Cour d'appel de Paris, Chambre 5-4, 9 mars 2016, 13/01884

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    13/01884
  • Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Décision précédente :Tribunal de commerce de Paris, 15 janvier 2013
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/6035bb722e022f2301791888
  • Président : Madame Françoise COCCHIELLO
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2018-03-07
Cour d'appel de Paris
2016-03-09
Tribunal de commerce de Paris
2013-01-15

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT

DU 09 MARS 2016 (n° , 10 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 13/01884 Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Janvier 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2012033422 APPELANTE SAS FREE MOBILE ayant son siège social [Adresse 1] [Localité 1] N° SIRET : B 4 992 471 38 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentée par Maître Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044 Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-louis FOURGOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P0069 et Maître Leyla DJAVADI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0069 INTIMÉE SA SFR ayant son siège social [Adresse 2] [Localité 1] N° SIRET : B 3 430 595 64 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentée par Maître Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-pierre GRANDJEAN, avocat au barreau de PARIS, toque : K0112 et Maître Thibaud D'ALÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0112 COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 13 Janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre Madame Dominique MOUTHON-VIDILLES, Conseillère, rédacteur Madame Joëlle CLÉROY, Conseillère appelé d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire, qui en ont délibéré, Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Dominique MOUTHON-VIDILLES dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de Procédure Civile, Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT ARRÊT : - Contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. FAITS ET PROCÉDURE Entre le 15 juin 2011 et le 24 septembre 2012, la SA Société française de radiotéléphonie (SFR) qui est l'un des trois opérateurs historiques du marché de la téléphonie mobile, a proposé des forfaits dits «'Carré'» associés à une offre «'prix Eco'». SFR a ainsi offert au consommateur de choisir entre un abonnement à un service de téléphonie (forfait) sans achat d'un terminal mobile ('prix Eco' ou 'en conservant votre mobile') et un forfait avec l'acquisition d'un nouveau téléphone mobile. Si le consommateur opte pour le forfait avec achat d'un nouveau mobile, il lui est proposé lors de la souscription de son abonnement soit de payer le prix du mobile dit 'prix de référence'et de bénéficier d'un forfait à 'prix Eco', soit de payer le mobile à un prix dit 'attractif' associé à un engagement d'abonnement 'un peu plus cher chaque mois' jusqu'à son terme (12 ou 24 mois) , le forfait passant alors automatiquement 'à prix Eco'. Soutenant que cette seconde formule est en réalité une opération de crédit qui est dissimulée au consommateur de sorte qu'elle constitue une publicité illicite par la violation délibérée de dispositions du code de la consommation ainsi qu'une pratique commerciale déloyale qui lui ont causé un grave préjudice et autorisée par ordonnance du 16 mai 2012, la SAS Free mobile a assigné à bref délai la SA SFR devant le tribunal de commerce de Paris. Vu le jugement du 15 janvier 2013 aux termes duquel le tribunal de commerce de Paris a : ' Débouté la SAS Free mobile de toutes ses demandes. ' Dit recevable la demande reconventionnelle de la SA Société française de radiotéléphonie (SFR) ' Condamné la SAS Free mobile à payer à la SA Société française de radiotéléphonie (SFR) 300 000 euros de dommages et intérêts, déboutant du surplus. ' Condamné la SAS Free mobile à payer à la SA Société française de radiotéléphonie (SFR) 100 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant du surplus. ' Ordonné l'exécution provisoire ' Débouté la SA Société française de radiotéléphonie (SFR) de toutes ses autres demandes ' Condamné la SAS Free mobile aux dépens ; Vu les dernières conclusions signifiées le 1er décembre 2015 par lesquelles la société SAS Free mobile demande à la cour de : Recevoir Free en son appel ; ' Dire que la société SFR s'est rendue coupable de pratiques de crédits à la consommation en méconnaissance du respect des dispositions régissant l'information des consommateurs sur ces pratiques ; ' Dire que la société SFR s'est rendue coupable de pratiques déloyales et trompeuses ; ' Dire que la société SFR n'a pas divulgué aux consommateurs d'information précontractuelle conforme à l'article L.111-1 et L.111-2 du Code de la consommation ; ' Enjoindre, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard et par infraction constatée, à la société SFR de fournir une fiche détaillée aux consommateurs souscrivant un contrat de crédit pour l'acquisition d'un terminal mobile ; ' Enjoindre, sous astreinte de 10.000 euros par jour et par infraction constatée, à la société SFR, de respecter les dispositions des articles L 311-1 a` L 311-20 du Code de la Consommation pour toute offre de vente a crédit d'un terminal ; ' Condamner la société SFR au paiement de la somme de 76,8 millions euros au titre du préjudice subi par la société Free mobile ; ' Ordonner la publication du dispositif du jugement a` intervenir dans le mois de la décision, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, dans LE MONDE, LES ECHOS, LE FIGARO, LE PARISIEN, LIBÉRATION, CAPITAL, ainsi qu'en caractère gras, de couleur noire, de taille 12 et de la police de caractère « Tirs New Roman » sur la partie haute de la première page (au dessus de la ligne de flottaison) des sites www.sfr.fr/portail, www.sfr.fr, www.sfr.com ou tout autre site qui s'y substituerait et ayant la même finalité, pendant un délai d'un (1) mois et aux frais exclusifs de la défenderesse ; ' Condamner la société SFR à adresser à chacun de ses abonnes ayant souscrit un abonnement avec terminal dans le cadre des formules Carré un courrier nominatif l'informant de façon précise sur les conditions de son abonnement (notamment le coût du crédit, TEG etc..). Sur la demande reconventionnelle, ' Infirmer le jugement et déclarer irrecevable et prescrite l'action engagée par SFR ; ' Débouter SFR de sa demande reconventionnelle sur le fondement de la procédure abusive; ' Déclarer les demandes de SFR prescrites et irrecevables ; ' Condamner SFR à payer a la société Free mobile la somme de 150 000 euros au titre de l'article 700 du code de Procédure Civile. ' Condamner SFR aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP AFG, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ; Vu les dernières conclusions signifiées le 24 septembre 2015 par lesquelles la SA SFR demande à la cour de : A titre liminaire, ' Dire que Free mobile est dénuée d'intérêt légitime à agir contre SFR ; ' Dire que les demandes de Free mobile sont devenues sans objet, les offres Carré n'étant plus commercialisées

En conséquence

, ' Déclarer irrecevable l'action judiciaire de Free mobile initiée a l'encontre de SFR. A titre principal, ' Dire que les offres Carré de SFR ne remplissent pas les critères juridiques d'une opération de crédit ; ' Dire que les offres Carré de SFR ne remplissent pas les critères économiques d'une opération de crédit ; ' Dire que les offres Carré de SFR reposent sur le mécanisme de la vente subventionnée, parfaitement licite ; En conséquence, ' Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Free mobile de ses demandes tendant à faire juger que SFR se serait "rendue coupable de pratiques de crédits à la consommation en méconnaissance du respect des dispositions régissant l'information des consommateurs sur ces pratiques" ; ' Débouter Free mobile de l'ensemble de ses demandes formées à ce titre. Subsidiairement, si par impossible la Cour devait considérer que les offres Carré de SFR s'analysent en opérations de crédit : ' Dire que les offres Carré entrent dans le champ d'application de l'exception prévue par l'article L. 311-1 4° du Code de la consommation ; ' Constater que les demandes de Free mobile ne portent que sur la souscription des offres Carré commercialisées à distance (c'est à dire par téléphone et internet) entre le 15 juin 2011 et le 24 septembre 2012, directement par SFR, à l'exclusion des ventes effectuées en boutiques et points de vente. Sur les prétendues pratiques usuraires de SFR Vu l'article 564 du Code de procédure civile ' Déclarer irrecevable comme nouvelle la demande de Free mobile au titre des prétendues pratiques usuraires de SFR ; ' Dire que cette demande est en tout état de cause mal fondée en son principe et en son montant; En conséquence, ' Débouter Free mobile de sa demande indemnitaire au titre des pratiques usuraires de SFR. Sur les prétendues pratiques déloyales et trompeuses auxquelles SFR aurait eu recours Vu les articles L.111-1 et suivants du Code de la consommation ' Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Free mobile de ses demandes formées à ce titre ; ' Dire que la présentation des offres Carré n'est pas susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique d'un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé ; ' Dire que la présentation des offres Carré n'est pas de nature à induire en erreur les consommateurs ; ' Dire que SFR n'a eu recours à aucune "pratique déloyale ou trompeuse" ; Subsidiairement, si par impossible le Tribunal devait considérer que SFR a eu recours à des pratiques "déloyales et trompeuses" ' Dire que les demandes indemnitaires de Free mobile sont irrecevables, en application des articles 31 et 122 du code de procédure civile ; ' Dire que Free mobile n'établit pas le principe du préjudice qu'elle invoque ; ' Constater que les demandes de Free mobile ne portent que sur la souscription des offres Carré à distance (c'est à dire par téléphone et internet) réalisées directement par SFR, à l'exclusion des ventes effectuées en boutiques et points de vente. ' Dire que le quantum du préjudice revendique par Free mobile n'est pas prouvé ni justifié; En conséquence, ' Débouter Free mobile de sa demande tendant à faire juger que SFR se serait "rendue coupable de pratiques déloyales et trompeuses" ; ' Débouter Free mobile de l'ensemble de ses demandes formées à ce titre. Reconventionnellement Vu l'article 1382 du Code civil ' Confirmer le principe de la condamnation de Free mobile à réparer le préjudice d'image et de réputation subi par SFR ; ' Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté SFR de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive et au titre de son préjudice moral et limité la condamnation de Free mobile à la somme de 300.000 euros en réparation du préjudice d'atteinte à l'image de marque de SFR. Statuant de nouveau, ' Dire que la procédure initiée par Free mobile à l'encontre de SFR est abusive ; ' Dire que la publicité faite par Free mobile de la présente procédure est un acte de dénigrement constitutif de concurrence déloyale ; En conséquence, ' Ordonner la publication aux frais de Free mobile , dans cinq journaux choisis par SFR, sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard, après expiration d'un délai de cinq jours suivant la signification de l'arrêt a intervenir ; pendant 30 jours sur le quart supérieur de la page d'accueil du site internet de Free mobile (www.mobile.free.fr/), en caractères de taille 12, accompagné d'une traduction en langue anglaise jurée (réalisée aux frais de Free mobile ), sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard après expiration d'un délai de cinq jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir du message informatif suivant, complété des indications pertinentes : "Par arrêt en date du [....], la Cour d'appel de Paris a confirmé le jugement rendu le 15 janvier 2013 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté la société Free mobile de l'action judiciaire initie'e par celle-ci à l'encontre de SFR, tendant à faire juger que le subventionnement des ventes de téléphones mobiles serait constitutif d'une opération de crédit et que SFR se serait rendue coupable d'actes de concurrence déloyale à son égard. La Cour a par ailleurs jugé que cette action judiciaire était abusive et a condamné Free mobile à verser à SFR la somme de [....] à titre de dommages et intérêts". ' Condamner Free mobile à payer à SFR la somme de 500.000 euros à titre de réparation du préjudice subi par SFR du fait du caractère abusif de la présente instance et de son maintien en cause d'appel ; ' Condamner Free mobile à payer à SFR la somme de 541.856 euros, sauf à parfaire, à titre de réparation du préjudice d'image et de réputation subi par SFR du fait de la campagne de dénigrement organisée par Free mobile , montant duquel sera déduite l'indemnité de 300 000 euros payée par Free mobile en exécution du jugement dont appel ; ' Condamner Free mobile à payer à SFR la somme de 1.000.000 euros, sauf à parfaire, à titre de réparation du préjudice moral subi par SFR. En tout état de cause, ' Condamner Free mobile à payer à SFR la somme de 150.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ; ' Condamner Free mobile aux entiers dépens de première instance et d'appel, SUR CE, Sur les exceptions d'irrecevabilité de l'action de Free mobile : ' l'exception tirée du défaut d'intérêt légitime à agir Considérant que SFR soutient que l'action de Free mobile en ce qu'elle ne vise, sans aucune explication, que les offres SFR alors qu'elles sont similaires aux offres subventionnées des autres opérateurs, est illégitime et partant irrecevable ; qu'elle ajoute que FREE MOBILE est également illégitime à critiquer le subventionnement alors qu'elle-même a commercialisé des offres subventionnées en juillet 2013 par le biais du site internet vente-privee.com, offres dont ses abonnés continuent à bénéficier pendant toute la durée de leur engagement ; qu'enfin, elle fait valoir l'absence d'intérêt légitime à former des demandes indemnitaires dès lors que [I] [F], fondateur de Free mobile, a indiqué lui-même dans une interview publiée par l'hebdomadaire Le Point le 6 septembre 2012 que SFR et FREE intervenaient sur des marchés distincts ; Considérant que Free mobile réplique que son action ne vise pas à interdire un mécanisme de subventionnement également pratiqué par d'autres opérateurs mais les pratiques d'apparence attractive de SFR qui causent un préjudice du fait de leur caractère illicite et illégal ; qu'elle ajoute que la moralité d'une action en justice n'est pas un critère de sa recevabilité et que de surcroît, elle n'a jamais proposé une offre identique aux offres Carré de SFR ; qu'elle soutient qu'un plaideur est libre d'intenter une procédure contre un opérateur contrevenant aux législation en vigueur et que surtout, SFR est le seul opérateur à proposer un crédit déguisé ; qu'elle affirme que les parties appartiennent au même marché et rappelle que l'exigence d'un rapport de concurrence n'est pas une condition de l'action en concurrence déloyale ; Considérant que le défaut d'intérêt à agir qui constitue une fin de non-recevoir en application des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, peut être proposé en tout état de cause conformément à l'article 123 du même code ; que l'exception soulevée pour la première fois en appel par SFR est donc recevable ; Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; que l'intérêt à agir n'est pas subordonnée à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action ; Considérant que Free mobile qui reproche à SFR de s'être rendue coupable de pratiques de crédit à la consommation en méconnaissance du respect des dispositions régissant l'information des consommateurs ainsi que de pratiques commerciales déloyales et trompeuses, justifie d'un intérêt et partant, est recevable à agir en cessation des pratiques qu'elle dénonce et en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi à hauteur de 29 millions d'euros portés en appel à 76,8 millions d'euros du fait d'agissements qu'elle qualifie d'actes de concurrence déloyale à son égard, peu important dès lors qu'elle n'ait pas entendu agir à l'encontre d'autres opérateurs qui auraient commis, selon SFR, de semblables agissements ; Considérant qu'il ne saurait pas plus être utilement opposé à Free mobile d'avoir commercialisé une offre identique à celles en cause ; qu'en effet, ce fait, à le supposer établi, ne constitue pas une condition de recevabilité de son action en indemnisation laquelle découle d'un dommage qu'elle prétend avoir subi ; Considérant enfin que la violation de la réglementation en vigueur par un opérateur économique créé une distorsion dans le jeu de la concurrence constitutive en soi d'un acte de concurrence déloyale de sorte que l'action en concurrence déloyale n'est pas subordonnée à l'existence d'un rapport de concurrence direct ou effectif ; qu'au demeurant, les offres SIM-Only de Free mobile et les offres subventionnées de SFR relèvent du même marché de détail de la téléphonie mobile ; que le moyen soulevé par SFR sur l'absence d'intérêt légitime du fait de l'absence d'activité sur le même marché sera également rejeté ; Considérant dès lors que Free mobile justifie donc d'un intérêt légitime à voir à faire cesser une pratique anticoncurrentielle et reconnaître l'existence de pratiques commerciales déloyales et trompeuses qui lui ont causé un préjudice ; ' l'exception tirée du fait que les demandes sont sans devenues sans objet, les offres Carré n'étant plus commercialisées Considérant que SFR soutient que ne commercialisant plus les forfaits Carré depuis le 24 septembre 2012, les demandes de Free mobile sont devenues sans objet et par suite, irrecevables ; que Free mobile réplique que SFR n'établit pas avoir mis un terme au système des offres Carré lui-même et qu'en tout état de cause, son action est recevable afin de lui permettre de voir réparer le préjudice qu'elle a subi du fait des actions commerciales passées ; Considérant que l'intérêt à agir s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice, soit en l'espèce au 21 mai 2012 ; qu'il importe peu dès lors au regard de la recevabilité de l'action de Free mobile que les pratiques qu'elle invoque dans la présente instance aient cessé à compter du 24 septembre 2012 ; Considérant en conséquence de l'ensemble de ces éléments que les exceptions d'irrecevabilité seront rejetées ; Sur l'existence d'une opération de crédit à la consommation : Considérant que Free mobile soutient en substance qu'en proposant au consommateur dans les formules Carré, une formule d'achat du terminal mobile à prix attractif associée à un abonnement plus cher sur 12 ou 24 mois, SFR propose en réalité une offre de crédit à la consommation (articles L 311-2 et L 311-1-4° du code de la consommation) sans aucune des informations précontractuelles et contractuelles prescrites par la loi (articles L 311-6, L 311-8 à L 311-12, L 311-18) ; qu'elle fait valoir plus précisément que lors de la souscription de l'opération, le prix du téléphone n'est pas payé comptant mais seulement pour une faible part et que le différentiel restant dû est inclus dans le montant de l'abonnement dont le paiement est échelonné de sorte qu'il s'agit d'une vente dont le prix est étalé dans le temps, ce qui constitue une vente à crédit ; qu'elle considère qu'il s'agit d'une publicité illicite et déloyale dès lors que la dissimulation aux consommateurs de la réalité du crédit facilite et encourage la souscription d'abonnements de façon déloyale ; Considérant que SFR réplique essentiellement qu'à l'instar de tous les autres opérateurs de téléphonie mobile, elle utilise depuis de nombreuses années le modèle du subventionnement qui consiste à vendre à l'abonné, qui souscrit ou renouvelle son abonnement, un terminal à prix subventionné, c'est-à-dire inférieur à sa valeur de marché, que ce mécanisme qui représente un investissement lourd pour les opérateurs, est un important facteur d'innovation en ce qu'il les incite à développer des technologies toujours plus sophistiquées et que la vente avec subvention n'est ni juridiquement ni économiquement une opération de crédit ; qu'elle se réfère notamment à cet égard à la réponse apportée à une question d'un député par le Secrétaire d'Etat à la consommation qui a exclu que la pratique du subventionnement soit assimilée à une opération de crédit ; Considérant qu'aux termes de l'article L 311-1, 4° du code de la consommation, une opération ou un contrat de crédit est 'une opération ou un contrat par lequel un prêteur consent ou s'engage à consentir à l'emprunteur un crédit sous la forme de délai de paiement, d'un prêt, y compris sous forme de découvert ou de toute autre facilité de paiement similaire, à l'exception des contrats conclus en vue de la fourniture d'une prestation continue ou à exécution successive de services ou de biens de même nature et aux termes desquels l'emprunteur en règle le coût par paiements échelonnés pendant toute la durée de la fourniture' ; que l'article L 311-2 du même code ajoute que la réglementation sur le crédit à la consommation s'applique à toute opération de crédit qu'elle soit conclue à titre onéreux ou à titre gratuit ; Considérant que la qualification d'opération de crédit au sens de ce texte suppose que le vendeur consente à l'acquéreur, par l'octroi d'un délai pour payer le prix de la vente après la livraison du bien, une avance que celui-ci doit lui restituer en totalité ; Considérant que dans les formules Carré en cause, SFR propose concomitamment un contrat de vente d'un terminal mobile et un contrat de prestations de services par souscription d'un abonnement à un service de téléphonie pour une durée de 12 ou 24 mois ; que chaque contrat relève de conditions générales distinctes ; Considérant qu'il sera d'emblée constaté que l'abonnement qui constitue un contrat de prestations de services à exécution successive de même nature dont le consommateur règle le coût par paiements échelonnés pendant toute sa durée, est expressément exclu de la qualification de crédit à la consommation par les dispositions de l'article L 311-1,4 ° ci-dessus rappelées ; Considérant qu'il ressort des conditions générales du contrat de vente, qu'en le souscrivant l'acquéreur acquiert un terminal mobile selon un prix attractif affiché, soit un prix convenu entre les parties, qu'il paye comptant à la livraison ; qu'il n'existe en effet aucun engagement de payer à terme la totalité ou partie du prix ; que le vendeur ne lui consent donc aucun délai pour payer le prix de la vente après la livraison du terminal sauf dans l'hypothèse particulière d'une vente à distance par téléphone ou internet lorsque le téléphone est envoyé avant d'avoir été payé ; que dans ce cas, le paiement du prix convenu doit alors intervenir dans le délai d'un mois au plus tard après la livraison du terminal, ce qui exclut l'application des dispositions du crédit à la consommation en vertu de l'article L 311-3, 4°, le délai de remboursement du prix étant inférieur à 3 mois ; Considérant que dès le paiement du prix convenu, la propriété de l'appareil est transférée instantanément et définitivement à l'acquéreur ; qu'il n'existe aucune clause de réserve de propriété au bénéfice du vendeur après ce paiement ; que la seule clause de réserve de propriété qui figure au contrat, est afférente au cas de la vente à distance examiné ci-dessus lorsque le bien a été livré avant le paiement qui doit intervenir dans le délai maximum d'un mois ; que plus particulièrement, aucune clause suspendant le transfert de propriété au paiement des mensualités de l'abonnement ou encore le corrélant à la durée de celui-ci n'est prévue ; que la propriété du mobile ne dépend donc pas du paiement des échéances mensuelles du forfait d'abonnement ; que du reste, en cas de défaut de paiement des mensualités de l'abonnement, aucune restitution du terminal n'est envisagée ; Considérant en outre qu'aucun autre événement affectant l'abonnement (exercice du droit de rétractation, résiliation anticipée, exercice du droit annuel de résiliation, choix d'une autre offre à tarif moins onéreux) n'a d'incidence sur la vente du terminal qui est définitivement acquise au consommateur ; qu'aucune restitution de quelque sorte que ce soit (téléphone ou quote-part de prix restant due) n'est convenue entre les parties alors que l'obligation de restituer l'avance perçue, qui est de résultat, est inhérente à l'octroi d'un crédit ; Considérant, par ailleurs, qu'il n'est nullement démontré que, comme le soutient Free mobile, la majoration du coût de l'abonnement corresponde au différentiel entre le prix attractif payé du téléphone et son véritable prix ; qu'il ne suffit pas à Free mobile de faire état et de calculer (au demeurant, sur la seule base arbitrairement retenue d'une durée d'engagement de 24 mois alors même qu'il existe des offres sur 12 mois), ce 'surcoût' payé au titre de l'abonnement par le consommateur lorsqu'il opte pour la formule 'prix attractif et majoration du forfait', pour affirmer péremptoirement qu'il correspondrait au différentiel entre le prix de référence et le prix attractif ; Considérant d'une part que la cour constate que le différentiel entre le prix de référence et le prix attractif est fixe par catégorie de forfaits ; que le prix de l'abonnement n'est pas corrélé à celui du terminal mobile ; Considérant d'autre part, qu'il y a lieu de relever qu'il existe de nombreuses hypothèses de résiliations anticipées légales ou conventionnelles (rétractation, chômage, ouverture d'une procédure collective, surendettement, hospitalisations, incarcération, déménagement, force majeure, augmentation de tarif en cours d'exécution, changement de forfait dès 4 mois après l'achat du mobile) où quelque soit la durée de l'abonnement (12 ou 24 mois), le consommateur n'est pas tenu de rembourser l'intégralité des mensualités de l'abonnement jusqu'au terme du contrat de sorte que la condition tenant au remboursement de l'intégralité de l'avance consentie inhérente au contrat de crédit, fait défaut ; Considérant que lors de la souscription du contrat, la survenance de ces événements susceptibles d'affecter l'exécution du contrat d'abonnement est imprévisible ; qu'il s'en déduit qu'à la date de la formation du contrat, la durée réelle d'engagement du consommateur n'est pas connue et partant, que le montant de l'avance sur le prix qu'aurait consentie le vendeur est indéterminé alors même que le prix attractif payé et le prix de référence du mobile sont certains et demeureront inchangés ; Considérant qu'il est donc établi que dans le cadre de l'opération économique en cause et à supposer même que les contrats de vente et d'abonnement soient indissociables, ce qui n'est pas démontré chacun des contrats étant parfaitement autonomes l'un de l'autre comme il a été analysé ci-dessus (ils relèvent de conditions générales distinctes, ils ne procèdent pas l'un de l'autre, ils disposent chacun d'un droit de rétractation séparé, la résiliation de l'un est sans incidence sur l'exécution de l'autre), l'obligation de remboursement, inhérente à toute opération de crédit, n'existe pas ; qu'à tout le moins, l'aléa quant au montant de la somme avancée exclut la qualification de contrat de crédit ; Considérant qu'à titre surabondant, il doit être ajouté que, comme le relève judicieusement SFR, à suivre le raisonnement de Free sur l'indivisibilité du contrat de vente et du contrat d'abonnement et le paiement échelonné de partie du prix du mobile, l'opération en cause devrait être qualifiée de contrat de fourniture de services ou de bien à exécution successive de même nature aux termes desquels l'emprunteur en règle le coût par paiements échelonnés pendant toute la durée de la fourniture, contrat qui, aux termes de l'article L 311-1,4° du code de la consommation rappelés ci-dessus, est expressément exclu du champs d'application de la réglementation relative au crédit ; Considérant qu'en définitive, les conditions nécessaires à la qualification d'opération de crédit, soit l'avance d'une partie déterminée du prix du mobile acquis avec obligation corrélative de remboursement, ne sont pas réunies ; qu'il importe peu à cet égard qu'à compter de septembre 2012 SFR ait cessé de proposer cette formule ; que ce renoncement ne constitue en rien une reconnaissance du caractère illégal des offres Carré ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont considéré qu'il ne s'agissait pas d'un crédit à la consommation et ont débouté Free des demandes formées à ce titre ; Sur les pratiques déloyales et trompeuses : Considérant que Free mobile soutient encore que SFR aurait commis une pratique commerciale trompeuse au sens de l'article L 120-1 du code de la consommation en ce qu'elle s'abstient de fournir une information claire sur le contrat de vente en omettant sciemment le terme 'crédit'et en ne fournissant donc pas d'offre préalable, en ce qu'elle s'abstient de fournir une information claire sur le coût du financement, le taux d'intérêt n'étant pas mentionné et ce d'autant qu'il est dans certains cas largement au-delà du taux usuraire, en ce qu'elle s'abstient volontairement de fournir une information claire sur le coût global d'acquisition du terminal en laissant le consommateur dans l'ignorance qu'il peut payer en réalité plus cher son terminal qu'en le payant comptant ou en l'acquérant auprès d'un tiers ou en souscrivant un crédit auprès d'une banque ; que comme l'ont justement analysé les premiers juges, ces moyens consistent à reprendre l'essentiel de ceux développés précédemment et tenant à l'absence d'information et d'offre préalable de crédit avant la souscription de l'abonnement ; qu'ils sont donc inopérants et seront rejetés ; Considérant par ailleurs qu'il apparaît que l'information donnée par SFR à l'aide de tableaux clairs pour chaque forfait proposé permet à un consommateur raisonnablement attentif et avisé de comparer les différentes offres (prix attractif et prix de référence du mobile, prix du forfait avec durée de l'engagement..), d'en apprécier les avantages et les inconvénients et notamment de calculer le prix de revient de chaque formule proposée afin de lui permettre de s'engager en toute connaissance de cause ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté le moyen soulevé du chef de pratiques commerciales déloyales et trompeuses et débouté Free mobile de l'ensemble de ses demandes ; Sur la demande reconventionnelle de SFR en dommages et intérêts : ' pour procédure et appel abusifs Considérant que l'accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n'est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d'intenter une action en justice et/ou d'exercer une voie de recours est susceptible de constituer un abus ; qu'en l'espèce, il n'est pas établi que l'exercice par Free mobile de son action et de la voie de recours qui lui était légalement ouverte, ait dégénéré en abus ; que SFR sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts formée à ce titre ; ' pour dénigrement constitutif d'un acte de concurrence déloyale du fait de la publicité faite par FREE sur la procédure Considérant que caractérise un acte de dénigrement constitutif de concurrence déloyale le fait de jeter le discrédit sur une entreprise concurrente en répandant des informations malveillantes sur les produits ou la personne d'un concurrent pour en tirer un profit ; que des allégations peuvent être constitutives de dénigrement quand bien même l'information divulguée serait exacte ou de notoriété publique, l'exception de vérité n'étant pas applicable en matière de dénigrement ; Considérant que SFR produit une interview publiée dans le magazine Capital en août 2012 où [I] [F] '[S] de FREE' indique : 'La pratique actuelle qui mélange le prix du service, celui du terminal et une prétendue subvention est une façon claire de faire du crédit à la consommation déguisé...sans se soumettre aux contraintes légales. En l'occurrence, cela revient à pratiquer des taux d'usure de 300 ou 400% que le consommateur ne voit pas. Je vous l'annonce en avant-première : nous avons déposé plainte contre SFR auprès du Tribunal de commerce de Paris pour faire reconnaître la nullité de ce type de contrat. Nous les assignons pour concurrence déloyale.' ; Considérant que c'est par des motifs particulièrement pertinents que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que ces propos dénigrants étaient constitutifs d'un acte de concurrence déloyale en estimant que les termes employés à l'égard d'un concurrent ainsi accusé d'agissements illégaux et de pratique d'usure en l'absence de toute décision judiciaire, étaient démesurés et marquaient la volonté de nuire en recherchant une large diffusion auprès du public ; que s'ils ont évoqué par erreur le recours à une procédure pénale, il n'en demeure pas moins que le fait d'invoquer le dépôt d'une plainte laisse planer un doute sur l'existence d'une telle procédure et est de nature à discréditer gravement l'image d'un concurrent dans l'esprit du public ; que la société Free mobile ne saurait s'exonérer de sa responsabilité à ce titre en invoquant des communications de la part de SFR qui seraient bien plus dénigrantes ; Considérant que le préjudice commercial subi du fait de l'atteinte à l'image et à la notoriété de SFR s'en infère nécessairement ; que compte tenu notamment de la diffusion à l'échelle nationale de l'interview comportant les propos dénigrants et de sa reprise sur de nombreux sites internet, la somme allouée par les premiers juges au titre de ce préjudice apparaît nettement insuffisante ; que les éléments du dossier permettent d'évaluer à la somme 500 000 euros la juste réparation du préjudice subi à ce titre ; Considérant qu'en revanche, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté SFR de sa demande en indemnisation du préjudice moral qu'elle prétend avoir subi, faute de le caractériser, dès lors qu'en cause d'appel, elle ne le caractérise pas plus ; Considérant que la publication de l'arrêt dans cinq journaux et sur le site internet de Free mobile n'apparaît nullement nécessaire ; que la demande de SFR formée à ce titre sera rejetée ;

PAR CES MOTIFS

: La COUR, REJETTE les exceptions d'irrecevabilité, CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la société Free mobile à verser à la société SFR la somme de 300 000 euros au titre du préjudice d'atteinte à l'image et à la réputation, L'INFIRME sur ce point, Statuant à nouveau, CONDAMNE la société Free mobile à verser à la société SFR la somme de 500 000 euros au titre du préjudice d'atteinte à l'image et à la réputation, Et y ajoutant, DÉBOUTE la société SFR du surplus de ses demandes, CONDAMNE la société Free mobile aux dépens de l'appel, CONDAMNE la société Free mobile à verser à la société SFR la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Le GreffierLa Présidente Vincent BRÉANTFrançoise COCCHIELLO