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Tribunal administratif de Marseille, 1ère Chambre, 16 mars 2023, 2006727

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
  • Numéro d'affaire :
    2006727
  • Rapporteur : Mme Felmy
  • Nature : Décision
  • Décision précédente :Inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la direction de la protection des populations des Bouches-du-Rhône, 3 juin 2020
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Chronologie de l'affaire

Conseil d'État
18 décembre 2024
Cour administrative d'appel de Marseille
29 avril 2024
Tribunal administratif de Marseille
16 mars 2023
Directrice départementale de la protection des populations des Bouches-du-Rhône
7 juillet 2020
Inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la direction de la protection des populations des Bouches-du-Rhône
3 juin 2020

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2020, et deux mémoires complémentaires enregistrés les 9 mai et 27 juin 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société par actions simplifiée Boulangeries BG, représentée par Me Goutaland, demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision du 3 juin 2020 par laquelle l'inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la direction de la protection des populations des Bouches-du-Rhône lui a enjoint pour l'établissement qu'elle exploite à Salon-de-Provence : - d'une part, en application de l'article L. 521-1 du code de la consommation, dans un délai de deux semaines à compter de la réception de la décision d'injonction, d'afficher les prix des produits mis en vente dès l'ouverture de l'établissement aux clients et d'identifier et distinguer certains produits afin de ne pas induire le consommateur en erreur ; - d'autre part, en application de l'article L. 521-5 du code de la consommation, dans un délai de deux semaines à compter de la réception de la décision d'injonction, de procéder au nettoyage et à la désinfection des équipements et des locaux de la zone de production et de stockage de l'établissement, de recharger les distributeurs de savon et libérer l'accès des lave-mains, de stocker à l'écart des denrées et des emballages alimentaires les objets susceptibles de les contaminer, de mettre en place un suivi pour s'assurer du respect des mesures de nettoyage et de désinfection, de mettre à la disposition des consommateurs l'information relative aux allergènes contenus dans les denrées alimentaires non préemballées ou préemballées en vue de leur vente immédiate, et d'indiquer l'état " décongelé " de manière visible, à proximité de l'ensemble des pâtisseries mises en vente. 2°) d'annuler la décision du 7 juillet 2020 par laquelle la directrice départementale de la protection des populations des Bouches-du-Rhône a rejeté son recours hiérarchique ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'inspecteur n'était pas compétent pour adresser des injonctions dès lors que la situation constatée ne présentait pas un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs ; - la décision est insuffisamment motivée en droit dès lors que les textes cités ne permettent pas de retrouver les infractions qui fondent l'injonction, et en fait dès lors que l'approximation de certains manquements relevés ne permet pas d'apprécier la réalité de ceux-ci ; - la décision est entachée d'erreur de droit dès lors que l'inspecteur n'a pas démontré que les produits fabriqués, détenus ou mis sur le marché présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs ; - l'inspecteur n'a pas précisé quels lave-mains étaient concernés par son injonction, alors que d'autres dispositifs de ce type sont opérationnels ; - le stockage séparé du matériel d'entretien n'est exigé par aucun texte ; - les salissures constatées lors de la visite du 7 février 2020 sont susceptibles de relever de l'activité quotidienne normale d'une boulangerie ; - le tableau des allergènes est situé à 1,50 mètre des produits concernés et l'information sur les denrées décongelées à moins de deux mètres, de sorte que les informations sont données de manière correcte ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la mise en place des mesures correctives en réponse à la lettre d'information préalable aurait dû conduire à surseoir à la mesure d'injonction ; - l'identification des produits de la veille était suffisante ; - la décision est entachée d'un détournement de pouvoir et de procédure dès lors qu'en l'absence de contre-visite, elle ouvre la possibilité d'utiliser la procédure de l'amende administrative afin de sanctionner de manière autonome des infractions relevant du Parquet. Par deux mémoires en défense enregistrés les 1er avril et 24 mai 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 25 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n°852/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ; - le règlement (UE) n°1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 ; - le code de la consommation ; - l'arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l'information du consommateur sur les prix ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Felmy, rapporteure, - les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public, - les observations de Me Goutaland, pour la SAS Boulangeries BG, - et les observations de Mme A, pour la direction de la protection des populations des Bouches-du-Rhône.

Considérant ce qui suit

: 1. La boulangerie Marie Blachère située au 306 avenue Michelet à Salon-de Provence, gérée par la société Boulangeries BG, a fait l'objet d'un contrôle le 7 février 2020 par l'inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. A la suite de ce contrôle, l'inspecteur a fait parvenir à la société une lettre d'information préalable à une injonction administrative du 17 février 2020 l'invitant à présenter ses observations sous huit jours, cette lettre étant accompagnée d'un procès-verbal de constatations. Par une décision du 3 juin 2020, l'inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la direction de la protection des populations des Bouches-du-Rhône lui a enjoint, dans un délai de deux semaines à compter de la réception de la décision d'injonction, d'une part, en application de l'article L. 521-1 du code de la consommation, d'afficher les prix des produits mis en vente dès l'ouverture de l'établissement aux clients et d'identifier et distinguer certains produits afin de ne pas induire le consommateur en erreur, d'autre part, en application de l'article L. 521-5 du même code, de procéder au nettoyage et à la désinfection des équipements et des locaux de la zone de production et de stockage de l'établissement, de recharger les distributeurs de savon et libérer l'accès des lave-mains, de stocker à l'écart des denrées et des emballages alimentaires les objets susceptibles de les contaminer, de mettre en place un suivi pour s'assurer du respect des mesures de nettoyage et de désinfection, de mettre à la disposition des consommateurs l'information relative aux allergènes contenus dans les denrées alimentaires non préemballées ou préemballées en vue de leur vente immédiate, et d'indiquer l'état " décongelé " de manière visible, à proximité de l'ensemble des pâtisseries mises en vente. La société Boulangeries BG a formé un recours hiérarchique le 23 juin 2020 auprès de la directrice départementale de la direction de la protection des populations des Bouches-du-Rhône, qui a été rejeté par décision du 7 juillet 2020. La société Boulangeries BG demande au tribunal d'annuler les deux décisions du 3 juin et du 7 juillet 2020. Sur les conclusions en annulation : En ce qui concerne la procédure préalable : 2. L'article L. 512-1 du code de la consommation dispose que : " Sous réserve de dispositions spécifiques, les dispositions du présent chapitre s'appliquent à la recherche et à la constatation des infractions et des manquements ainsi qu'à l'exercice des contrôles administratifs. " et son article L. 512-2 prévoit que : " Les infractions et les manquements sont constatés par des procès-verbaux, qui font foi jusqu'à preuve contraire. ". Aux termes de l'article R. 512-1 de ce code : " Les procès-verbaux constatant une infraction ou un manquement établis par les agents habilités énoncent la nature, la date et le lieu des constatations ou des contrôles effectués./ Ils sont signés par les agents ayant procédé aux constatations ou au contrôle ". 3. Contrairement à ce que soutient la requérante, le procès-verbal de manquement du 11 février 2020 accompagnant la lettre d'information préalable fait état de l'existence d'un danger ou de la possibilité d'un danger, découlant notamment d'un défaut d'hygiène. Ce procès-verbal signé par l'inspecteur chargé du contrôle, qui cite les textes pertinents sur lesquels il se fonde pour chaque manquement relevé, comprend l'ensemble des énonciations exigées à l'article R. 512-1 du code de la consommation, tient lieu de procès-verbal de constatation et permettait à la société requérante de connaître et, par suite, de discuter les éléments de faits constatés lors de la visite de contrôle. 4. En outre, si la requérante soutient qu'elle a fourni lors de la phase contradictoire, à l'appui de son courrier du 26 février 2020 en réponse à la lettre d'information préalable, des photographies des locaux et des équipements nettoyés, des lave-mains rechargés, des affichages régularisés et mis à jour notamment concernant les allergènes, ainsi que des fiches de postes et une attestation de formation à l'hygiène délivrée aux employés, et qu'elle a procédé, avant la décision attaquée du 3 juin 2020, aux corrections relatives aux mentions obligatoires, à savoir la mention des produits allergènes, ces éléments ne faisaient pas obstacle à ce que l'administration prenne ultérieurement une décision d'injonction. La société requérante n'est par ailleurs pas fondée à soutenir que le préfet aurait dû diligenter un nouveau contrôle pour s'assurer de la mise en conformité de l'entreprise avec ses obligations avant de prendre la décision attaquée, dès lors qu'aucune disposition du code de la consommation n'impose un tel contrôle sur place entre l'envoi de la lettre d'information préalable et le prononcé d'une injonction. En ce qui concerne la loyauté de l'information donnée aux consommateurs : 5. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation : " Lorsque les agents habilités constatent un manquement ou une infraction avec les pouvoirs prévus au présent livre, ils peuvent, après une procédure contradictoire, enjoindre à un professionnel, en lui impartissant un délai raisonnable qu'ils fixent, de se conformer à ses obligations ". 6. En premier lieu, si la requérante soutient qu'elle a fourni lors de la phase contradictoire, dans son courrier du 26 février 2020, une feuille d'émargement pour une formation délivrée aux employés durant laquelle un rappel sur les règles en matière d'affichage de prix aurait été réalisé, ainsi que des photographies de ces affichages, notamment des ardoises relatives aux prix des burgers, wraps, flans et boissons et une commande de matériel de type " pic pix " indiquant " Tarte de la veille - 50% ", il ressort de la décision d'injonction du 3 juin 2020 que l'inspecteur a pris en compte ces observations. En outre, de tels éléments, qui relèvent de simples renseignements, déclarations et photographies, dont les dates et lieux ne sont au demeurant pas vérifiables, ne permettent pas de remettre en cause les constatations opérées par l'inspecteur conformément aux dispositions de l'article L. 512-2 du code de la consommation citées au point 2, alors par ailleurs que la rectification des défauts d'affichage des prix ne porte que sur une partie des produits mis en cause et qu'aucune précision n'est donnée quant à la formation que les employés auraient reçue sur l'application des règles d'affichage de prix. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de l'administration sue ce point doit être écarté. 7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 412-12 du code de la consommation : " L'utilisation dans la fabrication ou la préparation d'une denrée alimentaire de tout ingrédient ou auxiliaire technologique ou dérivé d'une substance ou d'un produit énuméré à l'annexe II du règlement (UE) n° 1169/2011 modifié du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires provoquant des allergies ou des intolérances, et encore présent dans le produit fini même sous une forme modifiée, est portée à la connaissance du consommateur final et des établissements de restauration selon les modalités fixées par la présente sous-section ". Cette annexe comporte quatorze allergènes identifiés comme majeurs et devant être affichés dans le but d'éviter la mise en danger des consommateurs. Aux termes de l'article R. 412-13 du même code : " L'information mentionnée à l'article R. 412-12 est indiquée sur la denrée elle-même ou à proximité de celle-ci de façon qu'il n'existe aucune incertitude quant à la denrée à laquelle elle se rapporte lorsque celle-ci est : / 1° Présentée non préemballée sur les lieux de vente au consommateur final et aux collectivités au sens du d du paragraphe 2 de l'article 2 du règlement (UE) n° 1169/2011 modifié du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires ; / 2° Emballée sur les lieux de vente à la demande du consommateur ; / 3° Préemballée en vue de sa vente immédiate. ". Aux termes de l'article R. 412-14 de ce code : " Dans les lieux où sont proposés des repas à consommer sur place, sont portés à la connaissance du consommateur, sous forme écrite, de façon lisible et visible des lieux où est admis le public : / 1° Soit l'information mentionnée à l'article R. 412-12 elle-même ; / 2° Soit les modalités selon lesquelles cette information est tenue à sa disposition. Dans ce cas, le consommateur est mis en mesure d'accéder directement et librement à l'information, disponible sous forme écrite ". 8. Il ressort du procès-verbal de constats du 11 février 2020 établi par l'administration que l'information relative à la présence d'allergènes dans les " wraps et burgers " mis en vente n'était affichée à aucun endroit dans l'établissement et, plus généralement, que l'affichage de la liste des allergènes, y compris ceux contenus dans ces produits, en particulier le gluten ainsi que l'inspecteur l'a relevé, était placé au bas d'un mur, à proximité de la vitrine extérieure et difficilement lisible. Par suite, et alors que la présence d'allergènes doit être portée à la connaissance du consommateur en vertu de l'annexe II au règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le tableau des allergènes situé à 1,50 mètre des produits concernés était conforme aux dispositions précitées. 9. En troisième lieu, le point 1 de la partie A de l'annexe VI du règlement (UE) n° 1169/2011 du 25 octobre 2011 précise que la denrée alimentaire comporte ou est assortie d'une mention relative à l'état physique dans lequel elle se trouve ou au traitement spécifique qu'elle a subi, par exemple surgelé, au cas où l'omission de cette information serait susceptible d'induire l'acheteur en erreur. Le point 2 de cette annexe précise que, dans le cas spécifique des denrées qui ont été congelées avant la vente et sont vendues décongelées, la dénomination est accompagnée de la mention " décongelé ". Aux termes de l'article R. 412-11 du code de la consommation : " La dénomination, au sens du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 modifié concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, de toute denrée alimentaire présentée non préemballée sur les lieux de vente au consommateur final, et, le cas échéant, les autres mentions obligatoires qui doivent l'accompagner, sont indiquées sur la denrée elle-même ou à proximité de celle-ci de façon qu'il n'existe aucune incertitude quant à la denrée à laquelle elles se rapportent. ". 10. Il ressort du procès-verbal de constats que l'information relative au traitement de congélation-décongélation, que la société Boulangeries BG a choisi de porter à la connaissance des consommateurs par l'emploi conjoint d'un pictogramme et d'une affiche donnant l'explication de ce pictogramme et des modalités d'utilisation de la congélation lors de l'élaboration des produits, était visible, en ce qui concerne l'affiche explicative depuis l'extérieur de l'établissement, mais difficilement visible à l'intérieur de l'établissement en raison de la présence d'une vitrine réfrigérée située devant l'affichage. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'information sur les denrées décongelées, lesquelles se distinguent des denrées surgelées vendues, elles, en l'état de congélation, bien que se situant à moins de deux mètres des produits concernés, aurait été donnée conformément aux dispositions précitées. Si elle soutient qu'un tel affichage n'était pas rendu nécessaire compte tenu de l'absence de risque pour la santé lié à la recongélation des produits concernés, en l'espèce des beignets, l'obligation de faire apparaître une telle mention n'est pas liée, aux termes des dispositions visées au point 9, à l'existence d'un tel risque mais seulement à l'état de la denrée au moment de sa vente. En outre, et alors même qu'aucun élément au dossier ne permet d'établir que la recongélation de ces produits n'aurait pas d'effets qui nuisent à leur qualité ou à la sécurité du consommateur, c'est sans erreur de droit que l'inspecteur a pu décider de prononcer une injonction sur ce point en application des dispositions de l'article L. 521-1 du code de la consommation, et non de l'article L. 521-5 du même code. 11. En quatrième lieu, l'article 7 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires prévoit que les informations sur les denrées alimentaires n'induisent pas le consommateur en erreur et sont précises, claires et aisément compréhensibles par lui. Il ressort du procès-verbal de constats que les tartes fabriquées la veille de leur mise en vente étaient disposées au milieu des autres produits identifiés comme étant faits du jour, la seule mention d'un rabais de prix de 50% ne permettant pas d'informer le consommateur, au-delà de la promotion ainsi accordée, sur le fait que ces pâtisseries n'avaient pas été fabriquées le jour même. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par l'administration sur ce point doit être écarté. 12. Ainsi, dès lors que l'administration a poursuivi, par les décisions attaquées, les objectifs garantis notamment par les dispositions du règlement (UE) n°1169/2011 du 25 octobre 2011 d'une information claire des consommateurs sur les caractéristiques des données alimentaires et qu'il n'est pas établi, contrairement à ce que soutient la société requérante, que, compte tenu de ce qui précède et au regard de l'absence de démonstration de la cessation des manquements à la date de la décision attaquée, les étiquetages litigieux respecteraient les règles de l'Union européenne ci-dessus mentionnées, cette société n'est pas fondée à soutenir qu'en prescrivant les mesures d'injonction en litige, l'administration aurait pris des mesures qui n'étaient pas adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité poursuivie, ou que la décision d'injonction serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard notamment de la mise en place de mesures correctives en réponse à la lettre d'information préalable. En ce qui concerne la sécurité alimentaire : 13. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de la consommation : " La recherche et la constatation des infractions et des manquements mentionnés au présent code sont effectuées conformément aux habilitations et aux pouvoirs d'enquête définis au présent livre ". Aux termes de l'article L. 511-3 du même code : " Les agents de la concurrence et de la répression des fraudes sont habilités à rechercher et constater les infractions ou les manquements aux dispositions mentionnées à la présente section dans les conditions définies par celles-ci. ". Aux termes de l'article L. 521-5 du code de la consommation: " Lorsque du fait d'un manquement à la réglementation prise pour l'application des dispositions du livre IV ou d'un règlement de l'Union européenne, les conditions de fonctionnement d'un établissement sont telles que les produits fabriqués, détenus ou mis sur le marché présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs, les agents habilités peuvent ordonner toutes mesures correctives, notamment le renforcement des autocontrôles, des actions de formation du personnel, la réalisation de travaux ou d'opérations de nettoyage. /En cas de nécessité, l'autorité administrative peut prononcer par arrêté la fermeture de tout ou partie de l'établissement ou l'arrêt d'une ou de plusieurs de ses activités ". Aux termes de l'article L. 521-2 de ce code : " Les agents habilités peuvent, dans les mêmes conditions, enjoindre à tout professionnel de cesser agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite ou interdite () ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la procédure de l'injonction peut être mise en œuvre afin de faire cesser tout manquement ou infraction mentionné au code de la consommation. 14. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 521-5 du code de la consommation que la seule possibilité qu'un produit fabriqué, détenu ou mis sur le marché présente un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs fonde la compétence de l'inspecteur pour prendre les mesures d'injonction en cas de manquement constaté à la réglementation. Par suite, et alors que l'article précité n'opère pas de distinction quant au caractère mineur ou majeur du danger encouru, le moyen tiré de ce que l'inspecteur n'était pas compétent pour adresser des injonctions dès lors que la situation constatée ne présentait pas un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs doit être écarté. 15. En deuxième lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 1er du règlement (CE) n° 852/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires : " Le présent règlement établit les règles générales en matière d'hygiène des denrées alimentaires à l'intention des exploitants du secteur alimentaire en tenant particulièrement compte des principes suivants : / a) la responsabilité première en matière de sécurité alimentaire incombe à l'exploitant du secteur alimentaire ; / b) il est nécessaire de garantir la sécurité alimentaire à toutes les étapes de la chaîne alimentaire depuis la production primaire () ". Aux termes du 2. de l'article 4 du même règlement : " Les exploitants du secteur alimentaire ope´rant a` n'importe quel stade de la chai^ne de production, de la transformation et de la distribution de denre´es alimentaires apre`s ceux auxquels s'applique le paragraphe 1 se conforment aux re`gles ge´ne´rales d'hygie`ne figurant a` l'annexe II et a` toute exigence spe´cifique pre´vue par le re`glement (CE) no 853/2004. ". En vertu du point 4 du chapitre I de l'annexe II de ce même règlement, " Un nombre suffisant de lavabos judicieusement situés et destinés au lavage des mains doit être disponible. Les lavabos destinés au lavage des mains doivent être équipés d'eau courante, chaude et froide, ainsi que de matériel pour le nettoyage et pour le séchage hygiénique des mains. En cas de besoin, les dispositifs de lavage des denrées alimentaires doivent être séparés de ceux destinés au lavage des mains. ". 16. Si, en application des principes ainsi définis, la société Boulangeries BG est libre de déterminer le nombre de lavabos destinés au lavage des mains qui permet la mise en œuvre de bonnes pratiques d'hygiène dans l'établissement, il ressort des pièces du dossier que l'inspecteur a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, estimer que les lavabos installés dans la zone de production et qu'elle avait équipés d'un distributeur de savon fixé au mur étaient nécessaires pour garantir une hygiène suffisante. Par suite, la constatation portée dans le procès-verbal de constat du 11 février 2020 selon laquelle deux lave-mains étaient assortis d'un dispositif non opérationnel, suffit à caractériser le manquement aux dispositions précitées de nature à favoriser les mauvaises pratiques d'hygiène, quand bien même d'autres dispositifs de ce type auraient été opérationnels. 17. En troisième lieu, le règlement (CE) n° 852/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires dispose, dans son article 3, que " les exploitants du secteur alimentaire veillent à ce que toutes les étapes de de la production, de la transformation et de la distribution des denrées alimentaires sous leur responsabilité soient conformes aux exigences pertinentes en matière d'hygiène fixées par le présent règlement ". Il résulte du point 3 du chapitre IX, relatif aux dispositions applicables aux denrées alimentaires, de l'annexe II de ce règlement qu'à toutes les e´tapes de la production, de la transformation et de la distribution, les denrées alimentaires doivent être protégées contre toute contamination susceptible de les rendre impropres à la consommation humaine, dangereuses pour la santé ou contaminées de manie`re telle qu'elles ne pourraient e^tre raisonnablement conside´re´es comme pouvant e^tre consomme´es en l'e´tat. En vertu du 2 b) du chapitre I de cette même annexe relatif aux dispositions ge´ne´rales applicables aux locaux utilise´s pour les denre´es alimentaires, les locaux utilisés pour les denrées alimentaires doivent permettre de pre´venir l'encrassement, le contact avec des mate´riaux toxiques, le de´versement de particules dans les denre´es alimentaires et la formation de condensation et de moisissure inde´sirable sur les surfaces. Par suite, dès lors que les matériels et produits d'entretien, par leur fonction, transportent des poussières et des substances toxiques, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'exigence d'un stockage des denrées alimentaires séparé du matériel d'entretien serait dépourvue de toute base légale. 18. En quatrième lieu, en vertu du 2 a) du chapitre I de l'annexe II du règlement n° 852/2004 du 29 avril 2004 susmentionné relatif aux dispositions ge´ne´rales applicables aux locaux utilise´s pour les denre´es alimentaires, les locaux utilisés pour les denrées alimentaires doivent pouvoir e^tre convenablement entretenus, nettoye´s et/ou de´sinfecte´s, pre´venir ou re´duire au minimum la contamination ae´roporte´e et offrir un espace de travail suffisant pour l'exe´cution hygie´nique de toutes les ope´rations. Il ressort du procès-verbal de constats que la salissure relevée par l'inspecteur a été constatée à 11h10, soit en milieu de journée, et qu'elle ne pouvait résulter de la seule activité du jour dès lors que la saleté constatée dans les zones de production, de chambres de pousse et des chambres froides positives, et la couleur noire des particules, révélaient un processus d'accumulation impliqué par l'absence de nettoyage récent. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les salissures constatées lors de la visite du 7 février 2020 étaient susceptibles de résulter de l'activité quotidienne normale d'une boulangerie, et que l'injonction prononcée sur ce point est de ce fait injustifiée. 19. En cinquième lieu, pour les motifs retenus aux points 13 à 18, et dès lors l'inspecteur a démontré que les produits fabriqués, détenus ou mis sur le marché présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs au sens de l'article L. 521-5 du code de la consommation, les décisions en litige ne sont pas entachées d'erreur de droit. 20. En sixième et dernier lieu, si la société requérante soutient que l'injonction administrative est entachée d'un détournement de pouvoir et de procédure dès lors qu'en l'absence de contre-visite, elle " ouvre la possibilité d'utiliser la procédure de l'amende administrative afin de sanctionner de manière autonome des infractions relevant du Parquet ", il résulte toutefois des dispositions des articles L. 521-1 et L. 521-5 du code de la consommation que les mesures d'injonction ainsi prononcées ne constituent pas des sanctions, mais des mesures de police administrative destinées à prévenir, en l'espèce, tout risque sanitaire lié à la commercialisation d'un produit alimentaire. En outre, ainsi que le préfet le fait valoir en défense, aucune des mesures d'injonction prononcées n'ouvre en l'espèce la possibilité pour l'administration de sanctionner la requérante par une amende administrative en cas de non-respect. Il suit de là que le moyen tiré du détournement de procédure et celui tiré du détournement de pouvoir, au demeurant imprécis, ne peuvent qu'être écartés. 21. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est fondée à demander l'annulation ni de la mesure d'injonction prise à son égard le 3 juin 2020, ni de la décision du 7 juillet 2020 portant rejet de son recours hiérarchique. Sur les frais du litige : 22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée sur leur fondement par la société Boulangeries BG soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Boulangeries BG est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la société par actions simplifiée Boulangeries BG et au préfet des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 1er mars 2023, à laquelle siégeaient : Mme Hameline, présidente, Mme Felmy, première conseillère, Mme Hétier-Noël, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023. La rapporteure, Signé E. Felmy La présidente, Signé M.-L. Hameline La greffière, Signé B. Marquet La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2