LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen
, pris en sa première branche :
Vu les articles
1109 et
1184 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a commandé à la société SEVL une certaine quantité de viande ; que la société SEVL ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, M. Y... étant désigné en qualité de liquidateur (le liquidateur), le juge-commissaire a, par ordonnance du 20 mars 2007, autorisé la vente de gré à gré de cette marchandise à M. X... ; qu'en raison de la non-conformité de l'étiquetage, M. X... a assigné le liquidateur en résolution de la vente, tandis que ce dernier a réclamé le paiement du prix ;
Attendu que pour prononcer la résolution de la vente intervenue entre M. X... et le liquidateur et rejeter la demande de celui-ci en paiement d'une certaine somme, l'arrêt retient que rien n'interdit l'acquéreur de demander la résolution d'une vente sur le fondement d'une erreur sur les qualités substantielles et que le consentement de M. X... est entaché d'une erreur qui conduit à prononcer la résolution ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'erreur sur les qualités substantielles est cause de nullité du contrat pour vice du consentement tandis que son inexécution partielle ou totale est sanctionnée par la résolution, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille douze.
MOYENS ANNEXES
au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux conseils pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résolution de la vente intervenue entre M. X... et Me Y..., ès qualités, de mandataire liquidateur de la société Sevl et d'AVOIR débouté Me Y..., ès qualités, de sa demande en paiement de la somme principale de 14.914 euros ;
AUX MOTIFS QUE M. X..., dont l'activité consiste à fournir en denrées alimentaires des cantines scolaires et des maisons de retraite a proposé à Me Y... d'acquérir 4.000 kgs de sauté de gigot appartenant à la Sevl ; que Me Y... a soumis cette offre au juge-commissaire qui a ordonné la vente de ce stock au prix TTC départ usine de 15.192 euros (cf. ordonnance du 20 mars 2007) ; que M. X... a revendu ces marchandises mais qu'elles ont été refusées au moment de leur livraison car leur étiquetage n'était pas conforme à la législation en la matière ; que le re-étiquetage proposé par le gérant de la société Sevl s'est avéré impossible ; que si une vente de gré à gré des éléments composant l'actif mobilier de l'entreprise en liquidation constitue une vente par autorité de justice exclusive du jeu de la garantie des vices cachés, rien en revanche n'interdit à l'acquéreur d'en demander la résolution sur le fondement d'une erreur sur les qualités substantielles ou d'un dol tenant par exemple à une réticence dolosive sur un élément déterminant du consentement de l'acquéreur ; que les marchandises en question ne pouvant être revendues, elles ne présentaient pas les qualités substantielles que M. X... en attendait en raison de son activité professionnelle ; que son consentement est donc entaché d'une erreur qui conduit à prononcer la résolution de la vente autorisée par le juge-commissaire ;
1) ALORS QUE la résolution sanctionne l'inexécution partielle ou totale du contrat tandis que sa nullité sanctionne l'absence d'une condition de sa formation et emporte son effacement rétroactif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui était saisie par M. X... d'une demande en résolution de la vente autorisée le 20 mars 2007, a considéré que le consentement de M. X... avait été « entaché d'une erreur qui conduit à prononcer la résolution de la vente » ; qu'en se fondant ainsi sur un motif impropre à justifier le prononcé de la résolution du contrat, la cour d'appel a violé l'article
1184 du Code civil ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE le juge ne peut relever d'office un moyen sans inviter, au préalable, les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, M. X... sollicitait la résolution de la vente intervenue le 20 mars 2007 « pour non conformité » (cf. concl. Cailler, p. 4 § 4) ; qu'en se fondant, pour prononcer la résolution du contrat litigieux, sur le fait que M. X... avait été victime « d'une erreur », la cour d'appel a relevé un moyen d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, en violation de l'article
16 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résolution de la vente intervenue entre M. X... et Me Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sevl et d'AVOIR débouté Me Y..., ès qualités de sa demande en paiement de la somme principale de 14.914 euros ;
AUX MOTIFS QUE M. X..., dont l'activité consiste à fournir en denrées alimentaires des cantines scolaires et des maisons de retraite a proposé à Maître Y... d'acquérir 4.000 kgs de sauté de gigot appartenant à la Sevl ;
que Maître Y... a soumis cette offre au juge-commissaire qui a ordonné la vente de ce stock au prix TTC départ usine de 15.192 euros (cf. ordonnance du 20 mars 2007) ; que M. X... a revendu ces marchandises mais qu'elles ont été refusées au moment de leur livraison car leur étiquetage n'était pas conforme à la législation en la matière ; que le re-étiquetage proposé par le gérant de la société Sevl s'est avéré impossible ; que si une vente de gré à gré des éléments composant l'actif mobilier de l'entreprise en liquidation constitue une vente par autorité de justice exclusive du jeu de la garantie des vices cachés, rien en revanche n'interdit à l'acquéreur d'en demander la résolution sur le fondement d'une erreur sur les qualités substantielles ou d'un dol tenant par exemple à une réticence dolosive sur un élément déterminant du consentement de l'acquéreur ; que les marchandises en question ne pouvant être revendues, elles ne présentaient pas les qualités substantielles que M. X... en attendait en raison de son activité professionnelle ; que son consentement est donc entaché d'une erreur qui conduit à prononcer la résolution de la vente autorisée par le juge-commissaire ;
ALORS QUE la réception sans réserves de la marchandise achetée prive l'acheteur de la possibilité de se prévaloir d'un défaut de conformité de cette marchandise ; qu'en l'espèce, Me Y... faisait valoir que M. X... avait reconnu avoir pris possession du stock de viande litigieux et donné l'ordre au commissaire priseur de vendre aux enchères ce stock de viande (cf. concl., p. 3 § 2 à 5) ; qu'il en résultait que M. X..., professionnel du commerce de viande, n'avait pu ignorer, lors de la vente, l'erreur d'étiquetage de la marchandise en cause, puisqu'il lui suffisait de vérifier cet étiquetage pour s'en rendre compte ; qu'en prononçant la résolution de la vente sans rechercher si M. X... pouvait se prévaloir d'un défaut de conformité tandis que l'erreur d'étiquetage à l'origine de ce défaut était apparente et que les marchandises avaient été acceptées sans réserves, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1604 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (infiniment subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résolution de la vente intervenue entre M. X... et Maître Y... ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sevl et d'AVOIR débouté Maître Y... ès qualités de sa demande en paiement de la somme principale de 14.914 euros ;
AUX MOTIFS QUE M. X..., dont l'activité consiste à fournir en denrées alimentaires des cantines scolaires et des maisons de retraite a proposé à Maître Y... d'acquérir 4.000 kgs de sauté de gigot appartenant à la Sevl ;
que Maître Y... a soumis cette offre au juge-commissaire qui a ordonné la vente de ce stock au prix TTC départ usine de 15.192 euros (cf. ordonnance du 20 mars 2007) ; que M. X... a revendu ces marchandises mais qu'elles ont été refusées au moment de leur livraison car leur étiquetage n'était pas conforme à la législation en la matière ; que le re-étiquetage proposé par le gérant de la société Sevl s'est avéré impossible ; que si une vente de gré à gré des éléments composant l'actif mobilier de l'entreprise en liquidation constitue une vente par autorité de justice exclusive du jeu de la garantie des vices cachés, rien en revanche n'interdit à l'acquéreur d'en demander la résolution sur le fondement d'une erreur sur les qualités substantielles ou d'un dol tenant par exemple à une réticence dolosive sur un élément déterminant du consentement de l'acquéreur ; que les marchandises en question ne pouvant être revendues, elles ne présentaient pas les qualités substantielles que M. X... en attendait en raison de son activité professionnelle ; que son consentement est donc entaché d'une erreur qui conduit à prononcer la résolution de la vente autorisée par le juge-commissaire (cf. arrêt, p. 3 § 5 à 8 et p. 4 § 1) ;
ALORS QUE l'erreur sur les qualités substantielles n'est cause de nullité que dans la mesure où elle est excusable ; qu'en l'espèce, Me Y... faisait valoir que M. X... avait reconnu avoir pris possession du stock de viande litigieux et donné l'ordre au commissaire-priseur de vendre aux enchères ce stock de viande (cf. concl., p. 3 § 2 à 5) ; qu'il en résultait que M. X..., professionnel du commerce de viande, n'avait pu se méprendre, lors de la vente, sur l'erreur d'étiquetage de la marchandise en cause ; qu'en ne recherchant pas si l'erreur prétendue de M. X... était excusable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1110 du Code civil.