Chronologie de l'affaire
Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT) 09 avril 2015
Cour de cassation 06 octobre 2016

Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 6 octobre 2016, 15-24866

Mots clés sécurité sociale · société · rapport · médecin · médical · caisse · incapacité · taux · permanente · consultant · recours · désigné · communication · employeur · partielle

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 15-24866
Dispositif : Rejet
Décision précédente : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT), 09 avril 2015
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2016:C201477

Chronologie de l'affaire

Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT) 09 avril 2015
Cour de cassation 06 octobre 2016

Texte

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 9 avril 2015), que, contestant le taux d'incapacité permanente partielle de 18 %, fixé le 28 avril 2006 par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise (la caisse) au bénéfice de M. X..., atteint d'une maladie professionnelle inscrite au tableau n° 42, la société Profilafroid (l'employeur) a saisi d'un recours un tribunal du contentieux de l'incapacité ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Et sur le même moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de son recours, alors, selon le moyen, qu'il résulte des articles L. 141-10 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale que la caisse est tenue de transmettre au médecin consultant désigné par la CNITAAT l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente ; qu'aux termes de l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ce rapport doit comprendre les éléments d'appréciation sur lesquels l'avis du médecin conseil de la caisse s'est fondé ; que lorsque la discussion médicale porte sur l'état d'incapacité d'un salarié causé par une surdité, la caisse doit notamment communiquer à l'expert les examens audiométriques sur lesquels elle s'est fondée ; qu'en l'espèce, il est constant que l'audiogramme ayant servi à évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de M. X... n'a pas été communiqué au médecin consultant désigné par la CNITAAT, de sorte qu'il n'a pas été mis en mesure d'apprécier le bien-fondé du taux arrêté par la caisse ; qu'en considérant que ce défaut de communication n'emportait pas l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la caisse à l'égard de la société Profilafroid, au prétexte que le médecin consultant avait toujours la faculté de réclamer les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission, la CNITAAT a violé les articles L. 143-10 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'obligation de transmission de l'entier dossier médical au médecin expert ou au médecin consultant désigné par le juge du contentieux technique incombe non à la caisse primaire d'assurance maladie, mais au médecin conseil du service national du contrôle médical ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

:

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Profilafroid aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Profilafroid ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Profilafroid

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé le jugement rendu par le tribunal du contentieux de l'incapacité d'Amiens en date du 22 octobre 2012 et d'AVOIR débouté la société Profilafroid de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE le droit de l'employeur à une procédure contradictoire ne revêt pas un caractère absolu dès lors qu'il doit être concilié avec le droit du salarié victime au respect du secret médical ; qu'en vertu de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 226-13 du code pénal et de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique, il ne peut être dérogé au secret médical que dans les cas expressément prévus par la loi ; qu'à cet effet, l'article L.143-10 du code de la sécurité sociale dispose :
« Le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puissent lui être opposées les dispositions de l'article 226-13 du code pénal, à l'attention du médecin expert ou du médecin consultant désigné par la juridiction compétente l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet ;
que, selon l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale,
« L'entier rapport médical mentionné à l'article L. 143-10 comprend:
1° L'avis et les conclusions motivées données à la caisse d'assurance maladie sur le taux d'incapacité permanente partielle à retenir;
2° Les constatations et les éléments d'appréciation sur lesquels l'avis s'est fondé » ;
qu'il résulte de ces textes que la levée du secret médical ne vise que le rapport d'incapacité permanente partielle, lequel doit contenir non seulement l'avis et les conclusions données à la caisse (correspondant à la dernière page du rapport), mais également tous les éléments nécessaires à la discussion sur les séquelles évaluées (constituant le corps du rapport) ; que la dérogation prévue par ces dispositions ne concerne pas l'ensemble des pièces médicales consultées par le médecin-conseil, notamment celles présentées par l'assuré lors de son examen et qui constituent son dossier personnel; qu'il n'est pas présumé que le médecin conseil dispose de ces pièces; que dès lors que l'employeur n'est pas fondé à invoquer le défaut de communication de ces documents pour solliciter l'inopposabilité de la décision attributive de rente ; que le principe de la contradiction a été respecté et que la garantie d'un procès équitable est assurée par la faculté reconnue par l'article 275 du code de procédure civile au médecin expert ou au médecin consultant désigné par la juridiction de solliciter les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission ; qu'au regard de l'ensemble de ces considérations, il y a lieu de débouter la société appelante de sa demande d'inopposabilité ; qu'aux termes de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, "le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité ; qu'à la date du 29 novembre 2005, M. Jacky X... présentait une surdité professionnelle caractérisée par un déficit de 42db à l'oreille gauche et de 45db à l'oreille droite ; qu'ainsi, au vu des éléments soumis à son appréciation, contradictoirement débattus et avec le médecin consultant dont elle adopte les conclusions, les séquelles décrites ci-dessus justifiaient la reconnaissance d'un taux d'incapacité de 18 % à l'égard de la société la société PROFILAFROID ; qu'au regard de l'ensemble de ces considérations, il y a lieu de débouter la société appelante de sa demande et de confirmer le jugement entrepris ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'au vu des éléments soumis à son appréciation, le tribunal constate que d'après la nature de son infirmité, son état général, son âge, ses facultés physiques et mentales, sa qualification professionnelle, M. X... Jacky présentait à la date de consolidation, des séquelles indemnisables liées à la maladie professionnelle du 24/06/2005 ne justifiant pas un taux d'incapacité permanente partielle inférieure à 18 % ;

1) ALORS QU'il résulte de l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale que dès la première instance et avant l'ouverture des débats, la caisse est tenue de fournir l'ensemble des documents médicaux concernant l'affaire pour les contestations relatives à l'état d'incapacité ; que si, en vertu des articles L. 141-10 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, la caisse n'est pas tenue de fournir les rapports médicaux de son médecin conseil selon la procédure de l'article R. 143-8, il lui appartient, en revanche, de produire les éléments du dossier qui ne sont pas partie du rapport médical ; qu'à défaut, l'employeur n'est pas mis en mesure d'exercer de manière effective son droit au recours et la décision de la caisse, dont le bien-fondé n'est pas établi à son égard, lui est inopposable ; qu'en l'espèce, en considérant que la levée du secret médical prévue par l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale ne concernait que le rapport médical d'IPP, et non l'ensemble des pièces médicales consultées par le médecin-conseil dont il n'était pas présumer disposer, cependant que les pièces médicales non comprises dans le rapport médical demeurent soumises à l'obligation de communication de l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale, la CNITAAT a violé les articles L. 143-10, R. 143-8 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2) ALORS QUE le principe de l'égalité des armes garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales implique l'obligation d'offrir à chaque partie à un procès une possibilité effective de remettre en cause un acte qui constitue une ingérence dans ses droits ; que ce principe impose, en matière de contestation du taux d'incapacité professionnelle, que l'employeur - qui ne dispose d'aucun élément relatif à l'état du salarié - ait la possibilité de remettre en cause, dans le cadre d'un véritable débat médical, le diagnostic qui lui est opposé par l'organisme de sécurité sociale ; qu'un tel débat exige, en présence d'une discussion portant sur l'état d'incapacité auditif d'un salarié, que l'employeur puisse avoir accès, par l'intermédiaire d'un médecin qu'il a préalablement désigné, à l'ensemble des pièces du dossier médical du salarié ; qu'en l'espèce, la société Profilafroid dénonçait le fait que l'audiogramme ayant servi à évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de M. X... n'avait pas été communiqué au médecin qu'elle avait désigné, ce qui ne lui avait pas permis d'apprécier le bien-fondé du taux arrêté par la caisse ; qu'en considérant que ce défaut de communication n'emportait pas l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la caisse à l'égard de la société Profilafroid, la CNITAAT a rompu l'égalité des armes entre les parties en violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3) ALORS QU'il résulte des articles L. 141-10 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale que la caisse est tenue de transmettre au médecin consultant désigné par la CNITAAT l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente ; qu'aux termes de l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ce rapport doit comprendre les éléments d'appréciation sur lesquels l'avis du médecin conseil de la caisse s'est fondé ; que lorsque la discussion médicale porte sur l'état d'incapacité d'un salarié causé par une surdité, la caisse doit notamment communiquer à l'expert les examens audiométriques sur lesquels elle s'est fondée ; qu'en l'espèce, il est constant que l'audiogramme ayant servi à évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de M. X... n'a pas été communiqué au médecin consultant désigné par la CNITAAT, de sorte qu'il n'a pas été mis en mesure d'apprécier le bien-fondé du taux arrêté par la caisse ; qu'en considérant que ce défaut de communication n'emportait pas l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la caisse à l'égard de la société Profilafroid, au prétexte que le médecin consultant avait toujours la faculté de réclamer les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission, la CNITAAT a violé les articles L.143-10 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.