Sur le moyen
unique :
Vu
les articles
L. 376-1 du code de la sécurité sociale et 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, dans leur rédaction issue de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, ensemble l'article
L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon les deux premiers de ces textes, que la rente versée en application du dernier indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; qu'en présence de pertes de gains professionnels et d'incidence professionnelle de l'incapacité, le reliquat éventuel de la rente, laquelle indemnise prioritairement ces deux postes de préjudice patrimoniaux, ne peut s'imputer que sur le poste de préjudice personnel extra-patrimonial du déficit fonctionnel permanent, s'il existe ; que les recours des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion des postes de préjudice à caractère personnel, et que, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ; que lorsque la décision d'attribution de la rente versée en application du dernier de ces textes est définitive, la caisse est tenue, sous peine d'astreinte en cas de retard injustifié du versement de cette prestation, de sorte que tant pour les arrérages à échoir que pour les arrérages échus, la condition tenant au versement préalable et effectif de la prestation est remplie ;
Attendu que le 2 février 1997, M. X... a été blessé dans un accident de la circulation pris en charge au titre des accidents du travail, dans lequel était impliqué le véhicule non assuré conduit par M. Y... ; que M. X... a, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie (la caisse), saisi un tribunal de grande instance en indemnisation de ses préjudices ;
Attendu que pour limiter à une certaine somme le montant de la condamnation de M. Y... à l'égard de la caisse, l'arrêt retient
que le poste de préjudice lié à l'incidence professionnelle, évalué à 18 000 euros, est totalement compensé par la rente accident du travail versée par la caisse dont les arrérages échus s'élèvent à 20 743, 25 euros et le capital représentatif à 40 592, 41 euros ; qu'il alloue par ailleurs à M. X... une somme de 10 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;
Qu'en statuant ainsi
, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
:
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé le jugement quant à l'indemnité allouée au titre de l'article
700 du code de procédure civile et la condamnation aux dépens comprenant les frais d'expertise, l'arrêt rendu le 3 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille dix.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 96. 033, 18 augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2004 la somme qu'il a condamné Monsieur Denis Y... à verser à la CPAM des ARDENNES en remboursement des prestations versées par cette dernière à la victime, Monsieur Malik X... ;
AUX MOTIFS QUE, sur l'incidence professionnelle, Malik X... fait valoir que du fait de l'accident il est gravement limité dans son activité professionnelle et a perdu la chance d'être promu chef de service éducatif en 2006 comme son collègue M. A..., embauché au même poste que lui et à la même époque ; qu'il sollicite, de ce chef, la somme de 33 922, 80 ; que toutefois l'expert a conclu que Malik X... avait repris ses activités professionnelles dans des conditions normales et que les conséquences de l'accident ne contre-indiquent pas l'activité d'éducateur spécialisé ; qu'il est d'ailleurs établi par la production du bulletin de salaire de janvier 2004 qu'à cette époque, Malik X... travaillait toujours en qualité d'éducateur spécialisé ; qu'il ne démontre pas que les séquelles qu'il conserve de l'accident ont entravé sa carrière et que c'est la survenance de celui-ci qui l'a empêché d'être nommé en 2006 chef de service, étant relevé qu'aucune pièce relative à sa situation professionnelle postérieure à janvier 2004 n'est versée aux débats ; qu'en revanche, les séquelles de l'accident entraînent une fatigabilité accrue dans l'exercice des fonctions d'éducateur spécialisé ; qu'il lui sera alloué, de ce chef, une indemnité de 18. 000 ; que ce poste de préjudice étant totalement compensé par la rente accident du travail versée par la CPAM (arrérages échus au 16 avril-2005 : 20. 743, 25 et capital rente au 17 avril 2005 : 40. 592, 41 ), il ne revient aucune indemnité à la victime et la CPAM est en droit d'obtenir le payement de la somme de 18. 000 ; que sur les préjudices personnels-déficit fonctionnel temporaire : la gêne dans les actes de la vie courante pendant les arrêts de travail sera réparée par la somme de 14. 000 ;- déficit fonctionnel permanent : que l'indemnité demandée (10. 000 ), n'est pas contestée ; qu'en vertu de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006, les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en pris charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel... ; que cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ; que la CPAM soutient que la rente accident du travail indemnise tant l'incapacité permanente dont est atteint l'assuré social que l'incidence professionnelle de l'incapacité dont il demeure atteint et en déduit que la rente doit s'imputer tant sur l'incidence professionnelle et la perte de gains professionnels futurs que sur le poste déficit fonctionnel permanent ; que Toutefois, s'agissant d'un poste de préjudice personnel, la caisse doit, pour exercer son recours sur ce poste, établir qu'elle a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation l'indemnisant de manière incontestable ; que toutefois, aux termes de l'article L. 431-1 4° du code de la sécurité sociale, la rente accident du travail est versée aux « victimes atteintes d'une incapacité permanente de travail » ; que d'autre part, l'article
L. 434-2 du même code précise que le taux de l'incapacité permanente de la victime est déterminé notamment, d'après sa qualification professionnelle ; qu'enfin, le montant de la rente est fonction du salaire ; qu'il résulte de ces éléments que l'objet de cette rente est de contribuer a la réparation du préjudice subi par l'intéressé dans sa vie professionnelle du fait de son handicap et non à celle du déficit fonctionnel permanent, lequel comprend exclusivement les incidences de ce handicap sur la vie personnelle de la victime ; que dans ces conditions, la CPAM, qui n'établit pas avoir effectivement, préalablement et de manière incontestable, versé une prestation indemnisant tout ou partie du déficit fonctionnel permanent de la victime, est donc mal fondée en sa demande ; qu'il revient ainsi à la victime la somme de 10. 000 ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en retenant, pour justifier sa décision, que le poste déficit fonctionnel permanent constituerait un poste de préjudice personnel et non un poste de préjudice corporel soumis au recours des organismes sociaux, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si le déficit fonctionnel ne correspondait pas à une atteinte objective à l'intégrité physique de la victime, peu important qu'elle concerne la vie professionnelle ou la vie personnelle de cette dernière, a privé sa décision de base légale au regard des articles
L 376-1 du Code de la sécurité sociale et 31 de la loi du 5 juillet 1985 dans leur rédaction issue de la loi n° 2006-1540 du 21 décembre 2006 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'aux termes de l'article
L 434-2 du Code de la sécurité sociale qui définit les éléments nécessaires au calcul de la rente d'accident du travail, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime, ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité ; qu'en imputant le recours de la caisse au titre de la rente d'accident du travail versée par elle à la victime sur le seul poste de préjudice réparant l'incidence professionnelle de l'accident, sans rechercher si cette rente n'avait pas réparé d'autres préjudices de caractère corporel ou personnel subis par cette victime, la Cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé ;
ALORS, DE TROISIÈME PART, QU'en fixant ainsi, au vu de la seule incidence professionnelle, le préjudice de Monsieur X... déjà réparé par la rente d'accident du travail versée par la caisse, sans tenir compte de l'ensemble des autres critères, notamment personnels, prévus par l'article
L 434-2 du Code de la sécurité sociale, la Cour d'appel a violé a violé par fausse application le texte susvisé ;
ALORS, ENFIN, QU'en particulier, en refusant d'imputer cette rente d'accident du travail à l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent de la victime, pourtant pris en compte dans le calcul du taux de l'incapacité permanente de la victime et ainsi réparé par cette même rente, la Cour d'appel a violé à nouveau l'article
L 434-2 du Code de la sécurité sociale.