Tribunal administratif de Versailles, 12 avril 2023, 2301968

Mots clés
requête • étranger • requérant • principal • rapport • rejet • subsidiaire • saisie • requis • société • trouble

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
  • Numéro d'affaire :
    2301968
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : BARTHELEMY
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête enregistrée le 9 mars 2023, M. C A, représenté par Me Barthe´lemy, demande au juge des re´fe´re´s, saisie sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : 1°) d'ordonner, a` titre principal, la suspension de l'exécution de l'arrêté n° LD 2022-1608 du 1er février 2023 par lequel le préfet de police de Paris a prononcé une interdiction de stade pour les manifestations sportives des différentes sections du Paris Saint-Germain, ou` lors des retransmissions en public de celles-ci, pour une durée de six mois ; 2°) d'ordonner, a` titre subsidiaire, la suspension de l'exécution de l'article 2 de cet arrêté, par lequel le préfet de Police l'a obligé à répondre aux convocations du préfet de l'Essonne lors des manifestations des différentes sections du Paris Saint-Germain sur l'ensemble du territoire national ou sur le territoire d'un État étranger ; 3°) de mettre a` la charge de l'État une somme 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la condition d'urgence est remplie, dès lors que la mesure porte atteinte à des libertés fondamentales comme la liberté d'aller et venir, d'association, de réunion et d'expression, et que l'obligation de pointage porte atteinte à la liberté d'entreprendre et au respect de la vie privée ; l'obligation de pointage est en tout état de cause disproportionnée puisqu'il doit pointer chaque semaine plus de six fois soit près de 25 rencontres par mois; ceci constitue une contrainte professionnelle importante puisqu'il travaille comme commerçant, ayant créé sa société d'impression et étant le seul travailleur de son commerce ; il est porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale dès lors qu'il est père de famille; de plus, aucun intérêt général ne justifie une telle atteinte à une liberté fondamentale, d'autant plus que le préfet a mis deux mois à prendre sa décision après la fin de la procédure contradictoire et que, depuis août 2022, il n'a pas troublé l'ordre public ; enfin, il n'assiste qu'aux matchs de l'équipe masculine professionnelle de football du PSG et n'est pas concerné par les rencontres dans d'autres sports ; - la décision porte une atteinte grave et manifestement immédiate à la liberté d'aller et venir, aux libertés d'association, de réunion et d'expression ; - le doute sérieux quant a` la légalité de l'arrêté attaque´ découle du caractère identique des faits qui lui sont reprochés par rapport à ceux reprochés à de nombreuses personnes et aucun fait individualisé ne lui est reproché ; la matérialité des faits et leur individualisation ne sont donc pas démontrées ; l'article L. 332-16 du code du sport prévoit la possibilité pour le préfet de prendre une mesure d'interdiction administrative de stade lorsqu'une personne constitue une menace pour l'ordre public a` raison de son comportement d'ensemble a` l'occasion de manifestations sportives ; or, l'arrêté attaque´ se fonde sur son comportement d'ensemble à l'occasion d'une unique manifestation sportive ; la mesure de pointage en cause est disproportionnée, tant dans sa durée, que dans son étendue et ses modalités. Par un mémoire en défense enregistre´ le 5 avril 2023, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête. Il soutient que la requête doit être rejetée pour défaut d'urgence et qu'aucun moyen n'est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée.

Vu :

- les autres pièces du dossier ; - le code du sport ; - le code de justice administrative ; Vu : - la requête au fond enregistrée sous le n°231967. La présidente du tribunal a désigné Mme D, magistrat honoraire, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Descours-Gatin, juge des référés, - les observations de Me Dubois, pour M. A, qui reprend ses écritures et qui ajoute que l'obligation de pointage concerne les matches de plusieurs équipes, de football, mais aussi de handball, qui peuvent avoir lieu les mardis, mercredis et jeudis, que les horaires et jours des matches sont parfois difficiles à trouver, et que, compte tenu du comportement du préfet de police, il maintient sa demande de frais irrépétibles pour un montant de 5 000 euros. L'instruction a été close à l'issue de l'audience à 15h23.

Considérant ce qui suit

: La clôture de l'instruction a été prononcée a` 14h20. 1. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté n° LD 2022-1608 du 1er février 2023, le préfet de police de Paris a interdit, en son article 1er, a` M. C A de pénétrer et de se rendre aux abords des enceintes ou` se déroulent les manifestations sportives des différentes sections du Paris Saint-Germain, équipe masculine, féminine, U19 et handball, ou lors des retransmissions en public de celles-ci, pour une durée de six mois. Par l'article 2 de ce même arrêté, le préfet de police a ordonné à l'intéressé de répondre aux convocations du préfet de l'Essonne lors des manifestations des différentes sections du Paris Saint-Germain, sur le territoire national ou sur celui d'un État étranger. L'article 3 de l'arrêté prévoit l'obligation pour M. A d'informer de manière circonstanciée sans délai et par tout moyen le préfet de l'Essonne de l'impossibilité de déférer a` une convocation, et en une telle hypothèse, la possibilité pour le préfet de lui fixer un nouveau lieu de convocation. M. A demande, à titre principal, la suspension de l'exécution de cet arrêté d'interdiction de stade ou, a` titre subsidiaire, de son seul article 2 relatif a` l'obligation de pointage. Sur les conclusions à fin de suspension : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des re´fe´re´s, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre a` créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant a` la légalité´ de la décision ". Aux termes de l'article R. 522-1 du même code : " La requête visant au prononce´ de mesures d'urgence doit contenir l'expose´ au moins sommaire des faits et moyens et justifier de l'urgence de l'affaire () ". 3. Aux termes de l'article L. 332-16 du code du sport : " Lorsque, par son comportement d'ensemble a` l'occasion de manifestations sportives, par la commission d'un acte grave a` l'occasion de l'une de ces manifestations, du fait de son appartenance a` une association ou un groupement de fait ayant fait l'objet d'une dissolution en application de l'article L. 332-18 ou du fait de sa participation aux activités qu'une association ayant fait l'objet d'une suspension d'activité s'est vue interdire en application du même article, une personne constitue une menace pour l'ordre public, () le préfet de police [peut], par arrêté motive´, prononcer a` son encontre une mesure d'interdiction de pénétrer ou de se rendre aux abords des enceintes ou` de telles manifestations se déroulent ou sont retransmises en public. L'arrêté, valable sur le territoire national, fixe le type de manifestations sportives concernées. Il ne peut excéder une durée de vingt-quatre mois. () Le préfet de police [peut] également imposer, par le même arrêté´, a` la personne faisant l'objet de cette mesure l'obligation de répondre, au moment des manifestations sportives objet de l'interdiction, aux convocations de toute autorité ou de toute personne qualifiée qu'il désigne. Le même arrêté peut aussi prévoir que l'obligation de répondre a` ces convocations s'applique au moment de certaines manifestations sportives, qu'il désigne, se déroulant sur le territoire d'un État étranger. Cette obligation doit être proportionnée au regard du comportement de la personne () ". En ce qui concerne l'urgence : 4. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient ainsi au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse. 5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que M. A exerce seul une activité professionnelle d'imprimeur, qui exige une grande disponibilité pour satisfaire les commandes. Le requérant démontre que l'obligation de pointage associée à la mesure d'interdiction de stade pour l'ensemble des manifestations sportives des différentes sections du Paris Saint-Germain, équipe masculine, féminine, U19 et handball, peut intervenir jusqu'à 25 fois par mois, y compris certains jours de semaine et ceci pendant six mois. Dès lors, une telle obligation aura nécessairement des conséquences sur sa vie privée et professionnelle puisqu'il peut être amené à se déplacer les week-ends et plusieurs soirées par semaine au commissariat de police. Il s'ensuit que la condition d'urgence est remplie. En ce qui concerne le doute sérieux quant a` la légalité de l'arrêté : 6. En l'état de l'instruction, le moyen tiré de la disproportion de l'obligation de pointage, tant dans sa durée que dans son étendue et ses modalités, est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté du 1er février 2023. 7. Il résulte de tout ce qui précède que les deux conditions prévues par l'article L. 521-1 du code de justice administrative sont remplies. Par suite, il y a lieu de suspendre l'exécution de l'arrêté du 1er février 2023 du préfet de police. Sur les frais de l'instance : 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : L'exécution de l'arrêté du 1er février 2023 du préfet de police est suspendue. Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 000 (MILLE) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C A et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de police et au préfet de l'Essonne. Fait à Versailles, le 12 avril 2023. Le juge des référés, Signé Mme D Le greffier, Signé M. B La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.