Vu la procédure suivante
:
M. et Mme B... A..., à l'appui de leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que des pénalités correspondantes, ont produit un mémoire, enregistré le 21 octobre 2019 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel ils soulèvent une question prioritaire de constitutionnalité.
Par une ordonnance n° 1902602 du 5 décembre 2019, enregistrée le 10 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le président de la troisième chambre de ce tribunal, avant qu'il soit statué sur la demande de M. et Mme A..., a décidé, par application de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'État la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts.
Dans la question prioritaire de constitutionnalité transmise, M. et Mme A... soutiennent que ces dispositions, applicables au litige, méconnaissent le principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- la directive 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009, notamment son article 8 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code général des impôts, notamment son article 199 terdecies-0 A;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Charles-Emmanuel Airy, auditeur,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit
:
1. Il résulte de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'État a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. Aux termes de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I.- 1° Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 18 % des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés. / (...) IV. (...) / Lorsque tout ou partie des actions ou parts ayant donné lieu à la réduction est cédé avant le 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription, il est pratiqué au titre de l'année de la cession une reprise des réductions d'impôt obtenues ". Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de la directive du Conseil du 19 octobre 2009 concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'États membres différents, ainsi qu'au transfert du siège statutaire d'une SE ou d'une SCE d'un État membre à un autre : " 1. L'attribution, à l'occasion d'une fusion, d'une scission ou d'un échange d'actions, de titres représentatifs du capital social de la société bénéficiaire ou acquérante à un associé de la société apporteuse ou acquise, en échange de titres représentatifs du capital social de cette dernière société, ne doit, par elle-même, entraîner aucune imposition sur le revenu, les bénéfices ou les plus-values de cet associé (...) ".
3. Dès lors que les dispositions de l'article 8 de la directive citée au point 2 ci-dessus ne sont relatives qu'au traitement fiscal du gain résultant, pour l'associé d'une société apporteuse ou absorbée, de l'attribution de titres de la société bénéficiaire ou absorbante en rémunération de l'apport de titres qui lui a été consenti, leurs objectifs sont sans incidence sur le bien-fondé de la reprise de la réduction d'impôt pratiquée, sur le fondement de la première phrase du deuxième alinéa du IV de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, à l'égard d'un contribuable qui apporte à une société tierce, avant l'échéance du délai de conservation de cinq ans auquel est subordonné le bénéfice de la réduction d'impôt prévue à cet article, des titres dont la souscription lui avait ouvert droit à cet avantage fiscal. Il en résulte que M. et Mme A... ne peuvent utilement invoquer au soutien de leur question prioritaire de constitutionnalité une méconnaissance du principe d'égalité devant la loi, garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui résulterait de ce que la remise en cause de la réduction d'impôt prévue par les dispositions de la première phrase du IV de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts n'interviendrait que dans le cas d'une opération d'apport concernant des sociétés domiciliées fiscalement en France, la directive y faisant obstacle en cas d'opération impliquant des sociétés établies dans des États membres différents de l'Union européenne.
4. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. et Mme A..., qui n'est pas nouvelle, ne peut être regardée comme présentant un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Strasbourg.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B... A... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au Premier ministre, au Conseil constitutionnel et au tribunal administratif de Strasbourg.