Sur les deux moyens
réunis, pris de la violation des articles
455 du nouveau Code de procédure civile,
R. 516-30 et
R. 516-31 du Code du travail :
Attendu que M. X..., employé depuis plusieurs années en qualité de gestionnaire de magasin par la société des Ciments Vicat, qui exploite à Saint-Martin-le-Vinoux une carrière en galeries souterraines sur trois niveaux, travaillait au niveau 400 et exerçait les fonctions de délégué syndical ; qu'en raison d'une nouvelle méthode d'exploitation intervenue en 1982, M. X..., qui travaillait avec quinze autres personnes, a été seul maintenu au niveau 400 et a vu ses fonctions modifiées ; qu'il a saisi la formation de référé prud'homal pour demander sa réintégration dans ses anciennes fonctions, en prétendant qu'il avait été victime d'une mesure discriminatoire en relation avec sa qualité de délégué syndical ;
Attendu qu'il fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Grenoble, 13 mars 1984) d'avoir déclaré la juridiction des référés incompétente, aux motifs que l'urgence n'était pas établie, qu'il existait une contestation sérieuse et que le trouble invoqué n'était pas manifestement illicite, alors, d'une part, sur l'urgence, que la Cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions de la société faisant valoir que s'il était vrai que le changement de situation remontait à quelques mois, les relations des parties n'avaient cependant pas cessé d'évoluer pendant cet intervalle de temps et que les réserves émises dès l'origine par le salarié, ainsi que les contre-propositions de la direction, avaient créé une situation évolutive de négociation de nature à différer la constatation par le salarié d'une situation d'urgence jusqu'au moment où tout espoir d'arrangement fut écarté, et que le fait que l'action en référé ait été exercée en période de congés annuels ne saurait être reproché au salarié et contredire ses affirmations sur l'urgence, alors, d'autre part, sur la contestation sérieuse, que la modification des fonctions de M. X..., délégué syndical, s'ajoutant à l'isolement volontairement créé autour de lui, avait bouleversé les conditions d'exercice de ses fonctions représentatives, de sorte que la cour d'appel ne pouvait lui opposer l'impossibilité de remettre en cause la prérogative de l'employeur d'organiser le travail dans l'entreprise et que l'intervention du juge des référés ne se heurte à aucune contestation sérieuse dès lors qu'il est admis que les fonctions représentatives d'un délégé syndical ne sont pas, par leur nature, subordonnées aux prérogatives de l'employeur d'organiser le travail dans l'entreprise, alors, en outre, sur le trouble manifestement illicite, que la cour d'appel a omis de rechercher si l'employeur avait fourni la justification de l'ensemble des modifications qu'il avait apporté à la situation de ce délégué syndical, la seule constatation que le salarié travaillait au même niveau dans la carrière étant insuffisante au regard de tous les autres faits de la cause, qui révèlent que, dans un dessein d'isolement et d'humiliation, l'employeur avait modifié toutes les conditions importantes de travail de ce délégué, y compris par une rétrogradation de ses fonctions réelles et alors, enfin, que la constatation de l'absence d'urgence et de l'existence d'une contestation sérieuse était insuffisante, la règle de l'article
R.516-31 du Code du travail ayant un caractère propre qui ne saurait être considéré comme une simple redite de l'article
R. 516-30 du même Code ;
Mais attendu
, d'une part, que l'urgence et l'existence d'un trouble manifestement illicite sont souverainement appréciées par la formation de référé prud'homal ;
Attendu, d'autre part, que n'étant pas contesté que M. X... n'avait été l'objet d'aucune mutation, d'aucune diminution de son coefficient et de son salaire, qu'il n'avait été victime d'aucune mesure tendant à le priver de son crédit d'heures de délégation dont il disposait librement et que l'allégation par l'employeur du maintien de certaines fonctions antérieures et l'attribution de nouvelles fonctions ne pouvait être appréciée sans remettre en cause la prérogative de l'employeur d'organiser le travail dans son entreprise, les juges d'appel ont pu en déduire l'existence d'une contestation sérieuse ;
Qu'aucun des griefs du pourvoi ne saurait donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi