LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Air France en 1988 ; qu'en 1993, les parties ont conclu une transaction prévoyant le versement par l'employeur d'une indemnité, payable en deux échéances, au 31 octobre 1993 et au 31 mars 1994 ; qu'à compter du 1er décembre 1999, Mme X... a occupé l'emploi d'assistante du chef de service trafic-piste et de chef d'escale de permanence à Cayenne ; qu'en août 2000, elle a diffusé un tract, signé en son nom personnel ; que le retrait de ses fonctions lui a été notifié le 12 octobre 2000 ; que la salariée a été affectée le 5 janvier 2001 à un poste de chef de groupe trafic ; que Mme X..., qui était alors représentante syndicale au comité d'établissement, a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes aux fins de rétablissement dans ses fonctions antérieures ; que sa demande ayant été accueillie par ordonnance du 18 mai 2001, elle a été réintégrée dans ses fonctions le 26 septembre 2001 ; que par lettre du 28 septembre 2001, Air France a fait connaître à Mme X... qu'en raison d'une réorganisation de l'escale de Cayenne prenant effet au 1er octobre 2001, son poste d'assistant trafic était supprimé, et lui a demandé de faire connaître si elle acceptait cette modification ; que l'intéressée a refusé ; que par arrêt du 24 mai 2004, devenu définitif, la cour d'appel a dit n'y avoir lieu à référé ; que la salariée a été licenciée le 16 juillet 2002 après autorisation de l'inspecteur du travail du 11 juillet 2002 ; que cette autorisation a été annulée par le ministre du travail le 19 décembre 2002 ; que Mme X... a été réintégrée dans l'emploi d'agent de maîtrise encadrement exploitation 2, avec les fonctions de chef avion et assistante du chef de service trafic piste ; qu'elle a été licenciée le 19 mai 2004 avec autorisation de l'inspecteur du travail ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale, au fond, de diverses demandes ;
Sur le cinquième moyen
du pourvoi principal de la salariée et le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais
sur le deuxième moyen
du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article
L. 321-1-2 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable ;
Attendu que pour rejeter la demande de la salariée en indemnisation du préjudice subi du fait des modifications de ses conditions de travail et de son contrat de travail, l'arrêt retient que, s'agissant de la réorganisation intervenue en octobre 2001, ses principes avaient été présentés en commission et au comité d'établissement les 22 et 30 août 2001, soit bien avant la décision de référé, et qu'ils avaient reçu un avis favorable du personnel ; que cette réorganisation, qui se traduisait par le renforcement de la structure d'encadrement des fonctions d'assistant trafic et d'assistant passage, ne modifiait cependant en rien les conditions d'emploi, de classement professionnel et de rémunération de la salariée ; qu'il n'est ainsi nullement démontré que la réorganisation ait eu pour seule finalité de l'exclure de ses précédentes fonctions, et ce d'autant que la décision de retrait de fonctions qu'elle conteste remonte au mois de septembre 2000 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en adressant à la salariée le 28 septembre 2001 sa proposition dans les formes prévues à l'article
L. 321-1-2 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, l'employeur avait lui-même considéré que celle-ci emportait modification du contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur les troisième, quatrième et huitième moyens du pourvoi principal :
Vu l'article
624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation des dispositions de l'arrêt critiquées par le deuxième moyen entraîne par voie de conséquence celle des dispositions critiquées par les troisième, quatrième et huitième moyens, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;
Sur le sixième moyen
du pourvoi principal :
Vu l'article
L. 436-3, alinéa 4, recodifié sous le n°
L. 2422-4, du code du travail ;
Attendu que pour exclure du montant de l'indemnité allouée à la salariée en application de ce texte l'avantage consistant en des tarifs privilégiés sur les billets d'avion et de bus, ainsi que les indemnités kilométriques, l'arrêt retient que le premier n'est pas lié à la rémunération et que les secondes correspondent à des sujétions particulières non subies ;
Attendu, cependant, que, lorsque l'annulation de l'autorisation est devenue définitive, le salarié a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration s'il l'a demandée dans le délai de deux mois, ou à l'expiration de ce délai dans le cas contraire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que la salariée avait été privée entre son licenciement et sa réintégration d'un avantage et d'un forfait d'indemnités kilométriques liés à son emploi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le septième moyen
du pourvoi principal :
Vu l'article
2262 du code civil, dans sa rédaction alors applicable ;
Attendu que pour rejeter la demande de la salariée au titre d'un solde d'indemnité transactionnelle, l'arrêt retient que celle-ci devait être payée à deux termes périodiques fixés aux 31 octobre 1993 et 31 mars 1994 ; que selon l'article
2277 du code civil, se prescrivent par cinq ans les actions de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ; que la prescription est donc acquise ;
Attendu cependant que l'action de la salariée en paiement de son indemnité transactionnelle est, compte tenu des règles de prescription qui lui restent applicables, soumise à la prescription trentenaire, quelles que soient les modalités de paiement convenues ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
, et sans qu'il soit nécessaire de statuer
sur le premier moyen
du pourvoi principal de la salariée :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de Mme X... en paiement de dommages-intérêts au titre du préjudice subi du fait de la modification de ses conditions de travail et de son contrat de travail, de celles fondées sur l'absence de réintégration dans ses fonctions en conséquence de l'annulation de son licenciement du 16 juillet 2002, de celles tendant à la remise d'un certificat de travail conforme, au paiement de dommages-intérêts de ce chef, de frais de déplacement, du solde d'indemnité transactionnelle et de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et harcèlement moral, l'arrêt rendu le 25 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne la société Air France aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES
au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame Fabienne Y... épouse X..., tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice subi du fait des modifications de ses conditions de travail et de son contrat de travail ;
ALORS QUE un magistrat ne peut connaître en appel du même litige qui lui a été soumis en tant que juge des référés sans méconnaître les exigences de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le principe d'impartialité ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel était composée de M. Alain CHAUVET, président, de Mmes REZAIRE LOUPEC et MERI, assesseurs ; que la Cour d'appel qui avait débouté Mme X... de son instance en référé le 24 mai 2004 était composée de Monsieur Alain CHAUVET président, et de M. POTTIER et Mme REZAIRE LOUPEC, assesseur ; que le rejet de la demande en référé était notamment fondée sur l'absence de trouble manifestement illicite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame Fabienne Y... épouse X... tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice subi du fait des modifications de ses conditions de travail et de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE Madame X..., qui occupait depuis le 1er décembre 1999 les fonctions d'assistante du chef de service trafic-piste et du chef d'escale de permanence de l'escale de Rochambeau à CAYENNE a diffusé un tract signé en son nom personnel les 30 et 31 août 2000 ; suite à cette diffusion, et après des entretiens avec sa direction, le retrait de ses fonctions lui a été notifié le 12 octobre 2000 ; la salariée qui était alors représentante syndicale au comité d'établissement a protesté par lettre du 30 octobre 2000 contre ce retrait puis a saisi la formation de référé du conseil de Prud'hommes de CAYENNE qui par ordonnance du 18 mai 2001 a ordonné, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, son rétablissement dans ses fonctions antérieures ; cette décision a été infirmée par arrêt de la cour de ce siège du 24 mai 2004 aujourd'hui définitif, suite au rejet du pourvoi formé par Madame X... ; au soutien de ses prétentions de ce chef, Madame X... fait valoir en substance, d'une part qu'une telle modification dans ses conditions de travail alors qu'elle était salariée protégée ne pouvait intervenir sans son accord exprès et non équivoque, d'autre part qu'AIR FRANCE en supprimant à compter du 1er octobre 2001 le poste d'assistant trafic et d'assistant passage a manqué à ses obligations et a contrevenu au principe selon lequel le contrat de travail doit s'exécuter de bonne foi ; elle produit une attestation établie le 2 décembre 2000 par Monsieur D... prouvant selon elle qu'elle n'a jamais donné son accord pour quitter ses fonctions ; Mais ce témoignage qui se borne à rapporter les termes d'un entretien entre Madame X... et Monsieur E... chef du service trafic qui s'est tenu le 1er décembre 2000, soit deux mois après la décision de modification des fonctions de l'intéressée, est sans caractère probant ; par contre, il résulte des attestations régulières de Messieurs Jean Yves F... et Jean Jacques G... que lors de son entretien avec la direction d'AIR FRANCE à ROISSY le 26 septembre 2000 Madame X... avait clairement exprimé sa volonté de ne plus exercer une quelconque responsabilité au sein de l'équipe d'encadrement de l'escale de Rochambeau ; c'est donc à tort que la demanderesse soutient que la décision litigieuse aurait été prise sans son accord ; par ailleurs, s'agissant de la réorganisation de la structure d'escale de CAYENNE intervenue en octobre 2001, que la bonne foi contractuelle étant présumée, le juge n'a pas à rechercher si la décision de l'employeur de modifier les conditions de travail d'un salarié est conforme à l'intérêt de l'entreprise ; il incombe au salarié de démontrer que cette décision a en réalité été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle ; or, il résulte des pièces produites que les principes de réorganisation de l'escale de CAYENNE avaient été présentés en Commission et au Comité d'Etablissement les 22 et 30 août 2001, soit bien avant la décision de référé et qu'ils avaient reçu un avis favorable du personnel ; cette réorganisation qui se traduisait par le renforcement de la structure d'encadrement de des fonctions d'assistant trafic et d'assistant passage, ne modifiait cependant en rien les conditions d'emploi, de classement professionnel et de rémunération de la salariée ; qu'il n'est ainsi nullement démontré, contrairement aux allégations de la demanderesse sur ce point, que la réorganisation des services d'escale de Rochambeau au mois d'octobre 2001 ait eu pour seule finalité de l'exclure de ses précédentes fonctions, et ce d'autant que la décision de retrait de fonctions qu'elle conteste remonte au mois de septembre 2000 ;
ALORS QU'aucune modification de son contrat de travail ni même de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé ; que la salariée avait déploré le retrait, en octobre 2000, de ses fonctions d'assistante du chef de service trafic-piste et du chef d'escale de permanence de l'escale de Rochambeau à CAYENNE ; que la Cour d'appel a considéré que « Madame X... avait exprimé sa volonté de ne plus exercer une quelconque responsabilité au sein de l'équipe d'encadrement de l'escale de Rochambeau » ; qu'en disant la modification acceptée, et donc opposable à Mme X... sans se prononcer sur le retrait de ses fonctions d'assistante du chef de service trafic-piste, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article
1134 du Code Civil ;
ALORS aussi QUE en disant la modification acceptée alors que la salariée l'avait clairement refusée dans sa lettre du 1er novembre 2001 versée aux débats, la Cour d'appel a dénaturé cette lettre et encore violé l'article
1134 du Code civil
ALORS surtout QUE la salariée soutenait que la modification avait été imposée pour sanctionner sa liberté d'expression ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen, la Cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 10 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme.
ALORS QU'en l'état d'une proposition faite par l'employeur conformément à l'article
L. 321-1-2 du Code du travail, une cour d'appel ne peut dénier l'existence de la modification du contrat de travail d'un salarié ; que la Cour d'appel a affirmé que la réorganisation intervenue en septembre 2001 ne modifiait en rien les conditions d'emploi, de classement professionnel et de rémunération de la salariée et que la décision de retrait de fonctions contestée par la salariée remontait au mois de septembre 2000 ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors qu'en l'état de la proposition faite par l'employeur conformément à l'article
L. 321-1-2 du code du travail, l'existence de la modification du contrat de travail ne pouvait être contestée, la Cour d'appel a violé ledit article
L 321-1-2 du Code du Travail ;
ALORS en tout cas QU'en ne recherchant pas si la proposition de modification du 28 septembre 2001 n'était pas faite conformément à l'article
L. 321-1-2 du Code du travail, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article
L. 321-1-2 du Code du travail ;
ALORS aussi QU'aucune modification de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé ; qu' en cas de refus par celui-ci de ce changement, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'autorité administrative d'une demande d'autorisation de licenciement ; en ne recherchant pas si les mesures déplorées par la salariée ne constituaient pas, à tout le moins, des changements de ses conditions de travail, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles
1134 du Code Civil et
L 436-3 du Code du Travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de Madame X... fondées sur l'absence de réintégration dans ses fonctions en conséquence de l'annulation de son licenciement survenu le 16 juillet 2002 ;
AUX MOTIFS QUE suite à l'annulation par le ministre des transports le 19 décembre 2002 de l'autorisation de licenciement ayant conduit au licenciement de la demanderesse le 16 juillet 2002, la salariée a demandé sa réintégration dans l'entreprise par lettre du 7 février 2003 ; par courrier du 24 février 2003, le délégué régional de la société faisait connaître à Madame X... qu'elle était réintégrée dans l'emploi qui était le sien avant son licenciement soit Agent de Maîtrise Encadrement Exploitation 2, avec les fonctions qu'elle occupait avant le licenciement à savoir: Chef Avion et Assistante du chef de Service Trafic Piste ; l'intéressée prétend qu'en ne la réintégrant pas dans les fonctions qui étaient les siennes avant le mois de septembre 2000, à savoir celles de "chef d'escale de permanence" qu'elle considère comme une mission essentielle de son contrat de travail, la société AIR FRANCE a modifié ses conditions de travail et lui a causé un préjudice ; Mais, comme énoncé plus haut, du fait de la réorganisation de service opérée en octobre 2001 l'activité de chef d'escale de permanence a été attribuée à des cadres ; cette décision qui relève du pouvoir de direction et d'organisation de l'employeur et ne modifie en rien le niveau d'emploi ou de rémunération de la salariée, ne constitue pas une modification du contrat de travail de l'intéressée et ne peut lui ouvrir droit à l'indemnisation qu'elle réclame ;
ALORS QUE la cassation à intervenir
sur le premier moyen
relatif aux modifications du contrat de travail et des conditions de travail de Madame X... entraînera cassation par voie de conséquence des dispositions de l'arrêt relatives à la réintégration de la salariée dans ses fonctions en conséquence de l'annulation de son licenciement survenu le 16 juillet 2002, et ce en application de l'article 624 du NCPC;
ET ALORS QUE la salariée avait déploré l'absence d'équivalence entre l'emploi qu'elle occupait antérieurement et celui qui lui avait été affecté ensuite de l'annulation de son licenciement, en se prévalant notamment du retrait de ses tâches administratives au profit de fonctions opérationnelles habituellement confiées à des subordonnés ; qu'en ne se prononçant pas sur le retrait de ses tâches administratives au profit de fonctions opérationnelles habituellement confiées à des subordonnés, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article
L 436-3 du Code du Travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué infirmatif d'AVOIR rejeté les demandes de la salariée relatives à la remise d'un certificat de travail conforme et ainsi que le paiement de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE à la suite du licenciement 16 juillet 2002 la société AIR FRANCE a remis à la salariée un certificat de travail du 8 août 2002, indiquant qu'au jour de son départ elle exerçait la fonction « de Agent de Maîtrise d'Encadrement d'Exploitation 2 » ; par ordonnance du 21 février 2003, la formation de référé du Conseil de Prud'hommes de CAYENNE a ordonné sous astreinte à la SA AIR FRANCE de remettre à la demanderesse un certificat de travail "conformément à l'article 6-1 code du travail">L. 126-1 6 du Code du Travail" ; en premier lieu, les mentions portées sur le certificat litigieux sont conformes à l'emploi et à la classification de la salariée tels que définis par le titre II du Statut du Personnel de la société et par le Règlement du Personnel au sol ; au demeurant ces mentions correspondent à celles portées sur les bulletins de paie de l'intéressée ; en second lieu, les fonctions dont Madame X... demande la mention sur son certificat de travail ne sont pas celles qu'elle occupait à la date du licenciement, ainsi que cela est exposé plus haut ; Madame X... doit donc être déboutée tant de sa demande de dommages et intérêts que de celle tendant à la remise sous astreinte d'un certificat conforme ;
ALORS QUE la cassation à intervenir
sur le premier moyen
relatif aux modifications du contrat de travail et des conditions de travail ou
sur le deuxième moyen
relatif à la réintégration de la salariée dans ses fonctions en conséquence de l'annulation de son licenciement survenu le 16 juillet 2002 entraînera cassation par voie de conséquence des dispositions de l'arrêt relatives à la remise d'un certificat de travail conforme et au paiement de dommages et intérêts, et ce en application de l'article 624 du NCPC.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR limité à la somme de 10.000 euros l'indemnisation du préjudice subi par Madame X... du fait du caractère vexatoire de la rupture et subsidiairement en réparation des préjudice moral et matériel résultant de son licenciement nul ;
AUX MOTIFS QUE le licenciement de Madame X... notifié pour faute grave le 16 juillet 2002 a été annulé ensuite de l'annulation de l'autorisation administrative par une décision ministérielle du 19 décembre 2002, pour des motifs tenant à l'irrégularité de l'enquête administrative et à la nature des faits reprochés ; que le salarié protégé qui a été licencié en vertu d'une autorisation administrative qui a été annulée, a droit, lorsque l'annulation est devenue définitive et qu'il a obtenu sa réintégration, au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration ; Madame X... sollicite la somme de 70 000 euros en indemnisation du préjudice subi du fait du caractère vexatoire de la rupture et subsidiairement en réparation des préjudice moral et matériel résultant de son licenciement nul ; en l'espèce, il est acquis aux débats que Madame X... a perçu la totalité de ses salaires pour la période comprise entre le 16 juillet 2002 et le 7 février 2003 date de sa réintégration et qu'elle ne justifie d'aucun préjudice matériel ou financier de ce chef ; par contre, elle est fondée à obtenir réparation du préjudice moral né des conditions dans lesquelles est intervenu le licenciement et ce quelques soient les motifs invoqués à l'appui de la rupture, le licenciement étant nul ; force est de constater à cet égard que la salariée a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire signifiée par huissier le 10 mai 2002, que par la suite elle a été convoquée devant un conseil de discipline puis entendue de manière irrégulière en présence de son employeur au cours de l'enquête de l'inspection du travail en juillet 2002 ; ces circonstances caractérisent suffisamment le préjudice dont fait état la demanderesse et lui ouvrent droit à indemnisation ; toutefois, la somme de 70 000 euros accordée par les premiers juges à ce titre est manifestement exagérée; qu'eu égard aux éléments fournis une indemnité de 10 000 euros réparera justement le préjudice subi par Madame X... de ce chef ;
ALORS QUE la salariée avait également soutenu que ses affaires avaient été emballées en présence de tous les agents présents dans le service et d'un officier de police judiciaire alors même qu'aucune procédure de licenciement n'était engagée, qu'elle avait été privée de toutes ses affaires et de bureau pour travailler, que la procédure suivie devant le conseil de discipline avait été menée dans des conditions humiliantes en la privant en partie de l'exercice de ses droits de la défense et qu'elle avait été licenciée pour des motifs totalement fallacieux portant atteinte à sa réputation professionnelle en mettant gravement en cause ses compétences ; que la Cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur ces griefs, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article
L 120-4 du Code du Travail.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... tendant à obtenir le paiement de frais de déplacement ;
AUX MOTIFS QUE les sommes réclamées de ce chef correspondent à un différentiel sur le prix des billets d'avion et de bus qu'elle a acquis pour elle même et sa famille pendant la période du 16 juillet 2002 au mois de février 2003 et à un forfait d'indemnités kilométriques au cours de la même période ; qu'il ne peut être fait droit à ces demandes alors d'une part que l'intéressée a perçu la totalité des salaires dus pendant la période considérée conformément aux dispositions légales applicables, d'autre part que l'employeur ne peut être tenu au remboursement d'avantages non liés à la rémunération (billets d'avion et de bus) et d'indemnités liées à des sujétions particulières non subies (indemnités kilométriques) ;
ALORS QUE le salarié irrégulièrement licencié a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration ; que le salarié ne peut donc être privé du bénéfice de tarifs privilégiés dont il aurait du bénéficier durant cette période ; qu'en rejetant néanmoins la demande de la salariée sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article
L 436-3 du Code du Travail.
SEPTIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... tendant à obtenir le paiement de l'indemnité transactionnelle en exécution de la convention du 18 août 1993 ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... réclame le paiement d'une somme de 1295,82 euros correspondant selon elle au solde impayé d'une indemnité transactionnelle de 40 000 francs (6 097,96 euros) accordée par la société AIR FRANCE dans le cadre d'un protocole d'accord signé les 15 juillet et 18 août 1993 à l'occasion d'un conflit du travail ; aux termes du dit protocole la somme devait être payée en deux échéances la première au plus tard le 31 octobre 1993 et la seconde au plus tard le 31 mars 1994 ; selon l'article
2277 du Code Civil que se prescrivent par cinq ans les actions de "tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ; en l'espèce le dernier terme périodique de paiement étant prévu le 31 mars 1994, la prescription est acquise ;
ALORS QUE l'obligation de paiement en exécution d'une transaction portant sur la réparation d'un préjudice subi par la salariée est soumise à la prescription trentenaire ; qu'en considérant que la prescription quinquennale était applicable, au seul motif que le paiement devait être fait en deux échéances, la Cour d'appel a violé l'article
2262 du Code Civil.
HUITIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... tendant à obtenir l'indemnisation des préjudices subis en raison de la discrimination syndicale et des faits de harcèlement dont elle a été victime ;
AUX MOTIFS QUE la demanderesse prétend qu'elle a fait l'objet de mesures discriminatoires de la part de la société AIR FRANCE en raison de ses activités syndicales, ce qui a eu pour effet de nuire gravement au déroulement de sa carrière et de la priver de toute promotion ; selon elle, que sa situation au sein de l'entreprise s'est brusquement modifiée ensuite de la diffusion par ses soins d'un tract sur le harcèlement moral, alors qu'auparavant elle avait toujours fait l'objet d'appréciation positive sur la qualité de son travail et bénéficié d' avancements réguliers ; elle énumère un certain nombre de faits et décisions caractérisant à ses dires le comportement qu'elle dénonce et soutient que contrairement à ses collègues de travail, elle n'a bénéficié d'aucune promotion pendant les quatre dernières années, ce qui justifie selon elle son reclassement indiciaire et l'octroi du rappel de salaire correspondant ; mais, en premier lieu, une partie des faits invoqués par la salariée ont déjà été examinés plus haut et n'ont pas de caractère discriminatoire, les réclamations formulées de ces chefs ayant été rejetées (modification de fonctions et réorganisation de poste, mises à pied, refus de remise de certificat de travail, refus de réintégration dans ses fonctions suite au premier licenciement, non paiement de salaire suite à l'exercice du droit de retrait, non bénéfice de tarifs privilégiés) ; en second lieu, force est de constater que le tract diffusé par Madame X... à la fin du mois d'août 2000 ne peut être considéré comme la manifestation d'une activité syndicale, s'agissant d'une lettre rédigée à la seule initiative de la salariée, ne comportant aucune entête syndicale, signée du nom et du prénom de la rédactrice sans référence à une quelconque fonction syndicale ; dans ces conditions la modification de fonctions décidée par la direction d'AIR FRANCE en accord avec la salariée, ne peut s'apprécier comme la manifestation d'une discrimination syndicale, étant encore précisé que dès le 15 janvier 2001, le syndicat national AIR FRANCE CFTC retirait à Madame X... toutes ses fonctions représentatives au titre de cette organisation ; en outre, l'enquête diligentée au mois de décembre 2003 sur le fondement de l'article L.422- L-1 du Code du Travail à la demande du délégué du personnel UTG-CGT, syndicat auquel appartenait alors l'intéressée a conclu que « les faits de persécution et d'humiliation reprochés à Monsieur Jean Pierre H... (chef descale Air France de CAYENNE) ne sont pas fondés » ; par ailleurs, le témoignage de Madame I... selon lequel Monsieur J..., supérieur hiérarchique de Madame X... aurait été envoyé en Guyane pour la remplacer et aurait reçu pour instruction de la mettre dans une situation inconfortable pour à terme lui prendre son poste, est sans caractère réellement probant dès lors d'une part qu'il ne répond pas aux prescriptions de l'article
202 du Nouveau Code de Procédure Civile, d'autre part et principalement qu'il est formellement démenti par les attestations circonstanciées établies par Monsieur J... et son épouse ; enfin, les autres faits ou événements allégués par la demanderesse, soit ne sont pas matériellement prouvés, soit ne présentent pas de caractère discriminatoire au sens de l'article
L. 122-45 du Code du Travail, étant précisé que l'examen de la situation des collègues de travail de Madame X... ne permet pas caractériser la disparité de traitement qu'elle dénonce, les intéressés ne se trouvant pas dans des situations similaires ; en l'absence de discrimination, Madame X... doit être déboutée de ses demandes de reclassement par promotion de groupe ou de niveau, alors au surplus que les promotions revendiquées ressortent du pouvoir de direction de l'entreprise en fonction d'aptitudes professionnelles définies par le Règlement du Personnel au Sol (RPS 1), dont rien ne permet d'affirmer qu'elles correspondent à celles de la demanderesse ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Madame X... a écrit le tract de sa propre initiative avec propos diffamatoires en l'absence de toute représentation syndicale (non, prénom, absence de fonction) et non respect de l'article L 418-8 du Code du Travail ; que le compte rendu de l'enquête sur le fondement de l'article L 422-1-1 sollicitée par le délégué du personnel de l'UGT conclu que les preuves d'harcèlement moral ne sont pas fondées ; que la promotion et avancement relèvent du pourvoi de direction de l'employeur et non de la compétence des juges ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'un au moins des précédents moyens entraînera cassation par voie de conséquence des dispositions de l'arrêt relatives au grief de discrimination et de harcèlement, et ce en application de l'article 624 du NCPC;
Et ALORS QU'il appartient au salarié d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que Madame X... avait fait valoir que, travaillant pour la société AIR FRANCE depuis 1988, elle avait toujours fait l'objet d'appréciations positives sur la qualité de son travail et avait bénéficié d'avancements réguliers mais que cette situation s'était brusquement modifiée ensuite de la diffusion par ses soins d'un tract sur le harcèlement moral ; qu'en ne recherchant pas si la situation de la salariée n'avait pas été brusquement modifiée à compter de la diffusion de ce tract, permettant ainsi de présumer à tout le moins l'existence d'un harcèlement, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article
L 122-49 du Code du Travail.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Air France.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Air France à verser à Madame X... la somme de 10.000 à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des conditions dans lesquelles était intervenu le licenciement ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... sollicitait la somme de 70.000 en indemnisation du préjudice subi du fait du caractère vexatoire de la rupture et subsidiairement en réparation des préjudice moral et matériel résultant de son licenciement nul ; que Madame X... avait perçu la totalité de ses salaires pour la période comprise entre le 16 juillet 2002 et le 7 février 2003 date de sa réintégration et qu'elle ne justifiait d'aucun préjudice matériel ou financier de ce chef ; qu'elle était en revanche fondée à obtenir réparation du préjudice moral né des conditions dans lesquelles était intervenu le licenciement quels que soient les motifs invoqués, le licenciement étant nul ; que la salariée avait fait l'objet d'une mise à pied conservatoire signifiée par huissier le 10 mai 2002, que par la suite, elle avait été convoquée devant un conseil de discipline puis entendue de manière irrégulière en présence de son employeur au cours de l'enquête de l'inspection du travail en juillet 2002 ; que ces circonstances caractérisaient suffisamment le préjudice dont elle faisait état, les éléments fournis justifiant une indemnité de 10.000 pour réparer le préjudice subi ;
ALORS QUE la condamnation de l'employeur à réparer le préjudice subi par le salarié du fait des circonstances de son licenciement par la suite annulé, suppose que soit établie à la charge de l'employeur une faute à l'origine de ce préjudice ; qu'en l'espèce, en ne caractérisant pas l'existence d'un comportement fautif de l'employeur, de nature à causer à la salariée un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1382 du Code civil.