et de publication du calendrier du championnat de National 1 et de National 2 rendues le 16 juillet 2024 par le bureau exécutif de la Ligue de Football Amateur (BELFA) et publiées le 24 juillet 2024, validées le 22 juillet 2024 par le comité exécutif de la Fédération Française de Football (FFF) et publiées le 17 août 2024 ;
2°) de suspendre l'exécution de la décision de la FFF confirmant sa participation au championnat de National 2 pour la saison 2024-2025, révélée par un courriel du 13 août 2024, et refusant, par suite, de modifier la composition des groupes du championnat de National 1 et de National 2 pour la saison 2024-2025 afin de permettre sa participation au championnat de National 1 ;
3°) de mettre à la charge de la FFF la somme 6 000 euros en application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Goal FC soutient que :
Sur la
condition de l'urgence :
- la condition d'urgence est remplie dès lors que, d'une part, il se trouve, du fait de la décision attaquée, relégué dans une compétition relevant d'une catégorie inférieure à laquelle il participait au titre de la saison 2023-2024 ;
- d'autre part, les championnats de National 1 et de National 2 ont débuté le 16 août 2024 bien que le match de National 2 entre les clubs de Villefranche-sur-Saône et des Girondins de Bordeaux a été reporté compte tenu de la situation et que la FFF a autorisé le club des Girondins de Bordeaux à ne débuter le championnat de National 2 que lors de la 4ème journée ;
- en outre, il ne pouvait saisir le tribunal qu'une fois que la situation du club des Girondins de Bordeaux a été définitivement arrêtée, soit le 16 août 2024, date à laquelle le CNOSF a proposé à ce dernier de s'en tenir à la décision initiale de rétrogradation en National 2 ; que les décisions attaquées portent atteinte à l'image et à la réputation du club et vont générer des pertes financières ; que les championnats de National 1 et de National 2 disposant tous deux d'un exempt lors de la première journée, il est possible que les clubs de Bordeaux et de Goal FC qui n'ont pas joué lors de cette première journée reprennent respectivement leur place dans leur championnat avant le début de la seconde journée ; que le club de Goal FC est le seul et unique club en mesure d'être repêché en National 1 à la suite de la rétrogradation des Girondins de Bordeaux ;
- enfin, compte tenu des pertes financières que sa rétrogradation engendre, l'urgence économique est caractérisée ;
Sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées :
- les décisions attaquées résultent de l'application du règlement du championnat de National 1 et de National 2 qui ne prévoit pas les cas dans lesquels la commission de contrôle des clubs professionnels ou la commission fédérale de contrôle des clubs de la direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) de la FFF sont amenées à prendre des décisions postérieurement à la date butoir de composition des groupes des championnats que ce règlement fixe à la date du 17 juillet et qui ne peut pas être respectée en pratique ;
- la décision du 13 août 2024 est entachée d'incompétence négative au regard de l'article 23 des statuts de la FFF, puisqu'aux termes de cet article, il appartient au seul comité exécutif de la FFF de statuer sur les cas non prévus par les statuts ou les règlements, comme celui résultant en l'espèce des conséquences pour les clubs repêchables de l'incertitude entourant la participation du club des Girondins de Bordeaux au championnat de National 1 depuis la décision du 1er août 2024 de la commission fédérale de contrôle des clubs de la DNCG de rétrograder ce club en National 2 ;
- la date du 17 juillet prévue par le règlement du championnat de National 1 et de National 2 est contraire au principe d'égalité entre les clubs et au principe de l'équité sportive ; en particulier, le principe de l'équité sportive impose que la liste des équipes participant à un championnat puisse être actualisée en fonction des rétrogradations des clubs avant ou après le 17 juillet ; en l'espèce, le club de Villefranche-sur-Saône, premier relégable a pu bénéficier d'un repêchage en raison de la rétrogradation du club de Niort en National 2 décidée antérieurement à la date du 17 juillet 2024 tandis que la durée de l'examen par les différentes instances sportives de la situation des Girondins de Bordeaux n'a pas permis à Goal FC d'être repêché en National 1 avant cette date, ce qui constitue une rupture d'égalité puisque Villefranche-sur-Saône et Goal FC pouvaient tous deux prétendre à un repêchage en raison de la rétrogradation d'un club tiers ; en outre, le club des Girondins de Bordeaux a bénéficié de l'indulgence de la DNCG afin de retarder sa rétrogradation en National 1 puis en National 2 ;
- l'absence d'examen par la DNCG de la situation des Girondins de Bordeaux avant la date du 17 juillet 2024 a privé Goal FC d'un repêchage auquel il pouvait légitimement prétendre ;
- quand bien même une différence de traitement entre les clubs pourrait être admise, elle est en l'espèce manifestement disproportionnée au regard des conséquences tant sportives qu'économiques qui en résultent pour Goal FC ;
- le refus du comité exécutif de la FFF de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article 23 des statuts de la FFF afin de modifier la composition des groupes et d'autoriser la participation de Goal FC au championnat de National 1 méconnaît le principe d'égalité de traitement entre les clubs ;
- en appliquant la date butoir du 17 juillet au détriment de la règle fixée par l'assemblée fédérale du 18 juin 2022 imposant un total de 18 clubs pour le championnat de National 1 lors de la saison 2024-2025, la FFF a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- alors que l'article 6 du règlement des championnats de National 1 et 2 pour la saison 2024-2025 ne prévoit pas de modalités de repêchage pour le championnat de National 1, le comité exécutif de la FFF aurait dû se prononcer ;
- en appliquant la date du 17 juillet 2024 pour fixer la composition des groupes de National 1 alors que l'article 6 du règlement des championnats de National 1 et 2 pour la saison 2023-2024 et la saison 2024-2025 ne la prévoit pas pour le championnat de National 1, la FFF a commis une erreur de droit.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 août 2023, la FFF, représentée par le cabinet MPVR, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de Goal FC au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
La FFF fait valoir, à titre principal, que la requête est irrecevable dès lors que les décisions attaquées ont été entièrement exécutées puisque le championnat a débuté, et à titre subsidiaire que l'urgence n'est pas caractérisée et qu'aucun des moyens de la requête n'est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du sport,
- les règlements généraux de la Fédération française de football,
- le règlement des championnats de National 1 et 2, 2023-2024 et 2024-2025,
- les statuts de la FFF pour 2024-2025,
- le code de justice administrative.
Le président du tribunal a décidé que la nature de l'affaire justifiait qu'elle soit jugée, en application du troisième alinéa de l'article
L. 511-2 du code de justice administrative, par une formation composée de trois juges des référés et a désigné Mme Bailly, présidente de section, Mme Lambert, première conseillère, et Mme Merino, première conseillère, pour statuer sur la demande de référé.
Vu la requête
en annulation, enregistrée sous le n° 2422248 enregistrée le 20 août 2024.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique tenue le 23 août 2024, à 11 h, en présence de Mme Dekhil, greffière d'audience :
- le rapport de Mme Merino,
- les observations de Me Braillard, représentant Goal FC,
- les observations de Me Poupot, représentant la FFF, en présence de M. C, directeur des compétitions nationales de la FFF.
Considérant ce qui suit :
1. D'une part, par une décision du 9 juillet 2024, la commission de contrôle des clubs professionnels de la DNCG a décidé de rétrograder le club des Girondins de Bordeaux, qui évoluait alors en Ligue 2, en championnat de National 1 pour la saison 2024-2025. Par une décision du 16 juillet 2024 approuvée par le Comité Exécutif de la FFF lors de sa séance du 22 juillet 2024, le BELFA a fixé la composition des groupes des championnats nationaux pour la saison 2024-2025, en retenant notamment la participation du club de l'ESTAC Troyes ou du FC Girondins de Bordeaux en National 1 pour tenir compte notamment du recours formé par ce dernier club contre la décision de relégation en National 1 dont il faisait l'objet. Par cette même décision, le BELFA a retenu la participation en National 2 de Goal FC, qui avait terminé à la 14ème place du championnat de National 1 à la fin de la saison 2023-2024 en position de relégable, tandis que le club de Villefranche-sur-Saône, 13ème à l'issue de ce même championnat et également relégable, a été maintenu en National 1 pour la saison 2024-2025 du fait de la rétrogradation du club de Niort en National 2 confirmée par la commission d'appel de la DNCG le 11 juillet 2024.
2. D'autre part, par une décision du 1er août 2023, confirmée le 12 août 2023 par la commission d'appel de la DNCG, la commission fédérale de contrôle de gestion des clubs de la DNCG de la FFF a rétrogradé le FC Girondins de Bordeaux en championnat de National 2 pour la saison 2024-2025. Saisie, la conférence des conciliateurs du CNOSF a proposé, à l'issue d'une conciliation qui s'est tenue le 16 août 2024, de maintenir la décision de rétrogradation des Girondins de Bordeaux en National 2.
3. Enfin, par une décision du 12 août 2024, le président de la conférence des conciliateurs du CNOSF, statuant en application du 3° de l'article
R. 141-16 du code du sport, a rejeté comme manifestement mal fondée la demande de conciliation formée par Goal FC en vue d'obtenir son repêchage en National 1 et le lendemain, dans un courriel du 13 août 2024, le directeur des compétitions nationales de la FFF a confirmé à Goal FC sa participation au championnat de National 2 pour la saison 2024-2025. En réponse, Goal FC a demandé dès le 13 août 2024 à la FFF de réunir en urgence le Comité Exécutif afin qu'il statue sur sa demande de repêchage en National 1, demande qui a été rejetée par le directeur des compétitions nationales de la FFF dans un courriel du 14 août 2024.
4. Par la présente requête, Goal FC doit être regardé comme demandant au juge des référés de suspendre l'exécution de la décision, révélée par les courriels du 13 août 2024 et du 14 août 2024, par laquelle la FFF a confirmé sa participation au championnat de National 2 pour la saison 2024-2025 et a, dès lors, implicitement mais nécessairement refusé, d'une part, de modifier la composition des groupes des championnats de National 1 et 2 arrêtée par le BELFA le 16 juillet 2024 et, d'autre part, de l'autoriser à participer au championnat de National 1 pour cette même saison.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative :
5. Aux termes de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ". En application de ces dispositions, un requérant n'est recevable à demander la suspension de l'exécution d'une décision administrative qu'à la condition que cette décision soit encore susceptible d'exécution à la date à laquelle le juge des référés est saisi de cette demande.
6. Dès lors que la saison de championnat a commencé, toute décision relative à la détermination des clubs appelés à participer à ce championnat doit être regardée comme étant entièrement exécutée. Il résulte de l'instruction que la 1ère journée du championnat de National 1 et du championnat de National 2 pour la saison 2024-2025 s'est déroulée le 16 août 2024 soit antérieurement à la date d'enregistrement de la présente requête. Par suite, alors même que le club des Girondins de Bordeaux a été autorisé par la FFF à débuter le championnat de National 2 à la 4ème journée, et que le club de Goal FC a décidé de ne pas jouer le premier match du championnat de National 2 dans l'attente de la décision du juge des référés, les décisions attaquées doivent être regardées comme entièrement exécutées à la date de la saisine du juge des référés. Il suit de la que la fin de non-recevoir soulevée par la FFF doit être accueillie. Par suite la requête de Goal FC doit être rejetée dans toutes ses conclusions.
Sur les conclusions de la FFF au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Goal FC la somme que la FFF réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de l'association Grand Ouest Association Lyonnaise Football Club est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Fédération Française de Football présentées sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association Grand Ouest Association Lyonnaise Football Club et à la Fédération Française de Football.
Fait à Paris, le 23 août 2024.
Les juges des référés,
P. BAILLY F. LAMBERT M. MERINO
La République mande et ordonne à la ministre des sports, des jeux Olympiques et Paralympiques en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.