Partenariat officiel entre le Barreau de Paris et Pappers
En savoir plus
Logo pappers Justice
Logo pappers Justice

Tribunal administratif de Nantes, 11ème Chambre, 11 juin 2024, 2310387

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
  • Numéro d'affaire :
    2310387
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Nature : Décision
Voir plus

Résumé

Vous devez être connecté pour pouvoir générer un résumé. Découvrir gratuitement Pappers Justice +

Suggestions de l'IA

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête enregistrée le 13 juillet 2023, M. B A, représenté par Me Lepeuc, doit être regardé comme demandant au tribunal : 1°) d'annuler la décision implicite née le 3 septembre 2023 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 15 juin 2023 de l'autorité consulaire française à Lagos (Nigéria) lui refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France en qualité de travailleur salarié ; 2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision attaquée est intervenue au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est réunie dans une composition régulière ; - elle est insuffisamment motivée ; - ladite décision procède d'une erreur de droit et d'une appréciation manifestement erronée tant des éléments communiqués pour justifier de l'objet et des conditions du séjour que du risque de détournement de l'objet du visa. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 février 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code du travail ; - le code du sport ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Revéreau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit

: 1. M. B A, ressortissant nigérian, a sollicité la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France en qualité de travailleur salarié auprès de l'autorité consulaire française à Lagos (Nigéria). Par une décision du 15 juin 2023, cette autorité a refusé de délivrer le visa demandé. Par une décision implicite née le 3 septembre 2023, dont il doit être regardé comme en demandant l'annulation, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre cette décision consulaire. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de l'autorité consulaire : 2. Il résulte des dispositions de l'article D. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui instituent un recours administratif préalable obligatoire que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France se substitue à celle qui a été prise par l'autorité consulaire. Par suite, la décision implicite née le 3 septembre 2023 de cette commission s'est substituée à la décision du 15 juin 2023 de l'autorité consulaire française à Lagos. Il en résulte que les conclusions de la requête doivent être regardées comme dirigées contre la seule décision de rejet de la commission de recours et les conclusions à fin d'annulation de la décision consulaire rejetées comme irrecevables. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France : 3. Aux termes de l'article D. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre de l'intérieur est chargée d'examiner les recours administratifs contre les décisions de refus de visa de long séjour prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. (). ". Aux termes de l'article D. 312-8-1 du même code : " En l'absence de décision explicite prise dans le délai de deux mois, le recours administratif exercé devant les autorités mentionnées aux articles D. 312-3 et D. 312-7 est réputé rejeté pour les mêmes motifs que ceux de la décision contestée. L'administration en informe le demandeur dans l'accusé de réception de son recours ". 4. En application des dispositions précitées de l'article D. 312-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, si le recours administratif préalable obligatoire formé contre une décision de refus d'une demande de visa fait l'objet d'une décision implicite de rejet, cette décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui se substitue à celle de l'autorité consulaire, doit être regardée comme s'étant approprié les motifs retenus par cette autorité, tirés en l'espèce, d'une part, de ce qu'il existe un risque de détournement par le demandeur de l'objet du visa à des fins de maintien illégal en France après son expiration ou pour y mener des activités illicites, et, d'autre part, du caractère incomplet et/ou non fiables des informations communiquées pour justifier de l'objet et des conditions du séjour en France. 5. Aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour dont la durée de validité ne peut être supérieure à un an. / Ce visa peut autoriser un séjour de plus de trois mois à caractère familial, en qualité de visiteur, d'étudiant, de stagiaire ou au titre d'une activité professionnelle, et plus généralement tout type de séjour d'une durée supérieure à trois mois conférant à son titulaire les droits attachés à une carte de séjour temporaire ou à la carte de séjour pluriannuelle prévue aux articles L. 421-9 à L. 421-11 et L. 421-13 à L. 421-24. ". En outre, aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". 6. La circonstance qu'un travailleur étranger dispose d'un contrat de travail visé par la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) ou d'une autorisation de travail délivrée dans les mêmes conditions, ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente refuse de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur tout motif d'intérêt général. Constitue de tels motif, d'une part, le risque de détournement de l'objet du visa à des fins de maintien illégal en France après son expiration ou pour y mener des activités illicites et, d'autre part, l'absence de justification sur l'objet et les conditions de séjour en France du demandeur de visa. 7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a accordé le 31 mai 2023 à l'association amicale laïque Césaire Levillain, dont le siège est situé à Grand-Quevilly (76), une autorisation de travail pour le recrutement de M. A en qualité de joueur professionnel de basket-ball, en contrat à durée déterminée de neuf mois à compter d'une date prévisionnelle fixée au 10 août 2023. M. A a en outre produit une attestation établie par les dirigeants du club recruteur justifiant de son expérience sportive estimée être en parfaite adéquation avec l'emploi projeté de joueur professionnel de basket destiné à évoluer au niveau National 3, ainsi que le contrat de travail conclu avec l'association. Si le ministre fait valoir que ce contrat de travail n'est pas conforme, d'une part, aux dispositions de l'article L. 222-2-4 du code du sport prévoyant une durée minimale de contrat de douze mois, afin de couvrir la saison sportive et, d'autre part, aux stipulations de la convention collective nationale du sport s'agissant du salaire minimum auquel un joueur professionnel de basket-ball évoluant en nationale 3 française doit être rémunéré, ces seules circonstances ne sont pas de nature, par elles-mêmes, à établir l'existence d'un risque avéré de détournement par M. A de l'objet du visa demandé à des fins de maintien illégal en France après son expiration ou pour y mener des activités illicites. Par suite, en opposant ce motif, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. 8. D'autre part, M. A soutient, sans être contredit, qu'il a produit l'ensemble des documents requis à l'appui de sa demande de délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France en qualité de travailleur salarié. Dans ces conditions, et alors que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'apporte pas, dans son mémoire en défense, d'éléments de nature à établir que les informations communiquées pour justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé ne seraient pas complètes et fiables, le requérant est fondé à soutenir qu'en lui opposant un tel motif, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a commis une erreur d'appréciation. 9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la décision implicite née le 3 septembre 2023 de la commission de recours doit être annulée. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 10. Le présent jugement implique nécessairement qu'il soit procédé à la délivrance du visa d'entrée et de long séjour en France demandé par M. A, dans un délai de deux mois suivant sa notification, sans qu'il soit besoin, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros, à verser à M. A, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La décision implicite née le 3 septembre 2023 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée. Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France à M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. Article 3 : L'État versera à M. A la somme de 1 200 euros (mille deux cents euros) en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient : M. Besse, président, Mme Roncière, première conseillère, M. Revéreau, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juin 2024. Le rapporteur, P. REVEREAU Le président, P. BESSE La greffière, S. FOURNIER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière,

Commentaires sur cette affaire

Pas encore de commentaires pour cette décision.