Cour de cassation, Chambre sociale, 31 mai 2017, 16-14.519

Synthèse

Voir plus

Texte intégral

SOC. CGA COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 31 mai 2017 Rejet non spécialement motivé M. X..., conseiller le plus ancien faisant fonction de président Décision n° 10619 F Pourvoi n° N 16-14.519 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par la société Optiréno, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2016 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à Mme Séverine Y..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 3 mai 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Z..., conseiller rapporteur, M. Déglise, conseiller, M. A..., avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Optiréno, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme Y... ; Sur le rapport de M. Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article

1014 du code de procédure civile ; Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée

;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Optiréno aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme Y... ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-sept

MOYENS ANNEXES

à la présente décision Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Optiréno PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement pour motifs économiques de Mme Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société Optiréno à lui payer les sommes de 14 119,34 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR condamné la société Optiréno aux dépens ; AUX MOTIFS QUE « Sur ce : sur le caractère économique du licenciement de Mme Y... : Il est de jurisprudence constante, en matière de convention de reclassement personnalisé, dont le mécanisme est similaire à celui de la convention de sécurisation professionnelle, que la rupture du contrat de travail résultant de l'acceptation par le salarié d'une telle convention doit avoir une cause économique réelle et sérieuse et que l'appréciation de cette cause ne peut résulter que des motifs énoncés par l'employeur, que l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation et que la remise par l'employeur au salarié, postérieurement à son acceptation de la convention, d'une lettre énonçant le motif économique de la rupture prive le licenciement de caractère réel et sérieux. En l'espèce, Mme Y... a été convoquée à un entretien préalable à licenciement économique pour le 5 juin 2012,date à laquelle elle a été informée de sa possibilité d'accepter une convention de sécurisation professionnelle. Elle a accepté le bénéfice d'une telle convention le 8 juin 2012. Elle a été licenciée pour motif économique le 14 juin 2012. Il n'est pas démontré par la SAS Optiréno qu'à la date du 5 juin 2012, Mme Y... a été informée des motifs économiques fondant le projet de son licenciement. Par ailleurs, il n'est pas contesté que ces motifs n'ont pas été portés à sa connaissance le 8 juin 2012, date de son acceptation de la convention de sécurisation professionnelle et de la rupture du contrat de travail. En revanche, au terme de la lettre de licenciement du 14 juin 2012, la SAS Optiréno a porté à la connaissance de Mme Y... les motifs économiques de son licenciement. Cependant, une telle information a été apportée à Mme Y... postérieurement à son acceptation de la convention de sécurisation professionnelle. Elle est donc tardive et prive son licenciement pour motifs économiques de cause réelle et sérieuse. Mme Y... percevait lors de son licenciement un salaire mensuel moyen de 2 353 € bruts et justifiait de 18 mois d'ancienneté. Le préjudice qu'elle a subi à raison de la rupture de son contrat de travail sera justement indemnisé en lui allouant la somme de 14 119,34 € à titre de dommages et intérêts ; ( ) sur le surplus des demandes : Enfin, la SAS Optiréno, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, devra payer la somme de 1 500 € à Mme Y... au titre des frais exposés dans la défense de ses intérêts » ; 1°) ALORS QU'en cas d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, la rupture du contrat de travail est réputée intervenir d'un commun accord à la date d'expiration du délai de 21 jours dont dispose le salarié pour prendre parti et non au jour où le salarié exprime la volonté de bénéficier de ce dispositif ; qu'il en résulte que le courrier précisant au salarié le motif économique de la rupture peut lui être adressé jusqu'à l'issue du délai de réflexion qui constitue la date de prise d'effet de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle ; qu'en l'espèce, il était constant que la société Optiréno avait proposé à Mme Y..., au cours de l'entretien préalable qui s'était tenu le 5 juin 2012, un contrat de sécurisation professionnelle dont le délai de réflexion expirait le 26 juin 2012 ; que c'est donc à cette date, en l'état d'une acceptation par la salariée du dispositif proposé, que son contrat s'était trouvé rompu ; qu'en retenant que la date de rupture du contrat de la salariée correspondait à celle de son acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, soit le 8 juin 2012, pour juger tardive la notification à l'intéressée du motif économique de la rupture, par courrier du 14 juin 2012, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-15, L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ; 2°) ALORS QUE le juge ne peut méconnaitre les termes du litige tels qu'ils ressortent des prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, la société Optiréno faisait valoir, dans ses conclusions (cf. page10), oralement soutenues (arrêt p. 2, dernier §), que les motifs économiques fondant le projet de licenciement de Mme Y... lui avaient été exposés lors de son entretien préalable du 5 juin 2012, au cours duquel l'intéressée était assistée de Mme B..., déléguée du personnel régulièrement informée et consultée sur le projet de licenciement économique ; que de son côté, Mme Y... ne contestait pas avoir été informée desdits motifs au cours de l'entretien préalable du 5 juin 2012, seule étant discutée la formalisation écrite de ceux-ci préalablement à son acceptation du contrat de sécurisation professionnelle ; qu'en jugeant qu'il n'était pas démontré que la société Optiréno avait informé Mme Y..., à la date du 5 juin 2012, des motifs économiques de la rupture, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Optiréno faisait valoir, dans ses conclusions (cf. page10), oralement soutenues (arrêt p. 2, dernier §), que les motifs économiques fondant le projet de licenciement de Mme Y... lui avaient été exposés lors de son entretien préalable du 5 juin 2012, au cours duquel l'intéressée était assistée de Mme B..., déléguée du personnel régulièrement informée et consultée sur le projet de licenciement économique ; qu'en affirmant qu'il n'était pas contesté que ces motifs n'avaient pas été portés à la connaissance de la salariée à la date de son acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, le 8 juin 2012, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Optiréno à payer à Mme Y... les sommes de 4 706,44 € à titre de dommages et intérêts pour violation de la priorité de réembauchage et de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR condamné la société Optiréno aux dépens ; AUX MOTIFS QUE « selon contrat à durée indéterminée du 15 novembre 2010, Mme Y... a été embauchée par la SAS Optiréno en qualité de conducteur de travaux-chargé d'affaires. ( ) sur la priorité de réembauchage : Au terme de la lettre de licenciement du 14 juin 2012, Mme Y... a été régulièrement informée de sa priorité de réembauche. Selon lettre recommandée avec accusé de réception du 9 octobre 2012, Mme Y... a informé la SAS Optiréno qu'elle entendait bénéficier de la priorité de réembauche prévue par l'article L 1233-45 du code du travail. Le contrat de travail de Mme Y... mentionne que cette dernière est embauchée par la SAS Optiréno en qualité de conducteur de travaux-chargé d'affaires, statut agent de maîtrise, position 3-1, coefficient 400. Cette mention est reprise sur ses bulletins de paie. Aucune des pièces produites aux débats ne permettent de démontrer qu'elle exerçait dans les faits les fonctions de décoratrice d'intérieur. Il conviendra en conséquence de retenir, pour apprécier la respect par la SAS Optiréno de la priorité de réembauchage de Mme Y..., que cette dernière exerçait les fonctions de conducteur de travaux-chargé d'affaires. Les 5 et 7 novembre 2011, la SAS Optiréno a procédé à l'embauche de M. C... en qualité de conducteur de travaux et chargé d'affaires en free lance sur l'agence d'Annecy, de M. D... en qualité de chargé d'affaires sur l'agence de Lyon et de Melle E... en qualité d'assistant conducteur de travaux sur l'agence d'Annecy dans le cadre d'un contrat de professionnalisation. Par ailleurs, les 6 mai et 1er octobre 2012, elle a recruté F... en qualité de chargé d'affaires et conducteur de travaux (niveau agent de maîtrise) et Mme G... en qualité d'assistante cellule archi-déco (niveau employé). Le contrat d'assistant conducteur de travaux contracté par la SAS Optiréno avec Mme E... s'inscrit dans le cadre d'un parcours professionnalisant et ne correspond pas à la qualification de Mme Y.... De même, le poste de Mme G... constitue un poste d'assistante cellule archi-déco. Ces deux emplois ne relèvent pas en conséquence de la qualification de Mme Y.... En revanche, concernant les postes de conducteurs de travaux-chargés d'affaires et chargés d'affaires pourvus par les embauches de MM. C..., D... et F..., la SAS Optiréno ne démontre aucunement que ces emplois, bien que d'un intitulé similaire au poste auparavant occupé par Mme Y..., ne relevaient pas de la même qualification. Il en ressort ainsi que la SAS Optiréno n'a pas fait droit à la demande de priorité de réembauchage formée par Mme Y.... Elle sera en conséquence condamnée à lui payer la somme de 4 706,44 € à titre de dommages et intérêts de ce chef. sur le surplus des demandes : Enfin, la SAS Optiréno, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer la somme de 1 500 € à Mme Y... au titre des frais exposés dans la défense de ses intérêts » ; 1°) ALORS QUE le juge doit examiner les pièces invoquées par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, afin d'établir que la salariée exerçait, dans les faits, les fonctions de décoratrice d'intérieur et non celles de conducteur de travaux, comme indiqué sur son contrat de travail ou ses bulletins de paie, la société Optiréno avait produit divers mails de Mme Y... dans lesquels celle-ci, se présentant sous l'intitulé d' « Architecte d'intérieur », transmettait des plans et vue de salles de bain, indiquait que « je fais les esquisses, aménagements et décoration, choix des matériaux avec les clients et la liste avec référence des matériaux à commander » (cf. le mail de Mme Y... du 26 août 2011 adressé à Mme I...) et précisait, concernant ses cartes de visite « ok, merci, il faudra juste changer le poste de chargée d'affaires en « décoratrice d'intérieur » (Mail de Mme Y... du 16 mai 2012) (cf. productions n° 12 à 14) ; que l'exposante avait en outre produit l'organigramme de l'entreprise où la salariée apparaissait comme étant rattachée au « pôle décoration » (cf. production n° 16) ainsi que le compte-rendu d'audition de Mme Y... qui, dans le cadre du droit d'alerte, avait expressément reconnu que « mon contrat [de chargé d'affaires/conducteur de travaux] ne correspond pas à ma mission actuelle » (cf. production n° 15) ; qu'en affirmant qu'aucune des pièces produites ne permettait de démontrer que la salariée exerçait dans les faits les fonctions de décoratrice d'intérieur, la cour d'appel qui a statué par une affirmation ne permettant pas à la cour de cassation d'exercer son contrôle sur l'examen de ces éléments, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE la qualification du salarié s'apprécie au regard des fonctions réellement exercées par celui-ci ; qu'en se fondant, pour retenir que l'intéressée exerçait les fonctions de conducteur de travaux-chargé d'affaires, sur les seules mentions du contrat de travail de la salariée et de ses bulletins de paie renvoyant à cet intitulé de poste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.