Chronologie de l'affaire
Cour d'appel de Douai (2e chambre) 02 octobre 1997
Cour de cassation 27 novembre 2001

Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 novembre 2001, 97-21991

Mots clés société · procédure civile · travaux · société anonyme · intérêts · contrat · forclusion · redressement judiciaire · pourvoi · qualités · rapport · siège · sinistre · dommages · remise

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 97-21991
Dispositif : Rejet
Décision précédente : Cour d'appel de Douai (2e chambre), 02 octobre 1997
Président : Président : M. DUMAS
Rapporteur : Mme Tric
Avocat général : M. Viricelle

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Douai (2e chambre) 02 octobre 1997
Cour de cassation 27 novembre 2001

Texte

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Silonord, société anonyme, dont le siège est Appontement, quai Céréalier, port Est, 59140 Dunkerque,

en cassation d'un arrêt rendu le 2 octobre 1997 par la cour d'appel de Douai (2e chambre), au profit :

1 / de la société de Soudure entretien montage (SEM), société anonyme, dont le siège est ...,

2 / de M. X..., demeurant ..., pris en ses qualités de représentant des créanciers et de commissaire à l'exécution du plan de redressement par voie de continuation de la société de Soudure entretien montage (SEM),

3 / de la société Elvia Assurances, Groupe Allianz, société anonyme, anciennement dénommée Helvetia Accidents, société anonyme, dont le siège est ... le Pont,

4 / du procureur général près la cour d'appel de Douai, domicilié place Charles de Pollinchove, 59500 Douai,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 16 octobre 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Tric, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Tric, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Silonord, de la SCP Defrénois et Levis, avocat de la société Elvia Assurances, Groupe Allianz, de la SCP Gatineau, avocat de la société SEM et de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Viricelle, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Douai, 2 octobre 1997), qu'en juin 1986, la société Silonord a confié la restauration puis la maintenance d'un portique qu'elle exploite au Port Est à Dunkerque à la société Soudure entretien montage (la société SEM), assurée auprès de la compagnie d'assurances Elvia ; que dans la nuit du 17 au 18 décembre 1991, le portique s'est déplacé sous l'effet du vent, est sorti de ses rails et a été endommagé ; qu'une expertise judiciaire a été ordonnée en référé et que les travaux de réparation ont été effectués d'urgence par la société SEM qui a assigné la société Silonord en paiement de leur coût et de dommages-intérêts, appelant en garantie son assureur Elvia, tout en contestant devoir des dommages-intérêts pour malfaçons à la société Silonord ; que, mise en redressement judiciaire le 11 octobre 1994, la société SEM a fait valoir que la société Silonord n'avait pas déclaré sa créance ; que la société Silonord a contesté devoir le coût des réparations et a invoqué la compensation, intervenue avant le redressement judiciaire, entre le coût des travaux et les dommages-intérêts pour malfaçons ; que subsidiairement, elle a demandé à être relevée de la forclusion ; qu'elle a enfin demandé la condamnation de la compagnie Elvia au titre de l'action directe ;

Sur le quatrième moyen

, qui est préalable :

Attendu que la société Silonord reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de relevé de forclusion alors, selon le moyen, qu'en laissant sans réponse ses conclusions qui faisaient valoir que la société SEM avait omis sciemment d'aviser le représentant des créanciers de l'existence de la créance de la société Silonord, créance dont elle connaissait parfaitement le principe, et qu'elle l'avait informée de l'existence du redressement judiciaire un an et trois jours après le prononcé de cette mesure, aux fins de la placer dans l'impossibilité de déposer une requête en relevé de forclusion, comportement caractéristique d'une véritable fraude, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt relève que si la société SEM n'a pas visé dans l'état des créances qu'elle devait remettre au représentant des créanciers la société Silonord, celle-ci n'avait toutefois pas encore chiffré sa créance de dommages-intérêts et que, dans le litige pendant, elle a fait attendre ses conclusions de nombreux mois après le dépôt du rapport d'expertise, ayant un comportement purement dilatoire pour bloquer la créance certaine, liquide et exigible de la société SEM à laquelle elle est mal venue de reprocher d'avoir attendu un an et quatre jours pour lui faire connaître la procédure collective ouverte à son égard, régulièrement publiée au Bodacc ; qu'il retient encore que la société Silonord aurait dû se montrer particulièrement vigilante, le conseil de la société SEM s'étant fait l'écho des difficultés de trésorerie de cette société ; qu'ainsi la cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen

, pris en ses quatre branches :

Attendu que la société Silonord reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société SEM la somme de 648 609, 95 francs avec intérêts au taux légal à compter du 2 juin 1992 et la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1 / que faute d'avoir recherché, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la société SEM n'avait pas réalisé l'attache des élingues qui ont cédé et si cette faute, de même que le manque de raidissement des élingues, ne lui était pas imputable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;

2 / que la société Silonord soutenait, d'un côté, que l'accident n'était pas dû à une carence des freins, puisqu'ils étaient restées bloqués, le portique ayant simplement glissé et non roulé sur le rail et, de l'autre, que même dans l'hypothèse où le sinistre serait dû à une défaillance des freins, la responsabilité ne pourrait lui en incomber, dès lors que la société SEM était chargée de l'entretien des freins ; que faute d'avoir répondu à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que l'entreprise chargée de modifier une installation et d'assurer sa maintenance ultérieurement est tenue de faire au mieux des intérêts de son client ; que la société Silonord a demandé en 1986 à la société SEM de modifier considérablement le portique qu'elle exploitait ;

que d'importants travaux ont été réalisés en exécution de ce contrat, la société SEM ayant de surcroît assuré la maintenance du portique modifié par ses soins ; qu'en soutenant que cette société avait "la paternité de travaux inefficaces", la société Silonord invitait la cour d'appel à rechercher si elle avait satisfait à son obligation de conseil en tant que professionnel chargé de la réalisation des travaux et de leur maintenance ; qu'en omettant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;

4 / qu'un engagement contractuel suppose la rencontre des volontés ; que les travaux effectués par la société SEM n'avaient été acceptés par la société Silonord que sous réserve de leur acceptation par l'expert judiciaire dont les travaux venaient de débuter ; que la société Silonord s'opposait au paiement des sommes réclamées par la société SEM, les travaux réalisés n'ayant pas été préalablement examinés et approuvés par l'expert judiciaire, d'où il suit que le contrat n'avait pu se former ; qu'en estimant implicitement que le contrat était valable, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1108 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que dès lors que la cour d'appel a retenu que la créance de dommages-intérêts était éteinte faute de déclaration de créance, elle n'était pas tenue de faire les recherches inopérantes invoquées par les première et troisième branches ni de répondre aux conclusions inopérantes invoquées par la deuxième branche ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que la société Silonord a commandé les travaux de mise en sécurité et de remise en place du portique pour le compte de qui il appartiendra et retient qu'il y a eu accord sur la chose et sur le prix au moment de la commande, répondant ainsi, en l'écartant, à l'argumentation de la société Silonord ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen

:

Attendu que la société Silonord reproche ensuite à l'arrêt d'avoir rejeté son action directe contre la Cie Elvia, alors, selon le moyen, que la censure à intervenir

sur le premier moyen

de cassation, relatif à la responsabilité de la société SEM dans la survenance du sinistre, entraînera par voie de conséquence, et en application de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile, la cassation de la décision en ce qui concerne l'action directe, qui n'est fondée que sur l'absence de responsabilité de l'assuré de la compagnie Elvia ;

Mais attendu que le premier moyen étant rejeté, le second moyen doit l'être aussi ;

Et

sur le troisième moyen

:

Attendu que la société Silonord reproche enfin à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société SEM la somme de 648 609, 95 francs avec intérêts au taux légal à compter du 2 juin 1992 et la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que les juges du fond doivent examiner, même succinctement les pièces sur lesquelles ils fondent leur décision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné la société Silonord au paiement d'une certaine somme sans exposer de motifs circonstanciés relatifs au montant des travaux exécutés tout en incluant le montant de factures sans rapport avec le sinistre et qui n'ont fait l'objet d'aucune analyse ; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la société Silonord n'ayant discuté dans ses conclusions que l'abattement écarté par le tribunal et non le montant des travaux contrôlé par l'expert, ni deux factures étrangères aux travaux de remise en état réclamées par la société SEM, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, retient qu'il n'y a pas lieu de faire un abattement sur le montant des travaux puisque la commande a été passée par la société Silonord moyennant les prix arrêtés et facturés à l'identique par la SEM et que les factures sont restées impayées ; qu'ainsi, la cour d'appel a satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

:

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Silonord aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Silonord à payer à la société Elvia et à M. X..., ès qualités, la somme de 12 000 francs ou 1 829,39 euros, chacun ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille un.