Logo pappers Justice
Logo pappers Justice

CEDH, Cour (Quatrième Section), ARVANITI c. POLOGNE, 18 mars 2008, 20797/06

Synthèse

  • Juridiction : CEDH
  • Numéro de pourvoi :
    20797/06
  • Dispositif : Radiation du rôle
  • Date d'introduction : 27 avril 2006
  • Importance : Faible
  • État défendeur : Pologne
  • Nature : Décision
  • Identifiant européen :
    ECLI:CE:ECHR:2008:0318DEC002079706
  • Lien HUDOC :https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-85830
Voir plus

Résumé

Vous devez être connecté pour pouvoir générer un résumé. Découvrir gratuitement Pappers Justice +

Suggestions de l'IA

Texte intégral

QUATRIÈME SECTION DÉCISION de la requête no 20797/06 présentée par Andrzej ARVANITI contre la Pologne La Cour européenne des droits de l'homme (quatrième section), siégeant le 18 mars 2008 en une chambre composée de : Nicolas Bratza, président, Lech Garlicki, Giovanni Bonello, Ljiljana Mijović, Ján Šikuta, Päivi Hirvelä, Ledi Bianku, juges, et de Lawrence Early, greffier de section, Vu la requête susmentionnée introduite le 27 avril 2006, Vu la décision de la Cour d'examiner conjointement la recevabilité et le fond de l'affaire comme le permet l'article 29 § 3 de la Convention, Vu la déclaration du 12 septembre 2007 par laquelle le gouvernement défendeur invite la Cour à rayer la requête du rôle et la réponse du requérant à cette déclaration, Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Andrzej Arvaniti, est un ressortissant polonais, né en 1952 et résidant à Warszawa. Le gouvernement polonais (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. Jakub Wołąsiewicz, du ministère des Affaires étrangères. A. Les circonstances de l'espèce Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit. Le 16 février 1998, le requérant forma une action en dommages et intérêts à l'encontre de l'huissier de justice et du Trésor public. Il reprocha à l'huissier d'avoir classé sans raison valable une procédure d'exécution forcée. Le 18 février 1998, le tribunal de district somma l'intéressé à s'acquitter des frais de justice. Le 16 juillet 1998, le tribunal ordonna de notifier la demande introductive d'instance aux défendeurs et les obligea à fournir une réponse. Les réponses furent déposées au greffe les 12 août et 3 novembre 1998. Le 5 février 1999, le tribunal tint la première audience. Elle fut reportée en raison de l'absence des défendeurs. Le 4 mars 1999, le tribunal entendit le requérant, rejeta ses demandes d'administration des preuves et reporta l'audience afin de convoquer l'huissier de justice. Le 25 mars 1999, les défendeurs ne comparurent pas à l'audience et le tribunal décida de suspendre la présente procédure jusqu'à l'issue d'une autre procédure civile intentée par le requérant à l'encontre de l'huissier de justice. A la même date, le requérant modifia sa demande. Le 22 septembre 1999, le tribunal régional, statuant sur l'appel de l'intéressé interjeté le 29 avril 1999, infirma la décision de suspendre la procédure. En marge de leur jugement, les juges relevèrent qu'il était nécessaire pour les besoins de la présente procédure de désigner l'autre partie au procès, personne physique et non une institution étatique en général. Le 3 novembre 1999 et le 13 janvier 2000, l'intéressé déposa deux plaintes auprès du tribunal régional en se plaignant de la durée excessive de la procédure. Dans la lettre du 14 janvier 2000, le président du tribunal régional notifia au requérant la décision du 22 septembre 1999, reconnut le retard et l'informa que le dossier serait transmis au tribunal de district dans les meilleurs délais. Le 22 février 2000, le tribunal de district suspendit la procédure au motif que, malgré la sommation du juge du 21 janvier 2000, l'intéressé avait refusé de fournir les données personnelles de l'huissier de justice. Le requérant omit d'interjeter appel. Le 30 mars 2000, il fournit les données personnelles de l'huissier de justice au tribunal et celui-ci leva la suspension le 5 avril 2000. A l'audience du 17 mai 2000, comparut l'avocat de l'huissier de justice. Le tribunal reporta l'audience afin d'obliger l'huissier à comparaitre en personne. Le 8 juin 2000, le tribunal annula l'audience fixée au 9 juin 2000. Le 11 octobre 2000, aucun des défendeurs n'a comparu devant le tribunal. Le juge reporta l'audience sans fixer de délai et ordonna de demander à une autre chambre du même tribunal de fournir le dossier de la procédure d'exécution forcée qui faisait l'objet de la demande du requérant. Entre octobre 2000 et mars 2001, le tribunal renouvela ses demandes concernant ce dossier. Le 1er mars 2001, le tribunal désigna un expert-comptable afin qu'il établisse dans un délai de 30 jours le montant de la perte subie par le requérant à la suite du comportement de l'huissier de justice. Le 6 avril 2001, l'expert désigné par le tribunal refusa d'établir un rapport au motif qu'il avait engagé une procédure judiciaire à l'encontre d'une des parties au procès. Le 31 août 2001, l'autre expert nommé ultérieurement par le tribunal déposa son rapport au greffe. En novembre 2001, le requérant souleva plusieurs griefs concernant ce rapport. Le 8 mars 2002, le tribunal entendit l'expert et, à la demande de l'intéressé, désigna un autre expert en vue d'établir un rapport complémentaire dans un délai de 30 jours. A l'audience du 28 mai 2002, comparut seul l'avocat de l'huissier de justice. Le juge reporta l'audience sans fixer de délai et décida de renvoyer l'affaire à la deuxième chambre civile du même tribunal en vue de l'interprétation d'une décision judiciaire. Le 18 février 2003, après avoir procédé à l'interprétation demandée, le président de la deuxième chambre civile redéposa le dossier au greffe de la juridiction du fond. Le 14 mars 2003, l'expert y déposa ses conclusions. Le 15 avril 2003, le tribunal entendit un des experts. Eu égard aux divergences entre les conclusions recueillies, il reporta l'audience afin de confronter les deux experts. En mai 2003, l'affaire fut assignée à un autre juge. Le 16 mai 2003, un des experts ne comparut pas et le tribunal reporta l'audience. Le 29 septembre 2003, le tribunal entendit le requérant et reporta l'audience en vue d'entendre l'huissier de justice. Le 22 octobre 2003, l'intéressé modifia sa demande. Le 27 octobre 2003, le tribunal communiqua un mémoire du requérant à l'huissier de justice et reporta l'audience à la demande de celui-ci. Le 26 novembre 2003, le tribunal entendit les parties au procès et reporta l'audience en vue de prononcer la sentence. Le 10 décembre 2003, le tribunal décida de rouvrir la procédure et de procéder de nouveau à l'analyse des preuves ainsi que de reporter l'audience afin d'ordonner, à la demande du requérant, une autre expertise complémentaire. L'ordonnance concernant cette expertise fut rendue le 3 février 2004. L'expert déposa son rapport au greffe le 31 mars 2004. Le 21 mai 2004, le requérant modifia sa demande et souleva plusieurs griefs concernant les conclusions de l'expert. Le 23 juin 2004, le tribunal entendit l'expert et reporta l'audience. Le 21 juillet 2004, le tribunal entendit les parties au procès et reporta l'audience en vue de prononcer la sentence. Par jugement du 3 août 2004, le tribunal débouta le requérant de sa demande. Le juge estima qu'il n'avait pas démontré son préjudice. Le 23 août 2005, le requérant engagea une action sur la base de l'article 5 de la loi de 17 juin 2004 pour faire constater que sa cause n'était pas entendue dans un « délai raisonnable ». Le 17 octobre 2005, le tribunal régional rejeta cette action. Les juges constatèrent en particulier que l'ensemble des pièces du dossier ne révélait aucune période d'inactivité du juge du fond. Ils considérèrent que les changements dans la composition du tribunal de district n'avaient entrainé aucun retard. Selon eux, le fait que l'audience avait été reportée à plusieurs reprises était imputable aux non-comparutions des parties, ainsi qu'à l'erreur du requérant qui aurait fourni au tribunal une adresse incorrecte de l'huissier de justice. Les juges réfutèrent les allégations de l'intéressé qui reprochait au tribunal de district d'avoir désigné un expert incompétent. Ils estimèrent que dans le cadre de la procédure engagée sur la base de la loi de 17 juin 2004 il n'y avait pas lieu d'examiner le bien-fondé des décisions du juge du fond. Le 21 octobre 2004, l'intéressé interjeta appel. Le 4 avril 2005, le tribunal régional reporta sa première audience au vu de la nécessité de recueillir les dossiers invoqués dans la motivation du jugement du tribunal de district. Le 26 juillet 2005, le tribunal régional infirma le jugement du 3 août 2004 et renvoya l'affaire devant le tribunal de district. Les juges estimèrent que les preuves administrées par la juridiction de première instance étaient insuffisantes et que celle-ci avait rejeté à tort les demandes du requérant visant à convoquer des témoins. Le 18 janvier 2006, le tribunal de district fixa une audience au 17 mars 2006. Le juge ordonna de convoquer en qualité de témoin A.G. qui, selon les informations figurant déjà dans un des dossiers recueillis pour les besoins de la procédure, était morte depuis plusieurs années. Le 20 février 2006, le requérant modifia sa demande. Le 17 mars 2006, le tribunal de district reporta l'audience sans fixer un délai. Il obligea le requérant à fournir l'adresse d'A.G., malgré la déclaration de celui-ci que la personne concernée n'était plus en vie. Il décida également de présenter le dossier au président du tribunal afin de désigner un juge rapporteur. Le 8 mai 2006, le requérant modifia sa demande. Le 9 janvier 2007, le tribunal de district tint une audience et la reporta sans fixer de délai. Le 28 mai 2007, le tribunal de district désigna un expert. La procédure est toujours pendante. B. Le droit et la pratique internes pertinents Le 17 septembre 2004 est entrée en vigueur la loi adoptée le 17 juin 2004, qui a introduit dans le système juridique polonais une voie de recours contre la longueur excessive des procédures judiciaires (Ustawa o skardze na naruszenie prawa strony do rozpoznania sprawy w postępowaniu sądowym bez nieuzasadnionej zwłoki). Les décisions Charzyński c. Pologne no 15212/03 (déc.), §§ 12-23, ECHR 2005-V, Ratajczyk c. Poland no 11215/02 (déc.), ECHR 2005-VIII et Krasuski c. Poland, no 61444/00, §§ 34-46, ECHR 2005-V décrivent le droit et la pratique internes pertinents concernant l'efficacité de la voie de recours interne instaurée par la loi de 2004. GRIEFS 1. Invoquant l'article 6 § 1 de la Convention, le requérant dénonce la durée de la procédure. 2. Affirmant n'avoir eu à sa disposition aucun recours effectif au travers duquel il aurait pu se plaindre de cette durée, il allègue par ailleurs la violation de l'article 13 de la Convention.

EN DROIT

A. La durée de la procédure et l'absence de tout recours effectif à cet égard Le requérant dénonce la durée de la procédure et allègue n'avoir eu à sa disposition aucun recours effectif pour s'en plaindre en Pologne. Il invoque l'article 6 § 1 et l'article 13 de la Convention, dont les passages pertinents en l'espèce disposent : Article 6 § 1 « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) » Article 13 « Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. » Par une lettre du 12 septembre 2007, le Gouvernement a informé la Cour qu'il entendait faire une déclaration unilatérale tendant à résoudre la question soulevée par la requête. Il a en outre invité la Cour à rayer l'affaire du rôle en vertu de l'article 37 de la Convention. La déclaration se lit ainsi : « Le gouvernement déclare - au moyen de la présente déclaration unilatérale - qu'il reconnaît la durée excessive de la procédure interne engagée par le requérant. Le Gouvernement reconnaît également qu'en ce qui concerne le grief relatif à la durée excessive de la procédure litigeuse, le requérant n'a pas bénéficié, dans les circonstances particulières de la présente affaire, dans l'ordre interne d'un redressement adéquat, comme l'exigerait l'article 13 de la Convention. Le Gouvernement déclare être prêt à verser au requérant au titre de la satisfaction équitable la somme de 19 000 PLN, montant qu'il considère comme raisonnable au vu de la jurisprudence de la Cour. Cette somme qui couvrira tout préjudice matériel et moral ainsi que les frais et dépens, ne sera soumise à aucun impôt. Elle sera payable dans les trois mois suivant la date de la notification de la décision de la Cour rendue conformément à l'article 37 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme. A défaut de règlement dans ledit délai, le Gouvernement s'engage à verser, à compter de l'expiration de celui-ci et jusqu'au règlement effectif de la somme en question, un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage. .... Le Gouvernement invite respectueusement la Cour à dire que la poursuite de l'examen de la requête n'est plus justifiée et à la rayer du rôle en vertu de l'article 37 § 1 (c) de la Convention. » Par une lettre du 27 octobre 2007, le requérant a fait savoir que la somme offerte par le Gouvernement dans sa déclaration lui paraissait inacceptable. La Cour rappelle que l'article 37 de la Convention dispose que, à tout moment de la procédure, la Cour peut décider de rayer une requête du rôle lorsque les circonstances permettent de tirer l'une des conclusions exposées aux alinéas a), b) ou c) du paragraphe 1 de cet article. En particulier, l'article 37 § 1 c) autorise la Cour à rayer une requête du rôle lorsque : « pour tout autre motif dont [elle] constate l'existence, il ne se justifie plus de poursuivre l'examen de la requête. ». Elle rappelle aussi que, dans certaines circonstances, elle peut rayer une requête du rôle en vertu de l'article 37 § 1 c) de la Convention sur la base d'une déclaration unilatérale du gouvernement défendeur même si le requérant souhaite que l'examen de l'affaire se poursuive. En pareil cas, pour déterminer si elle doit rayer la requête du rôle, la Cour examine attentivement la déclaration à la lumière des principes se dégageant de sa jurisprudence, en particulier de l'arrêt Tahsin Acar (Tahsin Acar c. Turquie [GC], no 26307/95, §§ 75-77, CEDH 2003-VI), WAZA Spółka z o.o. c. Pologne (déc.), no 11602/02, 26 juin 2007, et Sulwińska c. Pologne (déc.), no 28953/03). La Cour a établi dans un certain nombre d'affaires, notamment des affaires dirigées contre la Pologne, sa pratique concernant les griefs relatifs à la violation du droit à être entendu dans un délai raisonnable et à l'absence de recours effectifs permettant d'en obtenir le redressement (voir, par exemple, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII, Cocchiarella c. Italie [GC], no 64886/01, §§ 69-98, CEDH 2006-...., Majewski c. Pologne, no 52690/99, 11 octobre 2005, Wende et Kukówka c. Pologne, no 56026/00, 10 mai 2007, Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, CEDH 2000-IX, §§, et Charzyński c. Pologne (déc.) no 15212/03, CEDH 2005-..., §§). Compte tenu de la nature des concessions que renferme la déclaration du Gouvernement ainsi que du montant de l'indemnité proposée - qui cadre avec les sommes octroyées dans des affaires analogues - la Cour estime qu'il ne se justifie plus de poursuivre l'examen de la requête (article 37 § 1 c) de la Convention). Eu égard à ce qui précède, et en particulier à l'existence d'une jurisprudence claire et abondante sur la question posée en l'espèce, elle considère que le respect des droits de l'homme garantis par la Convention et ses protocoles n'exige pas qu'elle poursuive l'examen de la requête (article 37 § 1 in fine). Dès lors, il y a lieu de rayer l'affaire du rôle. La décision de radiation ne met fin qu'à la procédure devant la Cour. Partant, elle ne préjuge en rien de la possibilité pour le requérant d'exercer d'autres recours ouverts devant les juridictions internes afin d'obtenir réparation pour la durée de la procédure en cause. B. Article 29 § 3 de la Convention Compte tenu des conclusions ci-dessus, il y a lieu de mettre fin à l'application de l'article 29 § 3 de la Convention.

Par ces motifs

, la Cour, à l'unanimité, Prend acte des termes de la déclaration du gouvernement défendeur et des modalités prévues pour assurer le respect des engagements qu'elle comporte ; Décide, en vertu de l'article 37 § 1 c) de la Convention, de rayer l'affaire du rôle. Lawrence Early Nicolas Bratza Greffier Président

Commentaires sur cette affaire

Pas encore de commentaires pour cette décision.