Vu la requête enregistrée le 3 mai 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Gérard X..., demeurant : 50 Jamestown Park, Holetown, SaintJames (Barbados) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat ;
1°) annule l'arrêt du 2 mars 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 15 mai 1992 rejetant sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2°) condamne l'Etat à lui payer une somme de 20 000 F au titre de l'article 75I de la loi du 10 juillet 1991 et une somme de 75 000 F au titre de l'article
L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. Gérard Philippe X...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'
il incombe à l'administration d'informer le contribuable dont elle envisage d'arrêter, en tout ou partie, les bases d'imposition par voie de taxation ou d'évaluation d'office, de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir par l'exercice de son droit de communication et a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti, par voie de taxation d'office, au titre des années 1981, 1982 et 1983 ont été établis sur la base de renseignements recueillis par l'administration fiscale dans l'exercice de son droit de communication et que, par deux lettres des 17 janvier et 29 mai 1986, antérieures à la date de mise en recouvrement desdites impositions, le conseil de M. X... avait demandé à cette administration de mettre à la disposition de celui-ci l'ensemble des documents contenant les renseignements qu'elle avait ainsi obtenus et utilisés ; que l'administration n'a communiqué aucun de ces documents à M. X... ou à son conseil ; que, par suite, en jugeant que M. X... s'était abstenu de demander, en temps utile, à l'administration de lui faire cette communication, la cour administrative de Paris a procédé à une constatation de fait entachée d'inexactitude matérielle ; que son arrêt doit, dès lors, être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les documents contenant les renseignements que l'administration a recueillis dans l'exercice de son droit de communication et utilisés pour établir les suppléments d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. X..., par voie de taxation d'office, au titre des années 1981 à 1983, n'ont pas été communiqués à l'intéressé, en dépit des deux demandes présentées par son conseil, avant la mise en recouvrement desdites impositions ; que, faute, par l'administration d'avoir répondu à ces demandes, le cas échéant, en proposant à M. X... des modalités pratiques de communication destinées à tenir compte de la nature et du volume des documents demandés, la procédure d'imposition a été irrégulière ; que, dans ces conditions, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 15 mai 1992, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées, ainsi que des pénalités y afférentes ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat, par application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, à payer à M. X... une somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er
: L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 2 mars 1995 est annulé.
Article 2 : M. X... est déchargé des suppléments d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 mai 1992 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : L'Etat paiera à M. X... une somme de 15 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.