Cour d'appel de Rennes, Chambre 8, 14 octobre 2022, 19/06806

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Texte intégral

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT

N°438 N° RG 19/06806 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QFRO Mme [T] [H] C/ SAS ADREXO Infirmation Copie exécutoire délivrée le : à : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2022 COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre, Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller, Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère, GREFFIER : Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 1er Juillet 2022 devant Madame Gaëlle DEJOIE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial En présence de Madame [Z] [U], Médiatrice judiciaire ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats **** APPELANTE : Madame [T] [H] née le 14 Janvier 1956 demeurant [Adresse 1] [Localité 3] Représentée par Me Hugues SENLECQ de la SELAS ADEQUATION, Avocat au Barreau de DUNKERQUE (bénéficiaire d'une aide juridictionnelle totale numéro 2019/013690 du 29/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES) INTIMÉE : La SAS ADREXO prise en la personnen de son représentant légal et ayant son siège social : [Adresse 4] [Adresse 4] [Localité 2] Représentée par Me Marie-Noëlle COLLEU, Avocat au Barreau de RENNES, substituant à l'audience Me Stéphanie BERTRAND de la SELARL STEPHANIE BERTRAND AVOCAT, Avocat au Barreau de BORDEAUX Mme [T] [H] a été embauchée par la SAS ADREXO selon contrat à durée indéterminée du 31 mars 2014 à temps partiel modulé, en qualité de Distributrice, classification 1.1. Le 23 février 2015 Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Lorient aux fins de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein et condamner la SAS ADREXO au paiement des rappels de salaire subséquents, outre diverses demandes de dommages-intérêts. Au 1er octobre 2015, la partie demanderesse n'ayant pas conclu dans le délai imparti, l'affaire a été renvoyée à une nouvelle audience du bureau de jugement fixée au 28 avril 2016. Lors de cette audience, en l'absence de diligence de la partie demanderesse, non comparante, l'affaire a été radiée ; le rétablissement de l'affaire étant subordonné à la justification de la transmission des pièces et des conclusions du demandeur par un dépôt au greffe d'un bordereau de communication de pièces. Le 28 février 2018, Mme [H] a quitté les effectifs de la SAS ADREXO en raison de son départ à la retraite. La procédure a été reprise le 2 mai 2018, par Mme [H] qui a déposé ses conclusions tendant notamment à voir requalifier son contrat à temps partiel modulé en contrat à temps plein et condamner la SAS ADREXO à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps plein pour la période d'avril 2014 à mars 2018 et de congés payés. La cour est saisie d'un appel régulièrement formé par Mme [H] le 11 octobre 2019 du jugement du 5 septembre 2019 par lequel le conseil de prud'hommes de Lorient a': ' Déclaré l'instance éteinte par l'effet de la péremption, ' Débouté la SAS ADREXO de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ' Laissé les éventuels dépens de l'instance à la charge de Mme [H]. Vu les écritures notifiées par voie électronique le 20 juin 2022, suivant lesquelles Mme [H] demande à la cour de : ' Infirmer le jugement entrepris ayant dit que l'affaire était périmée, Statuant à nouveau, ' Requalifier le contrat à temps partiel modulé en contrat à temps plein, ' Condamner la SAS ADREXO à verser à Mme [H] les sommes suivantes : - 42.689 € à titre de rappel de salaire pour la période d'avril 2014 à mars 2018, - 4.268 € au titre de l'indemnité de congés payés afférente, - 2.816 € à titre de rappel de prime d'ancienneté, - 281 € au titre de l'indemnité de congés payés afférente, ' Dire que les condamnations seront assorties de l'intérêt au taux légal à compter de la date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, ' Ordonner à la SAS ADREXO de délivrer à Mme [H] des bulletins de salaire et une attestation Pôle Emploi rectifiés dans les 8 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous peine d'une astreinte de 50 € par document et par jour de retard passé ce délai, ' Se réserver la liquidation de l'astreinte sur simple demande de la salariée, ' Condamner la SAS ADREXO à verser à Mme [H] la somme de 4.000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, outre les entiers dépens et notamment les frais éventuels de l'exécution forcée de l'arrêt à intervenir. Vu les écritures notifiées par voie électronique le 22 juin 2022, suivant lesquelles la SAS ADREXO demande à la cour de : A titre principal, ' Rejeter les pièces et conclusions communiquées le 20 juin 2022 par Mme [H], A titre subsidiaire, ' Prononcer le rabat de la clôture, ' Reporter l'audience de plaidoiries fixée au 1er juillet 2022, A titre infiniment subsidiaire, ' Prononcer le rabat de la clôture. La clôture a été prononcée par ordonnance du 23 juin 2022. Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.

MOTIVATION

DE LA DECISION Sur la demande de rejet de pièces et écritures tardives Vu les articles 15 et 135 du code de procédure civile, Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 23 juin 2022, Vu les conclusions notifiées le 22 juin 2022 suivant lesquelles la SAS ADREXO sollicite à titre principal au visa de l'article 15 et 135 du code de procédure civile le rejet des pièces adverses n°86 à 108 ainsi que des dernières écritures tardives de Madame [H] en date du 20 juin 2022'; Mme [H], appelante, a fait notifier par voie électronique, le 20 juin 2022 des écritures accompagnées de nouvelles pièces numérotées de 86 à 103, soit 22 nouvelles pièces et des conclusions comportant 4 pages supplémentaires relatives aux plannings, à des feuilles de route, et la modulation du temps de travail et à la péremption de l'instance soulevée. Contrairement à ce que soutient la Société, les pages d'écritures supplémentaires constituent une réponse aux conclusions de l'intimée mais ne modifient pas la structure des prétentions de l'appelante ou de leurs motifs, les nouvelles pièces produites ne portant quant à elle que sur des décisions de jurisprudence diverses'; dans ces conditions la société ne peut prétendre s'être trouvée dans l'impossibilité d'examiner les pièces complémentaires adverses et d'y apporter réponse dans les délais impartis du fait de cette communication tardive. Dans ces circonstances l'intimée, qui a pu matériellement prendre connaissance des nouveaux éléments produits par la partie appelante et le cas échéant y répondre avant la clôture, n'est pas fondée à solliciter le rejet des pièces et écritures susvisées. Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture Vu les articles 783, 784 et 907 du code de procédure civile, Il ressort de ce qui précède qu'il n'est justifié par la société intimée d'aucune cause de révocation de l'ordonnance de clôture, de sorte qu'il ne sera pas fait droit à cette demande. La SAS ADREXO, dans ses écritures notifiées le 22 juin 2022, soit la veille de l'ordonnance de clôture, intitulées «'de procédure'» mais adressées à la Cour, ne formule que les prétentions ci-dessus exposées relatives à titre principal au rejet des pièces et écritures adverses et à titre subsidiaire et infiniment subsidiaire à la révocation de l'ordonnance de clôture, sans aucune demande ni aucun moyen de fond, même à titre subsidiaire. Par application de l'article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. À défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. La cour ne peut que constater que la société ADREXO, qui dans ses dernières conclusions à la Cour ne reprend aucune des prétentions qu'elle avait développées dans ses écritures précédentes, est réputée les avoir abandonnées. Sur la péremption de l'instance retenue par le conseil de Prud'hommes Vu l'article 386 du code de procédure civile'; Vu l'article R.1452-8 du code de travail abrogé par l'article 8 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, applicable à la présente instance introduite par Mme [H] devant le conseil de prud'hommes de Nantes avant l'entrée en vigueur du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016'; En l'espèce, la décision de radiation a été rendue le 28 avril 2016 et adressée par courrier simple à Mme [H], qui n'était ni présente ni représentée à l'audience, de sorte que la péremption ne peut être opposée à l'appelante à défaut de date certaine quant au point de départ du délai de péremption d'instance. Le jugement sera réformé sur ce point, les demandes de Mme [H] étant recevables. Sur la requalification du contrat de travail Au soutien de sa demande de requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps plein, Mme [H] soutient essentiellement que : - Le contrat de travail à temps partiel modulé faisant état d'une durée annuelle contractuelle moyenne de référence et d'une durée indicative mensuelle moyenne de travail, ne respecte pas les dispositions légales applicables au temps partiel, résultant des articles L. 3123-14 et L. 3123-25 (nouveaux L. 3123-6 et L. 3123-22) du code du travail, - Le contrat de travail et les avenants n'ont pas précisé la durée mensuelle ou hebdomadaire de référence, - À de multiples reprises, Mme [H] n'a pas été destinataire de ses programmes indicatifs de modulation, ce qui ressort également des pièces produites par l'employeur, - Le délai de prévenance de sept jours, pouvant être réduit à trois jours sous certaines conditions, n'a jamais été respecté, de sorte qu'il ignorait la charge de travail qu'il aurait d'une semaine sur l'autre, - Mme [H] n'a jamais été consultée sur ses éventuels jours de disponibilité, encore moins sur ceux de la semaine suivante, - L'employeur n'a versé qu'une infime partie des feuilles de route sur la période d'avril 2014 à mars 2018 et y a indiqué des jours de disponibilité sans s'être concerté avec elle, - Mme [H] restait ainsi à l'entière disposition de son employeur et ne connaissait nullement à l'avance son rythme de travail. En droit, la modulation annuelle du travail à temps partiel était régie par les anciens articles L.3123-25 et suivants du code du travail abrogés par la loi n°2008-789 du 20 août 2008, laquelle a toutefois disposé en son article 20 V que les accords collectifs conclus sur la base des dispositions légales antérieures restaient en vigueur. En sa rédaction antérieure à la loi n°2008-789 du 20 août 2008, l'article L.3123-14 était ainsi rédigé : 'Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne : 1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application des articles L. 3123-25 et suivants, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois'; 2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification'; 3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié'; 4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.' En application de l'article L. 3123-25 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n°2008-789 du 20 août 2008 : 'Une convention ou un accord collectif de travail étendu ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l'année à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas la durée stipulée au contrat, que cette convention ou cet accord prévoit : 1° Les catégories de salariés concernés, 2° Les modalités selon lesquelles la durée du travail est décomptée, 3° La durée minimale de travail hebdomadaire ou mensuelle, 4° La durée minimale de travail pendant les jours travaillés. Une convention de branche ou un accord professionnel étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir plus d'une interruption d'activité ou une interruption supérieure à deux heures, 5° Les limites à l'intérieur desquelles la durée du travail peut varier, l'écart entre chacune de ces limites et la durée stipulée au contrat de travail ne pouvant excéder le tiers de cette durée. La durée du travail du salarié ne peut être portée à un niveau égal ou supérieur à la durée légale hebdomadaire, 6° Les modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié, 7° Les conditions et les délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, 8° Les modalités et les délais selon lesquels ces horaires peuvent être modifiés, cette modification ne pouvant intervenir moins de sept jours après la date à laquelle le salarié en a été informé. Ce délai peut être ramené à trois jours par convention ou accord collectif de branche étendu ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement.' La convention collective de la distribution directe, datée du 9 février 2004 et s'inscrivant ainsi dans le cadre de ces dispositions légales antérieures à la loi n°2008-789 du 20 août 2008, prévoit à l'article 1.2 du chapitre IV le recours au temps partiel modulé ainsi que la période d'appréciation de la variation de la durée du travail : 'Les entreprises de distribution peuvent avoir recours au travail à temps partiel modulé pour les salariés de la filière logistique. Aucun contrat de travail ne peut avoir une durée de travail inférieure à 2 heures quotidiennes, 6 heures hebdomadaires et 26 heures mensuelles (hors modulation). Compte tenu des spécificités des entreprises, la durée du travail hebdomadaire ou mensuelle des salariés à temps partiel peut être modulée sur l'année. Ainsi, la durée du travail pour les salariés à temps partiel peut varier au-delà ou en deçà de la durée stipulée au contrat, à condition que, sur 1 an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas en moyenne cette durée contractuelle. La durée hebdomadaire ou mensuelle du travail peut varier au-dessous ou au-dessus de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat dans la limite de 1/3 de cette durée. La durée hebdomadaire du travail du salarié ne peut être portée à un niveau égal ou supérieur à un temps plein à l'issue de la période de modulation. Un récapitulatif mensuel des heures travaillées est annexé au bulletin de paie. Le programme indicatif de répartition de la durée du travail et les horaires de travail sont communiqués par écrit aux salariés concernés, au début de chaque période de modulation, selon les modalités définies au sein de chaque entreprise. Sous réserve d'un délai de prévenance de 7 jours ouvrés, délai pouvant être exceptionnellement réduit à 3 jours ouvrés en cas d'accord d'entreprise prévoyant une contrepartie pour les salariés, les entreprises ou les établissements peuvent modifier la durée de l'horaire de travail ainsi que ses modalités de répartition initiales. Pour faire face à des situations imprévues ou des contraintes exceptionnelles, ce délai peut être réduit avec l'accord du salarié dans les cas suivants : - surcroît temporaire d'activité'; - travaux urgents à accomplir dans un délai limité'; - absence d'un ou de plusieurs salariés. Le temps partiel modulé n'est pas applicable aux salariés en contrat à durée déterminée d'une durée inférieure à 1 an.' L'article 2.1 du même texte prévoit la possibilité pour le distributeur engagé selon un contrat à temps partiel modulé d'effectuer, avec son accord, des prestations additionnelles: 'Le contrat peut prévoir, dans le cadre d'annexes temporaires au contrat de travail, la faculté offerte, le cas échéant, au distributeur de réaliser d'autres distributions pour le compte de l'entreprise. Dans ce cadre, le distributeur indique ses jours de disponibilité dans la semaine. En fin de période annuelle de modulation, si la durée de travail effectif n'atteint pas la durée contractuelle du fait que l'entreprise n'a pas fourni au distributeur une quantité de travail suffisante (situation de sous modulation) l'entreprise est tenue de régulariser la situation en payant le différentiel de salaire dans le mois qui suit la fin de période de modulation, après avoir respecté la procédure de révision prévue à l'article 2.2.3 suivant.' L'article 2.2.3 précise que : 'Le décompte du temps de travail effectué par chaque salarié est récapitulé grâce aux feuilles de route ou bons de travail et application des dispositions de la grille de correspondance de la présente convention (annexe III). Les entreprises doivent mettre en place au moins une fois par an une procédure de révision du niveau des volumes de distribution évalués en référencements horaires et qui correspondent aux rémunérations contractuellement garanties à chaque distributeur employé dans le cadre d'un contrat à temps partiel modulé. Cette procédure doit s'appliquer à tous les salariés travaillant à temps partiel modulé présents durant les 12 mois écoulés précédant la date de révision. Lors de cette révision, l'activité de chaque distributeur est analysée en fonction de la charge de travail moyenne hebdomadaire accomplie durant l'année écoulée, dans le cadre de la modulation (hors prestations additionnelles qui reposent sur le strict volontariat et qui font l'objet d'une prise en compte particulière). Il sera alors proposé au distributeur: - soit de redéfinir cette durée en prenant en compte la durée moyenne découlant des distributions effectuées au cours de la période de modulation (hors prestations additionnelles qui repose sur le strict volontariat, cf. ci-après)'; - soit de maintenir la durée prévue au contrat. Dans ces deux cas, le distributeur dispose d'un délai de réflexion de 15 jours pour donner sa réponse. En cas de refus, le distributeur conserve, pour l'année à venir, la durée contractuelle prévue à son contrat de travail à temps partiel modulé. Toute proposition de réduction de la durée contractuelle garantie par l'employeur est constitutive d'une modification d'un élément essentiel du contrat de travail.' L'accord d'entreprise de la SAS ADREXO, daté du 11 mai 2005, comporte les précisions suivantes : '- 1.9 Durée annuelle de référence garantie au titre du temps partiel modulé : La durée annuelle de référence prévue par le contrat de travail à temps partiel modulé s'entend d'une année glissante comportant une moyenne de 52 semaines civiles et douze périodes mensuelles de paye. Cette durée contractuelle varie prorata temporis en fonction du nombre de semaines incluses dans la période de référence annuelle définie par le calendrier individuel propre à chaque salarié. Elle est décomptée prorata temporis des semaines travaillées, en fonction de la présence à l'effectif durant l'année de référence pour les salariés quittant l'entreprise en cours d'année ; - 2.1 Durée du travail d'un distributeur à temps partiel modulé : Sauf exception, les distributeurs sont engagés par contrat de travail à temps partiel modulé, dans le respect des dispositions des articles 1.2 et 2.2.3 du Chapitre IV de la Convention Collective Nationale applicable et du présent accord. La durée du travail de référence du distributeur sera fixée sur une base annuelle. Cette base annuelle proratée (sic), selon les définitions données ci-dessus, constitue la garantie contractuelle de travail et de rémunération apportée par l'entreprise. Pour lui permettre de planifier son activité, le distributeur bénéficie d'un planning indicatif individuel annuel établi par l'employeur ainsi qu'il est dit au point 1.15 ci-dessus, qui lui est notifié par écrit 15 jours avant le début de sa période de modulation sauf à l'embauche où le planning lui est présenté par écrit avec son contrat de travail. La durée du travail de référence prévue mensuellement ne peut varier chaque mois qu'entre une fourchette haute et une fourchette basse, d'un tiers de la durée moyenne mensuelle de travail calculée sur la période annuelle de modulation. Le distributeur bénéficie d'une garantie de travail minimale par jour, semaine et mois travaillés conformes à celles prévues par la Convention Collective de Branche, soit au moins 2 heures par jour, 6 hebdomadaires et 26 heures par mois, qui seront respectées pour l'établissement du planning indicatif individuel. Ce planning individuel sera révisable à tout moment par l'employeur, moyennant une information donnée au salarié au moins sept jours à l'avance, ou au moins trois jours à l'avance en cas de travaux urgents ou surcroît d'activité moyennant, en contrepartie, aménagement de l'horaire de prise des documents si le salarié le souhaite, ou avec un délai inférieur avec l'accord du salarié matérialisé par la signature de la feuille de route, notamment en cas de nécessité impérative de service ou de surcroît exceptionnel d'activité ou de remplacement d'un salarié absent. Heures complémentaires à durée déterminée : Si la durée de référence d'une distribution prévue dans le planning individuel de la modulation et exécutée sur les secteurs habituels de distribution du salarié ou sur les secteurs qu'il accepte de distribuer, excède de 10 % au maximum la durée prévue au planning individuel indicatif de modulation, le distributeur pourra, après son accord express matérialisé par la signature de la feuille de route, réaliser des heures complémentaires dans la limite de 10 % de la durée prévue au calendrier avec un plafond de trois heures par semaine rapportées à la durée mensuelle du calendrier. Les parties conviennent que cette durée excédant la durée prévue au planning individuel constitue dès lors qu'elle est acceptée par le salarié un avenant provisoire au contrat de travail qui n'a pas vocation à entrer dans le décompte de la modulation, ni dans l'assiette de révision de la durée annuelle de travail de référence. Les parties reconnaissant la réelle autonomie et liberté d'organisation laissée au distributeur, dans le cours de son activité, déclarent qu'il n'y a pas lieu d'imposer aux distributeurs des coupures ou une durée de coupure de son activité, celui-ci s'engageant à respecter les clauses de la Convention Collective de Branche applicable.' S'agissant plus particulièrement des prestations additionnelles, l'article 1.19 du même texte précise : '- 1.19 Prestations additionnelles Prestation proposée, sur volontariat du distributeur, pour être exécutée au-delà des prévisions maximales de variation du calendrier individuel de distribution sur des secteurs vacants ou confiés habituellement à d'autres salariés ou pour surcroît exceptionnel d'activité. L'accord du salarié est matérialisé par la signature d'une feuille de route spécifique aux prestations additionnelles qui comporte mention de la majoration due pour la période de référence allouée à la prestation en cause.' La convention collective et cet accord d'entreprise, tous deux antérieurs à la loi n°2008-789 du 20 août 2008, demeurent applicables même après l'entrée en vigueur de cette loi par application de son article 20 précité'; ils ne peuvent toutefois déroger aux dispositions d'ordre public des articles L.3123-14 et L.3123-25 5° du code du travail en vigueur au moment de leur signature. Dans ce cadre, la convention organisant le temps partiel modulé prévoit les limites à l'intérieur desquelles la durée du travail peut varier, l'écart entre chacune de ces limites et la durée stipulée au contrat de travail ne pouvant excéder le tiers de cette durée'; toutes les heures effectuées, qu'elles soient imposées par l'employeur ou prévues par avenant au contrat à temps partiel en application de l'accord collectif, doivent être incluses dans le décompte de la durée de travail. En cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail lui sont notifiés par écrit, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur. En l'espèce, le contrat de travail conclu le 31 mars 2014 par la SAS ADREXO avec Mme [H] (pièce n°47 de l'appelante) précise en son article 4 relatif à la durée du travail: '- 1 La durée annuelle contractuelle de travail est définie ci-dessus pour une moyenne de 52 semaines ; cette durée contractuelle varie prorata temporis en fonction du nombre de semaines incluses dans la période de référence annuelle définie par le planning. Elle est aussi décomptée prorata temporis en fonction de la présence à l'effectif durant l'année de référence. Une année complète de référence comporte douze périodes mensuelles de paye. - 2 La durée mensuelle moyenne de travail est définie ci-dessus à titre indicatif. Cette durée peut varier suivant le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle de paye inscrite au planning. Elle est ensuite modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale du tiers. - 3 Le salarié sera rémunéré chaque mois sur la base des durées de travail inscrites sur les feuilles de route des distributions effectuées durant la période mensuelle de paye correspondante ce qu'il accepte expressément. - 4 Le(s) distributions sont réalisées à des jours fixés par le responsable du dépôt en accord avec le salarié parmi les jours de disponibilité que le salarié communique à sa discrétion à son embauche ou dans les conditions visées ci-dessous. - 5 Par ailleurs, d'éventuelles prestations additionnelles pourront être proposées au salarié parmi les jours de disponibilité complémentaire(s) qui existeraient le cas échéant. - 6 Les jours de disponibilité seront communiqués à l'entreprise par le salarié et pourront être modifiés d'un commun accord entre les parties et à l'initiative de l'une ou l'autre d'entre elles. - 7 La durée du travail du salarié variera dans les conditions et selon les modalités définies par la convention collective applicable et en fonction d'un planning annuel indicatif individuel fixé par l'employeur et porté à la connaissance du salarié 7 jours avant sa première mise en 'uvre sauf délai plus court donné avec l'accord du salarié. Ce planning sera révisable par l'employeur moyennant communication donnée au salarié au moins trois jours à l'avance ou moins avec l'accord du salarié matérialisé par la signature de la feuille de route, notamment en cas de nécessité impérative de service, absence d'un distributeur ou surcroît exceptionnel d'activité. La durée préétablie par la feuille de route correspondant aux prestations prévues au planning pourra le cas échéant inclure une durée complémentaire de travail de 10% si cela s'avère nécessaire pour réaliser la distribution notamment sur les secteurs habituels du salarié. - 8 Le salarié reconnaît que l'employeur ne lui impose pas d'horaires de travail. Il déclare vouloir exécuter son travail dans une complète autonomie d'organisation de son travail sous réserve de respecter le délai maximum qui lui serait alloué pour réaliser la distribution et les consignes de qualité et de sécurité prescrites par la société. - 9 Le salarié reconnaît être informé que l'autonomie et la liberté d'organisation dont il bénéficie permettent, en accord avec la convention collective, de remplir les exigences de l'article L.212-l-1 du code du travail et des décrets D.212-7 à 24 relatifs à la mesure et au contrôle du temps et des horaires de travail. Les parties conviennent que les conditions d'exécution des prestations contractuelles telles que précisées au présent article constituent un élément essentiel du contrat de travail pour chacune des deux parties.' L'article 5 du même contrat pose que : 'Au-delà du plafond de modulation du tiers sur le mois courant, les parties reconnaissent la possibilité, après accord du salarié, de procéder à des prestations de travail additionnelles au présent contrat, dans les limites posées par la convention collective de branche'. Ce contrat mentionne une 'durée annuelle contractuelle moyenne de référence' fixée à 416 heures de travail et une 'durée indicative mensuelle moyenne de travail variable selon le planning' de 34,67 heures. Un avenant signé le 15 septembre 2014 par Mme [H] porte la 'durée annuelle contractuelle moyenne de référence' à 566 heures de travail et la 'durée indicative mensuelle moyenne de travail variable selon planning' à 56,33 heures. Mme [H] fait observer qu'elle n'a reçu aucun programme de modulation pour la période comprise entre les mois de mai 2015 et mai 2017'; elle se réfère aux pièces n°20 et 21 et à la pièce n°30 de la SAS ADREXO dont le «'Récapitulatif individuel de modulation'» n'a selon elle aucun rapport avec le planning de modulation qui doit être notifié chaque année par écrit au salarié. La SAS ADREXO, ainsi qu'exposé ci-dessus, ne se défend pas de ce manquement à l'application des dispositions conventionnelles précitées et les pièces produites ne justifient pas qu'un planning était adressé à Mme [H] sur la période des 25 mois dont la salariée indique qu'ils n'étaient pas couverts. En outre, aucun document versé aux débats n'a précisé les jours de disponibilité de la salariée ni apporté de précision quant à la forme prise par le choix qu'en aurait fait la salariée ; ainsi la SAS ADREXO ne justifie pas que les jours de disponibilité de la salariée auraient bien été convenus d'un commun accord avec Mme [H], faute d'écrit permettant de l'établir au-delà du seul constat de l'absence d'observations écrites par la salariée. Mme [H] relève en outre que le contrat de travail modifié par avenant précité ne mentionnait qu'une valeur indicative mensuelle moyenne de travail pouvant varier selon les prévisions du planning annuel'alors qu'une telle mention «'indicative'» n'équivaut pas à la fixation de la «'durée mensuelle de travail de référence'» dont dépend la validité du contrat de travail à temps partiel modulé en application des dispositions susvisées des articles L.3123-14 et L.3123-25 du code du travail. Ainsi sur le contrat la seule mention d'une durée indicative mensuelle moyenne définie à titre indicatif et susceptible de varier en fonction du planning annuel ne satisfait pas à l'exigence de la mention d'une durée hebdomadaire ou mensuelle de référence. Il est donc établi que ne sont pas réunies les conditions légales et conventionnelles du recours au contrat de travail à temps partiel modulé. Le contrat de travail de Mme [H] est, en conséquence, présumé à temps complet, sauf pour l'employeur à démontrer que la salariée n'était pas dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail et n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur. Au vu des éléments qui précèdent et à défaut d'établir que la salariée recevait ses feuilles de route avec un délai de prévenance suffisant, le SAS ADREXO ne démontre pas que l'appelante, dont la durée du travail variait dès les premiers mois de son embauche, n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et n'avait pas de ce fait à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, ni même que cette situation aurait évolué au cours de l'exécution du contrat de travail en fonction de différents avenants dont aucun n'apportait d'autres garanties quant à la prise en compte de ses disponibilités. Dans ces circonstances, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens développés par la salariée, le contrat de travail de Mme [H] doit être requalifié en contrat à temps plein. Le jugement entrepris sera donc infirmé à ce titre. Sur le montant du rappel de salaire Compte tenu des salaires qui lui ont été versés, il sera alloué à la salariée la somme non autrement contestée de 42.689 € a titre de rappel de salaire pour la période d'avril 2014 à mars 2018 outre la somme de 4.268 € au titre de l'indemnité de congés payés afférente. La SA ADREXO sera condamnée à lui payer ces sommes. Sur le rappel de prime d'ancienneté Mme [H], au regard de ce qui précède, est fondée à solliciter le rappel de prime prévue par la convention collective de la distribution directe sur la base des salaires qu'aurait dû lui payer la SAS ADREXO au titre d'un contrat à temps complet. La SAS ADREXO sera condamnée à lui verser à ce titre la somme de 2.816 € outre 281 € au titre des congés payés afférents. Sur les intérêts Les condamnations seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes. Sur la remise des documents sociaux La demande de remise de documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision est fondée en son principe. Il conviendra d'y faire droit, sans que le prononcé d'une astreinte soit cependant nécessaire pour en assurer l'exécution. Sur les frais irrépétibles L'équité commande de condamner la SAS ADREXO à indemniser Mme [H] de ses frais irrépétibles ainsi qu'il est dit au dispositif

PAR CES MOTIFS

LA COUR, Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe, Rejette la demande de la SAS ADREXO tendant au rejet des dernières écritures de Mme [H] et de ses pièces n°86 et suivantes'; Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture'; Infirme le jugement du Conseil de prud'hommes de LORIENT en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la SAS ADREXO de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile'; Statuant à nouveau, Requalifie le contrat de travail du 31 mars 2014 liant Mme [H] à la SAS ADREXO en contrat à temps plein, Condamne la SAS ADREXO à verser à Mme [H] les sommes de': - 42.689 € in titre de rappel de salaire pour la période d'avril 2014 à mars 2018, - 4.268 € au titre des congés payés afférents, - 2.816 € à titre de rappel de prime d'ancienneté, - 281 € au titre des congés payés afférents, Rappelle que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes, Ordonne à la SAS ADREXO de délivrer à Mme [H] des bulletins de salaire et une attestation pôle emploi rectifiés'; Condamne la SAS ADREXO à verser à Mme [H] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile'; Condamne la SAS ADREXO aux entiers dépens d'instance et d'appel'; Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires. LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.