SOC.
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 février 2016
Rejet non spécialement motivé
M. LACABARATS, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président
Décision n° 10178 F
Pourvoi n° A 14-17.559
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. [O] [R], domicilié [Adresse 2],
contre l'arrêt rendu le 19 mars 2014 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [K] [V], domiciliée [Adresse 1], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Gel Moor,
2°/ au CGEA de Rennes, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 janvier 2016, où étaient présents : M. Lacabarats, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Geerssen, conseiller rapporteur, M. Betoulle, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. [R], de Me Blondel, avocat de Mme [V], ès qualités ;
Sur le rapport de Mme Geerssen, conseiller, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article
1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [R] aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille seize.
MOYEN ANNEXE
à la présente décision
Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. [R]
IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur [O] [R] de son contredit, d'avoir confirmé le jugement entrepris s'étant déclaré incompétent rationae materiae et ayant invité Monsieur [O] [R] à se pourvoir devant le Tribunal de Commerce de Lorient et d'avoir mis hors de cause le CGEA de RENNES.
- AU MOTIF QUE l'existence d'un contrat de travail étant une condition sine qua non de la compétence du conseil des prud'hommes, celui-ci peut d'office soulever son incompétence en requalifiant le contrat sur lequel se fonde l'action. Les différents nés à l'occasion d'un contrat de travail soumis à l'appréciation de la juridiction prud'homale supposent l'existence d'un lien de subordination entre un salarié et un employeur. En l'espèce, c'est à juste titre que les parties intimées font valoir :
-que le contrat de travail est signé seulement par Monsieur [R], qui, en tant que représentant de la société GEL MOOR en sa qualité de président, se concède lui-même un CDI en qualité de directeur, statut cadre supérieur, que dès lors il ne peut exister de lien de subordination puisqu'il ne peut se donner d'ordres lui-même,
-que Maître [M], administrateur judiciaire de l'entreprise, ne l'a pas signé et a présenté ce contrat de travail comme un projet, sur la base duquel elle a sollicité du juge-commissaire une autorisation de verser des subsides à M. [R] sur le fondement des articles L 631-
11 et
R 631-15 du code de commerce, ces articles ne prévoyant des subsides que pour le débiteur s'il s'agit d'une personne physique ou les dirigeants s'il s'agit d'une personne morale,
-que le juge-commissaire ne peut qu'autoriser sur requête ce versement mais n'a pas le pouvoir de valider le contrat de travail,
-qu'il ne peut exister un lien de subordination par rapport à Maître [M], le débiteur représenté par son dirigeant n'étant pas en période de redressement judiciaire dessaisi de la gestion de l'entreprise, mais poursuivant celle-ci sous le contrôle effectif de l'administrateur judiciaire.
C'est donc avec raison que le conseil des prud'hommes a considéré qu'en l'absence de lien de subordination, critère essentiel du contrat de travail, il n'était pas compétent et il y a lieu de confirmer sa décision, et de mettre hors de cause le CGEA de Rennes, sans qu'il soit justifié de mettre hors de cause Maître [V] défendeur à l'instance en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société.
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE in limine litis, qu'il est établi que Monsieur [R] était jusqu'au 5 août 2011, date à laquelle le Tribunal de Commerce de LORIENT a prononcé le redressement judiciaire de la Société GEL MOOR, rémunéré par la Société LES COTRILLADES dans le cadre d'une convention de prestations en qualité de Président de cette société. Que cette holding détenait la totalité des parts sociales de la Société GEL MOOR, Que Monsieur [R] dirigeait également la Société GEL MOOR, ATTENDU que le 20 septembre 2011, l'administrateur judiciaire a sollicité du juge commissaire l'autorisation de faire rémunérer Monsieur [R] par la Société GEL MOOR, Que le juge commissaire a, par ordonnance en date du 03 octobre 2011, octroyé cette autorisation, ATTENDU que le projet de contrat annexé à cette demande d'autorisation a été établi par Monsieur [R], Président es-qualités de la Société GEL MOOR, à son propre profit, Qu'il n'a jamais été paraphé ni par l'administrateur judiciaire, ni par le représentant légal de la Société GEL MOOR, Que la clause contractuelle traitant de la reprise d'ancienneté est totalement imprécise et floue ; qu'elle ne présente aucune valeur probatoire, ATTENDU, en définitive, que, suivant les dispositions des articles 631-11 et R 631-15 du Code du Commerce, le juge commissaire peut fixer la rémunération afférente aux fonctions exercées par le débiteur ou les dirigeants de la personne morale ; qu'en l'absence de rémunération il peut lui allouer des subsides ATTENDU que l'article 30 de la loi de 1985 n'envisage leurs versements que si le chef d'entreprise, ou le dirigeant de la personne morale ne perçoit aucune rémunération, ATTENDU que la seule volonté des parties est impuissante à soustraire une personne au statut social qui découle nécessairement des conditions effectives d'exercice de son activité. ATTENDU que la décision rendue par le juge commissaire ne saurait, sauf à outrepasser les pouvoirs qu'il détient de la loi, changer le statut du dirigeant ni la nature judiciaire des sommes versées, ATTENDU que les articles L. 631-11 et R. 631-15 du Code du Commerce, expressément mentionnés par l'administrateur judiciaire dans sa requête d'allocation de subsides, ne visent que le chef d'entreprise ou le dirigeant de la personne morale en difficulté. Ils n'ont pas vocation à permettre la modification de leurs statuts, ATTENDU que le redressement judiciaire, sauf application de la procédure simplifiée, implique nécessairement le contrôle, par l'administrateur judiciaire de certains actes de la gestion, ATTENDU que cette restriction des pouvoirs du dirigeant ne saurait caractériser l'existence d'un lien de subordination que l'article 32 de la loi de 1985 autorise le dirigeant à passer seul les actes de gestion courante, ATTENDU, compte tenu de tout ce qui précède, qu'il y a lieu de dire et juger que Monsieur [R] est le dirigeant de la Société GEL MOOR qu'il ne peut de ce fait revendiquer le statut de salarié, ATTENDU que, conséquemment, le Conseil se déclare incompétent materiae et invite Monsieur [R] à se pourvoir devant le Tribunal de Commerce de LORIENT ;
- ALORS QUE D'UNE PART la production d'un contrat de travail, de bulletins de salaire, la notification d'une lettre de licenciement par le liquidateur judiciaire, la délivrance d'un certificat de travail et d'une attestation Assedic sont à elles seules suffisantes à créer l'apparence d'un contrat de travail; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre aux conclusions de celui-ci (notamment p 7 et s) qui étaient de nature à démontrer l'existence d'un lien de subordination et qui faisaient valoir qu'il n'avait jamais été président de la société GEL MOOR ainsi qu'il résultait de l'extrait KBIS versé aux débats démontrant que c'était la société LES COTRILLADES qui était président de la SAS GEL MOOR ; que le contrat de travail, qui avait été paraphé par Maître [M], mentionnait in fine à la place des signatures « GEL MOOR SAS Maître [B] [M], administrateur judiciaire » ; qu'il travaillait au sein de l'entreprise GEL MOOR sous la subordination juridique de Maître [M], es-qualités, qui disposait de tous les pouvoirs pour assurer seule entièrement l'administration de l'entreprise et qui lui donnait des directives ainsi qu'il était démontré par les pièces versées aux débats ; qu'il avait été licencié pour motif économique par Maître [M], es-qualités, qui lui avait remis l'ensemble des documents et notamment la délivrance d'un certificat de travail et d'une attestation Assedic, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile ;
- ALORS QUE D'AUTRE PART il appartient au juge de restituer sa véritable qualification au contrat ; qu'en l'espèce, la requête intitulée « requête aux fins d'allocation de subsides » présentée par Maître [M], es-qualités, et à laquelle était annexé un projet de contrat de travail mentionnait expressément que « Monsieur [O] [R] était jusqu'à l'ouverture de la procédure rémunéré par la Holding les COTRILLADES au titre d'un contrat de travail sur une base brute de 5.600,66 € dans le cadre d'une convention de prestations ; que par souci de simplification, il apparaît plus judicieux que le poste de Monsieur [R] soit redescendu au niveau de la société GEL MOOR ; qu'à ce titre il est proposé la conclusion d'un contrat de travail entre la société GEL MOOR et Monsieur [R] dont les caractéristiques seraient les suivantes : poste : directeur, date d'effet du contrat 5 août 2011 soit à compter de l'ouverture de la procédure, rémunération, 5.606,66 €, reprise de l'ancienneté à la date d'entrée dans l'entreprise (….) c'est pourquoi, l'exposant sollicite de Monsieur le Juge commissaire autoriser la rémunération de Monsieur [O] [R] dans le cadre d'un contrat de travail ci-joint qui vous est proposé (….) » ; que par une ordonnance en date du 3 octobre 2011, le juge commissaire avait autorisé la rémunération de Monsieur [O] [R] dans le cadre du contrat de travail décrit dans la présente requête ; que dès lors, en se bornant à énoncer que Maître [M], administrateur judiciaire de l'entreprise, avait présenté ce contrat de travail, qu'elle n'avait pas signé, comme un projet, sur la base duquel elle avait sollicité du juge-commissaire une autorisation de verser des subsides à M. [R] sur le fondement des articles L 631-
11 et
R 631-15 du code de commerce sans rechercher, comme elle y était invitée (cf conclusions de l'exposant p 6) s'il ne résultait pas des termes même de cette requête que Maître [M], qui avait pour mission de gérer et administrer entièrement l'entreprise, n'avait pas eu la volonté au-delà des termes même de la requête de consentir non pas des subsides mais un véritable contrat de travail à Monsieur [O] [R], qui n'était pas le Président de la SAS GEL MOOR, laquelle était dirigée, avant la procédure de redressement judiciaire, par la société LES COTRILLADES, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article
1134 du code civil, ensemble l'article
L. 1221-1 du code du travail du code du travail
- ALORS QUE DE TROISIEME PART en statuant comme elle l'a fait alors que l'ordonnance du juge-commissaire en date du 3 octobre 2011 avait octroyé à Monsieur [R] une rémunération dans le cadre du contrat de travail décrit dans la requête de Maître [M], la cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée à ladite ordonnance en violation de l'article
1351 du code civil, ensemble
480 du code de procédure civile ;
- ALORS QUE DE QUATRIEME PART par jugement du 5 août 2011, le tribunal de commerce de LORIENT, qui a constaté l'état de cessation des paiements et prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SAS GEL MOOR, a notamment désigné Maître [M], en qualité d'administrateur judiciaire, avec pour mission de gérer et administrer entièrement l'entreprise ; que dès lors en affirmant qu'il ne pouvait exister un lien de subordination par rapport à Maître [M], le débiteur représenté par son dirigeant n'étant pas en période de redressement judiciaire dessaisi de la gestion de l'entreprise, mais poursuivant celle-ci sous le contrôle effectif de l'administrateur judiciaire, la cour d'appel a dénaturé le jugement susvisé du tribunal de commerce de LORIENT en violation de l'article
4 du code de procédure civile, ensemble l'article
1134 du code civil ;
- ALORS QU'ENFIN il résulte des pièces régulièrement versées aux débats (pièce n° 1 du bordereau des pièces annexé aux conclusions de Monsieur [R] et prod 2 du mémoire ampliatif) que le projet de contrat de travail litigieux était bien paraphé par Maître [M] ; qu'en affirmant le contraire par des motifs adoptés du Conseil de Prud'hommes, la cour d'appel a dénaturé ledit projet de contrat de travail en violation de l'article
1134 du code civil.