Tribunal de grande instance de Paris, 11 mars 2016, 2014/05716

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2014/05716
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : M
  • Classification pour les marques : CL09 ; CL16 ; CL42
  • Numéros d'enregistrement : 582585
  • Parties : MICROCHIP TECHNOLOGY Inc; (États-Unis) ; MICROCHIP TECHNOLOGY SARL / ITS SARL

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 11 mars 2016 3ème chambre 2ème section N° RG : 14/05716 Assignation du 09 avril 2014 DEMANDERESSES Société MICROCHIP TECHNOLOGY INC. 2355 West Chandler Blvd. Chandler ARIZONA (USA 85224-6199) (USA) Société MICROCHIP TECHNOLOGY SARL [mmeuble Mac Kinley [...] – LP976 Les Conquérants 91976 COURTABOEUF- CEDEX représentées par Maître Diego DE LAMMERVILLE du PARTNERSHIPS CLIFFORD C EUROPE L, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #K0112 DÉFENDERESSE Société ITS SARL [...], Europarc 94000 CRETEIL représentée par Me Paul ZEITOUN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1878 COMPOSITION DU TRIBUNAL François A 1er Vice-Président Adjoint Françoise B, Vice-Président Julien S, Vice-Président assistés de Jeanine R, faisant fonction de Greffier DEBATS À l'audience du 04 février 2016, tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société Microchip Technology Inc (ci-dessous Microchip Inc) se présente comme étant un fabricant de composants et d'équipements électroniques et de télécommunication, titulaire de la marque figurative communautaire enregistrée sous le numéro n°582585 déposée le 28 juillet 1997 en classes 9 (notamment "équipements pointe traitement de l'information et les ordinateurs"), 16 (notamment " machines à écrire et articles de bureaux") et 42 (notamment "services de conseil, conception, tests, recherche et assistance, tous liés à l'informatique et à la programmation informatique ; recherche et développement de matériel informatique et de logiciels ; services technologiques concernant les ordinateurs"), marque sous laquelle elle commercialise certains de ses produits. La société Microchip Technology (ci-après Microchip France), filiale de la société Microchip Inc, distribue en France les produits fabriqués par la société Microchip Inc, notamment via un site internet éponyme, aux côtés de dix autres distributeurs agréés, référencés sur le site internet de Microchip Inc. La société I.T.S. se présente comme étant un intermédiaire du commerce en composants électroniques qui importe ses produits depuis tous les continents, et notamment depuis les continents européens et asiatiques et vend ensuite, en gros et demi-gros, les produits importés depuis l'étranger sur le territoire national de la république française. Par courrier adressé à "CLIFFORD C L" (mandataire en France des sociétés MICROCHIP) en date du 5 mars 2014, la direction régionale des douanes et droits indirects de R FRET l'informait du fait qu'« A l'occasion d'un contrôle, (s)es services ont constaté la présence de vingt-six mille quarante (26040) composants électroniques qui semblent contrefaire la marque figurative « MICROCHIP » ». Ces produits ont été mis en retenue communautaire. Répondant à la demande de communication des informations prévues par le règlement UE n°608/2013 du 12 juin 2013 formée par CLIFFORD C L, les services des douanes communiquaient par la suite les informations concernant l'expéditeur des marchandises (la société JIEZHICHUANG 3F311 BULDING 7-3 GUANDONG SCIENCE PARK EASTLAKE DEVELOPMENT ZONE WUHAN CHINA), leur provenance (HONG KONG), et leur destinataire (la société ITS située [...]. Europarc - 94000 CRETEIL). Ainsi informées du fait que la société ITS ferait usage de sa marque figurative communautaire, les sociétés Microchip ont, selon acte d'huissier en date du 9 avril 2014. fait assigner la société ITS devant le tribunal de grande instance de PARIS en contrefaçon de marque et concurrence déloyale aux fins d'obtenir, outre des mesures d'interdiction sous astreinte et de publication, réparation de leurs préjudices et paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire. Elles ont fait procéder le 11 avril 2014, suivant autorisation du président de ce tribunal du 10 avril 2014, à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la direction régionale des douanes et droits indirects de Roissy Fret dont il ressort que les 26040 composants électroniques saisis reproduiraient la marque figurative communautaire n°582585 arguée de contrefaçon. Par notification de ces mêmes services des douanes du 9 mars 2015, la société Microchip Inc. a été informée de ce qu'un lot de 1.000 composants électroniques présumés contrefaire sa marque faisait également l'objet d'une mise en retenue communautaire. Le 12 mars 2015, la société Microchip Technology Inc. a adressé une demande de levée du secret professionnel au bureau des douanes de R Charles de Gaulle. Les douanes de R Charles de Gaulle ont ainsi révélé l'identité de l'importateur des marchandises litigieuses (la société ITS), et la provenance desdites marchandises (Chine). Les sociétés Microchip ont ainsi assigne le 23 mars 2015 la société ITS devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marque et actes de concurrence déloyale commis à leur préjudice, aux fins notamment d'indemnisation des préjudices en résultant. Après y avoir été autorisée le 13 mars 2015, la société Microchip Technology Inc. a fait procéder : -le 19 mars 2015 à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la direction régionale des douanes et droits indirects de Roissy Fret (le procès-verbal de saisie-contrefaçon confirmant la retenue de 1.000 composants électroniques reproduisant ladite marque litigieuse), - le 13 avril 2015 à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société ITS (les bons de commandes saisis et joints au procès-verbal de saisie-contrefaçon faisant état d'au moins 31.410 composants électroniques commandés auprès d'exportateurs étrangers dont il est indiqué qu'ils reproduisent la marque en cause). Par ordonnance du juge de la mise en état en date du 11 juin 2015, la jonction des procédures enrôlées sous les numéros d'inscription au répertoire général 14/05716 et 15/05855 a été ordonnée. Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 7 octobre 2015, les sociétés Microchip Technology Inc. et Microchip Technology SARL demandent au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au visa notamment des articles L.712-2, L.713-2, L.713-3 et L.716-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, du Règlement (CE) n°207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire, du Règlement (UE) n° 608/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 12 juin 2013 concernant le contrôle, par les autorités douanières, du respect des droits de propriété intellectuelle, et de l'article 1382 du code civil, de : - les juger recevables et bien fondées en leurs demandes ; -juger que la société ITS a commis des actes de contrefaçon de la marque communautaire n° 582585 dont est titulaire la société Microchip Inc. en important des composants électroniques sous le signe reproduit dans ses conclusions ; -juger que la société ITS a également commis au préjudice des sociétés Microchip Technology Inc. et Microchip Technology SARL des actes de concurrence déloyale de nature à engager sa responsabilité civile délictuelle

; En conséquence

: - interdire la poursuite des actes de contrefaçon, et notamment la fabrication, l'offre, la mise dans le commerce, l'utilisation, l'importation ou l'exportation, à quelque titre que ce soit, de tout produit sur lequel serait apposée la marque sans l'autorisation de la société Microchip Inc, sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée à compter du prononcé de la décision ; - ordonner la confiscation et la destruction, aux frais de la société ITS de l'intégralité des marchandises litigieuses retenues par les douanes ; - ordonner à la société ITS de communiquer, sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification du jugement : • les nom et adresse des producteurs, fabricants, distributeurs et autres détenteurs antérieurs de composants électroniques reproduisant la marque ainsi que des grossistes, destinataires et autres détaillants; • les quantités produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le prix obtenu pour les composants électroniques litigieux. ; -ordonner la publication aux frais avancés de la société ITS du jugement, soit en entier soit par extraits avec éventuellement une ou plusieurs photographies de la marque contrefaite, dans au plus cinq journaux ou magazines au choix de la société Microchip Technology Inc. sans que le coût total de ces insertions excède la somme de 50.000 euros HT ; - renvoyer l'affaire à telle audience qu'il plaira au Tribunal pour permettre à la société Microchip de conclure sur l'étendue du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon révélé par la production des informations ordonnée par le Tribunal; - dire qu'à défaut de production dans un délai de six mois à compter du jugement, l'affaire pourra être remise au rôle à la diligence d'une ou l'autre des parties ; - condamner la société ITS à payer à la société Microchip Inc. la somme de 35.000 euros à titre de provision sur les dommages et intérêts au litre do la contrefaçon de marque ; - condamner la société ITS à payer à la société Microchip Inc. la somme de 15.000 euros à titre dommages et intérêts dus au titre de provision sur le préjudice moral subi par cette dernière du fait des actes de contrefaçon de marque ; - condamner la société ITS à payer aux sociétés Microchip Technology Inc. et Microchip Technology France la somme de 55.000 euros, soit respectivement 27.500 euros chacune, à titre de provision sur les dommages et intérêts afin de réparer le préjudice subi du fait de leurs agissements déloyaux ; - condamner la société ITS à verser à chacune des sociétés Microchip Technology Inc. et M T SARI, la somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de la présente instance dont le recouvrement sera assuré par Maître Diego de Lammerville, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code. Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 27 juillet 2015, la société ITS demande au tribunal, au visa des articles 1382 et suivants du code civil, et L. 713-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, de : - la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, - débouter les sociétés MICROCHIP TECHNOLOGY Inc. et MICROCHIP TECHNOLOGIE SARL de l'intégralité de leurs demandes ; - constater l'absence de dualité d'agissements illicites imputables à la société l.T.S. ; - constater qu'aucun acte de contrefaçon et qu'aucune faute ne lui sont imputables, n'étant d'ailleurs pas en mesure d'identifier le caractère prétendument contrefait des marchandises litigieuses ; En conséquence. - dire que l'action en concurrence déloyale et en parasitisme économique ne peuvent pas se cumuler à défaut de l'existence d'une dualité d'agissement illicites ; - débouter les sociétés MICROCHIP TECHNOLOGY Inc et MICROCHIP TECHNOLOGIE SARL de leur demande tendant à la voir condamner au titre de prétendus actes de contrefaçon et de concurrence déloyale ; À titre subsidiaire, si le Tribunal de Grande Instance de Paris lui impute des actes de contrefaçon ou de concurrence déloyale, constater sa bonne foi, n'ayant jamais été en mesure d'identifier le caractère contrefait des produits litigieux et ayant d'ores et déjà elle-même souffert d'un préjudice, correspondant au prix de la commande passée auprès de la société de droit hongkongais TRUECHIP LIMITED : En conséquence, - la condamner à verser aux sociétés MICROCHIP TECHNOLOGY Inc et MICROCHIP TECHNOLOGIE SARL la somme symbolique de 1 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par les demanderesses au titre des actes de concurrence déloyale et/ou de contrefaçon dont elle se serait rendue coupable : En tout état de cause, - condamner solidairement les sociétés MICROCHIP TECHNOLOGY Inc et MICROCCHIP TECHNOLOGIE SARL à lui payer une indemnité de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de la présente instance. L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2016 et l'affaire, plaidée à l'audience du 4 février 2016, a été mise en délibéré au 11 mars suivant. MOTIFS DE LA DÉCISION 1) Sur la contrefaçon de marque Les demanderesses soutiennent au visa des articles L.713-2 et L.713- 3 (a) du code de la propriété intellectuelle, que la contrefaçon de sa marque est caractérisée par l'identité des signes et des produits en présence, et qu'en tout état de cause, il existe un risque de confusion, ce que conteste la défenderesse. La société ITS explique en effet à titre liminaire qu'elle n'a procédé qu'à une seule et même action, à savoir l'achat de 26 040 composants électroniques portant la marque figurative MICROCHIP auprès de la société TRUECHIP LIMITED, et qu'à défaut de dualité d'agissements, illicites ou non, le cumul de l'action en concurrence déloyale avec l'action en contrefaçon est infondé. Elle expose notamment qu'aucun acte de contrefaçon ne peut lui être imputé puisqu'elle a toujours pensé que les produits qu'elle commandait auprès de la société TRUECHIP LIMITED étaient authentiques car le prix payé pour ces marchandises correspondait au prix normal pour ce type de composants électroniques (0,47US$/pièces) et que des centaines de fournisseurs européens, asiatiques ou américains proposent cette référence à la vente sur les plateformes dédiées aux professionnels du secteur informatique. Elle invoque en outre le fait que la société TRUECHIP LIMITED a attesté que les pièces vendues sous la référence « PIC16C54C-04/P» étaient des puces informatiques originales de MICROCHIP et certifiées fabriquées directement par la société MICHOCHIP Inc et que pour sa part, elle n'a ni reproduit, ni apposé, ni même usé des produits comportant la marque semi figurative « MICROCHIP », s'étant contentée d'en passer commande. Sur ce. Aux termes de l'article L.713-2 a) du code de la propriété intellectuelle ""Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : "formule, façon, système, imitation, genre, méthode ", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement". L'article 9 § 1 du règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 dispose que "la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en I absence de son consentement, défaire usage dans la vie des affaires a) d'un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée ". L’article L. 717-1 du code de la propriété intellectuelle précise que constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues à l'article 9 du règlement communautaire précité. Un signe est considéré comme identique à la marque s'il reproduit, sans modification ni ajout, tous les éléments constituant la marque ou si, considéré dans son ensemble, il recèle des différences si insignifiantes qu'elles peuvent passer inaperçues aux yeux du consommateur moyen. En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats, et notamment du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 19 mars 2015 par Maître Gérard S, huissier de Justice à ROSNY SOUS BOIS (93), que la société ITS a importé des composants électroniques sous un signe constituant la reproduction à l'identique du signe protégé, à l'exception des couleurs noires et blanches, qui sont inversées sur les produits saisis, ce qui constitue des différences insignifiantes, pouvant passer inaperçues aux yeux du consommateur moyen. En outre, la saisie-contrefaçon réalisée dans les locaux de la société ITS le 13 avril 2015 a démontré que cette dernière avait passé commande de composants électroniques reproduisant à l'identique le signe revendiqué. Les produits saisis, à savoir des composants électroniques ("puces"), appartiennent à la catégorie générale des "équipement de traitement de données, ordinateurs" visés à l'enregistrement de la marque arguée de contrefaçon (en classe 9), de sorte qu'il s'agit bien de produits identiques. La contrefaçon par reproduction de la marque communautaire sus- visée, sur des puces électroniques, est ainsi caractérisée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner s'il existe un risque de confusion ou non pour le consommateur et nonobstant la bonne foi invoquée en défense. 2) Sur les actes de concurrence déloyale commis par la société ITS à l'égard des sociétés Microchip Les sociétés Microchip soutiennent que la société ITS a commis des actes de concurrence déloyale à leur encontre, d'une part en désorganisant le réseau de distribution mis en place par la société Microchip Inc. et en reproduisant les numéros de références sous lesquels les produits authentiques sont commercialisés par cette société, et d'autre part en banalisant les produits commercialisés par la société Microchip France, contrainte de rassurer les distributeurs de produits authentiques voyant arriver sur le marché français des produits marqués illicitement de leur signe à des prix attractifs et concurrentiels, ce que conteste la société ITS, qui invoque de nouveau la bonne foi dont elle a toujours fait preuve. Sur ce. La concurrence déloyale tout comme le parasitisme trouvent leur fondement dans l'article 1382 du code civil, qui dispose que "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ". Par ailleurs, l'action en concurrence déloyale ou en parasitisme doit reposer sur des agissements distincts de ceux qui ont été retenus pour établir la contrefaçon. Elle doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce. En l'espèce, s'agissant tout d'abord de la société Microchip Inc., les actes de concurrence déloyale commis à son encontre consistent d'une part en la désorganisation du réseau de distribution mis en place par cette dernière, du fait de la mise en vente à un prix moindre de pièces usuellement vendues par ce réseau, et en la reproduction des numéros de références sous lesquels les produits authentiques sont commercialisés par la société Microchip Inc., ces faits, attestés par les procès-verbaux des saisies-contrefaçons réalisées au sein de la direction régionale de R fret et au sein des locaux de la société ITS, constituant bien des faits distincts des actes de contrefaçon de la marque. S'agissant par ailleurs de la société Microchip France, Filiale de la société Microchip Inc. en charge notamment de l'importation et de la commercialisation de ses produits en France, la commercialisation illicite par la société ITS de composants électroniques identiques à ceux que la société Microchip France commercialise est de nature à générer un trouble dans son activité, de sorte que les faits de contrefaçon retenus à l'égard de la société Microchip Inc. constituent incontestablement des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Microchip France en sa qualité de distributeur. Les actes de concurrence déloyale sont ainsi caractérisés. 3) Sur les demandes en réparation des sociétés Microchip Sur la mesure d'interdiction de fabrication et de commercialisation et les mesures de destruction Il sera fait droit à la mesure d'interdiction et à celles de destruction dans les conditions énoncées au dispositif de la présente décision. Sur la communication d'information Les demanderesses sollicitent, au visa de l'article L.716-7-1 du code de la propriété intellectuelle, la communication sous astreinte de diverses informations devant être certifiées par un expert-comptable. Néanmoins, compte tenu des circonstances de l'espèce et des pièces déjà versées aux débats, cette mesure ne paraît pas nécessaire à la détermination du principe et du montant des indemnisations sollicitées. II n'y sera en conséquence pas fait droit. Sur l'indemnisation au titre de la contrefaçon En application de l'article L.716-14 du code de la propriété intellectuelle, "pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 10 Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ; 2° Le préjudice moral causé à cette dernière ; 3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon. Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée ". En vertu de l'article L. 717-2 du code de la propriété intellectuelle, les dispositions L. 716-8 à L. 716-15 du code de la propriété intellectuelle sont applicables aux atteintes portées au droit du propriétaire d'une marque communautaire. En l'espèce, la société Microchip Inc. sollicite l'octroi d'une indemnisation forfaitaire en détaillant de façon précise l'assiette de sa redevance et en opposant à la défenderesse l'inopposabilité de la bonne foi qu'elle invoque. La société ITS conclut au rejet en invoquant sa bonne foi. Subsidiairement, la société ITS demande que sa condamnation soit portée à un euro symbolique, dès lors qu'elle a déjà été sanctionnée financièrement en ayant acquitté la somme de 15 483.80USS pour l'acquisition des produits litigieux, sans aucune contrepartie, et qu'en raison de sa modeste structure, elle n'est pas en mesure d'assumer le coût d'une action en justice devant une juridiction hongkongaise aux fins de répétition de l'indu vis-à-vis de son fournisseur hongkongais, la société TRUECHIP LIMITED, les demanderesses ayant au surplus fait preuve d'une légèreté blâmable vis à vis des producteurs de produits contrefaits. Sur ce. Il convient, au vu des pièces produites, de retenir une masse contrefaisante de 58.450 puces électroniques se décomposant comme suit : 26.040 composants référencés sous le numéro PIC 16C54C-04/SO et 1.000 composants électroniques portant la référence numéro PIC16F873-04I/SP (objet des deux retenues douanières), ainsi que 31.410 composants électroniques commandés (saisie-contrefaçon du 13 avril 2015 dans les locaux de la société ITS). En admettant comme le soutient la demanderesse que l'usage dans le domaine des semi-conducteurs est de concéder des licences de marque à un taux de redevance moyen de 7,8%, qu'il convient, au regard des circonstances du litige, de majorer à 10%, et que la somme totale qu'aurait dû acquitter la société ITS pour obtenir les composants électroniques litigieux est de 83 818,77€, le montant des redevances sera fixé à 83816. Compte tenu par ailleurs de l'ancienneté de la commercialisation par la société Microchip Inc. des produits déposés sous sa marque communautaire n°582585 (déposée le 28 juillet 1997), de ses investissements en publicité et en marketing en France, ainsi que de sa notoriété, la somme forfaitaire de 9000 € lui sera allouée. Enfin, la société Microchip Inc. a subi un préjudice moral causé par l'atteinte à ses droits privatifs et l'atteinte portée à la valeur distinctive de sa marque qui sera réparé par l'octroi d'une somme de 6000 €. Sur la réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale S'agissant du préjudice subi du fait des actes distincts de concurrence déloyale commis à l'encontre des sociétés Microchip, force est de constater que la société Microchip Inc., qui invoque "le nombre considérable de produits ayant fait l'objet d'une retenue douanière et dont la société ITS a pu passer commande auprès de sociétés n 'appartenant pas au réseau de distribution agréé (58450) ", ne produit aucun élément justifiant du montant de son préjudice, distinct de l'évaluation du préjudice réparé au titre de la contrefaçon. Elle ne peut en conséquence qu'être déboutée de cette demande. En revanche, le préjudice commercial subi par la société Microchip France peut être évalué à la somme de 10000 €. Sur les autres demandes II convient, à titre de complément d'indemnisation, d'autoriser la publication d'un communiqué judiciaire selon les modalités ci-dessous précisées. La société ITS, qui supportera les dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, versera la somme de 3000 € à chacune des demanderesses au titre de l'article 700 du code de procédure civile et verra sa propre demande à ce titre rejetée. L'exécution provisoire, compatible avec la nature du litige, sera ordonnée sauf pour ce qui concerne les mesures de publication et de destruction.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort, - DIT que la société ITS a commis des actes de contrefaçon de la marque communautaire n° 582585 dont est titulaire la société Microchip Inc. en important des composants électroniques reproduisant ladite marque et qu'elle a commis au préjudice des sociétés Microchip Technology Inc. et Microchip Technology SARL des actes de concurrence déloyale ; - FAIT INTERDICTION à la société ITS de poursuivre de tels agissements, et ce sous astreinte de 150 euros par infraction constatée à l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du présent jugement pendant un délai de trois mois ; - DIT que le tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte ; - ORDONNE la confiscation et la destruction, aux frais de la société ITS de l'intégralité des marchandises litigieuses retenues par la Direction régionale des Douanes et Droits indirects de Roissy Fret ; - DÉBOUTE les sociétés Microchip de leur demande de communication d'informations ; -Ordonne la publication du communiqué suivant, dans deux organes de presse du choix des sociétés Microchip Technology, aux frais de la société ITS, sans que le coût de chaque insertion ne puisse être supérieur à 3000 € hors taxe par insertion soit 6.000 hors taxe au total: "Par jugement du II mars 2016, le tribunal de grande instance de PARIS (chambre des marques et brevets) a notamment jugé que la société ITS a commis des actes de contrefaçon de la marque communautaire n° 582585 dont est titulaire la société Microchip Inc. en important des composants électroniques reproduisant ladite marque ainsi que des actes de concurrence déloyale à l'encontre des sociétés Microchip Technology Inc. et Microchip Technology France, et a été condamnée à indemniser ces sociétés " ; Dit que cette publication, qui devra paraître en dehors de toute publicité, sera effectuée en caractères gras, noirs sur fond blanc, de 0,5 cm de hauteur, dans un encadré et sous le titre "CONDAMNATION JUDICIAIRE", lui-même en caractères de un centimètre, - CONDAMNE la société ITS à payer à la société Microchip Technology Inc. la somme de 9.000 (neuf mille) euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par la contrefaçon de sa marque ; - CONDAMNE la société ITS à payer à la société Microchip Technology Inc. la somme de 6.000 (six mille) euros à titre dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par cette dernière du fait des actes de contrefaçon de marque ; - CONDAMNE la société ITS à payer à la société Microchip Technology France la somme de 10.000 (dix mille) euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis par celle-ci ; - DÉBOUTE la société Microchip Technology Inc. de sa demande d'indemnisation au titre de la concurrence déloyale ; - CONDAMNE la société ITS à verser à chacune des sociétés Microchip Technology Inc. et Microchip Technology SARL la somme de 3.000 (trois mille) euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; - CONDAMNE la société ITS aux entiers dépens de la présente instance, lesquels pourront être recouvres par Maître Diego de Lammerville. conformément aux dispositions de l'article 699 de ce même code ; - DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes : - ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement, sauf pour ce qui concerne la mesure de publication et celle de destruction.