Tribunal de grande instance de Paris, 25 mai 2018, 2017/10284

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2017/10284
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : JUVÉDERM ; JUVEDERM
  • Classification pour les marques : CL03 ; CL05 ; CL10 ; CL35
  • Numéros d'enregistrement : 5807169 ; 2196822 ; 3061345 ; 14016737
  • Parties : ALLERGAN HOLDINGS FRANCE SAS ; ALLERGAN FRANCE SAS / DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS (Liban) ; AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT (Bulgarie) ; DIMA CORP. (Luxembourg) ; S (Jacqueline) ; S (Dimitri) ; LAZEO SAS ; VITAL ESTHÉTIQUE SARL ; MY CREAM LAB SAS

Chronologie de l'affaire

Tribunal judiciaire de Paris
2021-02-26
Cour d'appel de Paris
2021-01-12
Cour d'appel de Paris
2020-10-06
Cour d'appel de Paris
2020-03-26
Tribunal judiciaire de Paris
2020-02-10
Tribunal de grande instance de Paris
2019-06-07
Tribunal de grande instance de Paris
2018-05-25

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT rendue le 25 mai 2018 3ème chambre 3ème section N° RG : 17/10284 Assignation du 27 juin 2017 DEMANDERESSES, défenderesses à l'incident ALLERGAN HOLDINGS FRANCE SAS 12 Place de la Défense 92400 COURBEVOIE ALLERGAN FRANCE SAS 12 Place de la Défense 92400 COURBEVOIE représentées par Maître Benjamin MAY de la S ARAMIS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #K0186 DEFENDEURS, dont la demanderesse à l'incident DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS Corniche El Mazraa Main Road Lebanon & Gulf Bank Building BEYROUTH (LIBAN) représentée par Maître Galina PARICHEVA de la SCP PARICHEVA & MARTY, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1473 AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT 6 Dragan Tzankov blvd 1000 SOFIA (BULGARIE) représentée par Maître Philippe MIRO de la SCP VITOUX & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0273 DIMA CORP [...] LUXEMBOURG Madame Jacqueline S Monsieur Dimitri S S.A.S. LAZEO [...] 75016 PARIS représentés par Maître Alexandra LEGUIDE de la SELEURL L ASSOCIE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C2210 S.A.R.L. VITAL ESTHETIQUE [...] Armée 75017 PARIS représentée par Maître Philippe MIRO de la SCP VITOUX & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0273 S.A.S. MY CREAM LAB [...] 75016 PARIS représentée par Maître Alexandra LEGUIDE de la SELEURL L ASSOCIE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C2210 MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT Florence BUTIN, Vice-Présidente assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier DEBATS À l'audience du 13 mars 2018, avis a été donné aux avocats que l'ordonnance serait rendue le 25 mai 2018. ORDONNANCE Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES : La société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE SAS se présente comme ayant pour activité la prise d'intérêts dans toutes sociétés ou entreprises industrielles, commerciales et financières. Elle détient ainsi des participations dans les filiales françaises ALLERGAN INDUSTRIE et ALLERGAN FRANCE SAS. Elle est titulaire d'une série de marques parmi lesquelles : -la marque de l'Union européenne verbale JUVEDERM n°5807169, déposée le 3 avril 2007 pour désigner en classe 5 des « produits pharmaceutiques administrés par injection pour hydratation de la peau et réduction des rides » ; -la marque de l'Union européenne verbale JUVEDERM n°2196822 déposée le 18 avril 2001 pour désigner en classe 10 les produits suivants : « appareils et instruments médicaux, implants dermiques, substances biocompatibles à usage médical destinées au comblement de la ride, peau artificielle à usage chirurgical, prothèse ». -la marque française JUVEDERM n°3061345, déposée le 30 octobre 2000 pour désigner en classe 10 des « appareils et instruments médicaux et chirurgicaux, implants dermiques, substances biocompatibles à usage médical destinées au comblement de la ride, peau artificielle à usage chirurgicale, prothèse. » La société ALLERGAN FRANCE a notamment pour activité la préparation, la fabrication et la commercialisation de tous produits pharmaceutiques, d'hygiène et de soins de cosmétologie et parfumerie, et de tous produits entrant dans la fabrication des médicaments. Elle assure en France la promotion et la commercialisation sous licence exclusive consentie le 18 mai 2017 sur les marques précitées des produits de la gamme JUVEDERM (« Juvéderm Ultra », « Juvéderm Ultra Smile », « Juvéderm Volbella with lidocaine » « Juvéderm Volift with lidocaine », « Juvéderm Voluma », « Juvéderm Hydrate ») qui sont des produits de comblement des rides administrés par injection sous-cutanée dont le principal agent actif est l'acide hyaluronique, développés par le laboratoire pharmaceutique du groupe international ALLERGAN et fabriqués en France par la société ALLERGAN INDUSTRIE. La société DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHIAN & PARTNERS de droit libanais se présente comme une société spécialisée dans « la fabrication, la commercialisation et la distribution de larges gammes de produits cosmétiques professionnels et soins à domicile, des cocktails méso et épluchures de la peau ». Elle est titulaire de la marque de l'Union européenne verbale JUVEDERM n°0140673 7 déposée le 30 avril 2015 pour désigner divers produits et services dans les classes 3, 35 et 44 suivants : 3. « Produits cosmétiques à usage professionnel et destinés au consommateur; Crèmes cosmétiques, émulsions, lotions, liquides, solutions, laits de toilette, gels et huiles de soin pour la peau (du visage, du corps, des mains, des pieds, du cou), huiles à usage cosmétique; Nécessaires de produits de beauté, Produits et préparations cosmétiques pour les soins de la peau; Masques cosmétiques, Cosmétiques, Préparations cosmétiques amincissantes, Exfoliants (produits cosmétiques), Gommages cosmétiques, Produits cosmétiques à effet lifting; Produits cosmétiques pour l'entretien et les soins des cheveux; Produits antisolaires et préparations cosmétiques pour le bronzage de la peau (émulsions, lotions, laits, gels, huiles, liquides); Produits cosmétiques pour blanchir la peau, Crème pour blanchir la peau, Décolorants à usage cosmétique, Produits cosmétiques blanchissants pour la peau, produits cosmétiques pour unifier le teint; Produits cosmétiques pour réduire les rides et ridules, produits cosmétiques anti-âge, produits cosmétiques pour l'éclaircissement de la peau, produits cosmétiques pour l'hydratation de la peau, Produits cosmétiques tonifiants pour la peau; Huiles essentielles et extraits aromatiques; Produits de toilettes; Préparations nettoyantes et parfumantes. 35. « Services de publicité, de marketing et de promotion; Services de négociations commerciales et d'information de la clientèle; Services d'analyses, de recherche et d'informations relatifs aux affaires. 44. « Hygiène et soins de beauté pour êtres humains; Soins hygiéniques et de beauté; Hygiène et soins de beauté pour êtres humains. » La société AESTHETIC SERVICES & DEVELOPMENT (ou ASD) de droit bulgare a son siège à Sofia. Elle a pour activité notamment l'importation, l'exportation et la commercialisation de produits cosmétiques et dispositifs médicaux, et l'organisation de formation dans le domaine de la médecine esthétique. Elle se présente comme bénéficiant d'une licence non exclusive enregistrée le 15 avril 2016 sur la marque JUVEDERM n°0140673 7 dont la société DERMAVITA est titulaire. La SARL VITAL ESTHETIQUE est une société française créée en 2008 se décrivant comme spécialisée dans la production et la commercialisation de produits dans le domaine de la dermatologie, de la médecine esthétique et de la chirurgie dite reconstructive. La société DEVIA CORP de droit luxembourgeois a été fondée par Dimitri S. Elle se présente comme bénéficiaire d'une licence sur la marque JUVEDERM n°01406737. La société LAZEO SAS, constituée en 2009 et présidée par Jacqueline S, a pour activités la vente de dispositifs médicaux ainsi que l'exploitation d'une clinique de médecine esthétique sous l'enseigne « LAZEO » spécialisée dans les soins de rajeunissement, d'amincissement, de traitement au laser et dans le soin des cheveux. Elle a distribué à partir de 2012 des produits du groupe ALLERGAN avant de se voir reprocher par celui-ci l'offre parallèle d'articles contrefaisants sous le signe JUVEDERM, ce qui a entraîné la rupture de son approvisionnement et l'engagement à son encontre d'une action en contrefaçon et concurrence déloyale. La société MY CREAM LAB SAS présidée par Dimitri S a été créée en juin 2016. Elle a pour activités la distribution de produits cosmétiques crées sur mesure et la mise en place d'outils d'analyse et de diagnostic de la peau. Par ordonnance rendue le 2 juin 2017, le juge des référés saisi à l'initiative des sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE SAS et ALLERGAN FRANCE SAS a notamment: -dit qu'en fabricant, en faisant la promotion, en commercialisant ou en s'apprêtant à commercialiser, en France, des produits cosmétiques revêtus du signe JUYEDERM ayant pour objet l'hydratation de la peau et la réduction des rides, la société DERMAVTTA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, la société AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT, la société DMA CORP, Dimitri S et Jacqueline S ont vraisemblablement commis des actes de contrefaçon des marques n°5807169, 3061345 et 2196822 dont la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE est titulaire, ou sont susceptibles de porter une atteinte imminente aux droits conférés par ces titres ; -interdit provisoirement sur le territoire français à la société DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, la société AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT, la société DEVIA CORP, Dimitri S et Jacqueline S de poursuivre ces agissements, et ce, passé un délai de 15 jours à compter de la signification de la présente ordonnance, sous astreinte provisoire de 5.000 euros par infraction constatée pendant un délai de 90 jours ; -condamné in solidum la société DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, la société AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT et la société DIMA CORP à payer à la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE la somme provisionnelle de 30.000 euros au titre du préjudice subi par elle du fait des actes de contrefaçon vraisemblable aux marques No 5807169, 3061345 et 2196822 ; Il a été interjeté appel de cette décision et cette instance est -s'agissant du recours de la société DERMAVITA- actuellement toujours en cours, les autres procédures ayant été radiées en application de l'article 526 du code de procédure civile. Les sociétés ALLERGAN ont en outre fait assigner en référé les sociétés DERMAVITA, ASD et DEVIA CORP par acte des 5 et 6 février 2018 afin d'obtenir la liquidation des astreintes prononcées par l'ordonnance précitée du 2 juin 2017. Parallèlement suivant acte des 22, 27et 28 juin 2017, les sociétés ALLERGAN HOLDINGS France et ALLERGAN France SAS ont fait assigner au fond Jacqueline S, Dimitri S, la société DERMAVITA COMPANY Ltd, la société AESTHETIC SERVICE AND DEVELOPMENT, la société DEVIA CORP, la société LAZEO SAS, la SARL VITAL ESTHETIQUE et la SAS MY CREAM LAB pour voir juger que la fabrication, la présentation, la promotion et/ou la commercialisation de produits cosmétiques, « cosméceutiques » et dispositifs médicaux revêtus du signe JUVEDERM ainsi que toute communication ou usage du signe JUVEDERM en lien avec les produits cosmétiques, cosméceutiques et dispositifs médicaux, constituent une contrefaçon des marques n° 5807169, 3061345 et 2196822 de la société ALLERGAN HOLDINGS France et à titre subsidiaire, voir dire et juger que la fabrication, la présentation, la promotion et/ou la commercialisation de produits cosmétiques, « cosméceutiques » et dispositifs médicaux, revêtus du signe JUVEDERM ainsi que toute communication ou usage du signe JUVEDERM en lien avec les produits cosmétiques, cosméceutiques et dispositifs médicaux par DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT, DEVIA CORP, VITAL ESTHETIQUE, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S constituent une atteinte à la renommée des marques n° 5807169, 3061345 et 2196822 de la société ALLERGAN HOLDINGS France. Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 6 novembre 2017 puis le 9 mars 2018, la société DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHlAN & PARTNERS demande au juge de la mise en état de: Vu notamment l'article 378 du code de procédure civile, les assignations, les conclusions et pièces communiquées devant l'EUIPO (affaires n° 12772 et n° 13948) et devant le TGI de Nanterre (RG n° 17/01904 et RG n° 17/002022), A TITRE PRINCIPAL : SURSEOIR À STATUER dans l'attente des décisions définitives qui seraient rendues dans les procédures de nullité des marques européennes JUVEDERM n° 002196822 et 005807169 (Procédure n° 12772C et 13948C) et des décisions définitives qui seraient rendues dans les procédures de déchéance et nullité de la marque française JUVEDERM n° 3061345 (RG n° 17/01904 et n° 17/06022); À TITRE SUBSIDIAIRE : Si le juge de la mise devait rejeter la demande de sursis à statuer, RENVOYER l'affaire devant le juge de la mise en état et fixer une date d'audience pour conclusions de la société DERMAVITA au fond. Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 9 mars 2018, les sociétés DEVIA CORP SA, LAZEO, MY CREAM LAB, Dimitri S et Jacqueline S demandent qu'il leur soit donné acte du fait qu'ils s'associent aux demandes présentées par la société DERMAVITA COMPANY et à titre subsidiaire, demandent le renvoi de l'affaire devant le juge de la mise en état et la fixation d'une date d'audience pour conclusions de la société DERMAVITA au fond. Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 11 mars 2018, les sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE demandent au juge de la mise en état de:

Vu les articles

367, 378 et 766 du code de procédure civile, Vu l'article 104, 2° du Règlement n°207/2009 sur la marque communautaire Vu l'intérêt d'une bonne administration de la justice et les raisons particulières de poursuivre la procédure, À titre principal, DEBOUTER les sociétés DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, DEVIA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S de leur demande de sursis à statuer, RENVOYER l'affaire à la mise en état avec injonction de conclure au fond à l'encontre de DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, DEVIA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S, PRONONCERLA CLOTURE PARTIELLE de l'instance à l'égard des sociétés AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT et VITAL ESTHETIQUE, qui ont refusé de comparaître bien qu'ayant valablement reçu signification de l'action des sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE, À titre subsidiaire, si par extraordinaire le juge de la mise en état jugeait fondée la demande de sursis à statuer de l'action en contrefaçon sur le fondement de la marque UE JUVEDERM No 2196822, ORDONNER la disjonction entre la demande en contrefaçon sur le fondement de la marque UE JUVEDERM No 2196822, d'une part, et la demande en contrefaçon sur le fondement des marques UE JUVEDERM No 5807169 en classe 5 et FR JUVEDERM No 3061345 en classe 10, ORDONNER le sursis à statuer uniquement pour la demande en contrefaçon fondée sur la marque UE JUVEDERM No 2196822, dans l'attente de la décision à intervenir de PEUIPO sur la demande en déchéance de DERMAVITA à l'encontre de cette même marque, ORDONNER la poursuite de la procédure en contrefaçon fondée sur les marques UE JUVEDERM No 5807169 en classe 5 et FR JUVEDERM No 3061345 en classe 10, RENVOYER l'affaire à la mise en état avec injonction de conclure au fond à rencontre de DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHTP) PARSEGHlAN & PARTNERS, DEVIA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S sur la demande en contrefaçon sur le fondement des marques UE JUVEDERM No 5807169 en classe 5 et FR JUVEDERM No 3061345 en classe 10, PRONONCER LA CLOTURE PARTIELLE de l'instance à l'égard des sociétés AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT et VITAL ESTHETIQUE, qui ont refusé de comparaître bien qu'ayant valablement reçu signification de l'action des sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE, À titre plus subsidiaire, si par extraordinaire le juge de la mise en état jugeait fondée la demande de sursis à statuer de l'action en contrefaçon sur le fondement des marques JUVEDERM UE No 2196822 et FR No 3061345, ORDONNER la disjonction entre la demande en contrefaçon sur le fondement des marques JUVEDERM UE No 2196822 et FR No 3061345 en classe 10, d'une part, et la demande en contrefaçon sur le fondement de la marque UE JUVEDERM No 5807169 en classe 5, ORDONNER le sursis à statuer uniquement pour la demande en contrefaçon fondée sur les marques JUVEDERM UE No 2196822 et FR No 3061345 en classe 10, dans l'attente de la décision à intervenir de l'EUIPO et du Tribunal de grande instance de Nanterre dans les procédures engagées à l'encontre de ces marques, ORDONNER la poursuite de la procédure en contrefaçon fondée sur la marque UE JUVEDERM No 5807169 en classe 5, RENVOYER l'affaire à la mise en état avec injonction de conclure au fond à rencontre de DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHlAN & PARTNERS, DMA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S sur la demande en contrefaçon sur le fondement de la marque UE JUVEDERM No 5807169 en classe 5, PRONONCER LA CLOTURE PARTIELLE de l'instance à l'égard des sociétés AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT et VITAL ESTHETIQUE, qui ont refusé de comparaître bien qu'ayant valablement reçu signification de l'action des sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE, En tout état de cause, DEBOUTER DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGfflAN & PARTNERS, DIMA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S de l'ensemble de leurs demandes, CONDAMNER in solidum DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, DIMA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S à payer à ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE la somme de 15.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, CONDAMNER in soliduM. DERMAVITA COMPANY (LIMITED PARTNERSHIP) PARSEGHIAN & PARTNERS, DIMA CORP, LAZEO, MY CREAM LAB et Dimitri et Jacqueline S aux entiers dépens de l'instance, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile. L'incident a été plaidé à l'audience du 13 mars 2018 et mis en délibéré au 25 mai 2018.

MOTIFS DE LA DECISION

: La société DERMAVITA fait valoir au soutien de sa demande de sursis à statuer que les trois marques qui lui sont opposées par la société ALLERGAN HOLDINGS font aujourd'hui l'objet de sérieuses contestations devant plusieurs juridictions à savoir : -une action en déchéance visant la marque française JUVEDERM n° 3061345 introduite le 9 février 2017 devant le tribunal de grande instance de Nanterre suivie d'une action en nullité pour cession frauduleuse engagée le 12 mai 2017, les deux instances ayant été jointes le 8 mars 2018; -une action en nullité de la marque de l'Union européenne JUVEDERM n°005807169 initiée le 1er avril 2016 devant l'EUIPO sous le n° 12772C ; -une action en nullité de la marque de l'Union européenne JUVDERM n° 002196822 initiée le 25 octobre 2016 sous le n°13948 C (ses pièces 8 à 10). Elle fait valoir que ces différentes actions en nullité formées devant l'EUIPO ont de même que l'instance pendante devant la juridiction de Nanterre été introduites avant la procédure de référé engagée pour voir constater la vraisemblance de la contrefaçon des marques précitées. Elle expose ensuite qu'avant l'absorption par la société ALLERGAN Inc. de la société LEA DERM et l'acquisition de sa marque JUVEDERM ainsi que le choix fait par celle-ci de s'implanter au LIBAN ou la société DERMAVITA détenait des droits antérieurs sur ce signe qui ont récemment été reconnus par la cour d'appel de BEYROUTH ces deux entités coexistaient sans difficultés, que le groupe ALLERGAN a mis en œuvre une stratégie « de barrage » par le dépôt de marques JUVEDERM en classe 3 outre les classes 5 et 10 normalement visées, l'engagement de procédures d'opposition et d'annulation des titres de la société DERMAVITA et enfin, la poursuite d'actions contre ses licenciés. Elle soutient que la présentation du contexte du litige par les sociétés ALLERGAN est erroné et empreinte de mauvaise foi en ce qu'il existe de nombreuses autres procédures en cours initiées par DERMAVITA devant d'autres juridictions et qu'une première action en référé d'heure à heure engagée en 2016 contre celle-ci et la société ASD s'est révélée dépourvue de fondement. Enfin elle affirme que le sursis sollicité se justifie dans la perspective d'une bonne administration de la justice puisque les décisions attendues sont déterminantes pour apprécier la réalité des atteintes alléguées aux droits des sociétés ALLERGAN. Les sociétés ALLERGAN répondent que l'opportunité de prononcer un sursis à statuer est laissé à l'appréciation des juges du fond devant relever des circonstances particulières justifiant cette décision, et qu'il y a lieu de dans ce cadre de mesurer les intérêts en présence au regard du caractère sérieux des actions parallèlement engagées. Elle expose que toutes les actions en cours de la société DERMAVITA ont été précédemment jugées non sérieuses lors de la procédure de référé donnant lieu à la mesure d'interdiction provisoire prononcée le 2 juin 2017, faisant valoir que : -l'action en déchéance à l'encontre de la marque de l'Union européenne n°5807169 a été rejetée par l'EUIPO au regard des nombreuses preuves d'exploitation produites suivant une décision du 26 octobre 2017 ; -l'action en déchéance à l'encontre de la marque JUVEDERM n° 2196822 devant l'EUIPO est parfaitement artificielle face aux preuves d'usage massif qui sont rapportées, étant souligné que les produits JUVEDERM sont mixtes comme relevant à la fois de la classe 5 et de la classe 10 puisqu'ils sont présentés dans des seringues pré- remplies pour réaliser leur injection ; -l'action en déchéance et en nullité de la société DERMAVITA à l'encontre de la marque JUVEDERM n°3061345 devant le tribunal de grande instance de Nanterre n'est pas plus sérieuse, au regard des chiffres de vente en France des produits de la gamme JUVEDERM entre 2012 et 2016, certifiés par le cabinet Ernst & Young le 20 novembre 2017 et du caractère dilatoire des contestations relatives aux actes de cession des marques invoquées et de leur renouvellement qui outre le fait d'être irrecevables pour défaut d'intérêt à agir et manifestement prescrites, sont également mal fondées en ce que les circonstances de ces opérations entre sociétés ayant des intérêts communs ne caractérisent pas une fraude. Enfin les sociétés ALLERGAN soutiennent que le sursis réclamé ne se justifie pas dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice dès lors que les procédures mentionnées plus haut conduiraient à différer le terme de la présente action pendant plusieurs années, que des mesures provisoires ont été ordonnées et que la société ALLERGAN FRANCE, qui a parallèlement été assignée devant le tribunal de commerce de Paris par la société LAZEO pour voir statuer sur le contexte de la rupture de leurs relations contractuelles, a demandé à cette juridiction de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la présente instance. Sur ce, Selon l'article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis à statuer suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine. Hors des cas expressément prévus par la loi, elle peut être prononcée dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice si l'issue d’une autre procédure est susceptible d'avoir une incidence directe sur la solution du litige. Cette appréciation doit s'opérer notamment au regard de l'incidence prévisible du sursis qui serait ordonné sur le délai de traitement du litige et de la probabilité d'une contrariété de décisions qui résulterait en l'espèce d'une remise en cause des droits privatifs invoqués par la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE au soutien de ses demandes. Le juge de la mise en état ne peut évidemment préjuger de l'issue des actions en cours, et doit se prononcer en considérant l'ensemble des conséquences susceptibles de résulter de la poursuite ou non de la présente instance. 1-procédure tendant à la déchéance des droits de la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE sur la marque française JUVEDERM n°3061345: Cette action a été engagée le 9 février 2017 pour la période de référence s'étendant à compter du 9 février 2012 pour une durée de 5 ans à compter de cette date (article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle). Contrairement à ce qui était le cas devant le juge des référés, elle ne développe pas au soutien de la présente demande les raisons -usage par l'intermédiaire d'une marque complexe, ou qui ne concerneraient pas les produits de la classe 5- pour lesquelles la déchéance serait encourue nonobstant les preuves d'exploitation rapportées par la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE, lesquelles ont précédemment été examinées par le juge des référés et par une décision de l'EUIPO du 25 mars 2015 pour une période de référence située entre le 10 avril 2008 et le 9 avril 2013. Ces preuves d'exploitation sont variées et produites en nombre significatif puisqu'elles résultent d'un chiffre d'affaires justifié de plus de 88 millions USD dans l'Union européenne pour les produits de la gamme JUVEDERM en 2009 et de 146 millions USD en 2015, de factures de commercialisation pour un volume important de produits distribué en France, de documents publicitaires et brochures marketing datées et du budget consacré sur les années de référence à la promotion, les éléments financiers étant certifiés par son commissaire aux comptes. S'agissant ensuite des moyens tirés des conditions de la cession de la marque française par ALLERGAN INDUSTRIE à la société ALLERGAN HOLDING FRANCE conclu le 7 janvier 2010 et partant des conditions de renouvellement des titres, qui ont été soulevés postérieurement et seront examinés dans le cadre de la même instance, il est permis de relever que des contestations sérieuses sont émises tant sur la recevabilité que sur le bien-fondé de ces prétentions (pièce ALLERGAN 114). 2-procédure tendant à la déchéance des droits de la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE sur la marque JUVEDERM n°5807169 devant l'EUIPO: Cette action a été introduite le 1 er avril 2016 sur la période de référence du 1er avril 2011 au 31 mars 2016. Elle a donné lieu à une décision de l'EUIPO datée du 26 octobre 2017, aux termes de laquelle la division d'annulation estime que les preuves présentées par la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE sont suffisantes pour établir l'usage sérieux de la marque JUVEDERM pour les produits pour lesquels elle est enregistrée. Ces moyens de preuves -certificats de conformité des produits, rapport R&D, enregistrement de noms de domaine contenant le signe JUVEDERM, emballages utilisés à compter de 2008, sélection de factures et de supports promotionnels, rapports et recommandations sur les performances des produits- sont énumérés et analysés (pièce ALLERGAN 113). 3-procédure tendant à la déchéance des droits de la société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE sur la marque JUVEDERM n° 2196822 devant l'EUIPO: Cette action a été engagée le 25 octobre 2016 devant l'EUIPO pour défaut d'usage sérieux sur la période du 25 octobre 2011 au 24 octobre 2016 concernant les produits d1 «implants dermiques, substances biocompatibles à usage médical destinées au comblement de la ride ». La société ALLERGAN HOLDING FRANCE fait valoir que les preuves d'usage jugées pertinentes pour les produits de la classe 5 le sont également pour ceux de la classe 10 « appareils et instruments médicaux, implants dermiques, substances biocompatibles à usage médical destinées au comblement de la ride, peau artificielle à usage chirurgical, prothèse » en ce que comme il est indiqué plus haut plusieurs produits de la gamme JUVEDERM commercialisés sous les appellations « JUVEDERM ULTRA » ou « JUVEDERM VOLUMA », s'appuyant à cet égard sur les remarques générales relatives à la Classification de Nice invoquées devant l'EUIPO et selon lesquelles « un produit fini à usages multiples (...) peut, être classé dans toutes les classes correspondant à l'une quelconque de ses fonctions ou de ses destinations », Dans son mémoire déposé devant l'EUIPO le 12 avril 2017, la défenderesse à l'incident établit un descriptif de plusieurs des produits concernés mentionnant leur mode d'injection (pages 6 et 7). La société ALLERGAN HOLDINGS FRANCE communique enfin un état certifié des ventes des produits de la gamme JUVEDERM entre 2012 et 2016 dont il ressort que pour le seul territoire français et concernant 6 références, elles ont représenté une valeur de 153.784.188 USD sur un total de 368.857.146 USD en France, Allemagne, Pologne Espagne et Royaume Uni (pièces ALLERGAN 115 et 116). Si les arguments opposés à ces actions en déchéance et nullité des marques litigieuses ne permettent pas de préjuger de leur résultat, il est observé qu'ils ont pour une partie significative été examinés par l'EUIPO et par le juge des référés et qu’une décision -certes frappée de recours- a déjà été rendue s'agissant de la marque n°5807169. Au regard de ces éléments s'ajoutant au fait que des mesures provisoires d'interdiction d'exploitation du signe JUVEDERM pour des produits cosmétiques ont cours depuis le 2 juin 2017 et donnent parallèlement lieu à une demande de liquidation d'astreinte, il n'apparaît pas relever d'une bonne administration de la justice de surseoir à statuer dans la présente instance dans l'attente des décisions définitives à intervenir dans les procédures visant les marques JUVEDERM n° 002196822 et 005807169 (Procédure devant l'EUIPO n°12772C et 13948C) et celle tendant à l'annulation de la marque française JUVEDERM n° 3061345. Les demandes présentées par la société DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHIAN & PARTNERS sont donc rejetées. Aucune circonstance particulière ne justifiant la clôture partielle à l'égard des sociétés AESTHETIC SERVICES AND DEVELOPMENT et VITAL ESTHETIQUE, cette mesure réclamée par les sociétés ALLERGAN n'a pas lieu d'être prononcée. La société DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHIAN & PARTNERS étant à l'origine de l'incident, elle supportera la charge des dépens afférents et sera condamnée à verser aux sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE, qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à 3.000 euros. L'affaire sera rappelée à l'audience de mise en état du 25 septembre 2018 à 15 heures 30 pour les conclusions au fond des sociétés défenderesses devant être notifiées avant le 11 septembre 2018.

PAR CES MOTIFS

: Le juge de la mise en état statuant publiquement, par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe, susceptible d'appel dans les conditions prévues à l'article 776 du code de procédure civile, REJETTE la demande des sociétés DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHIAN & PARTNERS, DIMA CORP SA, LAZEO, MY CREAM LAB, et de Dimitri S et Jacqueline S, tendant à voir prononcer un sursis à statuer dans l'attente des décisions définitives à intervenir dans les procédures visant les marques JUVEDERM n° 002196822 et 005807169 (Procédure devant l'EUIPO n°12772C et 13948C) et celle tendant à l'annulation de la marque française JUVEDERM n° 3061345 ; RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état du 25 septembre 2018 à 15 heures 30 pour les conclusions au fond des sociétés défenderesses devant être notifiées avant le 11 septembre 2018; CONDAMNE la société DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHIAN & PARTNERS à verser aux sociétés ALLERGAN HOLDINGS FRANCE et ALLERGAN FRANCE ensemble une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. CONDAMNE la société DERMAVITA COMPANY (Limited partnership) PARSEGHIAN & PARTNERS aux dépens.