AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize septembre deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PELLETIER, les observations de Me FOUSSARD et de la société civile professionnelle ANCEL et COUTURIER-HELLER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Christian,
contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 30 juin 1999, qui, pour contravention à la réglementation relative au activités de surveillance à distance, l'a condamné à 1500 francs d'amende, et qui a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de articles
111-3,
111-4,
111-5,
121-3 et 1222 du Code pénal, de articles ter et 5 du décret n° 91-1206 du 26 novembre 1991 relatif au activités de surveillance à distance, de l'arrêté du 3 novembre 199 fixant le taux des redevances dues par les bénéficiaires d'un numér de téléphone réservé exerçant des activités de surveillance àdistance ensemble les articles
591 et
593 du Code de procédure pénale, défau de motifs, dénaturation ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christian X... coupable d'appel d'un service de police en utilisant une procédure autre que celle du numéro réservé et l'a condamné, en répression, à une amende de 1 500 francs, et l'a condamné, en outre à verser somme de 3 000 francs de dommages et intérêts à la Direction de Ia sécurité publique du Puy de Dôme ;
" aux motifs que l'élément matériel de l'infraction, défini pal, les textes rappelés ci-dessus recouvre les faits reprochés Christian X..., qui, agissant au nom d'une entreprise de télésurveillance à distance n'est pas attributaire d'un numéro de téléphone spécifique et a utilisé pour les besoins de son activité professionnelle le numéro du standard de la police, en violation de Ia réglementation ; qu'il ne peut être soutenu que ce délit est impossibl en raison du refus d'attribution de la ligne téléphonique spéciale, alors qu'il appartient à l'entreprise privée, avant d'établir des relations commerciales avec des clients de s'assurer qu'elle est en mesure de disposer d'un numéro réservé dans le ressort géographique d'implantation de son client ; qu'il est soutenu que la direction de Ia sécurité publique du Puy de Dôme excède les dispositions d'une réglementation illégale, en exigeant des entreprises de télésurveillance à distance un engagement de régler les redevances prévues par l'article n° 95-641 du 3 novembre 1995 ;
qu'en premier lieu, redevances étant dues en application de cet arrêté, la direction de la sécurité publique du Puy de Dôme n'excède nullement les dispositions réglementaires en vigueur, en exigeant un engagement de la part des entreprises de télésurveillance, le texte n'étant pas destiné à rester lettre morte, et les pouvoirs publics qui en ont la possibilité n'ayant pas modifié le texte ; que l'engagement réclamé ne rajoute rien aux exigences de ce dernier ;
qu'il importe peu que dans certains ressorts, en violation de ce texte, il ait été renoncé à la perception de certaines de ces redevances ; qu'au demeurant, même si la société CET conteste devant les juridictions administratives cette réglementation, rien ne lui interdit de souscrire un engagement, sous réserve de l'issue des procédures en cours ; que la société CET ne saurait soulever, pour Ia première fois en cause d'appel, l'illégalité de l'arrêté du 3 septembre 1995, en insérant dans le corps de ses conclusions des arguments qui n'ont pas été présentés devant le premier juge, alors que l'exception d'illégalité doit être présentée avant toute défense au fond, et que ni le jugement, ni les notes n'indiquent que cette procédure a été respectée ; qu'au surplus, les sommes prévues par ce texte, ni une imposition, mais la rémunération d'un service facturé par l'Etat à des entreprises privées et qui constitue l'essentiel de Ia prestation payée à ces dernières par leur client ; qu'enfin que la société CET et Christian X... n'ignoraient pas qu'ils n'étaient pas réservatrice d'une ligne réservée ; qu'ils ne peuvent invoquer aucun cas de force majeure justifiant leur action, alors qu'il leur était tout à fait possible de se mettre en règle avec la direction départementale de la sécurité publique du Puy de Dôme, en attendant une éventuelle évolution de la réglementation, et qu'en outre l'appel litigieux ne présentait pour la défense d'autrui et de l'ordre public, aucun caractère d'urgence, s'agissant d'une fausse alarme ; que dans ces conditions, en retenant Christian X..., responsable d'exploitation de la centrale opérationnelle de la société CET, et qui a sous ses ordres le préposé Y..., dans les liens de la prévention, le premier juge a tiré des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient ; qu'en ce qui concerne la peine, celle prononcée par Ie tribunal est adéquate à la gravité des faits et à la personnalité du prévenu ;
" alors que, premièrement, la loi pénale est l'interprétation stricte ; que si, aux termes des articles ter et 5 du décret n° 91-1206 du 26 novembre 1991 relatif aux activités de surveillance à distance, les entreprises de surveillance doivent, sous peine de contravention, utiliser un numéro téléphonique réservé mis à leur disposition par Ie service de police ou de gendarmerie, ni ces textes, ni l'arrêté du 3 novembre 1995, qui fixe les redevances dues par les entreprises de surveillance, ne subordonnent la mise à disposition d'une ligne réservée au paiement desdites redevances ou à un engagement formel de les acquitter ; qu'ainsi au cas d'espèce, en énonçant, pour déclarer Christian X... coupable de l'infraction, que la direction départementale de service public du Puy de Dôme pouvait parfaitement, sans excéder les dispositions réglementaires en vigueur, exiger que la société CET s'engage à payer des redevances, avant de mettre à sa disposition la ligne réservée, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;
" alors que, deuxièmement, dans ses conclusions d'appel, Christian X... faisait valoir que l'application de l'arrêté du 3 novembre 1995 avait fait l'objet, devant les juridictions administratives, de nombreux recours et qu'à la suite de ces difficultés, tant le ministre de l'intérieur que le ministre de la défense avaient admis que les sociétés de surveillance pouvaient bénéficier, sans frais, d'un accès aux lignes réservées ; que cependant, en aucune façon, dans la présente procédure Christian X... contestait la légalité du décret n° 91-1206 du 26 novembre 1991 ainsi que la légalité de l'arrété pris pour son application ; que, simplement, Christian X... reprochait à la direction départementale de la sécurité publique du Puy de Dôme d'avoir subordonné l'octroi d'une ligne réservée à l'engagement de payer les redevances ce qui n'était pas prévu par les textes en vigueur ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, et notamment qu'en énonçant que Christian X... soutenait, pour la première fois en cause d'appel, l'illégalité de l'arrêté du 3 novembre 1995, les juges du fond ont incontestablement dénaturé les conclusions prises par Christian X... ;
" alors que, troisièmement, les juges du fond doivent, sous peine de censure, caractériser en tous leurs éléments constitutifs les infractions dont ils reconnaissent le prévenu coupable ; qu'à cet égard, ils doivent notamment caractériser l'élément intentionnel de l'infraction ; qu'au cas d'espèce, en statuant comme ils l'ont fait, sans caractériser la volonté consciente et délibérée de Christian X... d'enfreindre la réglementation en vigueur, les juges du fond ont en tout état de cause privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" et alors que, quatrièmement, n'est pas pénalement a agi responsable la personne qui sous l'empire d'une force ou d'une contrainte à laquelle elle n'a pas pu résister ; qu'au cas d'espèce, la société CET était une société de surveillance ; qu'à ce titre, elle était chargée d'assurer la sécurité des biens appartenant à ses clients ainsi que d'assurer leur intégrité physique ; qu'à cet égard, il n'est pas contestable que, malgré l'absence d'une ligne réservée, la société CET était en droit d'appeler les services de police ou de gendarmerie dés lors qu'il y avait un risque d'une atteinte aux biens ou un risque d'atteinte à l'intégrité physique de ses clients ; qu'au cas d'espèce, en statuant comme ils l'ont fait, sans plus s'expliquer sur l'existence d'un cas de force majeure, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Attendu que, pour condamner le prévenu pour contravention à la réglementation relative aux activités de surveillance à distance, la cour d'appel se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en cet état, les juges ont justifié leur décision, dès lors qu'en vertu des articles 1 er et 5 du décret du 26 novembre 1991, les entreprises de surveillance à distance doivent, pour appeler les services de police ou de gendarmerie, utiliser un numéro téléphonique réservé mis à leur disposition par ces services et qu'il leur est interdit, sous peine d'amende prévue pour les contraventions de Ia 5ème classe, d'utiliser toute autre procédure ;
Qu'il résulte de ce texte que, tant que l'entreprise de surveillance à distance n'a pas obtenu, amiablement ou à la suite d'un recours contentieux, de numéro réservé, dans une circonscription, pour lui permettre d'appeler les services de police ou de gendarmerie qui y sont implantés, elle ne peut avoir téléphoniquement recours à ces services pour faire vérifier la réalité du danger signalé par le déclenchement d'une alarme dans des bâtiments placés sous sa surveillance ;
Qu'ainsi, le prévenu ne saurait prétendre avoir agi sous l'empire d'une force majeure et sans intention d'enfreindre la réglementation en vigueur, dès lors qu'il lui appartenait, pour ne pas commettre les infractions qui lui sont reprochées, soit de refuser d'assurer Ia télésurveillance de biens dans un département où il ne possédait pas de numéro réservé, soit de mettre en place tout autre système de son choix pour remplir légalement ses obligations contractuelles ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article
L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Farge conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Pelletier conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;