Vu la procédure suivante
:
Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2023, M. A B et Mme D E doivent être considérés comme demandant au tribunal :
1°) à titre principal, d'annuler la notification de saisie administrative à tiers détenteur émise le 22 novembre 2022 par le directeur régional des finances publiques d'Île-de-France relative aux frais de séjour de leur fils, C B, à l'Hôpital Armand Trousseau, d'un montant de 2 511,20 euros, ainsi que le titre de recettes correspondant, n°220018307088100, du directeur général de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), émis le 10 janvier 2022, et de les décharger de l'obligation de payer la somme correspondante ;
2°) à titre subsidiaire, d'enjoindre l'AP-HP à réviser sa facturation en adéquation avec le principe du respect de la stricte économie, en fonction des soins réellement nécessaires au rétablissement du patient.
Ils soutiennent que la décision de l'AP-HP méconnaît :
- l'article
L.1111-2 du code de la santé publique ;
- l'article
L.1111-3 du code de la santé publique ;
- l'article
R.6145-4 du code de la santé publique ;
- l'article
L.162-2-1 du code de la sécurité sociale ;
- les articles
1104 et
1194 du code civil.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
1. Aux termes de l'article
R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif () et les présidents de formation de jugement des tribunaux () peuvent, par ordonnance : () / 2° Rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative ; () / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ".
Sur les conclusions dirigées contre la saisie administrative à tiers détenteur :
2. Aux termes de l'article
L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 : " () / 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur / (). / L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. / 2° La contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article
L. 281 du livre des procédures fiscales () ". Aux termes de l'article
L. 281 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2017 : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / () / Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés : / () / c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution ". Enfin, aux termes de l'article
L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire : " Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. / () ".
3. Les requérants contestent la saisie administrative à tiers détenteur émise le 22 novembre 2022 relative aux frais de séjour à l'hôpital Armand Trousseau de leurs fils, d'un montant de 2 511,20 euros. Comme le prévoient les dispositions précitées de l'article
L. 281 du livre des procédures fiscales, seule la juridiction judiciaire est compétente pour connaître des recours dirigés contre un tel acte de recouvrement. Par suite, les conclusions des requérants dirigées contre la saisie administrative à tiers détenteur doivent être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître en application des dispositions précitées du 2° de l'article
R. 222-1 du code de justice administrative.
Sur les conclusions dirigées contre le titre n°220018307088100 :
4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article
L. 6145-11 du code de la santé publique : " Les établissements publics de santé peuvent toujours exercer leurs recours, s'il y a lieu, contre les hospitalisés, contre leurs débiteurs et contre les personnes désignées par les articles
205,
206,
207 et
212 du code civil ". Aux termes de son article
R. 6145-4 : " Dans le cas où les frais de séjour, de consultations ou d'actes des patients ne sont pas susceptibles d'être pris en charge, soit par un organisme d'assurance maladie, soit par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ou par tout autre organisme public, les intéressés ou, à défaut, leurs débiteurs ou les personnes désignées par les articles
205,
206,
207 et
212 du code civil souscrivent un engagement d'acquitter les frais de toute nature afférents au régime choisi. Ils sont tenus, sauf dans les cas d'urgence, de verser au moment de l'entrée du patient dans l'établissement une provision renouvelable calculée sur la base de la durée estimée du séjour, des frais de consultations, d'actes, ou d'un tarif moyen prévisionnel du séjour arrêté par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Sous réserve des dispositions de l'article
L. 253-2 du code de l'action sociale et des familles, lorsque la provision versée est supérieure aux montants dus, la différence est restituée à la personne qui l'a versée ".
5. D'autre part, aux termes de l'article
L. 1111-3 du code de la santé publique, " Toute personne a droit à une information sur les frais auxquels elle pourrait être exposée à l'occasion d'activités de prévention, de diagnostic et de soins et, le cas échéant, sur les conditions de leur prise en charge et de dispense d'avance des frais. / Cette information est gratuite ". Aux termes de l'article
L.162-2-1 du code de la sécurité sociale : " Les médecins sont tenus, dans tous leurs actes et prescriptions, d'observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins ".
6. Les dispositions citées aux points 3 et 4 n'ont pas pour objet et ne peuvent avoir légalement pour effet de placer l'hospitalisé, qui a la qualité d'usager d'un service public administratif, dans une situation contractuelle. Par suite, les circonstances que l'AP-HP n'a pas fait souscrire à M. B ou à un membre de sa famille un engagement d'acquitter les frais conformément à l'article
R. 6145-4 du code de la santé publique, qu'elle ne leur a pas donné d'information sur les frais auxquels ils pourraient être exposés, que les soins prodigués ne respectaient pas le principe de stricte économie et qu'enfin l'AP-HP n'a pas répondu aux demandes d'information et de médiation présentées après la prise en charge, dernière circonstance qui, au demeurant, n'est pas assortie de faits permettant d'en apprécier le bien-fondé, sont sans incidence sur le droit de l'établissement où le jeune C B a été hospitalisé de réclamer le paiement des frais de séjour.
7. En second lieu, le moyen tiré de ce que l'AP-HP n'aurait pas respecté son obligation d'information relativement à l'état de santé du fils des requérants au sens de l'article
L.1111-2 du code de la santé publique, ne peut, eu égard au principe de non-compensation des créances publiques, être utilement invoqué à l'encontre du titre exécutoire contesté, alors même qu'il appartient aux requérants, s'il s'y croient fondés, de rechercher la responsabilité de l'AP-HP en raison de la faute qu'elle aurait commise dans la prise en charge de leur fils.
8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête qui relèvent de la compétence du juge administratif ne comportent que des moyens inopérants, ou de moyens qui ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Dans ces conditions, les conclusions dirigées contre le titre litigieux peuvent être rejetées selon les modalités prévues par les dispositions de l'article
R. 222-1 7° du code de justice administrative.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la requête présentée par M. et Mme B peut être rejetée en toutes ses conclusions, en application de l'article
R. 222-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête susvisée est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A B, à Mme D E et à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée des finances publiques pour l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.
Fait à Paris, le 12 juillet 2024.
La présidente,
K. Weidenfeld
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et de la solidarité en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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