Sur le premier moyen
:
Vu
les articles
L. 515-3,
R. 516-28 et
R. 516-2 du Code du travail ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, en cas de partage de voix, l'affaire est renvoyée devant le même bureau de conciliation, le même bureau de jugement ou la même formation de référé, présidé par un juge du tribunal d'instance dans le ressort duquel est situé le siège du conseil de prud'hommes, et que, conformément aux prescriptions du deuxième texte, les débats sont alors repris ; qu'aux termes du troisième texte susvisé, les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables en tout état de cause, même en appel, sans que puisse être opposée l'absence de tentative de conciliation ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes qu'en cas de partage de voix, l'instance se poursuit devant le conseil de prud'hommes présidé désormais par le juge d'instance et que les parties peuvent donc, en cet état de la procédure, former les demandes nouvelles ;
Attendu, selon la procédure, que le conseil de prud'hommes, saisi par le salarié d'une demande en paiement d'un rappel de salaire d'un montant inférieur au taux du dernier ressort, s'est déclaré en partage de voix et a renvoyé l'affaire à une audience ultérieure du bureau de jugement présidée par le juge départiteur ; qu'à cette audience, le salarié a présenté une demande nouvelle tendant à l'annulation d'une sanction disciplinaire et à la condamnation de l'employeur au paiement de salaires et de dommages-intérêts ; que le bureau de jugement, présidé par le juge départiteur, a débouté le salarié de sa demande initiale, et, après avoir déclaré recevable la demande nouvelle, avant dire droit, a renvoyé la cause à une audience ultérieure ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel de la société, dire que la formation de départage ne pouvait connaître des demandes nouvelles, la cour d'appel a énoncé que, même dans le cas où l'appel ne serait pas possible en application de l'article
544, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, une telle voie de recours serait ouverte s'il était démontré un excès de pouvoir ou une violation manifeste de certaines règles de procédure ou de forme d'ordre public ; que, certes, les demandes nouvelles sont recevables même en cause d'appel, mais encore convient-il qu'elles soient formées devant la juridiction compétente pour en connaître ; qu'il est admis par la jurisprudence, ce qui correspond par ailleurs à l'esprit et à la volonté du législateur, que la formation du départage ne connaît que des demandes sur lesquelles le conseil de prud'hommes, en sa composition paritaire, a constaté le partage des voix, et qu'elle ne peut se saisir d'autres chefs de demande, qu'ils soient nouveaux ou réservés par la formation initiale ; que, dès lors, la formation de départage, en déclarant recevables, sous le seul argument qu'il s'agit d'une demande nouvelle, des prétentions différentes de celles qui avaient fait l'objet du partage des voix, a excédé sa compétence et violé les règles relatives à la procédure devant être suivie devant le conseil de prud'hommes ;
Qu'en statuant ainsi
, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen
:
Vu
l'article
R. 517-4 du Code du travail ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel formé par le salarié, la cour d'appel a énoncé que la formation de départage ne pouvait connaître que de la demande en paiement de la prime ; qu'eu égard au montant du litige, l'appel ne saurait être exercé contre ce chef de décision ;
Qu'en statuant ainsi
, alors que le conseil de prud'hommes ayant été régulièrement saisi d'une demande nouvelle tendant à l'annulation d'une sanction disciplinaire, le jugement était susceptible d'appel ;
PAR CES MOTIFS
:
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 juin 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges.