Tribunal administratif de Nantes, 4ème Chambre, 2 mai 2023, 2206997

Mots clés séjour · rapport · médecins · collège · médical · pays · préfet · ressort · santé · territoire · quitter · étranger · requête · transmission · vie privée

Synthèse

Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro affaire : 2206997
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Président : M. Livenais
Avocat(s) : KADDOURI

Texte

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 31 mai 2022, Mme B A, représentée par Me Kaddouri, demande au tribunal :

1°) d'annuler l'arrêté du 13 mai 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré ;

2°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au profit de son conseil qui renoncera, dans cette hypothèse, à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de l'arrêté contesté :

- il n'est pas établi qu'il a été signé par une autorité compétente ;

- il n'est pas suffisamment motivé ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été précédé de la rédaction d'un rapport sur l'état de santé de la requérante et que l'avis n'a pas été pris à l'issue d'un débat collégial par trois médecins régulièrement nommés ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L.425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour la prive de base légale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

- elle méconnaît l'article L. 611-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision fixant le délai de départ :

-l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français la prive de base légale ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français la prive de base légale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Mme A a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Livenais, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.


Considérant ce qui suit

:

1. Mme A, ressortissante tunisienne née le 5 janvier 1937, est entrée en France le 12 août 2018 sous couvert d'un visa de court séjour. Elle a sollicité du préfet de Maine et Loire la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 425-9 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 13 mai 2022 portant en outre obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Mme A demande au tribunal d'annuler cet arrêté.

Sur les moyens communs aux décisions attaquées :

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux a été signé par Mme Magali Daverton, secrétaire générale de la préfecture de Maine et Loire. Par un arrêté du 7 septembre 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Maine et Loire, le préfet de Maine et Loire lui a accordé délégation à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de Maine-et-Loire ", à l'exception de certains actes limitativement énumérés au nombre desquels ne figurent pas les décisions de refus de titre de séjour, celles portant obligation de quitter le territoire français et celles fixant le pays de destination. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté attaqué manque en fait.

3. En deuxième lieu, la décision attaquée indique les stipulations conventionnelles ainsi que les dispositions légales sur lesquelles s'est fondé le préfet pour prononcer le refus de titre, l'obligation de quitter le territoire et fixer le pays de destination de Mme A et les circonstances de fait propres à la situation de cette dernière qui justifient ces mesures. Par suite, le préfet n'étant pas tenu de faire état de l'ensemble des éléments propres à la situation personnelle de Mme A mais uniquement de ceux qui fondent utilement le sens des mesures prises à l'encontre de cette dernière, cette décision est suffisamment motivée tant en droit qu'en fait au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. () ". Par ailleurs, l'article R. 425-11 du même code dispose que : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / () ". L'article R. 425-12 du même code dispose : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre () Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. () ". Enfin, aux termes de l'article R. 425-13 du même code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. () ".

5. En outre, selon l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

6. Il résulte des dispositions citées au point précédent que l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) doit être rendu à l'issue d'une délibération pouvant prendre la forme soit d'une réunion, soit d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, à laquelle ne prend pas part le médecin ayant établi le rapport médical préalable. Le caractère collégial de cette délibération constitue une garantie pour le demandeur de titre de séjour.

7. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis du collège de médecin de l'OFII du 3 février 2022 et de son bordereau de transmission, que le rapport médical a été établi le 4 janvier 2022 par la docteure Dekerros, qui ne faisait pas partie du collège de médecins composé des docteurs Aranda-Grau, Ortega et Wagner et transmis à ce collège le même jour, soit en temps utile afin de permettre à celui-ci de se prononcer sur la situation de l'intéressée.

8. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège des médecins de l'OFII concernant Mme A, signé par les trois médecins composant ce collège et régulièrement désignés à cette fin par le directeur général de l'OFII porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant ", qui fait foi jusqu'à preuve du contraire. Par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie tirée du débat collégial du collège de médecins de l'OFII qui résulte des dispositions de l'article R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le collège de médecins de l'OFII n'aurait pas été régulièrement consulté par le préfet manque en fait et ne peut qu'être écarté en toutes ses branches.

9. En deuxième lieu, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

10. Pour refuser de délivrer à Mme A le titre de séjour sollicité sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Maine et Loire s'est fondé, notamment, sur l'avis du collège de médecins de l'OFII du 3 février 2022 selon lequel, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel elle peut voyager sans risque.

11. Il ressort des pièces du dossier que Mme A présente une perte d'autonomie avec troubles de la marche et de l'équilibre ainsi que des troubles cognitifs nécessitant à ses côtés la présence d'une personne pour l'aider dans la plupart de ses actes de la vie quotidienne. Si elle verse au débat des certificats médiaux attestant de ces pathologies, ceux-ci se bornent à affirmer que sa prise en charge ne peut être envisagée dans son pays d'origine et qu'elle doit continuer à être suivie à Angers, sans apporter d'éléments remettant sérieusement en cause la présomption attachée aux termes de l'avis du collège des médecins de l'OFII. Par ailleurs, si la requérante affirme qu'elle n'a pas les ressources nécessaires pour bénéficier d'un traitement adapté à ses pathologies en Tunisie, elle n'assortit en tout état de cause ses allégations d'aucune précision sur les conditions et le coût de sa prise en charge médicale en Tunisie. Dans ces conditions, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le préfet de Maine et Loire aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 () ". L'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ".

13. Dès lors que l'accord franco-tunisien ne prévoit pas de modalités d'admission exceptionnelle au séjour semblables à celles prévues par les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lorsque la régularisation du droit au séjour est demandée pour des motifs tirés de la vie privée et familiale, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient alors au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

14. Il ressort des pièces du dossier que Mme A est arrivée en France le 12 août 2018 sous couvert d'un visa de court séjour, soit quatre ans avant l'édiction de la décision attaquée, et qu'elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire à l'expiration de la durée de validité de son visa. Si elle se prévaut de la présence en France de son fils et sa belle-fille qui y résident régulièrement, l'hébergent et l'accompagnent sur le plan financier et affectif, de telles circonstances ne constituent ni des considérations humanitaires ni des motifs exceptionnels justifiant l'admission exceptionnelle au séjour de la requérante. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que si les parents et l'époux de Mme A sont décédés, trois de ses enfants vivent en Tunisie. Elle ne peut ainsi être regardée comme étant dépourvue d'attaches dans son pays d'origine. Dans ces conditions, en rejetant la demande de titre de séjour de l'intéressée, le préfet n'a pas ni méconnu l'étendue de son droit à régularisation du droit au séjour des étrangers ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

15. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales des droits de l'homme : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (). ".

16. Il ressort des pièces du dossier que Mme A est entrée sur le territoire français le 12 août 2018 âgée de 81 ans où elle s'est maintenue irrégulièrement à l'expiration de son visa de court séjour. Son fils de nationalité française et sa belle-fille qui l'aident dans son quotidien, résident en France. Toutefois, si son époux et ses parents sont décédés, elle n'établit pas être isolée en cas de retour dans son pays d'origine où résident ses trois autres enfants et où se situent nécessairement l'essentiel de ses attaches personnelles, dans la mesure où elle y a vécu pendant plus de quatre-vingt ans. Dans ces conditions, le préfet n'a pas porté, en prenant l'arrêté attaqué, au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée au regard du but en vue duquel elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs de fait, la décision refusant à Mme A la régularisation de son droit au séjour n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

17. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance () ".

18. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions relatives à la délivrance de plein droit des cartes de séjour citées audit articles, auxquels il envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour et non de celui des tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Mme A ne remplissant pas, ainsi qu'il vient d'être dit, les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 435-1 et L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter la demande de titre de séjour.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

19. En premier lieu, l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas établie, eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré par voie de conséquence de l'illégalité de cette décision, que Mme A invoque à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.

20. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante et qu'elle ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

21. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 611-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : () 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme A, eu égard à son état de santé, n'est pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions.

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

22. D'une part, il résulte de ce qui vient d'être dit que l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas établie. Par suite, le moyen tiré de cette illégalité, invoqué par Mme A à l'encontre de la décision fixant le délai de départ volontaire, ne peut qu'être écarté.

23. D'autre part, il résulte également de ce qui a été dit précédemment que la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

24. En premier lieu, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas établie, eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré par voie de conséquence de l'illégalité de cette décision, que Mme A invoque à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.

25. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et ne méconnaît, à supposer le moyen opérant, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

26. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la requête de Mme A aux fins d'annulation de l'arrêté doivent être rejetées, ainsi pas voie de conséquence, que ses conclusions aux fins d'injonction et sa demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D É C I D E :



Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A, au préfet de Maine-et-Loire et à Me Kaddouri.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Livenais, président,

Mme Rosemberg, première conseillère,

Mme Thierry, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2023.

Le président-rapporteur,

Y. LIVENAIS

L'assesseure la plus ancienne

dans l'ordre du tableau,

V. ROSEMBERG

Le greffier,

E. LE LUDEC

La République mande et ordonne au préfet de Maine-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

hm/ell