Vu, I, sous le n° 08MA00300, la requête enregistrée le 21 janvier 2008, présentée pour M. Artur A, élisant domicile chez ..., par la SCP d'avocats Dessalces-Ruffel ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703918 du 4 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 mars 2007 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire national dans le délai d'un mois ;
2°) d'annuler la décision litigieuse ainsi que celle prise le 2 mai 2007 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer le titre sollicité ou de réexaminer sa demande, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 196 euros au titre de
l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, soit en cas d'admission à l'aide juridictionnelle à son avocat qui renoncerait à la percevoir, soit à lui-même ;
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Vu, II, sous le n° 08MA00301, la requête enregistrée le 21 janvier 2008, présentée pour Mme Naira A née Mkrtian, élisant domicile chez ..., par la SCP d'avocats Dessalces-Ruffel ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703920 du 4 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 mars 2007 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire national dans le délai d'un mois ;
2°) d'annuler la décision litigieuse ainsi que celle prise le 2 mai 2007 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer le titre sollicité ou de réexaminer sa demande, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à verser la somme de 1 196 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, soit en cas d'admission à l'aide juridictionnelle à son avocat qui renoncerait à la percevoir, soit à elle-même ;
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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code
de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2010 :
- le rapport de Mme Gaultier, rapporteur,
- les conclusions de M. Brossier, rapporteur public,
- et les observations de Me Bonomo, de la SCP d'avocats Dessalces-Ruffel, pour M. et Mme A ;
Considérant que
, par la requête enregistrée sous le n° 0800300, M. A fait appel du jugement n° 0703918 du 4 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 26 mars 2007 rejetant sa demande d'admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire national dans le délai d'un mois , ainsi que la décision confirmative du préfet en date du 2 mai 2007 ; que, par la requête enregistrée sous le n° 0800301, Mme A, épouse du précédent, fait appel du jugement n° 0703920 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 26 mars 2007 rejetant sa demande d'admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire national dans le délai d'un mois, ainsi que la décision confirmative du préfet en date du 2 mai 2007 ; que ces deux requêtes ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué et sans qu'il soit besoin de statuer sur tous les moyens présentés :
Considérant que l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit :
(...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à
l'article L. 311-7 soit exigée ;
Considérant que M. A, né en 1976 à Bakou mais de nationalité arménienne par son père, déclare avoir fui l'Arménie après l'assassinat de son frère et ne pouvoir y vivre désormais en raison de la nationalité azérie de sa mère ; qu'il résulte des pièces du dossier qu'il a épousé en 2000 en Ukraine Mme Naira Mkrtian, née en 1982 à Erevan et de nationalité arménienne ; que le couple a fui l'Ukraine et est entré en France en 2004 ; qu'il s'est vu refuser, en 2005 et 2006, le régime de protection des réfugiés puis de l'asile territorial ; qu'à la date à laquelle les décisions litigieuses ont été prises, deux enfants du couple étaient nés en France en 2005 et 2007 ; que de nombreuses attestations au dossier établissent la forte volonté d'intégration des intéressés dans la société française et la réalité de cette intégration, leur connaissance de la langue française ainsi que les perspectives d'emploi salarié de M. A ; que les liens du couple A avec le pays dont ils ont la nationalité sont inexistants et problématiques ; que, dans les circonstances de l'espèce, et nonobstant les usurpations d'identité commises aux fins d'obtenir un titre de séjour, M. et Mme A doivent être regardés comme ayant désormais en France avec leurs enfants leurs liens privés et familiaux ; qu'il suit de là que les décisions litigieuses ont porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et sont, par suite, entachées de violation des dispositions précitées de l'article L. 313-11-7° ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes en annulation ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que l'article
L. 911-1 du code de justice administrative dispose que : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'un personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution ;
Considérant que le présent arrêt accueille les conclusions présentées aux fins d'annulation présentées par M. et Mme A et implique, par suite, la délivrance d'un titre de séjour vie privée et familiale aux intéressés ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de délivrer à M. et Mme A les titres de séjour en cause, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu de prononcer l'astreinte demandée ;
Sur l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à verser à M. A ou à Mme A, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Les arrêtés du préfet de l'Hérault en date du 26 mars 2007 rejetant la demande d'admission au séjour de M. A et de Mme A et les obligeant à quitter le territoire national dans le délai d'un mois, ainsi que la décision confirmative du préfet en date du 2 mai 2007 sont annulés.
Article 2 : Les jugements n° 0703918 et n° 0703920 du tribunal administratif de Montpellier en date du 4 décembre 2007 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. A, ainsi qu'à Mme A un titre de séjour vie privée et familiale, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A et de Mme A est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Artur A, à
Mme Naira A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de
l'identité nationale et du développement solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
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N° 08MA00300, 08MA003012