SOC.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 mars 2020
Cassation partielle
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 343 F-D
Pourvoi n° H 18-26.114
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. U....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 15 novembre 2018.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020
M. N... U..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° H 18-26.114 contre l'arrêt rendu le 31 octobre 2017 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Vindemia Distribution Jumbo Score Duparc, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. U..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Vindemia Distribution Jumbo Score Duparc, après débats en l'audience publique du 11 février 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, M. Liffran, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 31 octobre 2017), M. U..., engagé en qualité d'agent d'entretien le 28 avril 2006 par la société Sodexmar, aux droits de laquelle vient la société Vindemia Distribution Jumbo Score Duparc, tout d'abord selon un contrat à durée déterminée renouvelé jusqu'au 11 mars 2007, puis selon un nouveau contrat à durée déterminée le 8 décembre 2007 renouvelé, transformé en un contrat de travail à durée indéterminée le 30 mai 2008, avec reprise d'ancienneté au 8 décembre 2007, a été victime d'un accident du travail le 15 janvier 2010, a été déclaré inapte à l'issue de deux examens médicaux le 15 février 2012 et a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 7 août 2012.
2. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater le bien fondé du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, de rejeter les demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et les demandes en découlant, les demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement et les demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral, alors « qu'il appartient à l'employeur, qui peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte, de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que le refus implicite par le salarié de l'unique poste de reclassement proposé n'implique pas, à lui seul, le respect par l'employeur de son obligation de reclassement ; que dans ses conclusions d'appel M. U... faisait valoir qu'à supposer qu'il ait refusé le seul poste proposé, ce refus ne pouvait justifier à lui seul l'impossibilité de reclassement de l'employeur sur un autre poste dans l'entreprise et parmi celles du groupe ; qu'en considérant que l'obligation de reclassement était réputée satisfaite dans la mesure où l'employeur avait proposé un seul emploi de poste d'hôte de caisse au sein du magasin Score de Bellepierre qui prenait en compte l'avis du médecin du travail, la cour d'appel a violé les articles
L. 1226-10 et
L. 1226-12 du code du travail dans leur rédaction applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
Vu
les articles
L. 1226-10 et
L. 1226-12 du code du travail, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 et le second dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 :
4. Il résulte du premier de ces textes que lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. Selon le second de ces textes, lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article
L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III.
5. Pour rejeter les demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient
que l'obligation de reclassement est réputée satisfaite dans la mesure où l'employeur a proposé un emploi de poste d'hôte de caisse au sein du magasin Score de Bellepierre qui prenait en compte l'avis et les indications du médecin du travail, qui a été refusé implicitement par le salarié.
6. En se déterminant ainsi
, alors que le refus par le salarié d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement n'implique pas à lui seul le respect par celui-ci de cette obligation, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'employeur établissait que le poste proposé était le seul poste disponible conforme aux préconisations du médecin du travail, n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
6. La cassation prononcée n'atteint pas les chefs de dispositif rejetant les demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement et les demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral que les critiques du moyen n'étaient pas susceptibles d'atteindre.
PAR CES MOTIFS
, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette les demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement et les demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral, l'arrêt rendu le 31 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne la société Vindemia Distribution Jumbo Score Duparc aux dépens ;
En application de l'article
700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Vindemia Distribution Jumbo Score Duparc et la condamne à payer à la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. U....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir constaté le bien fondé du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de M. U..., rejeté les demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et les demandes en découlant, rejeté les demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement et les demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
Selon M. U..., la société a abusivement considéré qu'il avait refusé le poste de reclassement proposé pour engager hâtivement la procédure de licenciement. Or, la société considère que les réserves de M. U... étaient telles qu'elles constituaient un refus de la proposition faite et rendaient, en pratique, impossible son reclassement. En l'absence d'autre solution de reclassement, cette situation rendait nécessaire, selon la société, l'engagement d'une procédure de licenciement.
En application des articles
L. 1226-10 et suivants du code du travail, la rupture du contrat de travail ne peut intervenir qu'en cas d'impossibilité de reclassement.
Ainsi, lorsque le salarié victime d'un accident du travail est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article
L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.
L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article
L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.
En l'espèce, la lettre de licenciement, en date du 7 août 2012, qui fixe définitivement les limites du litige, énonce :
« Suite à vos visites médicales en date des 1er et 15 février 2012, le médecin du travail vous a déclaré :
Lors de la visite du 1er février 2012 : « inapte à tout poste dans l'établissement JUMBO Score de Ste Marie. 1ère visite (article
R.4624-31 du code du travail) - 2ème visite à prévoir le mercredi 15 février 2012. »
Lors de la visite du 15 février 2012 : « inapte à tout poste dans l'établissement JUMBO Score de Ste Marie (suite à AT du 15 janvier 2010) - 2ème visite (article
R. 4624-31 du code du travail) ».
Pour faire face à cette situation, nous avons recherché plusieurs solutions de reclassement au sein de notre Groupe. A cet effet nous avons recherché les emplois disponibles :
correspondant aux recommandations de la médecine du travail qui lors d'un entretien en date du 13 février2012 avec la Sameth, nous a contre-indiqué un port de charges lourdas, une manipulation de produits d'entretiens susceptible de contenir des agents chimiques, un travail exposé au froid ainsi qu'un lieu de travail en dehors de la zone Nord-Est de l'Ile compte tenu de vos contraintes pour effectuer le trajet ;
approprié à vos capacités, notamment aux aptitudes acquises dans le cadre de votre formation initiale, et aussi comparable que possible à l'emploi que vous occupiez précédemment au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail
Sans pour autant limiter l'étendue de nos recherches de reclassement nous avons également pris en considération vos souhaits professionnels, présentés à notre Directrice des Ressources Humaines, Mme F... M... et à notre Manager Prévention des Risques, M. J... Y... lors de l'entretien du 22 mars 2012 à savoir : un reclassement sur un poste du secteur « textile » ou un poste à responsabilité en caisse.
Vous aviez alors précisé que vous ne souhaitiez pas reprendre vos anciennes fonctions d'agent d'entretien afin d'éviter tout contact avec les produits utilisés pour le nettoyage.
Considérant les éléments exposés ci-dessus par courrier en date du 30 mars 2012, nous vous avons précisé que nous ne pouvions pas vous proposer un poste sur le secteur « textile » dans la mesure où celui-ci nécessiterait un port de charges lourdes. Seul l'établissement de Ste Marie dispose d'un effectif suffisant au sein du rayon « textile » permettant de mettre une organisation avec un poste aménagé sans port de charges lourdes mais l'avis d'inaptitude de la médecine du travail ne nous permet pas de continuer à vous faire travailler au sein de l'établissement de Ste Marie.
Nous vous avons alors proposé dans ce même courrier un reclassement sur le poste d'Hôte de Caisse au magasin Score de Bellepierre, poste conforme aux prescriptions de la médecine du travail et vous permettant par ailleurs de connaître les basiques du métier de la caisse en magasin, essentiels avant d'envisager l'exercice de responsabilités sur ce secteur.
Nous avons également proposé de réaliser un bilan de compétence.
Enfin, nous vous informions que faute de vous avoir reclassé dans le délai d'un mois qui nous était imparti nous avions repris le paiement de vos salaires à compter du 15 mars 2012. Ce paiement a été effectué sans déduction des éventuelles prestations de sécurité sociale et de prévoyance versées dans le cadre de vos arrêts de travail pendant la période considérée.
Par avis en date du 30 mars 2012 la médecine du travail vous a déclaré « apte à une reprise de poste d'hôte de caisse dans le cadre d'un reclassement suite à un avis d'inaptitude en 2 visites (1er et 15 février 2012) ».
Faute de réponse de votre part à notre proposition de poste de reclassement, nous avons réitéré celle-ci par courrier en date du 24 avril 2012 auquel vous avez finalement répondu la 3 mai 2012 en indiquant que vous acceptiez de réaliser un bilan de compétence. Toutefois, vous n'avez apporté aucune réponse à notre proposition de poste.
Dans le cadre de différents échanges téléphoniques avec nos services, vous avez annoncé que ce poste ne vous convenait pas car il était trop éloigné de votre domicile et qu'il engendrerait des frais trop importants.
Pour autant malgré nos relances, nous ne disposons toujours pas d'une réponse claire et non équivoque de votre part sur la proposition de reclassement faite.
C'est pourquoi par courrier en date du 5 juin, nous vous avons à nouveau demandé de vous prononcer sur cette proposition de poste tout en attirant votre attention sur le fait que la réalisation du bilan de compétence n'était qu'une mesure complémentaire à cette proposition.
Nous vous confirmons alors que nous n'avions pas d'autre poste disponible, à la fois compatible avec vos capacités professionnelles et votre état de santé, à vous proposer de sorte qu'un refus de votre part nous contraindrait à envisager la rupture de nos relations contractuelles.
Par courrier en date du 18 juin, soit près de 3 mois après notre 1er courrier de proposition de poste et par conséquent après un délai de réflexion plus que raisonnable, vous avez finalement répondu à notre proposition de poste d'hôte de caisse au sein du magasin de Score Bellepierre mais sous réserves :
de votre état de santé,
des résultats du bilan de compétence,
de précisions sur votre rémunération et vos horaires de travail.
A cet effet, par courrier en date du 12juillet 2012, nous vous avons rappelé que :
le poste proposé correspond aux recommandations de la médecine du travail ;
le bilan de compétence n'est qu'une mesure complémentaire à votre reclassement et n'a aucunement pour effet de conditionner celui-ci ;
votre horaire contractuel ainsi que votre rémunération demeurent inchangés ;
vous n'êtes pas sans savoir que vos horaires peuvent varier en fonction de l'activité de votre département et des périodes de forte ou faible activité.
Par conséquent, vous avez enfin répondu à notre proposition de poste de reclassement mais en nous imposant d'attendre les résultats du bilan de compétence. Or, comme nous vous l'avions déjà expliqué à plusieurs reprises, les résultats du bilan ne conditionnent pas votre prise de poste. Vous pouvez occuper le poste d'hôte de caisse à score Bellepierre sans réaliser de bilan de compétence.
En nous imposant d'attendre les résultats de votre bilan de compétence vous n'acceptez pas de façon claire et non équivoque notre proposition et nous restons encore dans l'attente de votre réponse définitive.
Par ailleurs, les résultats de votre bilan de compétence ne sont pas connus avant la fin du mois de septembre 2012 ce qui repousse d'autant votre éventuelle reprise de poste et nous oblige à laisser l'organisation du magasin score Bellepierre en l'état. Or, notre activité ne nous le permet pas.
Vos conditions sont telles qu'elles ne nous permettent pas de vous reclasser effectivement au poste hôte de caisse au sein de score Bellepierre
En tant qu'employeur, il nous appartient de vous reclasser ou à défaut d'engager une procédure de licenciement. Le délai imparti d'1 mois pour ce faire étant largement dépassé, nous ne pouvons attendre plus encore.
Par conséquent, et à défaut de pouvoir vous proposer un autre poste de reclassement correspondant aux recommandations de la médecine du travail nous vous avons convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 25 juillet 2012.
Lors de cet entretien, auquel vous avez été accompagné de Mme S... L... X..., déléguée du personnel nous vous avons exposé les faits cités ci-dessus et expliqué que nous n'étions pas en mesure de vous proposer d'autres solutions de reclassement conformes aux recommandations du médecin du travail.
Nous avons rappelé que le bilan de compétence ne conditionnait pas votre reclassement et que vous pouviez occuper ce poste sans avoir à réaliser de bilan de compétence. Nous vous avons précisé que nous mettrions en place une formation « caisse » à votre prise de poste afin de vous permettre d'assurer pleinement vos nouvelles missions. Certes, notre Manager Prévention des Risques, M. J... Y... vous a informé de l'importance de ce bilan mais il vous avait également précisé que ce bilan n'était pas indispensable à votre reclassement.
Nous vous avons une nouvelle fois expliqué que nous n'étions pas en mesure de vous proposer un autre poste aussi comparable que possible à votre précédent emploi correspondant aux recommandations de la médecine du travail et approprié à vos capacités fût-ce par mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.
A aucun moment vous n'avez exprimé le souhait de reprendre effectivement le travail au sein de notre entreprise. Vous avez expliqué que, depuis 2010, vous souffrez et que vous ne pouvez plus travailler compte tenu de votre état de santé.
Vous avez ajouté que notre procédure n'était pas la bonne et que nous aurions dû vous envoyer un courrier précisant le jour et la date de votre reprise du travail.
Par conséquent nous sommes dans l'impossibilité de vous reclasser
Au regard de la décision de la Caisse de Sécurité Sociale de La Réunion en date du 30 mars 2012 concluant à l'absence de lien entre l'inaptitude prononcée par le médecin du travail et votre accident du travail en date du 15 janvier 2010, nous vous notifions un licenciement pour cause d'inaptitude physique non professionnelle.
Votre état de santé ne vous permettant pas d'effectuer votre préavis votre contrat de travail prendra fin à la date d'envoi du présent courrier. [..] »
M. N... U... fait valoir que l'obligation de reclassement de l'employeur n'a pas été exécutée de bonne foi, dans la mesure où la société avait initialement conditionné l'offre de reclassement à la réalisation d'un bilan de compétences, ce qui a conduit M. U... à formuler des réserves. En outre, M. N... U... soutient qu'il n'a jamais formulé de refus exprès à cette proposition de reclassement.
Il fait également valoir que, quand bien même il aurait expressément refusé ledit poste, la société ne rapporte pas la preuve de l'impossibilité de reclassement sur un autre poste, et des recherches diligentées au niveau du Groupe.
En réplique, l'employeur considère que le licenciement de M. U... a été prononcé suite à l'inaptitude définitive du salarié à tout poste au sein de l'établissement de Sainte Marie (résultant d'une déclaration d'inaptitude à l'issue de deux visites médicales) et à l'impossibilité de le reclasser : les motifs qui se sont opposés au reclassement du salarié sont notamment le refus implicite du poste, lequel résultait de l'absence d'acceptation expresse et sans réserves de la proposition du poste d'hôte de caisse, disponible et correspondant aux capacités et aptitudes de M. U....
La société fait également valoir que le médecin du travail avait déclaré le salarié apte au poste d'hôte de caisse le 30 mars 2012, que ce poste répondait aux aspirations de M. U... telles que explicitées dans le cadre d'une rencontre en date du 22 mars 2012 et que ce poste correspondait à ses compétences professionnelles.
Néanmoins, la société fait valoir que M. U... n'a pas formalisé sa décision (à savoir acceptation ou refus de la proposition de poste) de manière claire et non équivoque, nonobstant les multiples relances.
Cette situation a conduit la société, faute de disposer d'autres postes disponibles, vacants et correspondants aux compétences et aptitudes du salarié, à engager la procédure de licenciement de M. U..., au terme de laquelle il a été licencié.
Au vu de ces éléments, force est de constater que l'employeur a respecté les préconisations du médecin du travail, à savoir une inaptitude à tout poste dans l'établissement de Sainte Marie et une restriction quant au port de charges lourdes.
Certes, les parties ne produisent pas d'écrits sur les restrictions émises relatives au port de charges lourdes par le médecin du travail et sur les souhaits professionnels émis par M. U..., mais il convient de relever que la contre-indication au port de charges lourdes est implicitement reconnue par les parties aux termes du courrier du 30 mars 2012 et que cette reconnaissance implicite suffit.
D'autant que le salarié a été déclaré apte au poste d'hôte de caisse en date du 30 mars 2012, ce poste n'impliquant pas le port de charges lourdes.
Il convient, en outre, de relever que ce poste n'impliquait pas une modification du contrat de travail dans la mesure où il était situé sur le même secteur géographique et où les horaires prévus au contrat de travail et la rémunération demeuraient inchangées.
Ainsi, il est manifeste que le poste proposé était comparable à l'emploi précédemment occupé, approprié aux capacités du salarié et répondait aux souhaits manifestés par M. U... lors de la rencontre du 22 mars 2012.
Par ailleurs, M. U... a bénéficié d'un délai plus que raisonnable de 3 mois pour réfléchir à cette proposition, l'employeur ayant, en outre, repris le versement des salaires, à l'issue du délai d'un mois suite à la déclaration d'inaptitude.
Enfin, l'employeur a répondu à l'intégralité des réserves émises par M. U... dans ses courriers des 18 et 19 juin 2012 par courrier en date du 12 juillet 2012. Or, nonobstant sa convocation à un entretien préalable et l'engagement de la procédure de licenciement, M. U... ne rapporte pas la preuve de son acceptation expresse et sans réserve du poste d'hôte de caisse.
Ainsi, force est de constater que, si à aucun moment, M. U... n'a refusé la proposition faite, il n'a, pour autant, pas accepté ledit poste.
L'acceptation du 18 juin 2012 assortie de réserves ne pouvait donc qu'être considérée comme un refus implicite de la proposition de reclassement, ce d'autant que le salarié ne rapporte pas la preuve d'une quelconque acceptation postérieurement au courrier du 12 juillet 2012.
Par conséquent, il convient de considérer que l'obligation de reclassement est réputée satisfaite dans la mesure où l'employeur a proposé un emploi de poste d'hôte de caisse au sein du magasin Score de Bellepierre qui prenait en compte l'avis et les indications du médecin du travail.
Au vu des moyens des parties, il doit être retenu que la société a respecté ses obligations dans le cadre de la recherche d'un reclassement, au bénéfice de M. U... et n'a donc pas rompu de manière abusive le contrat de travail de M. U..., compte tenu de l'impossibilité de reclassement.
Le jugement déféré est donc confirmé.
En conséquence, au vu de ses moyens et prétentions, Monsieur N... U... doit être débouté de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des demandes afférentes concernant l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis,
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE
Au vu des pièces versées aux débats et des explications fournies par les parties, il ressort que M. U... a été licencié pour inaptitude physique en date du 7août2012.
Attendu que l'article
L.1225-10 du code du travail qui dispose : «Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident ou travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à sas capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise.
« Dans les entreprises « d'au moins cinquante salariés », le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté.
»
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de postes ou aménagement du temps de travail. »
Qu'en l'espèce, cette disposition légale s'applique lorsque le contrat de travail est suspendu par des arrêts de travail consécutifs à un accident du travail. A l'issue de la suspension, à la reprise du travail, le médecin du travail le déclare inapte à reprendre l'emploi qu'occupait précédemment. Que 2 avis du médecin du travail doivent être délivrés à moins un mois d'intervalle pour déclarer l'inaptitude du salarié au poste qu'il occupait précédemment. L'employeur doit rechercher un emploi approprié à ses capacités.
Que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de postes ou aménagement du temps de travail.
Tel est le cas d'espèce, M. U... a été victime d'un accident du travail en date du 15 janvier 2010. Que son contrat a été suspendu depuis le 18 janvier 2010. Qu'il a fait une rechute le 13 mai 2010.
Qu'il était en arrêt de travail jusqu'au 30 janvier 2012.
Qu'en date du 1er février 2012, le médecin du travail l'a déclaré inapte à tout poste dans l'établissement de JUMBO Ste Marie.
Qu'en date du 15 février 2012 il a confirmé cette inaptitude. (pièce N° 6).
L'employeur était dans l'obligation de rechercher à reclasser M. U... sur un poste correspondant à la fois aux prescriptions médicales ainsi qu'aux compétences professionnelles de M. U....
Que l'employeur a pris en compte le souhait de M. U... de ne plus reprendre ses anciennes fonctions d'agent d'entretien que M. U... avait souhaité sur un poste du rayon « textile ».
Pour ce faire, l'employeur lui a proposé le poste d'hôte de caisse au magasin Score Bellepierre et en complément un bilan de compétence
En date du 30 mars 2012, le médecin du travail a conclu à son aptitude à la reprise à un poste d'hôte de caisse dans le cadre d'un reclassement en 2 visites.
Le 24 avril 2012, l'employeur lui demande de répondre s'il accepte ou non cette proposition de reclassement compatible avec son état de santé ainsi que son bilan de compétence, et ce, sous huitaine.
En date du 3 mai 2012, M. U... accepte qu'un bilan de compétence soit réalisé.
En date du 5 Juin 2012, l'employeur accuse réception de son accord pour que le bilan de compétence soit réalisé. Néanmoins, la réalisation de ce bilan de compétences est complémentaire à la proposition de reclassement pour le poste d'hôte de caisse. Il est précisé qu'en cas de refus de la proposition ou de non réalisation du bilan de compétences dans le délai imparti, la rupture des relations contractuelles serait envisagée faute de reclassement possible.
En date du 18 juin 2012, M. U... accepte la proposition de poste d'hôte de caisse à Score Bellepierre, sous réserve de son état de santé et s conclusion du bilan de compétence.
En date du 19 juin 2012, M. U... revient sur sa décision et rappelle qu'il accepte le poste d'hôte de caisse à Score Bellepierre sous réserve de son état de santé, de la conclusion du bilan de compétence, à condition de le mettre par écrit, les horaires de travail et le salaire qui lui sera attribué.
Le 12 juillet 2012, l'employeur lui répond que le poste qui lui a été proposé correspond aux recommandations de la médecine du travail, le bilan de compétence n'est qu'une mesure complémentaire à son reclassement. Que sa rémunération restera inchangée Les horaires sont en fonction de l'activité du service. L'employeur expose qu'il ne peut pas attendre les résultats du bilan de compétence, qui seront connus qu'en septembre 2012. Qu'il maintient es droits de M. U... depuis le mois de mars 2012. M. U... est donc convoqué à un entretien le 25 juillet 2012 à 15 heures en se faisant assister obligatoirement par une personne de son choix appartenant obligatoirement à l'entreprise.
Qu'en date du 7 août 2012, M. U... est licencié pour inaptitude physique.
Qu'en conséquence, l'employeur a satisfait à son obligation de proposition de reclasser M. U... dans un emploi d'hôte de caisse dans le groupe. Que M. U... a émis des réserves en date du 19 juin 2012. Que l'employeur lui a répondu sur les trois conditions qu'il a émises.
Dès lors qu'il a émis des réserves équivalant à un refus, l'employeur n'avait pas d'autre alternative que de rompre le contrat de travail. De ce fait, les demandes de M. U... sont irrecevables. Par conséquent le Conseil rejette toutes ses demandes indemnitaires afférentes au licenciement,
ALORS QU'il appartient à l'employeur, qui peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte, de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que le refus implicite par le salarié de l'unique poste de reclassement proposé n'implique pas, à lui seul, le respect par l'employeur de son obligation de reclassement ; que dans ses conclusions d'appel M. U... faisait valoir qu'à supposer qu'il ait refusé le seul poste proposé, ce refus ne pouvait justifier à lui seul l'impossibilité de reclassement de l'employeur sur un autre poste dans l'entreprise et parmi celles du groupe ; qu'en considérant que l'obligation de reclassement était réputée satisfaite dans la mesure où l'employeur avait proposé un seul emploi de poste d'hôte de caisse au sein du magasin Score de Bellepierre qui prenait en compte l'avis du médecin du travail, la cour d'appel a violé les articles
L.1226-10 et 1226-12 du code du travail dans leur rédaction applicable à la cause.