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Tribunal administratif de Melun, 15 mars 2023, 2104291

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Melun
  • Numéro d'affaire :
    2104291
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Série identique - rejet
  • Nature : Ordonnance
  • Avocat(s) : SCP CARLINI & ASSOCIES
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Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Melun
15 mars 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête, enregistrée le 7 mai 2021, Mme C A, représentée par Me Laillet, demande au tribunal : 1°) d'annuler l'arrêté collectif du 12 octobre 2020 en tant que la directrice du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière l'a reclassée dans un nouvel échelon à compter du 1er octobre 2020 et, par voie de conséquence, la décision de reclassement notifiée par le Grand hôpital de l'Est francilien le 26 octobre 2020 ; 2°) d'enjoindre au centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière de la reclasser à " l'échelon souhaité " et de reconstituer sa carrière, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa requête est recevable ; - l'arrêté du 12 octobre 2020 a été pris par une autorité incompétente ; - le décret n° 2020-1182 du 28 septembre 2020, sur le fondement duquel ont été prises les décisions attaquées, porte atteinte aux principes d'égal accès aux emplois publics et à l'égalité de traitement à laquelle ont droit les agents appartenant à un même corps, principes garantis par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, constitue une discrimination indirecte en méconnaissance de l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 et porte atteinte au " principe de confiance légitime " ; - la décision du 12 octobre 2020, qui a pour effet de la reclasser à un échelon inférieur à celui qu'elle détenait antérieurement, a le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée, celle de l'abaissement d'échelon prévue par l'article 81 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986. La requête a été communiquée au centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière qui n'a produit aucun mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de la santé publique ; - le code des relations entre l'administration et le public ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ; - le décret n° 2007-704 du 4 mai 2007 ; - le décret n° 2020-1182 du 28 septembre 2020 ; - la décision n°s 445031, 446862, 446939, 447078 et 450650 du Conseil d'Etat en date du 28 octobre 2022 ; - le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit

: 1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (), les présidents de formation de jugement des tribunaux () peuvent, par ordonnance : / () ; / 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; / 6° Statuer sur les requêtes relevant d'une série, qui, sans appeler de nouvelle appréciation ou qualification de faits, présentent à juger en droit, pour la juridiction saisie, des questions identiques à celles qu'elle a déjà tranchées ensemble par une même décision devenue irrévocable, à celles tranchées ensemble par une même décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux () ; / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. / () ". 2. Mme A, praticienne hospitalière titulaire au Grand hôpital de l'Est francilien a, par arrêté du 12 octobre 2020 de la directrice générale du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG), pris sur le fondement du décret du 28 septembre 2020 relatif à la modification de la grille des émoluments des praticiens hospitaliers à temps plein et des praticiens des hôpitaux à temps partiel, été reclassée à un nouvel échelon, à compter du 1er octobre 2020. Par une décision du 26 octobre 2020, le directeur du GHEF a, aux visas du décret du 28 septembre 2020 et de l'arrêté collectif de la directrice générale du CNG du 12 octobre 2020, reclassé Mme A, à compter du 1er octobre 2020, au 4ème échelon. Par courrier du 11 décembre 2020, reçu le 18 janvier 2021, Mme A a formé un recours gracieux auprès de la directrice générale du CNG. Le silence gardé par la directrice générale sur cette demande pendant plus de deux mois a fait naître une décision implicite de rejet en application des dispositions du 5° de l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration. Par la présente requête, Mme A demande l'annulation de l'arrêté collectif du 12 octobre 2020 en tant que la directrice générale du CNG l'a reclassée, à compter du 1er octobre 2020, à un nouvel échelon et la décision du 26 octobre 2020 par laquelle le directeur du GHEF l'a reclassée au 10ème échelon, à compter du 1er octobre 2020. 3. En premier lieu, en application du 2° du deuxième alinéa de l'article 2 du décret n° 2007-704 du 4 mai 2007 relatif à l'organisation et au fonctionnement du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et modifiant le code de la santé publique, le directeur du CNG assure, " en qualité d'autorité investie du pouvoir de nomination et, au nom du ministre chargé de la santé ", la " nomination et les autres actes de gestion de la carrière des praticiens hospitaliers ainsi que le suivi de l'évolution des emplois et des compétences les concernant ". 4. Par un arrêté du 15 juillet 2019, régulièrement publié le 31 juillet 2019 au Journal officiel de la République française, la ministre des solidarités et de la santé a nommé Mme B, directrice générale du CNG pour une durée de trois ans à compter du 1er septembre 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme B n'était pas compétente pour signer l'arrêté du 12 octobre 2020 est manifestement infondé. 5. En deuxième lieu, Mme A soutient, par la voie de l'exception, que le décret du 28 septembre 2020 porte atteinte aux principes d'égal accès aux emplois publics et à l'égalité de traitement à laquelle ont droit les agents appartenant à un même corps, principes garantis par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, constitue une discrimination indirecte en méconnaissance de l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 et porte atteinte au " principe de confiance légitime ". 6. Le moyen de Mme A analysé au point 5. de la présente ordonnance, sans appeler de nouvelle appréciation ou qualification de faits, présente à juger en droit des questions identiques à celles déjà tranchées par une décision n°s 445031, 446862, 446939, 447078 et 450650 rendue par le Conseil d'Etat le 28 octobre 2022. 7. Le décret du 28 septembre 2020 modifie la grille des émoluments des praticiens hospitaliers à temps plein et à temps partiel, en fusionnant, dans le cadre d'une revalorisation de ces émoluments, les quatre premiers échelons, d'une durée d'un an pour les deux premiers et deux ans pour les deux suivants, en un seul échelon d'une durée de deux ans. Ce décret définit également les conditions de reclassement des membres présents dans le corps, en prévoyant notamment, à son article 7, que les agents classés entre le premier et le troisième échelon sont reclassés, à compter de son entrée en vigueur, intervenue le 1er octobre 2020, au premier échelon de la nouvelle grille, sans que l'ancienneté acquise dans leur précédent échelon ne soit conservée, tandis que les praticiens classés au quatrième échelon sont reclassés à la même date au même premier échelon en conservant leur ancienneté acquise dans leur précédent échelon et que les praticiens précédemment classés du cinquième au treizième échelon sont respectivement reclassés, à la même date, et en fonction de l'échelon qu'ils avaient, du deuxième au dixième échelon en conservant également leur ancienneté acquise dans leur précédent échelon. 8. Tout d'abord, la différence de traitement, résultant de la modification apportée par le décret aux règles applicables au corps des praticiens hospitaliers, entre les agents qui ont été recrutés dans ce corps avant la date à laquelle est entrée en vigueur la modification statutaire et ceux qui ont été recrutés sous l'empire des nouvelles règles est inhérente à la succession dans le temps des règles applicables et n'est pas, par elle-même, contraire au principe d'égalité et ne constitue pas davantage une discrimination indirecte. 9. Ensuite, eu égard aux modalités de reclassement retenues par le décret, qui placent au même niveau d'ancienneté dans l'échelon les praticiens nommés au 1er octobre 2020 et les praticiens précédemment classés entre le premier et le troisième échelon et reclassés à cette date au même premier échelon, et qui, par ailleurs, prévoient la conservation de l'ancienneté dans l'échelon des praticiens précédemment classés au quatrième échelon et au-delà, il ne résulte du décret du 28 septembre 2020 aucune inversion illégale dans l'ordre d'ancienneté au sein du corps. La circonstance que ce décret se combine avec la règle, résultant de l'article R. 6152-17 du code de la santé publique, qui prévoit que le classement dans l'emploi de praticien hospitalier des agents qui sont nommés dans le corps tient également compte, notamment, de la durée des fonctions de même nature effectuées antérieurement à leur nomination et présentant un intérêt pour le service public hospitalier, est sans incidence sur le respect du principe d'égalité entre agents d'un même corps, les fonctions ainsi prises en compte ne relevant pas d'une ancienneté dans le corps et n'entraînant ainsi aucune inversion illégale dans l'ordre d'ancienneté au sein du corps ni aucune discrimination indirecte basée sur l'âge. 10. Enfin, Mme A soutient que le décret du 28 septembre 2020 porte atteinte au " principe de confiance légitime " dans la mesure où il ne permet pas un reclassement des praticiens titularisés avant l'entrée en vigueur de ce décret dans la nouvelle grille des émoluments des praticiens hospitaliers. 11. Toutefois, Mme A, en se bornant à évoquer les enjeux du " Ségur de la santé " et les prises de position de certains membres du gouvernement et des organisations syndicales souhaitant œuvrer vers une refonte globale du système de santé et une meilleure fidélisation des professionnels médicaux dans un contexte de crise sanitaire, n'assortit son argument que de faits manifestement insusceptibles de venir à son soutien. 12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6. à 11. de la présente ordonnance que le moyen de Mme A analysé au point 5. doit dès lors être écarté. 13. En troisième et dernier lieu, Mme A soutient que la décision du 12 octobre 2020, qui a pour effet de la reclasser à un échelon inférieur à celui qu'elle détenait antérieurement, a le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée, celle de l'abaissement d'échelon prévue par l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986. 14. La décision du 12 octobre 2020, qui met seulement en œuvre les dispositions du décret du 28 septembre 2020, n'a toutefois ni pour objet ni pour effet d'infliger l'une des sanctions disciplinaires mentionnées à l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986. Le moyen analysé au point 13. de la présente ordonnance est dès lors inopérant et doit ainsi, et en tout état de cause, être écarté. 15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté collectif du 12 octobre 2020 en tant que la directrice générale du CNG l'a reclassée, à compter du 1er octobre 2020, à un nouvel échelon ainsi et pas davantage fondée à demander celle de la décision du 26 octobre 2020 par laquelle le directeur du GHEF l'a reclassée au 4ème échelon, à compter du 1er octobre 2020. Ses conclusions aux fins d'annulation doivent par suite être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E:

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme C A et au centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière. Copie en sera adressée pour information au Grand hôpital de l'Est francilien. Fait à Melun, le 15 mars 2023. La présidente de la 9ème chambre, S. BONNEAU-MATHELOT La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. SCHILDER