LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 mai 2015), que le 7 juin 1993, la société Obringer, entreprise spécialisée en métallurgie et fonderie, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Sotralentz métal industries (la société Sotralentz), a souscrit auprès de la société Gan assurances une police d'assurance multirisque des entreprises à effet du 1er octobre 1992, incluant une garantie de la responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés ; que le 19 décembre 1995, deux travailleurs intérimaires mis à la disposition de la société Obringer par la société Lorraine services ont été grièvement brûlés en effectuant des travaux de soudure à l'arc en atmosphère confinée ; que par un arrêt du 26 juillet 2000, M. X..., cadre de la société Obringer, titulaire d'une délégation de pouvoir en matière d'hygiène et de sécurité, a été condamné pénalement pour blessures involontaires et pour divers manquements à la réglementation du travail ; qu'une juridiction de sécurité sociale a reconnu l'existence d'une faute inexcusable à l'origine de l'accident, et, retenant que cette faute était imputable à l'entreprise utilisatrice, a condamné cette dernière et son assureur, la société Gan assurances, à garantir la société Lorraine services des condamnations prononcées à son encontre ; que la société Lorraine services a ensuite assigné la société Sotralentz afin d'obtenir le remboursement des cotisations supplémentaires mises à sa charge en application des dispositions de l'article
L. 242-7 du code de la sécurité sociale ; que par un arrêt du 4 août 2009, une cour d'appel a accueilli cette demande et condamné la société Sotralentz à payer à la société Lorraine services la somme de 358 915 euros, majorée des intérêts légaux ; que la société Sotralenz s'étant acquittée de cette condamnation a assigné la société Gan assurances pour en obtenir la prise en charge, cet assureur lui opposant que les cotisations supplémentaires prévues à l'article L. 242-7 du code des assurances n'étaient pas garanties ;
Sur le deuxième moyen
:
Attendu que la société Sotralentz fait grief à l'arrêt de la débouter de cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges sont tenus d'examiner par eux-mêmes les faits dont ils sont saisis sans pouvoir procéder par voie de référence à des causes déjà jugées ; qu'en l'espèce, l'article 5 de la police d'assurance souscrite par la société Obringer, dans les droits de laquelle se trouve la société Sotralentz, excluait de la garantie les dommages résultant d'une violation consciente et délibérée d'une obligation professionnelle par l'assuré ou par la direction de l'entreprise assurée ; qu'en se fondant entièrement sur les motifs du jugement pénal rendu à l'égard de M. X... pour en déduire que la société Sotralentz ou sa direction avait violé de façon consciente et délibérée les obligations de sécurité qui s'imposaient à elle, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile ;
2°/ que l'autorité de la chose jugée ne vaut qu'entre litiges présentant une identité d'objet, de cause et de parties ; que si les constatations résultant des motifs d'un jugement pénal peuvent s'imposer au juge civil, ce n'est que pour autant qu'elles concernent les éléments constitutifs de la faute commise par l'auteur visé par l'action publique et actionné ensuite en réparation par la victime devant la juridiction civile ; qu'en retenant en l'espèce qu'il se déduisait des motifs d'un jugement pénal rendu contre M. X..., seul visé à la prévention, que la société Sotralentz, demanderesse à une action en indemnisation contre son assureur, avait violé de façon consciente et délibérée les obligations de sécurité qui étaient les siennes, la cour d'appel a violé les articles
1351 du code civil et
480 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en cas de délégation de pouvoir, l'infraction aux règles de sécurité retenue contre le salarié délégataire exclut d'imputer la même infraction au dirigeant délégant ; que par ailleurs, le pouvoir de gestion délégué à un cadre salarié dans l'administration du service dont il a la charge ne suffit pas à le constituer comme autorité dirigeante de l'entreprise ; qu'en se fondant sur la condamnation pénale de M. X..., qui était cadre salarié chargé de la fabrication et simple délégataire de pouvoir pour la sécurité de son service, pour opposer à la société Sotralentz l'exclusion de garantie prévue à l'article 5 de la police d'assurance en tant que celui-ci ne visait que la faute délibérée de l'entreprise assurée ou de sa direction, la cour d'appel a violé l'article
1134 du code civil ;
4°/ que les infractions consistant à infliger des blessures involontaires ou à méconnaître la réglementation du travail relative à la sécurité des salariés sont des infractions non intentionnelles qui n'impliquent pas en elles-mêmes que les règles de prudence et de sécurité méconnues l'aient été de façon délibérée par l'auteur poursuivi, cet état d'esprit constituant seulement une circonstance aggravante des délits d'atteinte involontaire à la personne ; qu'en l'espèce, M. X... a été reconnu coupable d'avoir, en sa qualité de responsable du service de fabrication de la société Obringer, enfreint les règles de sécurité prévues par le code du travail et causé une incapacité totale de travail de plus de trois mois à deux salariés de la société Lorraine services ; que la circonstance aggravante tirée d'une violation délibérée d'une obligation particulière de sécurité n'a pas été retenue à la prévention ; qu'en déduisant néanmoins de cette condamnation que la direction de la société Sotralentz aurait consciemment et délibérément violé les règles de sécurité au travail, la cour d'appel a violé l'article
480 du code de procédure civile, ensemble les articles
121-3 et
222-19 du code pénal et l'article L. 263-2 ancien du code du travail ;
5°/ que les juges sont tenus de ne pas méconnaître les décisions de justice revêtues de l'autorité de la chose jugée ; qu'en l'espèce, le jugement du 14 avril 1999 rendu par le tribunal correctionnel de Sarreguemines a simplement observé dans ses motifs que le frère de l'une des victimes accusait la direction de la société Obringer d'avoir eu connaissance des risques qu'elle faisait encourir à ses salarié, et que M. X... avait fait savoir qu'il n'avait pas ressenti pour sa part la nécessité de fournir des équipements de protection aux salariés qui le demandaient ou encore de dispenser au personnel intérimaire une formation en matière de sécurité ; qu'en déduisant de ces seules constatations que la direction de la société avait consciemment et délibérément violé les obligations de sécurité qui lui incombaient, la cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article
480 du code de procédure civile ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a analysé les décisions pénales produites, notamment l'arrêt confirmant le jugement sur la culpabilité d'un cadre de l'entreprise ayant délégation en matière de sécurité, tant au titre des blessures involontaires que des infractions à la sécurité du travail, pour estimer qu'il ressortait de celle-ci l'existence de défaillances de l'entreprise relativement à la sécurité malgré la connaissance que pouvaient avoir les responsables de la société Sotralentz des risques encourus ; qu'ayant ainsi relevé les circonstances de fait de l'exclusion de garantie des conséquences de la violation consciente et délibérée des règles de sécurité au travail, dont la validité n'était pas contestée, c'est sans encourir les griefs du moyen, qui en ses deuxième et cinquième branches, est irrecevable comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit, que la cour d'appel a décidé que l'assureur était fondé à opposer cette exclusion à la société Sotralentz ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le premier moyen
, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la société Sotralentz fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu que le rejet du deuxième moyen prive de toute portée le premier qui ne peut donc être accueilli ;
Sur le troisième moyen
, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la société Sotralentz fait encore le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu que c'est sans méconnaître l'objet du litige que la cour d'appel a recherché si la garantie de la responsabilité encourue à l'égard des salariés, convenue à l'article 2 de la police, était due comme s'en prévalait la société Sotralentz ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sotralentz métal industries aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Gan assurances la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES
au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Sotralentz métal industries
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES de sa demande visant à être indemnisée par son assureur de responsabilité, la société GAN ASSURANCES, des sommes versées en réparation du préjudice subi par la société LORRAINE SERVICES au titre d'une augmentation de son taux de cotisation sociale faisant suite aux accidents du travail subis par deux de ses salariés mis à disposition de la société OBRINGER, du groupe SOTRALENTZ ;
AUX MOTIFS QUE « la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES prétend mobiliser, outre les garanties spécifiques de l'article 2 des conventions spéciales relatives notamment à la responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés, la garantie de base des " dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels non-garantis " qui ont été causés en cours d'exploitation, n'explicitant pas plus ce dernier fondement ; que compte tenu du renvoi fait dans les conclusions de l'intimée à sa pièce 2, sur laquelle sont surlignés les termes " dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels non-garantis ", la cour peut en déduire qu'elle entend mettre en oeuvre une " garantie commune aux risques responsabilité civile d'exploitation et responsabilité civile après livraison ou achèvement des travaux ", la cour restant en l'absence de production des conditions générales de la police dans l'ignorance de la définition contractuelle du dommage immatériel ; qu'au surplus, et ainsi que l'invoque la SA GAN ASSURANCES, celle-ci peut utilement opposer la clause d'exclusion dont l'existence n'est pas contestée et qui vise les conséquences de la violation " consciente et délibérée " des règles de sécurité au travail, la condamnation pénale du cadre de l'entreprise ayant délégation en matière de sécurité au titre tant des blessures involontaires que des infractions à la sécurité du travail (l'arrêt confirmant la déclaration de culpabilité prononcée en première instance au titre de cette double prévention) induisant le caractère conscient et délibéré de la violation des dispositions protectrices de la sécurité des travailleurs, la lecture des décisions pénales confortant d'ailleurs l'analyse de l'assureur, puisqu'il y est stigmatisé une absence de signalisation de l'alimentation en oxygène (qui a été confondue par les victimes avec l'alimentation en air comprimé), le refus de fournir aux salariés qui en avaient fait la demande, des équipements de protection individuelle ainsi qu'une carence dans l'accueil du personnel intérimaire qui ne recevait aucune formation renforcée à la sécurité du travail en atmosphère confinée, le tribunal correctionnel (§ D46 et D 52 du jugement) retenant les'défaillances de l'entreprise OBRINGER. relativement à la sécurité, malgré la connaissance que pouvaient avoir les responsables des risques encourus notamment d'incendies ainsi que l'aveu du prévenu quant au choix délibéré de l'entreprise de ne pas dispenser de formation à la sécurité au personnel intérimaire alors même qu'elle y avait fréquemment recours » (arrêt, p. 4 et 5) ;
ALORS QUE, premièrement, le juge est tenu, en cas d'ambiguïté, de rechercher quelle a été la commune intention des parties au contrat ; que lorsqu'il estime, pour la bonne compréhension du litige, que l'interprétation nécessite de prendre connaissance d'un autre acte, il lui appartient d'enjoindre aux parties de le produire, sans pouvoir s'arrêter à l'ambiguïté des termes du contrat invoqué devant lui ; qu'en se bornant à relever en l'espèce qu'il ne lui était pas possible de comprendre le terme de « dommages immatériels » dès lors que les conditions générales de la police d'assurance, susceptibles de contenir la définition de ce terme, n'avaient pas été produites par les parties, la cour d'appel a violé l'article 1134, ensemble l'article
1161 du Code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, les juges sont tenus de ne pas dénaturer les écritures des parties et les pièces produites à leur soutien ; qu'en opposant en l'espèce que la notion contractuelle de « dommages immatériels » figurant dans les conditions particulières sur lesquelles se fondait la société SOTRALENTZ n'était pas définie dans la police d'assurance produite par cette société, cependant que l'article 9 de cette police « Responsabilité civile du chef d'entreprise » définissait les dommages immatériels comme « Tout préjudice pécuniaire résultant de la privation de jouissance d'un droit, de l'interruption d'un service rendu par une personne ou par un bien meuble ou immeuble, ou de la perte d'un bénéfice et qui est la conséquence de dommages corporels ou matériels ou non garantis », la cour d'appel a dénaturé le contrat d'assurance conclu le 7 juin 1993, en violation de l'article
1134 du Code civil ;
ET ALORS QUE, troisièmement, les juges sont tenus d'examiner les pièces produites par les parties au soutien de leur prétention ; qu'en prétextant de l'absence de production des conditions générales pour s'abstenir de rechercher si la définition de la notion de « dommages immatériels » ne figurait pas aux conditions spéciales de la police produites par les parties à l'instance, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard de l'article
1134 du Code civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES de sa demande visant à être indemnisée par son assureur de responsabilité, la société GAN ASSURANCES, des sommes versées en réparation du préjudice subi par la société LORRAINE SERVICES au titre d'une augmentation de son taux de cotisation sociale faisant suite aux accidents du travail subis par deux de ses salariés mis à disposition de la société OBRINGER, du groupe SOTRALENTZ ;
AUX MOTIFS QUE « la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES prétend mobiliser, outre les garanties spécifiques de l'article 2 des conventions spéciales relatives notamment à la responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés, la garantie de base des " dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels non-garantis " qui ont été causés en cours d'exploitation, n'explicitant pas plus ce dernier fondement ; que compte tenu du renvoi fait dans les conclusions de l'intimée à sa pièce 2, sur laquelle sont surlignés les termes " dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels non-garantis ", la cour peut en déduire qu'elle entend mettre en oeuvre une " garantie commune aux risques responsabilité civile d'exploitation et responsabilité civile après livraison ou achèvement des travaux ", la cour restant en l'absence de production des conditions générales de la police dans l'ignorance de la définition contractuelle du dommage immatériel ; qu'au surplus, et ainsi que l'invoque la SA GAN ASSURANCES, celle-ci peut utilement opposer la clause d'exclusion dont l'existence n'est pas contestée et qui vise les conséquences de la violation " consciente et délibérée " des règles de sécurité au travail, la condamnation pénale du cadre de l'entreprise ayant délégation en matière de sécurité au titre tant des blessures involontaires que des infractions à la sécurité du travail (l'arrêt confirmant la déclaration de culpabilité prononcée en première instance au titre de cette double prévention) induisant le caractère conscient et délibéré de la violation des dispositions protectrices de la sécurité des travailleurs, la lecture des décisions pénales confortant d'ailleurs l'analyse de l'assureur, puisqu'il y est stigmatisé une absence de signalisation de l'alimentation en oxygène (qui a été confondue par les victimes avec l'alimentation en air comprimé), le refus de fournir aux salariés qui en avaient fait la demande, des équipements de protection individuelle ainsi qu'une carence dans l'accueil du personnel intérimaire qui ne recevait aucune formation renforcée à la sécurité du travail en atmosphère confinée, le tribunal correctionnel (§ D46 et D 52 du jugement) retenant les'défaillances de l'entreprise OBRINGER. relativement à la sécurité, malgré la connaissance que pouvaient avoir les responsables des risques encourus notamment d'incendies ainsi que l'aveu du prévenu quant au choix délibéré de l'entreprise de ne pas dispenser de formation à la sécurité au personnel intérimaire alors même qu'elle y avait fréquemment recours » (arrêt, p. 4 et 5) ;
ALORS QUE, premièrement, les juges sont tenus d'examiner par eux-mêmes les faits dont ils sont saisis sans pouvoir procéder par voie de référence à des causes déjà jugées ; qu'en l'espèce, l'article 5 de la police d'assurance souscrite par la société OBRINGER, dans les droits de laquelle se trouve la société SOTRALENTZ, excluait de la garantie les dommages résultant d'une violation consciente et délibérée d'une obligation professionnelle par l'assuré ou par la direction de l'entreprise assurée ; qu'en se fondant entièrement sur les motifs du jugement pénal rendu à l'égard de M. X... pour en déduire que la société SOTRALENTZ ou sa direction avait violé de façon consciente et délibérée les obligations de sécurité qui s'imposaient à elle, la cour d'appel a violé l'article
455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, deuxièmement, l'autorité de la chose jugée ne vaut qu'entre litiges présentant une identité d'objet, de cause et de parties ; que si les constatations résultant des motifs d'un jugement pénal peuvent s'imposer au juge civil, ce n'est que pour autant qu'elles concernent les éléments constitutifs de la faute commise par l'auteur visé par l'action publique et actionné ensuite en réparation par la victime devant la juridiction civile ; qu'en retenant en l'espèce qu'il se déduisait des motifs d'un jugement pénal rendu contre M. X..., seul visé à la prévention, que la société SOTRALENTZ, demanderesse à une action en indemnisation contre son assureur, avait violé de façon consciente et délibérée les obligations de sécurité qui étaient les siennes, la cour d'appel a violé les articles
1351 du Code civil et
480 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, troisièmement, en cas de délégation de pouvoir, l'infraction aux règles de sécurité retenue contre le salarié délégataire exclut d'imputer la même infraction au dirigeant délégant ; que par ailleurs, le pouvoir de gestion délégué à un cadre salarié dans l'administration du service dont il a la charge ne suffit pas à le constituer comme autorité dirigeante de l'entreprise ; qu'en se fondant sur la condamnation pénale de M. X..., qui était cadre salarié chargé de la fabrication et simple délégataire de pouvoir pour la sécurité de son service, pour opposer à la société SOTRALENTZ l'exclusion de garantie prévue à l'article 5 de la police d'assurance en tant que celui-ci visait que la faute délibérée de l'entreprise assurée ou de sa direction, la cour d'appel a violé l'article
1134 du Code civil ;
ALORS QUE, quatrièmement, les infractions consistant à infliger des blessures involontaires ou à méconnaître la réglementation du travail relative à la sécurité des salariés sont des infractions non intentionnelles qui n'impliquent pas en elles-mêmes que les règles de prudence et de sécurité méconnues l'aient été de façon délibérée par l'auteur poursuivi, cet état d'esprit constituant seulement une circonstance aggravante des délits d'atteinte involontaire à la personne ; qu'en l'espèce, M. X... a été reconnu coupable d'avoir, en sa qualité de responsable du service de fabrication de la société OBRINGER, enfreint les règles de sécurité prévues par le Code du travail et causé une incapacité totale de travail de plus de trois mois à deux salariés de la société LORRAINE SERVICES ; que la circonstance aggravante tirée d'une violation délibérée d'une obligation particulière de sécurité n'a pas été retenue à la prévention ; qu'en déduisant néanmoins de cette condamnation que la direction de la société SOTRALENTZ aurait consciemment et délibérément violé les règles de sécurité au travail, la cour d'appel a violé l'article
480 du Code de procédure civile, ensemble les articles
121-3 et
222-19 du Code pénal et l'article L. 263-2 ancien du Code du travail ;
ET ALORS QUE, cinquièmement, et en toute hypothèse, les juges sont tenus de ne pas méconnaître les décisions de justice revêtues de l'autorité de la chose jugée ; qu'en l'espèce, le jugement du 14 avril 1999 rendu par le Tribunal correctionnel de Sarreguemines a simplement observé dans ses motifs que le frère de l'une des victimes accusait la direction de la société OBRINGER d'avoir eu connaissance des risques qu'elle faisait encourir à ses salarié, et que M. X... avait fait savoir qu'il n'avait pas ressenti pour sa part la nécessité de fournir des équipements de protection aux salariés qui le demandaient ou encore de dispenser au personnel intérimaire une formation en matière de sécurité ; qu'en déduisant de ces seules constatations que la direction de la société avait consciemment et délibérément violé les obligations de sécurité qui lui incombaient, la cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article
480 du Code de procédure civile.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES de sa demande visant à être indemnisée par son assureur de responsabilité, la société GAN ASSURANCES, des sommes versées en réparation du préjudice subi par la société LORRAINE SERVICES au titre d'une augmentation de son taux de cotisation sociale faisant suite aux accidents du travail subis par deux de ses salariés mis à disposition de la société OBRINGER, du groupe SOTRALENTZ ;
AUX MOTIFS QUE « la demande de la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES ne peut éventuellement prospérer que sur le fondement du volet " responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés " des conventions spéciales qu'elle produit en pièce 1 étant relevé que l'article 1 de ces conventions sont étrangères au volet " responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés " dès lors qu'il définit la garantie de base (soit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir à l'égard des tiers en cours d'exploitation ou de travaux effectués à l'extérieur ou du fait des matériels ou produits livrés) et qu'il ne peut donc avoir une quelconque contradiction entre cet article et l'article suivant ;
que l'article 2 relatif à la responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés est ainsi rédigé :
« Par dérogation partielle à l'article 9 § 02 (qui qualifie de tiers les préposés de l'entreprise) des présentes conventions, la garantie est étendue aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile encourue par l'assuré en qualité d'employeur en raison des dommages survenus à son personnel du fait des risques définis ci-après.
A – Faute inexcusable de l'assuré ou d'un substitué dans la direction (article L. 452-1 code de la sécurité sociale)
La garantie s'applique au remboursement des sommes dont l'assuré est redevable à l'égard de la caisse primaire d'assurance maladie à la suite d'accident du travail dont seraient victimes ses préposés ou salariés et imputables à la faute inexcusable de l'assuré ou des personnes que l'assuré s'est substitué dans la direction de son entreprise.
Le remboursement porte :
- Sur le montant des cotisations supplémentaires prévues à l'article
L. 452-2 du Code de la Sécurité sociale ".
- Sur le montant de 1'indemnisation complémentaire à laquelle la victime ou ses ayants-droit peuvent prétendre en application de l'article
L. 452-3 du Code de la sécurité sociale.
Sont exclues les cotisations supplémentaires pouvant incomber l'assuré en application de l'article
L. 242-7 du Code de la sécurité sociale » ;
que ces stipulations sont claires et sans ambiguïté, l'assurée, en sa qualité d'employeur, ne pouvant pas se méprendre sur la portée des renvois au code de la sécurité sociale dans ses dispositions relatives à la définition et aux conséquences de la faute inexcusable ; qu'elles distinguent les cotisations supplémentaires de l'article
L. 452-2 du code de la sécurité sociale qui correspondent, ainsi que l'énonce le texte, à la récupération par la caisse de la majoration des rentes versées au salarié victime ou à ses ayants droit, de la majoration de cotisation de l'article
L. 242-7 (visée à L. 452-4) imposée à l'entreprise au constat d'un risque majoré d'accident de travail et destinée à alimenter un fond de prévention, le dernier alinéa de l'article 2 A de la police apparaissant redondant et venant préciser l'étendue de la garantie et non ériger une exclusion, ce qui rend inopérant le moyen tiré de l'article
L. 113-1 du code des assurances ;
qu'enfin, l'article 442-6 du code de commerce (comme l'article 36 de l'ordonnance du le décembre 1986 qui l'a précédé) est relatif à la concurrence et aux pratiques restrictives et n'est pas utilement invoqué en l'espèce, la cour n'ayant pas à rechercher l'existence d'éléments de fait de nature à établir la violation d'un texte qui est simplement cité par la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES ;
que dès lors, la société SOTRALENTZ METAL INDUSTRIES n'est pas fondée à solliciter le remboursement des sommes versées en exécution de la condamnation à rembourser, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, le surcroît des cotisations accident du travail supportés par l'entreprise de prêt de main d'oeuvre, la décision déférée devant être infirmée » (arrêt, p. 5 et 6) ;
ALORS QUE, premièrement, les juges sont tenus de ne pas méconnaître l'objet du litige ; qu'en l'espèce, par contrat du 7 juin 1993, la société GAN ASSURANCES s'est engagée, selon l'article 1er de la police « Conventions spéciales – Responsabilité civile du chef d'entreprise », à garantir l'assuré des conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile à raison des dommages causés aux tiers dans l'exercice de son activité professionnelle ; qu'en l'espèce, la société SOTRALENTZ demandait à la société GAN ASSURANCES de la garantir des sommes versées à la société LORRAINE SERVICES en réparation du préjudice subi par cette dernière du fait de l'augmentation de son taux de cotisation sociale par suite des deux accidents du travail survenus en 1995 ; qu'en opposant que, eu égard à l'objet de cette demande, il convenait, non pas d'appliquer l'article 1er de la police, mais l'article 2 relatif à la responsabilité encourue par l'assuré à l'égard de ses préposés, cependant que le sinistre invoqué par la société SOTRALENTZ ne concernait pas ses obligations à l'égard de ses préposés, la cour d'appel a violé l'article
4 du Code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, il résulte en l'espèce de l'article 2, A, de cette même police « Conventions spéciales – Responsabilité civile du chef d'entreprise » que la garantie due par l'assureur s'étend aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile encourue par l'assuré en qualité d'employeur à raison des dommages survenus à ses salariés par suite d'une faute inexcusable de sa part, étant précisé que la garantie s'applique au remboursement des sommes dont l'assuré est redevable envers les organismes de sécurité sociale et que ce remboursement porte alors sur le montant des cotisations supplémentaires dues en application des articles
L. 452-2 et
L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, à l'exclusion de celles pouvant incomber à l'assuré en application de l'article L. 242-7 du même Code ; qu'en l'espèce, l'augmentation du taux de cotisation imposée par la caisse d'assurance maladie sur le fondement de l'article
L. 242-7 du Code de la sécurité sociale ne concernait pas la cotisation due par la société SOTRALENTZ mais celle versée par la société LORRAINE SERVICES et se justifiait par les accidents du travail subis par les propres salariés de cette société ; qu'en se fondant néanmoins sur l'exclusion prévue au dernier alinéa de l'article 2 A de la police d'assurance, la cour d'appel a une nouvelle fois méconnu l'objet du litige, en violation de l'article
4 du Code de procédure civile.