Vu la procédure suivante
:
Par une requête enregistrée le 4 mai 2022, régularisée le 21 mai 2022, M. A B doit être regardé comme demandant au tribunal :
1) d'annuler la décision du 27 avril 2022 par laquelle le directeur de l'agence Pôle emploi Occitanie a refusé de l'inscrire rétroactivement sur la liste des demandeurs d'emploi ;
2) d'enjoindre à Pôle emploi de le rétablir dans ses droits à compter du 17 février 2022 et de procéder au versement des allocations non versées.
Il soutient que :
- il n'a pas pu s'inscrire à Pôle emploi avant le 11 mars 2022 ; il était en cours de déménagement et ne disposait pas d'une connexion internet ; il attendait la communication de son courrier de son ex-employeur ainsi que de l'assurance maladie avant de s'inscrire à Pôle emploi ; son retard d'inscription n'est pas de son fait ;
- il est dans une situation financière précaire ; il est sans emploi et perçoit une indemnisation de 30 euros par jours ; cette demande d'inscription rétroactive lui permettrait de faire face à ses charges quotidiennes.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2022, le directeur régional de Pôle emploi Occitanie conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la requête présentée par le requérant tend à demander le paiement de ses indemnités ; la demande du requérant est mal dirigée dès lors que le tribunal administratif est incompétent pour y faire droit, le paiement des indemnités concernant l'allocation de retour à l'emploi (ARE) ;
- la requête présentée par le requérant est irrecevable ; le requérant ne fait état d'aucun moyen de droit à l'appui de sa requête ; il se contente de présenter sa situation personnelle ;
- la décision de refus d'inscription rétroactive sur la liste des demandeurs d'emploi est bien fondée ; le principe est que les décisions administratives ne sont pas rétroactives ; sa demande est présentée dans le seul but de percevoir les allocations à l'ARE ; la démarche d'inscription est un acte personnel, volontaire et positif d'un individu à la recherche d'un emploi ; le requérant ne s'est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi que le 11 mars 2022 ; il n'a pas perdu ses droits en s'inscrivant à cette date, ses droits étant ouverts pour la même période que celle à laquelle il pouvait prétendre ; il n'a commis aucune erreur d'appréciation en refusant cette inscription.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
En application de l'article
R. 222-13 du code de justice administrative, la présidente du tribunal a désigné M. C pour statuer sur les litiges visés audit article.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Au cours de l'audience publique, après l'appel de l'affaire, les parties n'étant ni présentes ni représentées, la clôture de l'instruction a été prononcée en application de l'article
R. 772-9 du code de justice administrative et le rapport de M. C a été entendu.
Considérant ce qui suit
:
1. M. B s'est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi le 11 mars 2022 à la suite de sa rupture de sa période d'essai à l'initiative de son ancien employeur le 16 février 2022. Par courrier du 25 mars 2022, Pôle emploi Occitanie notifie à M. B une ouverture de droit à l'allocation d'aide au retour à l'emploi provisoire à compter du 26 mars 2022 au taux journalier de 21,94 euros pour 730 jours, en l'attente des éléments manquants. Par courrier du 14 avril 2022, M. B demande son inscription rétroactive sur la liste des demandeurs d'emploi à compter du 17 février 2022. Par décision du 27 avril 2022, le directeur de Pôle emploi Occitanie rejette sa demande. Par la présente, le requérant demande l'annulation de cette dernière décision.
Sur l'exception d'incompétence opposée par Pôle emploi :
2. Aux termes de l'article
L. 5312-1 du code du travail dans sa version applicable au litige : " Pôle emploi est une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière a pour mission de : () 4° Assurer, pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, le service de l'allocation d'assurance et de l'allocation des travailleurs indépendants et, pour le compte de l'Etat, le service des allocations de solidarité prévues à la section 1 du chapitre III du titre II du livre IV de la présente partie, des allocations mentionnées à l'article L. 5424-21, de l'aide prévue au II de l'article
136 de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997, des sommes restant dues au titre du versement de l'allocation équivalent retraite prévue à l'article L. 5423-18, dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2009, et des sommes restant dues au titre de la prime forfaitaire prévue à l'article L. 5425-3, dans sa rédaction antérieure au 1er septembre 2017, ainsi que le service de toute autre allocation ou aide dont l'Etat lui confierait le versement par convention ; () ". Aux termes de l'article L. 5312-12 du même code : " Les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par l'institution, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage ou de l'Etat sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution ".
3. Il résulte de ces dispositions que le législateur a souhaité que la réforme, qui s'est notamment caractérisée par la substitution de Pôle emploi à l'Agence nationale pour l'emploi et aux associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce, reste sans incidence sur le régime juridique des prestations et sur la juridiction compétente pour connaître du droit aux prestations, notamment sur la compétence de la juridiction judiciaire s'agissant des prestations servies au titre du régime conventionnel d'assurance chômage.
4. Les litiges relatifs au paiement des allocations d'assurance chômage relevaient, antérieurement à la création de l'institution nationale " Pôle emploi ", de la compétence du juge judiciaire. Ces allocations, dont l'allocation de retour à l'emploi, étaient alors versées par les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Assédic), organisme de droit privé. La substitution de Pôle Emploi à l'Assédic n'a pas d'incidence sur le régime juridique des prestations et sur la juridiction compétente pour en connaître. Par suite, il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de se prononcer sur ces litiges.
5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions relatives au rétablissement des droits à l'ARE présentées par M. B doivent être rejetées comme étant présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Sur le refus d'inscription rétroactive :
6. Aux termes de l'article
L. 5411-1 du code du travail : " A la qualité de demandeur d'emploi toute personne qui recherche un emploi et demande son inscription sur la liste des demandeurs d'emploi auprès de Pôle emploi. ". Aux termes de l'article
R. 5411-2 du même code : " L'inscription sur la liste des demandeurs d'emploi est faite par voie électronique auprès de Pôle emploi. Le travailleur recherchant un emploi qui demande son inscription déclare sa domiciliation et transmet les informations permettant de procéder à son identification. / A défaut de parvenir à s'inscrire lui-même par voie électronique, le travailleur recherchant un emploi peut procéder à cette inscription dans les services de Pôle emploi, également par voie électronique, et bénéficier le cas échéant de l'assistance du personnel de Pôle emploi. () ".
7. Les dispositions du code du travail qui soumettent le travailleur inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi à des obligations telles que le renouvellement de la demande d'inscription, l'acceptation d'emploi ou d'action de formation proposés, ou la réponse à des convocations, font en principe obstacle à ce que cette inscription ait un caractère rétroactif.
8. Les circonstances que M. B n'aurait pu s'inscrire avant le 11 mars 2022 sur la liste des demandeurs d'emploi dès lors qu'il déménageait, qu'il ne disposait pas, à ce moment-là, d'une connexion internet lui permettant de faire cette démarche, ne sont établies par aucune pièce du dossier. Si M. B soutient que son inscription rétroactive lui permettrait de faire face à ses charges qui sont importantes, qu'il est sans emploi depuis le 17 février 2022 et qu'il pouvait prétendre à une ouverture de ses droits à compter de cette date, ces éléments sont sans incidence sur la légalité du refus d'inscription rétroactive qui lui a été opposé. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions précitées du code du travail que le directeur de l'agence de Pôle emploi a refusé de l'inscrire rétroactivement sur la liste des demandeurs d'emploi.
9. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par Pôle emploi Occitanie. les conclusions à fin d'annulation de M. B doivent être rejetées, de même que, par voie de conséquence et en tout état de cause, ses conclusions à fin d'injonction.
D E C I D E :
Article 1er : Les conclusions de la requête de M. B tendant au rétablissement de ses droits à l'allocation de retour à l'emploi sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A B, à Pôle emploi Occitanie et au ministre en charge du travail.
Rendue publique par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2023.
Le magistrat désigné,
Alain CLe greffier,
Baptiste Roets
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme :
La greffière en chef,