CR/MMC
COPIE OFFICIEUSE
COPIE EXÉCUTOIRE
à :
- la SCP AVOCATS CENTRE
- la SCP ROUAUD & ASSOCIES
LE : 02 JUIN 2022
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 02 JUIN 2022
N° - Pages
N° RG 21/00569 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DLK3
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire de CHATEAUROUX en date du 12 Février 2021
PARTIES EN CAUSE :
I - M. [F] [Z]
né le 26 Janvier 1987 à CHATEAUROUX (36000)
16 rue du Québec
36000 CHATEAUROUX
aide juridictionnelle Partielle 55% numéro 18033 2021/001777 du 06/07/2021
- Mme [D] [M]
née le 21 Décembre 1985 à ISSOUDUN (36100)
16 rue du Québec
36000 CHATEAUROUX
aide juridictionnelle Partielle 55% numéro 18033 2021/001776 du 06/07/2021
Représentés par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES
APPELANTS suivant déclaration du 27/05/2021
II - Mme [Y] [B] épouse [X]
née le 29 Septembre 1955 à ARGENTON SUR CREUSE (36200)
Lieudit Mont
36250 ST MAUR
Représentée par la SCP ROUAUD & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES
timbre fiscal acquitté
INTIMÉE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles
786 et
907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mars 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. PERINETTI, Conseiller chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. WAGUETTEPrésident de Chambre
M. PERINETTIConseiller
Mme CIABRINIConseiller
***************
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS
***************
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile.
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EXPOSÉ :
Suivant acte sous seing privé en date du 25 octobre 2018, Mme [Y] [B] épouse [X] a consenti un bail d'habitation à M. [F] [Z] et à Mme [D] [M] portant sur un logement situé 16, rue du Québec à Châteauroux (36000), moyennant un loyer de 695 euros charges comprises.
Par acte d'huissier du 10 septembre 2020, Mme [B] [X] a fait citer M. [Z] et Mme [M] devant le juge des contentieux de la protection de Châteauroux aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- constater la résiliation du bail en vertu de la clause résolutoire insérée au bail ou, subsidiairement, de prononcer la résiliation du bail,
- ordonner l'expulsion des défendeurs,
- condamner solidairement les défendeurs à lui verser :
* la somme de 2.682,45 euros au titre des loyers impayés (ultérieurement ramenée à hauteur de 1.461,25 euros au 31 janvier 2021), avec les intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation,
* une indemnité d*occupation égale au montant du loyer contractuel et des charges, jusqu'à la libération effective et totale des lieux,
* la somme de 500 euros en application de l'article
700 du Code de procédure civile,
- condamner les défendeurs in solidum aux dépens.
M. [Z] et Mme [M] n'ont pas comparu, ni ne se sont fait représenter.
Par jugement réputé contradictoire du 12 février 2021, le Tribunal judiciaire de Châteauroux a :
- Constaté que la résiliation du bail conclu entre Mme [B] [X] d'une part, et M. [Z] et Mme [M] d'autre part, était intervenue par le jeu de la clause résolutoire et par l'effet du commandement de payer infructueux,
- Ordonné par conséquent à M. [Z] et Mme [M] de libérer avec tous occupants de leur chef et après avoir remis les clés, les locaux situés 16 rue du Québec à Châteauroux (36000), à défaut, que leur expulsion pourrait être poursuivie, le cas échéant avec l'assistance de la force publique, et dit qu'il pourrait être procédé au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais et risques de M. [Z] et Mme [M], dans tel garde-meuble qu'il plairait à Mme [B] [X],
- Condamné solidairement M. [Z] et Mme [M] à verser à Mme [B] [X] la somme de 1.461,25 € pour loyers, provisions sur charges locatives selon le compte arrêté au 31 janvier 2021, avec les intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2020 sur la somme de 1.433,85 € et à compter de la date de la signification pour le surplus de la dette,
- Condamné solidairement M. [Z] et Mme [M] à payer à Mme [B] [X] une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et des charges locatives à compter du 1er février 2021 et jusqu'à la libération des lieux,
- Condamné M. [Z] et Mme [M] in solidum à payer à Mme [B] [X] la somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
- Condamné in solidum M. [Z] et Mme [M] aux dépens de l'instance comprenant le coût du commandement de payer, de l'assignation et de sa notification au Préfet de l'Indre,
- Rappelé que l'exécution provisoire du présent jugement était de droit,
- Rappelé qu'en cas de mise en place d'une procédure de surendettement, la créance serait remboursée selon les termes et conditions fixées à l'issue de ladite procédure,
- Dit que le jugement serait transmis par les soins du greffe au Préfet de l'Indre en vue de la prise en compte de la demande de relogement des occupants dans le cadre du plan d'action pour le logement des personnes défavorisées,
- Rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.
Le Tribunal a notamment retenu que les causes du commandement de payer n'avaient pas été acquittées dans le délai imparti, que la bailleresse justifiait de l'existence d'un arriéré locatif, et que l'ampleur de l'arriéré laissait présumer que les locataires ne pouvaient pas ou ne désiraient pas régler leur dette locative, rendant inopportun l'octroi de délais de paiement.
M. [Z] et Mme [M] ont interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 27 mai 2021.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 29 juillet 2021, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'ils développent, M. [Z] et Mme [M] demandent à la Cour de :
DÉCLARER recevables et bien fondés Mme [M] et M. [Z] en leur appel du jugement rendu le 12 février 2021 par le Juge des contentieux de la protection près le Tribunal Judiciaire de Châteauroux ;
EN CONSEQUENCE VOIR ANNULER toutes ses dispositions de leur condamnation à paiement et ordonnant leur expulsion de leur logement d'habitation ;
ET DÉBOUTER Mme [B] [X] de toutes ses demandes, moyens et conclusions à ces fins ;
CONDAMNER Mme [B] [X] au contraire à verser à Mme [M] et M. [Z], la somme de 1.000 € au titre de l'article
700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d`instance.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 26 octobre 2021, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'elle développe, Mme [B] [X] demande à la Cour, au visa des articles 1103, 1104, 1193, 1217, 1224, 1231-6,1231-7,
1728 et
1760 du code civil et des dispositions des articles 7 et 24 de la loi du 6 juillet 1989, de :
Constater que M. [Z] et Mme [M] n'ont pas régularisé les causes du commandement de payer visant la clause résolutoire qui leur a été signifié dans le délai de deux mois imparti par l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989,
Constater en conséquence l'acquisition de la clause résolutoire du bail liant les parties,
CONFIRMER en conséquence en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 février 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Châteauroux et débouter M. [Z] et Mme [M] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
Y ajoutant,
CONDAMNER in solidum M. [Z] et Mme [M] au paiement d'une somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
Les condamner aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 février 2022.
MOTIFS :
A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir «dire et juger», «rappeler» ou «constater» ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt. Il en va de même de la demande de «donner acte», qui est dépourvue de toute portée juridique et ne constitue pas une demande en justice.
Sur l'acquisition de la clause résolutoire :
L'article 24, I, de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 énonce que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.
Le commandement de payer contient, à peine de nullité :
1° La mention que le locataire dispose d'un délai de deux mois pour payer sa dette ;
2° Le montant mensuel du loyer et des charges ;
3° Le décompte de la dette ;
4° L'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d'expulsion ;
5° La mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l'adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière ;
6° La mention de la possibilité pour le locataire de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l'article
1343-5 du code civil.
L'article 7 de la même loi dispose que le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ; le paiement mensuel est de droit lorsque le locataire en fait la demande. Le paiement partiel du loyer par le locataire réalisé en application de l'article
L. 843-1 du code de la construction et de l'habitation ne peut être considéré comme un défaut de paiement du locataire.
En l'espèce, le contrat de bail conclu entre les parties le 25 octobre 2018 comporte une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit dudit bail en cas notamment de défaut de paiement des loyers ou des charges.
Mme [B] [X] a fait délivrer à M. [Z] et Mme [M], suivant acte d'huissier en date du 4 juin 2020, un commandement de payer la somme de 1.573,10 euros (soit 1.433,85 euros d'impayés de loyers et charges, outre le coût de l'acte) visant la clause résolutoire insérée au bail.
M. [Z] et Mme [M] reconnaissent avoir laissé deux loyers demeurer impayés. Les relevés de compte qu'ils produisent ne laissent ressortir aucun versement au mandataire de la bailleresse entre le 4 juin et le 4 août 2020. Les causes du commandement de payer n'ont donc pas été acquittées dans le délai légal. Le premier juge a ainsi à bon droit constaté la résiliation du bail, acquise par le jeu de la clause résolutoire.
Sur l'octroi de délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire :
Aux termes de l'article 24, V, de la loi du 6 juillet 1989, le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article
1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative, le quatrième alinéa de l'article
1343-5 du code civil s'appliquant lorsque la décision du juge est prise sur ce fondement.
L'article
1343-5 du code civil prévoit, en son quatrième alinéa, que la décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier.
En l'espèce, si Mme [M] et M. [Z] ne justifient nullement de leurs revenus et charges actuels, Mme [B] [X] indique qu'ils demeuraient redevables envers elle, au 25 octobre 2021 (soit à la veille de la signification de ses écritures) de la somme de 329,42 euros. Il ressort du jugement entrepris qu'à la date de son prononcé, la dette locative s'élevait à hauteur de 1.433,85 euros. Par conséquent, Mme [M] et M. [Z] ont poursuivi depuis lors des versements entre les mains de la bailleresse et ont réglé les trois quarts de l'arriéré locatif en huit mois environ.
Dans ces conditions, il peut être considéré que Mme [M] et M. [Z] peuvent apurer leur dette locative envers Mme [B] [X], dont le montant résiduel s'avère relativement peu élevé, dans un délai raisonnable, tout en continuant de s'acquitter des sommes mensuellement dues au titre des loyers et charges.
Il convient en conséquence de leur accorder un délai de six mois pour se libérer de leur dette selon les modalités évoquées au dispositif ci-après.
L'octroi de délais de paiement suspend la résiliation du bail. Le contrat de bail se poursuivra si Mme [M] et M. [Z] respectent les obligations et les délais qui leur sont impartis au dispositif ci-après.
Dans le cas contraire, le bail se trouvera résilié à la date de la défaillance de Mme [M] et M. [Z] qui seront alors redevables envers Mme [B] [X], jusqu'à leur départ effectif des lieux, d'une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au loyer courant majoré des charges et taxes applicables si le bail s'était poursuivi.
Sur l'article 700 et les dépens :
L'équité et la prise en considération de l'issue du litige commandent de faire application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile. Mme [M] et M. [Z], qui succombent en partie en leurs prétentions, seront condamnés in solidum à verser à Mme [B] [X] la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens.
Aux termes de l'article
696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie. Mme [M] et M. [Z], partie succombante, devront supporter in solidum la charge des dépens de l'instance d'appel.
Le jugement entrepris sera enfin confirmé de ces chefs.
PAR CES MOTIFS
:
La Cour,
CONFIRME le jugement rendu le 12 février 2021 par le Tribunal judiciaire de Châteauroux sauf en ce qu'il a ordonné l'expulsion de M. [Z] et Mme [M] et les a condamnés à payer à Mme [B] [X] une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et des charges locatives à compter du 1er février 2021 et jusqu'à la libération des lieux ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
AUTORISE Mme [D] [M] et M. [F] [Z] à s'acquitter de la dette locative s'élevant à 329,42 euros au 25 octobre 2021 en 5 mensualités successives de 55 euros, et une sixième soldant la dette en principal, frais et intérêts ;
DIT que la première mensualité sera payable avant le 10 du mois suivant la signification du présent arrêt et les suivantes avant le 10 de chaque mois, en plus du loyer courant et des provisions sur charges ;
SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant cette période ;
DIT qu'elle sera réputée ne pas avoir joué si le loyer courant est réglé et la mensualité respectée ;
A défaut,
DIT que le bail sera résilié de plein droit et la totalité de la dette exigible ;
ORDONNE l'expulsion de Mme [D] [M] et M. [F] [Z] et celle de tous occupants de leur chef ainsi que de tous les biens qui s'y trouvent avec, le cas échéant, le concours de la force publique, et ce après expiration d'un délai de deux mois à compter de la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux ;
DIT que le sort des meubles sera régi conformément aux articles
L.433-1 et
L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution et ce, après expiration d'un délai de deux mois à compter de la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux ;
CONDAMNE solidairement Mme [D] [M] et M. [F] [Z] au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 695 euros et ce, jusqu'à libération effective des lieux loués ;
CONDAMNE in solidum Mme [D] [M] et M. [F] [Z] à verser à Mme [Y] [B] [X] une somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;
CONDAMNE in solidum Mme [D] [M] et M. [F] [Z] aux dépens de l'instance d'appel.
L'arrêt a été signé par M. WAGUETTE , Président et par Mme MAGIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
S. MAGISL. WAGUETTE