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Tribunal administratif de Marseille, 4ème Chambre, 9 octobre 2023, 2208672

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
  • Numéro d'affaire :
    2208672
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction totale
  • Rapporteur : Mme Giocanti
  • Nature : Décision
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 octobre 2022 et le 8 février 2023, M. A B, représenté par Me Nouis, demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision du 16 août 2022 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire d'exclusion définitive de fonction ; 2°) d'enjoindre au recteur de l'académie d'Aix-Marseille et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche de remettre au tribunal la vidéo filmant l'altercation avec son collègue le 11 mars 2022 ; 3°) d'enjoindre au recteur de l'académie d'Aix-Marseille et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche de le réintégrer avec effet rétroactif à compter de la sanction d'exclusion avec tous les droits y afférents, notamment en termes de rémunération ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision attaquée est insuffisamment motivée en fait et en droit ; - la CHS-CT des services académiques n'a pas été saisie lors de la mesure de suspension ; - les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ; - la décision critiquée induit une rupture d'égalité de traitement ; - la sanction est disproportionnée. Par un mémoire en défense enregistré le 22 décembre 2022, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille, conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par M. B ne sont pas fondés. Par des mémoires, enregistrés le 5 janvier 2023 et le 24 février 2023, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - les conclusions prononcées à son encontre sont irrecevables ; - les moyens invoqués par M. B ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 11 juillet 2023, a été prononcée, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture immédiate de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 fixant les dispositions applicables aux stagiaires de la fonction publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Le Mestric, première conseillère, - les conclusions de Mme Giocanti, rapporteure publique, - et les observations de Me Nouis, représentant M. B.

Considérant ce qui suit

: 1. M. B, recruté sans concours le 31 août 2021 après plusieurs contrats à durée déterminée, a été nommé en qualité d'adjoint technique de recherche et de formation stagiaire à compter du 1er septembre 2021 pour occuper les fonctions d'agent de sécurité au rectorat de l'académie d'Aix-Marseille. Par arrêté du 14 mars 2022, le recteur de l'académie l'a suspendu de ses fonctions après une altercation physique le 11 mars 2022 avec son chauffeur. Par la présente requête, M. B demande au tribunal l'annulation de l'arrêté du 16 août 2022 par lequel le recteur a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de l'exclusion définitive de service. Sur les conclusions tendant à la production de la vidéo : 2. L'affaire est en état d'être jugée, le principe du contradictoire a été respecté et il n'apparaît donc pas nécessaire, dans les circonstances de l'espèce, d'ordonner la communication de la vidéo détenue par l'administration. Sur les conclusions à fin d'annulation : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () 2° Infligent une sanction ; () ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". 4. L'arrêté attaqué comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement au sens de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Il expose les griefs retenus à l'encontre de M. B de manière suffisamment circonstanciée pour le mettre à même de déterminer les faits que l'autorité disciplinaire a retenu à son encontre et de comprendre les motifs de la décision qui lui est opposée. La circonstance que l'intéressé estime que les faits ne soient pas établis est sans incidence sur son caractère motivé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation et de son caractère stéréotypé manque en fait et doit être écarté. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 du décret du 7 octobre 1994 précité : " Le fonctionnaire stagiaire peut être suspendu dans les conditions qui sont prévues, pour les fonctionnaires titulaires, par l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée. La durée de la suspension n'entre pas en compte comme période de stage. ". Aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 applicable à la date du litige : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. () ". 6. Contrairement à ce que soutient le requérant aucun principe ni aucun texte n'exige la saisine de la CHS-CT des services académiques préalablement à une décision de suspension. Par suite, M. B n'est pas fondé à soutenir que l'illégalité de la décision de suspension prononcée à son encontre rend illégale la décision d'exclusion définitive de service attaquée. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article 10 du décret du 7 octobre 1994 : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être infligées au fonctionnaire stagiaire sont : / 1° L'avertissement ; / 2° Le blâme ; / 3° L'exclusion temporaire, avec retenue de rémunération à l'exclusion du supplément familial de traitement, pour une durée maximale de deux mois ; / 4° Le déplacement d'office ; / 5° L'exclusion définitive de service. ". 8. Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur les questions de savoir si les faits reprochés à un agent public constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. 9. Pour infliger à M. B la sanction d'exclusion définitive de service, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a considéré que l'intéressé avait fait preuve d'un comportement inapproprié en adoptant une attitude agressive à l'égard d'un collègue de travail, lors d'une bagarre physique violente avec ce dernier le 11 mars 2022 dans le hall d'accueil du rectorat en présence de de public. 10. Le requérant soutient qu'il n'est pas à l'origine de ladite altercation et réfute toute part de responsabilité dans le conflit qui l'a opposé à son collègue, chauffeur du recteur. Si, au regard des témoignages produits, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir avec certitude que M. B est à l'origine des actes de violence qui ont été échangés dans le hall d'accueil du rectorat, le requérant ne peut sérieusement dénier sa responsabilité dans le déclenchement de cette altercation qui résulte notamment des différents actes de provocation dont il est à l'origine et des échanges d'insultes qu'il ne conteste pas. Ainsi, la matérialité des faits sur lesquels s'est fondé le recteur de l'académie d'Aix-Marseille pour prononcer la sanction litigieuse doit être regardée comme établie. 11. En quatrième lieu, le requérant ne peut utilement soutenir que la décision attaquée est entachée d'erreur de droit en ce qu'elle méconnait le principe d'égalité entre les agents, notamment à l'égard de son collègue qui n'a pas été sanctionné dès lors que ce principe n'est pas invocable en matière de sanctions disciplinaires, dont le caractère est nécessairement individuel. Par suite, M. B n'est pas fondé à invoquer une rupture d'égalité avérée dans le traitement des agents du service et le moyen doit être écarté. 12. En dernier lieu, les faits en cause, commis par un agent stagiaire en période probatoire, sont de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire. Toutefois, en décidant de prononcer à l'encontre de M. B la sanction d'exclusion définitive du service, qui est la sanction encourue la plus grave, compte tenu de la nature spécifique de ses fonctions d'agent de sécurité et des obligations particulières d'exemplarité attachées à ce type de fonctions, le recteur de l'Académie d'Aix-Marseille a pris une sanction disproportionnée dès lors que M. B justifie d'états de service satisfaisants sur d'autres fonctions au sein du rectorat, n'a jamais fait l'objet de sanctions disciplinaires antérieures et qu'aucun élément en l'état du dossier ne vient démontrer qu'il soit seul à l'origine de l'altercation du 11 mars 2022. Par suite, M. B est fondé à soutenir que la sanction d'exclusion définitive de service prononcée à son encontre est disproportionnée. 13. Il résulte de tout ce qui précède que la décision du 16 août 2022 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire d'exclusion définitive de fonction doit être annulée. Sur les conclusions à fin d'injonction : 14. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public () prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". 15. L'annulation de la décision du 16 août 2022 implique nécessairement, au sens de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, la réintégration de M. B dans ses fonctions au rectorat avec effet rétroactif à compter de la sanction d'exclusion avec tous les droits y afférents, notamment en termes de rémunération. Il y a donc lieu d'enjoindre au recteur de l'académie d'Aix-Marseille, seul compétent, d'y procéder, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sans qu'il soit besoin d'assortir cette mesure d'une astreinte. Sur les frais d'instance : 16. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens, exposés par M. B à l'occasion de la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La décision du 16 août 2022 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire d'exclusion définitive de fonction doit être annulée. Article 2 : Il est enjoint au recteur de l'académie d'Aix-Marseille, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, de réintégrer M. B dans ses fonctions au rectorat avec effet rétroactif à compter de la sanction d'exclusion avec tous les droits y afférents, notamment en termes de rémunération. Article 3 : L'Etat versera à M. B la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. A B, au recteur de l'académie d'Aix-Marseille et au ministre de l'enseignement et de la recherche. Délibéré après l'audience du 22 septembre 2023, à laquelle siégeaient : M. Salvage, président, Mme Le Mestric, première conseillère Mme Fayard, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 octobre 2023. La rapporteure, Signé F. LE MESTRIC Le président, Signé F. SALVAGE La greffière Signé F. FOURRIER La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour la greffière en chef, La greffière,

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