Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 22 octobre 2015, 15LY00142

Mots clés étrangers · séjour des étrangers Refus de séjour · rétention · préfet · placement · résidence · ressort · représentation · risque · soutenir · quitter · territoire · étranger · séjour · saisie · possession

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro affaire : 15LY00142
Type de recours : Excès de pouvoir
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur : Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public : M. DURSAPT
Avocat(s) : GUERAULT

Texte

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C..., alors retenu au centre de rétention administrative de Lyon Saint-Exupéry, a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 9 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays de destination ainsi que celle par laquelle le préfet a prononcé son placement en rétention.

Par le jugement n° 1409585 du 12 décembre 2014, le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 9 décembre 2014 par laquelle le préfet du Rhône a prononcé le placement en rétention administrative de M. C...et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2015, le préfet du Rhône demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 décembre 2014 en tant qu'il a annulé sa décision portant placement en rétention administrative de M.C....

Le préfet soutient que c'est à tort, dès lors que l'intéressé ne possédait pas de passeport en cours de validité, que le premier juge a annulé sa décision de placement en rétention administrative au motif qu'il n'était pas nécessité par les circonstances de l'espèce.

Par un mémoire enregistré le 19 mai 2015, M.C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

- à titre principal, de prononcer un non-lieu à statuer compte tenu de l'exécution de la mesure d'éloignement, base légale de la décision de placement en rétention administrative, et de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve pour Me A...de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

- à titre subsidiaire, de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a annulé la décision de placement en rétention administrative et de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve pour Me A...de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

M. C...fait valoir que :

- quelques jours après la notification du jugement attaqué, il a exécuté la mesure d'éloignement ;

- la décision prononçant son placement en rétention n'est pas suffisamment motivée, qu'ainsi le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de son dossier et que, compte tenu de l'ensemble des éléments, il aurait dû privilégier une mesure d'assignation à résidence.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mai 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Gondouin, rapporteur.

1. Considérant que M.C..., ressortissant mexicain né en 1987, est entré en France en août 2006, sous couvert d'un visa mention " étudiant " ; que le dernier titre de séjour qu'il a obtenu régulièrement était valable jusqu'au 15 octobre 2013 ; qu'en décembre 2014, alors qu'il tentait de se prévaloir d'un faux titre de séjour, il a été interpellé par les services de police ; que, le 9 décembre 2014, le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire et placé en rétention administrative ; que le préfet du Rhône relève appel du jugement par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a annulé la décision plaçant M. C...en rétention administrative ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu :

2. Considérant que si M. C...fait valoir qu'il a exécuté la mesure d'éloignement, cette circonstance ne rend pas sans objet les conclusions du préfet du Rhône dirigées contre le jugement annulant la décision le plaçant en rétention administrative qui a produit des effets ; que ses conclusions à fin de non-lieu ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " À moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ; que, selon l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (...) " ; qu'au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 561-2 du code précité, la notion de garanties de représentation effectives, suffisantes pour prévenir un risque de fuite, doit être appréciée au regard des conditions de résidence et de logement de l'étranger, et au regard, notamment, de la possession ou non de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ou encore du respect ou non, par l'étranger, des décisions prises à son encontre et des obligations lui incombant en matière de police des étrangers ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au moment de son interpellation par les services de police, M. C...ne disposait pas d'un passeport en cours de validité et que la carte de séjour temporaire dont il entendait faire usage avait été falsifiée ; que s'il fait valoir qu'il disposait d'une adresse chez des amis à Lyon, rue des Capucins, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que cette adresse, différente de celle qui figurait sur sa demande de titre de séjour déposée en 2012, pouvait être regardée comme stable ou durable ; que, dès lors, le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a retenu, pour annuler la décision plaçant M. C...en rétention administrative, que ce placement n'était pas nécessité par les circonstances de l'espèce et qu'ainsi avait été méconnu l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... tant devant elle que devant le tribunal administratif de Lyon ;

6. Considérant que M. C...soutient que la décision en litige ne satisfait pas aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisée aux termes de laquelle : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision attaquée, qui vise l'ensemble des textes applicables et précise les circonstances qui ont conduit le préfet à prendre une telle mesure, comporte les considérations de droit et de fait qui la fondent ; qu'elle répond ainsi aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

7. Considérant qu'il ressort tant de la décision du 9 décembre 2014 que des pièces du dossier que le préfet du Rhône, contrairement à ce que soutient M.C..., a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et n'a ainsi commis aucune erreur de droit ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 9 décembre 2014 ordonnant le placement en rétention administrative de M.C... ; que les conclusions présentées par ce dernier tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être, en conséquence, rejetées ;

DÉCIDE :



Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1409585 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande de M. C...tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône du 9 décembre 2014 ordonnant son placement en rétention administrative ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...C....

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2015 où siégeaient :

- Mme Verley-Cheynel, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Gondouin, rapporteur.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2015.

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