Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 27 mars 2007, 06-10.594

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2007-03-27
Cour d'appel de Versailles (12e chambre civile, section 1)
2005-11-10

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Redskins, qui fabrique des vêtements de cuir, en a confié plusieurs expéditions à la société Sernam, laquelle a souscrit pour le compte de la société Redskins une assurance "ad valorem" auprès de la société Compagnie européenne d'assurance (l'assureur) ; que, s'estimant insuffisamment indemnisée de la perte des marchandises, la société Redskins, après avoir obtenu en référé la condamnation de l'assureur à une provision, a assigné les sociétés Sernam, Sernam Ile-de-France (les sociétés Sernam) et l'assureur en indemnisation de son préjudice ; qu'ultérieurement, elle a été placée en redressement judiciaire, M. X... étant représentant des créanciers et M. Y..., administrateur puis commissaire à l'exécution de son plan de redressement ; que les sociétés Sernam ont reconventionnellement prétendu à la compensation de leur dette avec une créance de fret ;

Sur le premier moyen

:

Attendu que la société

Redskins ainsi que M. Y..., ès qualités, reprochent à l'arrêt d'avoir constaté la prescription des demandes formées par la société Redskins pour les prestations de transport réalisées par les sociétés Sernam avant le 22 octobre 2001 et d'avoir évalué à 133 146,60 euros la créance de la société Redskins hors limitations tarifaires, alors, selon le moyen, que constituent une fraude ou une infidélité les actes du transporteur mettant son client dans l'impossibilité d'agir dans le délai d'un an ; qu'il en est ainsi des atermoiements, contradictions et incohérences affectant les explications successives données par le transporteur et relatives à la perte des expéditions, dans le but de retarder l'indemnisation du client et d'empêcher son action en justice ; que les mensonges répétés du transporteur suspendent le délai de prescription entre la date de livraison prévue et la date de reconnaissance de perte des colis ; que constitue ainsi une réticence mensongère empêchant de faire courir le délai de prescription l'absence de communication des justificatifs de livraisons, faisant obstacle à ce que le client découvre l'existence d'un dommage et son étendue et sollicite le règlement auprès de l'assureur ; qu'en jugeant que le défaut de justification des livraisons n'empêchait pas la société Redskins d'agir en justice et que le délai de prescription courait ainsi dès la date à laquelle la livraison aurait dû être effectuée, lorsque ce défaut de communication laissait la société Redskins dans l'ignorance du préjudice qu'elle avait effectivement subi, la cour d'appel a violé l'article L. 133-6 du code de commerce et l'article 1147 du code de commerce ;

Mais attendu

qu'ayant relevé que la société Redskins n'établissait pas que le silence des sociétés Sernam l'aurait empêchée d'agir en justice pour interrompre la prescription, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen

:

Attendu que la société

Redskins ainsi que M. Y..., ès qualités, reprochent encore à l'arrêt d'avoir fixé après application de la limitation tarifaire prévue au contrat type, la créance de la société Redskins à la somme de 6 555 euros et après compensation de cette somme avec les frais de transports, à 147 487,46 euros le montant de la créance de la société Sernam au passif de la société Redskins au prix selon le moyen d'un manque de base légale au regard des articles 1131 et 1150 du code civil ainsi que des articles 21 et 22 du contrat type applicable et d'un manque de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu

que le moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le troisième moyen

, pris en sa première branche :

Vu

l'article 564 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer fondée la créance des sociétés Sernam pour une somme de 154 042,46 euros, ordonner la compensation entre cette créance et celle de la société Redskins, fixer à 147 487,46 euros le montant de la créance des sociétés Sernam au passif de la société Redskins, l'arrêt retient

que contrairement à ce que prétendent les sociétés Sernam, la demande de compensation de leur propre créance avec celle de la société Redskins constitue une demande reconventionnelle mais que la société Redskins et M. X..., ès qualités, ne sont pas fondés à contester pour la première fois en cause d'appel la régularité des déclarations de créance des sociétés Sernam au motif qu'il ne serait pas justifié du pouvoir des signataires ;

Attendu qu'en statuant ainsi

, alors que l'irrégularité d'une déclaration de créance pour défaut de pouvoir de son signataire affecte la validité de l'acte et fait obstacle à la compensation avec la créance du débiteur en redressement judiciaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le quatrième moyen

, pris en sa deuxième branche :

Vu

l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société Redskins à l'encontre de l'assureur, l'arrêt retient

qu'il ne peut être soutenu que l'assureur aurait renoncé par avance à se prévaloir de la prescription pour les liltiges dont la société Redskins demande l'indemnisation au motif qu'à l'occasion d'autres litiges antérieurs, elle aurait accepté de procéder à des indemnisations tandis que la prescription était acquise ;

Attendu qu'en statuant ainsi

, sans répondre aux conclusions de la société Redskins qui soulignaient que la prescription avait été interrompue par l'assignation en référé-provision du 19 juin 2002 jusqu'au 3 octobre 2002, date de l'ordonnance ayant accueilli partiellement la demande à l'encontre de l'assureur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de la société Redskins contre la société CEA, en ce qu'il a confirmé le jugement d'avoir déclaré fondée la créance des sociétés Sernam pour un montant de 154 042,46 euros, d'avoir ordonné la compensation judiciaire entre la créance de la société Redskins et la créance des sociétés Sernam et en ce qu'il a fixé, après application de la limitation tarifaire prévue au contrat type et compensation, à 147 487,46 euros le montant de la créance des sociétés Sernam au passif de la société Redskins, l'arrêt rendu le 10 novembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ; Condamne les sociétés Sernam Ile-de-France et Sernam aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille sept.