COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT
DU 21 MAI 2008
ARRÊT N° 702
R.G. : 06/04083
CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'AVIGNON
02 mars 2005
Section : Commerce
ASSOCIATION DES ECOLES LAÏQUES DE CAVAILLON
C/
SOCIETE SOGERES-PROVENCE /
X...
/ S.A SOGERES
APPELANTE :
ASSOCIATION DES ECOLES LAÏQUES DE CAVAILLON
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 58, Rue Liffran
84300 CAVAILLON
représentée par Maître Jean-Victor BOREL, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
INTIMÉES :
Madame Josiane
X...
...
84300 CAVAILLON
comparant en personne, assistée de Maître Anne-France BREUILLOT, avocat au barreau de CARPENTRAS
S.A SOGERES
prise ne la personne de son Président Directeur General
42-44 rue de Bellevue
BP96
92105 BOULOGNE
représentée par Maître Danielle BEURNAUX, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Régis TOURNIER, Président,
Madame Brigitte OLIVE, Conseiller,
Madame Françoise GAUDIN, Conseiller,
GREFFIER:
Madame Catherine ANGLADE. Adjoint Administratif exerçant les fonctions de Greffier, lors des débats, et Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors du prononcé,
DÉBATS :
à l'audience publique du 19 Mars 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Mai 2008
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 21 Mai 2008, date indiquée à l'issue des débats,
FAITS ET PROCÉDURE
L'association des Ecoles Laïques de Cavaillon a pour objet statutaire la gestion des cantines scolaires et des activités culturelles et sportives au sein des écoles laïques de Cavaillon.
Dans le cadre de son activité elle embauchait des employés de cuisine dont l'intimée Josiane
X...
pour un emploi à temps partiel et à durée indéterminée et se trouve soumise à la Convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 étendue par arrêté du 2 février 1984.
A la suite de la conclusion d'un avenant contractuel, à compter du 1er septembre 1994, les parties ont adopté une annualisation du contrat de travail. La rémunération étant dès lors prévue sur douze mois, indépendamment de l'alternance de périodes travaillées et non travaillées.
A compter du 1er septembre 2003, la gestion des cantines scolaires était confiée à la société SA SOGERES, l'association ne pouvant plus poursuivre cette activité à la suite d'une réduction des subventions municipales et cette société reprenait l'ensemble du personnel composé de cantinières et de cuisinières.
Entre temps le 30 juillet 2003, l'intimée avait saisi le Conseil de Prud'hommes d'Avignon aux fins notamment d'obtenir, outre l'indemnisation de ses frais au titre de l'article
700 du Code de procédure civile :
- un rappel de salaire au titre d'une régularisation du revenu minimum mensuel dit RMM,
- le versement d'une indemnité spéciale en application des dispositions de l'article
L. 223-15 du Code de travail,
- un rappel de salaires au titre d'une classification supérieure poste chef de cuisine, niveau IV de la convention collective,
- des dommages intérêts pour résistance abusive.
La salariée demanderesse soutenait l'argumentation suivante :
L'article 16 bis de la Convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivité impose à l'employeur de garantir aux salariés de plus de 6 mois d'ancienneté un revenu minimum mensuel calculé en incluant au salaire conventionnel de base :
« Le prorata rapporté au mois des primes contractuelles acquises pendant une année civile et ayant un caractère de salaire, notamment: treizième mois, prime de fin d 'année ou d'exercice, prime d 'objectif, prime de fin de saison, prime de vacances..., quelles qu 'en soient les modalités de versement"
C'est cette dernière partie de l'article qui n'est pas respectée par l'association qui ne veut inclure que les repas effectivement consommés, en violation de la lettre même du texte.
Quant aux congés annuels l'association méconnaît les dispositions de l'article
L 223-15 du Code du travail qui dispose :
« Lorsque le maintien en activité d'un établissement n 'est pas assuré pendant un nombre de jours dépassant la durée fixée pour la durée des congés légaux annuels, l'employeur est tenu pour chacun des jours ouvrables de fermeture excédant cette durée, de verser à son personnel une indemnité qui ne peut être inférieure à l'indemnité journalière de congés payés.
Cette indemnité journalière n'est pas cumulable avec l'indemnité de congés payés ».
En vertu de ces dispositions, en cas de fermeture d'un établissement au-delà de la durée des congés légaux, les salariés ont droit, pour chacun des jours ouvrables excédentaires, à une indemnité qui ne peut être inférieure à l'indemnité journalière de congés payés.
Ces dispositions sont applicables même lorsque la fermeture de l'entreprise au-delà de cette durée est motivée par des circonstances extérieures, telles que le rythme de l'activité scolaire (Cass. soc.17 décembre 1997 n' 94-43.718 Dalloz 1998, IRp. 54).
La technique du lissage de la rémunération est d'ailleurs contraire aux dispositions de cet article dès lors que le paiement des périodes d'inactivité n'est pas assuré par le paiement de l'indemnité spécifique prévue par ce texte, en sus du salaire et des congés payés (Cass. Soc. 21 mai 1996 Bull civ. no 194).
Le refus de l'association de rechercher toute solution amiable est manifestement fautif et justifie la demande tendant à un versement de la somme de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée.
Par jugement du 2 mars 2005 le Conseil des prud'hommes d'Avignon aux motifs que :
- Sur le revenu minimum mensuel
ATTENDU que l'article 16 bis de la Convention Collective impose à l'employeur de garantir aux salariés de plus de 6 mois d'ancienneté un revenu minimum mensuel calculé en incluant au salaire conventionnel de base :
- l'avantage en nature mensuel évalué, quel que soit le nombre de repas consommés, à 2l fois le minimum garanti;
- le prorata rapporté au mois des primes contractuelles acquises pendant une année civile et ayant un caractère de salaire (ex 13e mois, prime de fin d'année...).
Il n'y a pas lieu de proratiser l'avantage en nature égal à 2l fois le minimum garanti.
- Sur l'indemnité spéciale
ATTENDU qu 'en vertu des dispositions prévues à l'article
L 223-15 du Code du Travail, en cas de fermeture d'un établissement au delà de la durée des congés légaux, les salariés ont droit, pour chacun des jours ouvrables excédentaires, à une indemnité qui ne peut être inférieure à l'indemnité journalière de congés payés.
Les dispositions de l'article
L 223-15 sont applicables même lorsque la fermeture de l'entreprise au delà de cette durée est motivée par des circonstances extérieures, telles que le rythme de l'activité scolaire.
ATTENDU que lorsque l'employeur répartit sur 12 mois et non pas seulement sur la période d'activité le salaire qu 'il a déterminé en fonction des seules semaines d'activités, il en résulte que le paiement de la période d'inactivité est assuré par le fractionnement du salaire et non par le versement, en sus du salaire, de l'indemnité spéciale prévue par l'article 223-15 du Code ; cette méthode est contraire aux dispositions du dit article (soc. 2l Mai 1996).
ATTENDUque les salariés ont signé un avenant transformant le contrat à temps partiel en contrat intermittent il ne peut se prévaloir à partir de cette date des dispositions de l'art L 223.15 du Code du Travail car ce type de contrat prévoit expressément une alternance de périodes travaillées et non travaillées, ce qui est l'essence même du contrat de travail intermittent.
- Sur les demandes à l'encontre de la SOGERES pour l'année scolaire 2003/2004
ATTENDU que la Société SOGERES a repris les contrats des salariés de l'association en application de l'article L 122-12.
ATTENDU que la SOGERES a continué à pratiquer le même calcul que l'Association des Ecoles Laïques, elle est redevable pour l'année scolaire 2003/2004 des sommes dues concernant le revenu minimum mensuel.
- Sur la demande de requalification du contrat de travail
Attendu que la demanderesse n 'apporte pas la preuve d'une haute spécialisation de ses tâches dans le cadre de son emploi à la cantine ; que son emploi ne répond pas au statut d'agent de maîtrise, elle ne peut se prévaloir d'un niveau et d'un échelon supérieur au niveau III échelon B tel que repris dans la convention collective nationale de restauration de collectivités ;
L'association des Ecoles Laïques était condamnée à payer :
- 864,49 euros de rappel de salaire minimum mensuel, en sus la prime d'ancienneté correspondante de 25,93 euros, outre les congés payés y afférents de 86,44 euros,
- 5.289,23 euros de rappel d'indemnité spéciale de l'article
L 223-15 et les congés payés y afférents,
- 66,10 euros de rappel au titre des congés payés d'ancienneté,
- 400 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile.
Tandis que la société SOGERES était condamnée à payer :
- 174 euros de rappel sur le revenu minimum de salaire et les congés payés y afférents,
- 400 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile.
L'association des Ecoles Laïques de Cavaillon a régulièrement interjeté appel de cette décision, dont l'intimée a également relevé appel incident le 15 avril 2005 par lettre enregistrée au greffe de la Cour.
PRÉTENTIONS
L'affaire était radiée par arrêt du 11 mai 2006.
L'association réinscrivait l'affaire après avoir satisfait aux obligations mises à sa charge par l'arrêt de radiation.
Actuellement les deux employeurs sollicitent :
- d'abord l'irrecevabilité des conclusions déposées par l'intimée deux jours avant l'audience, qui sont manifestement tardives en soulevant des moyens jamais présentés et des demandes qu'ils n'ont pas pu examiner,
- ensuite sur le fond, la réformation de cette décision.
Les deux employeurs prétendent que :
A) Sur le revenu minimum mensuel
L'article 16 bis définit le RMM comme étant constitué par trois éléments dont le deuxième est l'avantage en nature mensuel évalué, quel que soit le nombre de repas consommés, à 21 fois le minimum garanti.
Or selon la définition de l'avantage en nature résultant de l'article 22 de la convention collective « l'employeur est tenu de nourrir gratuitement son personnel de service lorsqu'il est présent sur les lieux de travail au moment du repas », ce texte prouvant que le salarié à temps partiel qui effectue son travail sur 4 jours, ne peut pas être présent 21 jours dans l'entreprise comme un salarié à temps complet.
Face à la revendication de ses salariés, l'association avait interrogé en 2002 le ministère du travail qui par une lettre du 21 octobre 2002 avait répondu que :
"Il semble résulter de l'application croisée des articles 16, 16 bis C et 22 que la prise en compte de vingt et un avantages nourriture repose sur l'idée d'une mensualisation des repas pour des salariés à temps plein, ce nombre étant déterminé dans le cas de salariés travaillant à temps partiel en fonction de la présence du salarié au moment des repas. Sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, cette lecture permet de concilier les dispositions conventionnelles tout en respectant le principe d'égalité entre les salariés à temps partiel et les salariés à temps plein».
C'est aussi la position du Ministère du travail qui par circulaire 15-90 du 9 mars 1990, relative au calcul du SMIC dans les hôtels, cafés, restaurants indique que le décompte du nombre de repas, destiné au calcul de l'avantage en nature, est fonction de l'horaire et de la répartition du temps de travail de chaque salarié, c'est-à-dire du nombre de jours travaillés, ces dispositions subordonnant en outre l'obligation de nourrir l'employé à une présence effective de celui-ci pendant les repas ainsi qu'à l'ouverture de l'établissement à la clientèle.
Est dans le même sens le mémoire du Syndicat National de la Restauration Collective du 23 février 2003, portant sur l'impact de l'application de l'article 1er de l'arrêté du 10 décembre 2002 en restauration collective concédée. Ce texte précisant en effet que le nombre forfaitaire de vingt et un repas mensuels concerne les emplois à temps plein, cinq jours par semaine, et non les salariés à temps partiel qui ne peuvent prétendre au même nombre d'avantages.
La première réponse du ministère du travail s'appuie sur le fait que le 1er alinéa de l'article 16 qui définit « le salaire minimum mensuel restauration collective », se réfère à une durée mensuelle de 151,67 heures et à 21 avantages nourriture, tandis que le 2e alinéa précise que pour une durée de travail inférieure à 35 heures, le calcul de ce salaire minimum se fait sur une base prorata temporis du travail effectif.
Ce texte rappelle que pour pouvoir bénéficier des avantages nourriture, le salarié doit remplir cumulativement deux conditions :
- être présent sur les lieux de travail
- être présent au moment des repas.
Au paragraphe 1-2 il en effet indiqué «le SMIC Restauration Collective », il est exposé que le nombre forfaitaire de 21 repas par mois complet est obtenu en prenant en compte un travail sur 5 jours de la semaine. Dans notre cas d'espèce, pour 4 jours de la semaine, le nombre forfaitaire de repas doit être ramené à 16.
Il en résulte que les avantages en nature pouvant bénéficier à un salarié à temps partiel doivent nécessairement être calculés de manière proportionnelle par rapport à ceux dont peut bénéficier un salarié occupant un emploi identique à temps complet.
B) Sur l'indemnité spéciale au titre de l'article
L. 223-15 du Code du travail
l/ Eléments d'information en raison de l'évolution législative.
Plusieurs lois sont intervenues pour fixer le régime juridique de la modulation du temps de travail:
- l'ordonnance n° 82-41 du 16 janvier 1982 a introduit dans le code du travail deux dispositifs de modulation du temps de travail appelés modulation de type 1 et de type 2,
- la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 a créé un troisième dispositif de modulation s'accompagnant d'une réduction du temps de travail et appelé modulation de type 3,
- la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 (dite loi Aubry II sur les 35 heures), relative à la réduction négociée du temps de travail, a supprimé les trois dispositifs de modulation du temps de travail pour les remplacer par un dispositif unique. Le temps partiel annualisé a donc disparu.
Cependant le régime juridique de la modulation issu de la loi du 19 janvier 2000 n'est applicable qu'aux accords conclus depuis le 1er février 2000, date d'entrée en vigueur de la loi. Les accords de modulation conclus avant le 20 janvier 2000 ont été validés par la seconde loi Aubry quel que soit le type de modulation (I, II, III), à la condition qu'ils soient conformes aux textes en vigueur au moment de leur conclusion. Ils continuent toujours à s'appliquer sous l'empire de la législation antérieure.
De même l'ancien régime de l'intermittence issu de l'ordonnance du 11 août 1986 a été abrogé par la loi quinquennale du 20 décembre 1993, mais été maintenu en vigueur par son article 43.
Ceci précisé en ce qui concerne l'indemnité spéciale de l'article
L 223-15 du Code du travail le texte est ainsi rédigé, selon la rédaction applicable de l'ordonnance n° 82-41 du 16 janvier 1982 :
«Lorsque le maintien en activité d'un établissement n 'est pas assuré pendant un nombre de jours dépassant la durée fixée pour la durée des congés légaux annuels, l'employeur est tenu, pour chacun des jours ouvrables de fermeture excédant cette durée, de verser à son personnel une indemnité qui ne peut-être inférieure à l'indemnité journalière de congés payés.
Cette indemnité n 'est pas cumulable avec l'indemnité de congés payés ».
L'employeur est donc tenu de payer une indemnité pour chacun des jours ouvrables de fermeture excédant la durée de congés payés.
2/ Argumentation de ce chef des employeurs
Les salariés qui travaillent dans les cantines scolaires de Cavaillon ont une période de travail interrompue par les différentes périodes de vacances scolaires, et la période non travaillée n'est pas couverte en totalité par l'indemnité de congés payés, aussi pour la partie non indemnisée, les salariés revendiquent l'indemnité prévue par l'article
L 223-15.
Or les contrats de travail à temps partiel liant les parties sont des contrats de travail annualisés et mentionnent une alternance de périodes travaillées et non travaillées réparties sur l'année.
L'article 1er dernier alinéa de l'avenant n° 6 du 1er décembre 1989, repris à l'identique par d'autres avenants postérieurs, stipule que lorsque les entreprises de restauration collective sont dans l'impossibilité de pourvoir des emplois non intermittents pour des salariés du secteur scolaire, du fait de la nature de l'emploi et seulement dans ce cas, elles pourront procéder à des embauches en contrat à durée indéterminée intermittents en application du présent avenant.
L'article 2 définit le travail intermittent comme étant destiné à pourvoir des emplois permanents qui par nature, comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées et uniquement ceux- ci.
Ces emplois sont conformes à la loi du 20 décembre 1993 qui a mis en place le travail à temps partiel annualisé et dont la définition a été la suivante : « Salariés occupés selon une alternance de périodes travaillées et non travaillées dont la durée de travail annuelle est inférieure d'au moins un cinquième à celle qui résulte de l'application sur cette même période de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement diminuée des heures correspondant aux jours de congés légaux ou conventionnels».
La rémunération dans le cadre du travail intermittent est définie à l'article 4 de l'avenant du 14 juin 1993 qui stipule que «la rémunération est mensuelle, payée chaque mois, en fonction du temps de travail effectué dans le mois considéré ou période de paie, une mention indiquant la garantie minimale du nombre d'heures annuelles prévue à l'article 5 sera portée sur le bulletin de paie, à défaut, sur le document annuel prévu au dernier alinéa de l'article 3 selon lequel au début de chaque année scolaire, et en fonction du calendrier des congés scolaires, il sera remis à chaque salarié un document annexé au contrat de travail précisant les dates des périodes pendant lesquelles il sera amené à travailler".
En l'espèce les salariés ont conclu un contrat écrit à temps partiel et ont signé chaque année, lors de la rentrée scolaire de septembre, un avenant au contrat de travail avec la mention «annualisé», avec toutes les mentions obligatoires pour ce type de contrat.
Cet avenant s'est prorogé ainsi jusqu'à la reprise de l'activité par SOGERES le 1er septembre 2003 qui a poursuivi les contrats à l'identique.
Il est de jurisprudence que dans une telle hypothèse, l'indemnité spéciale prévue par les dispositions de l'article
L. 223-15 n'est pas due.
Cass. Soc., 25 Février 2004, n° 01-44.787
Cet arrêt n'a fait que confirmer ce qui avait déjà été jugé à contrario par l'arrêt du 15 janvier 2002 en l'absence de contrat de travail partiel annualisé à durée indéterminée instauré par la loi du 20 décembre 1993, le salarié ne pouvait être privé de l'indemnité de l'article
L 223-15 du Code du Travail.
L'article
L 223-15 du Code du Travail n'est donc pas applicable.
Les salariés demandeurs en refusant de signer les avenants aux contrats annualisés de 1994 établis normalement par SOGERES en septembre 2003 et septembre 2004 se sont mis dans l'illégalité en voulant imposer au nouvel employeur une modification du contrat de travail, tout en s'abstenant en première instance de demander l'application de l'article
L 223-15 à la société SOGERES et n'ont sollicité aucune condamnation de la Société SOGERES sur ce fondement.
Subsidiairement les employeurs soutiennent que si l'on devait considérer l'article
L 223-15 applicable, le nombre de jours dus au titre de l'indemnité spéciale étant de 34 jours, 16 semaines de vacances par an multiple par 4 jours de travail égale 64 jours, or actuellement dans la rémunération annualisée elle paye 30 jours, il resterait donc 34 jours et non 52 jours, comme les salariés le revendiquent.
L'un et l'autre employeur demandent enfin une indemnisation de leurs frais non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 3.000 euros pour chacun.
L'intimée soulève l'irrecevabilité de l'appel, pour défaut de pouvoir du président de l'association, et au fond demande la confirmation du jugement tout en actualisant ses demandes au titre de l'article
L 223-15 du Code du travail, outre l'indemnisation de ses
MOTIFS
S recevabilité de l'appel
Attendu que si selon l'article
120 du Code de procédure civile la régularité de la voie de recours exercée doit être examinée d'office par la Cour, il n'en demeure pas moins que cet examen ne peut porter que sur les pièces figurant au dossier de la procédure et pour les autres celles fournies par les parties; qu'à cet égard il ne résulte des premières aucune irrégularité, et des secondes il apparaît bien que le président de l'association avait reçu le pouvoir du Conseil d'administration de l'association afin de pouvoir interjeter appel du jugement ;
Attendu que l'appel est donc recevable ;
Sur l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que cette affaire a été introduite par la salariée le 30 juillet 2003; que les diligences mises à la charge de l'association par l'arrêt de radiation ayant été accomplies, l'affaire était enrôlée le 27 octobre 2007 avec les conclusions de l'appelante;
Attendu que malgré la formalisation d'un appel incident au greffe, l'intimée n'a jamais conclu ni présenté des moyens pour répliquer à l'argumentation de l'association ; qu'elle a expédié des conclusions par télécopie le 17 mars 2008 ; qu'en l'état du déroulement de cette instance, cette transmission le lundi matin pour une audience fixée au mercredi après midi était manifestement tardive et portait atteinte aux droits tant de l'association appelante que de la société SEGERES en les empêchant de pouvoir en prendre connaissance sans précipitation et de pouvoir y répondre;
Attendu que le conseil de l'intimée a alors indiqué que la procédure étant orale, elle pouvait déposer le jour même de l'audience, le 19 mars, des conclusions comportant des moyens nouveaux, et des prétentions d'actualisation qui sont la simple conséquence de l'écoulement du temps sur le montant de la condamnation au titre de l'article
L 223-15 ;
Attendu, cependant, que lorsque le justiciable est représenté ou assisté par un avocat, ce dernier ne saurait s'affranchir unilatéralement des règles impératives fixées :
- d'une part par la Décision du 12 juillet 2007 portant adoption du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, pris en application de l'article 21-1 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, publiée au journal officiel du 11 août 2007,
- d'autre part par le décret 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif à la déontologie de la profession d'avocat, publié au journal officiel du 16 juillet 2005;
Attendu qu'en effet le premier de ces textes exige dans son article 5, au titre du respect du principe du contradictoire, que l'avocat :
- respecte les droits de la défense et le principe du contradictoire,
- assure la communication mutuelle et complète des moyens de fait, des éléments de preuve et des moyens de droit qui doivent se faire spontanément, en temps utile et par les moyens prévus par les règles de procédure, cette règle s'imposant à l'avocat devant toutes les juridictions, y compris celles où le ministère de l'avocat n'est pas obligatoire et où le principe de l'oralité des débats est de règle,
- mette en œuvre cette communication des moyens de fait et de droit sous forme soit de notices, soit de conclusions, soit de dossier de plaidoirie ;
Attendu que de l'article 16 du second texte découlent les mêmes obligations ;
Attendu qu'enfin ces prescriptions sont liées à la bonne exécution et à l'effet utile des articles 6 et 7 de la directive 98/5/CE, du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise, lesquels déterminant les règles professionnelles et déontologiques applicables dans l'Etat membre d'accueil ;
Attendu que l'avocat de l'intimée, en concluant deux jours seulement avant l'audience pour une affaire dont l'acte introductif remonte à cinq ans, a méconnu toutes les dispositions précédentes, outre celles des articles
15 et
16 du Code de procédure civile ;
Attendu que dès lors le moyen tiré de la procédure orale est donc dépourvu de pertinence ; qu'en cet état seront rejetées les conclusions des 17 mars et 19 mars, ces dernières déposées le jour de l'audience des débats, seule devant être prise en considération l'argumentation invoquée dans les conclusions visées par le greffier lors de l'audience de première instance ;
Sur le rappel de salaire minimum mensuel
Attendu que selon l'article 16 bis de la Convention collective le revenu minimum mensuel, dit RMM, est constitué par trois éléments :
- le salaire de base minimum (SBM) tel qu'il est défini au paragraphe B de l'accord ;
- l'avantage en nature mensuel évalué, quel que soit le nombre de repas consommés, à vingt et une fois le minimum garanti,
- le prorata rapporté au mois des primes contractuelles acquises pendant une année civile et ayant un caractère de salaire (....):
Attendu que cet article stipule aussi que pour les entreprises qui ont une durée de travail inférieure à 151,67 heures par mois, les RMM seront ceux résultant du calcul prorata temporis de la rémunération en espèces (SBM + traction des primes) majoré des avantages en nature, sauf accord d'entreprise ou d'établissement plus favorable ;
Attendu que ce dernier paragraphe, spécifique au temps partiel, n'applique le principe de proportionnalité qu'au revenu minimum mensuel et non à l'avantage en nature qui n'est pas affecté d'une quelconque restriction ; que dès lors la majoration de l'avantage en nature mensuel doit s'entendre forfaitairement, quel que soit le nombre de repas consommés, évalué à vingt et une fois le minimum garanti ;
Attendu que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a alloué un rappel de salaires et des accessoires y afférents à ce titre ;
Sur le rappel de salaires sur le fondement de l'article
L 223-15 du Code du travail
Attendu qu'il résulte de l'examen des contrats de travail produits aux débats par l'association que l'intimée embauchée le 30 mai 1986 a conclu un avenant le 1er septembre 1994 soumettant le régime du contrat de travail à un temps partiel annualisé découlant de la loi de 1993 ;
Attendu que depuis cette date elle a signé les avenants annuels comportant, pour l'année scolaire, les périodes travaillées et celles non travaillées, le nombre de jours de cantine, le nombre de jours fériés, et le nombre de jours de congés, peu important que lors de la survenance du litige elle ait refusé de signer des avenants avec la SOGERES ;
Attendu que selon l'article
L. 212-4-2 du Code du travail, alinéa 4, dans sa rédaction issue des dispositions de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 seule applicable en l'espèce, sont considérés comme salariés à temps partiel les salariés occupés selon une alternance de périodes travaillées et non travaillées dont la durée de travail annuelle est inférieure d'au moins un cinquième à celle qui résulte de l'application sur cette même période de la durée légale du travail ou de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise diminuée des heures correspondant aux jours de congés légaux ou conventionnels ;
Attendu que selon l'article
L. 212-4-3 du Code du travail, issu de la même loi, le contrat de travail des salariés à temps partiel mentionne notamment la qualification, les éléments de la rémunération et, par dérogation aux articles L. 143-2 et L. 144-2, les modalités de calcul de la rémunération mensualisée lorsque le salarié est occupé à temps partiel sur une base annuelle ;
Attendu que dès lors dans cette hypothèse le contrat étant soumis à un régime de temps partiel annualisé les dispositions de l'article
L. 223-15 du Code du travail ne sont pas applicables ;
Attendu que de ce chef le jugement doit être infirmé ;
Sur les autres demandes
Attendu que les premiers juges ont fait, en des motifs pertinents que la Cour adopte, une juste appréciation des faits de la cause ainsi que des moyens et prétentions des parties, auxquels ils ont directement répondu et qui ne se sont pas modifiés depuis lors en déboutant la salariée de ses autres demandes;
Attendu que selon l'article 26 de la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 le Code de procédure civile, institué par le décret n° 75-1123 du 5 décembre 1975 devient le Code de procédure civile ;
Attendu qu'il paraît équitable que l'association participe à concurrence de 120 euros aux frais exposés et non compris dans les dépens tant pour la première instance que pour celle d'appel;
Vu l'article
696 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Déclare l'appel recevable,
Déclare irrecevables les conclusions déposées par l'intimée les 17 et 19 mars 2008,
Réforme le jugement déféré et statuant à nouveau,
Rejette la demande de rappel d'indemnité compensatrice journalière fondée sur l'application de l'article
L 223-15 du Code du travail,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article
700 du Code de procédure civile pour la première instance,
Confirme pour le surplus,
Condamne l'association à payer à l'intimée la somme de 120 euros pour les frais exposés en cause d'appel en application de l'article
700 du Code de procédure civile,
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens d'appel.
Arrêt qui a été signé par Monsieur TOURNIER Président et par Madame SIOURILAS Greffier, présente lors du prononcé.