Chronologie de l'affaire
Tribunal de Grande Instance de Paris 28 mars 2014
Cour d'appel de Paris 27 novembre 2015
Cour de cassation 30 novembre 2017

Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - Chambre 6, 27 novembre 2015, 14/09020

Mots clés société · AXA · contrat · dommages · garantie · SAS · rapport · assureur · qualité · ouvrage · réparation · désordres · travaux · responsabilité · adresse

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro affaire : 14/09020
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Décision précédente : Tribunal de Grande Instance de Paris, 28 mars 2014, N° 06/09646
Président : Madame Marie-Christine BERTRAND

Chronologie de l'affaire

Tribunal de Grande Instance de Paris 28 mars 2014
Cour d'appel de Paris 27 novembre 2015
Cour de cassation 30 novembre 2017

Texte

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2015

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/09020

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mars 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/09646

APPELANTES

SA AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur dommages-ouvrages et d'assureur de la Société ECC agissant en la personne de ses représentants légaux

RCS : 722 057 460

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par : Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055 et assistée par Me DIDI MOULAI Samia, avocat au barreau de 'Paris, toque C675.

SAS GYMA Anciennement dénommée GYMA INDUSTRIE, venant aux droits et obligations de la Société TEAMPACK agissant en la personne de ses représentants légaux

RCS : B 388 680 670

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et assistée par : Me Roger DENOULET, avocat au barreau de PARIS, toque: D0285.

INTIMÉES

M.A.F prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par : Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090 et assistée par Me TESSIER Sophie avocat au barreau de PARIS toque:G706.

SA SOCOTEC prise en la personne de ses représentants légaux

RCS : B 542 016 654

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par : Me Jean-Jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0675

SMABTP en sa qualité d'assureur de la Société SOCOTEC prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Défaillante

SAS ISOLATION DU SUD - ISOSUD représentée par son liquidateur Maître [V] [J] demeurant [Adresse 6]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Défaillante

SOCIÉTÉ L'AUXILIAIRE prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

Représentée par : Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

SAS TATA STEEL FRANCE BATIMENTS ET SYSTEMES prise en la personne de ses représentants légaux

RCS : 442 121 893

[Adresse 9]

[Adresse 9]

Représentée par : Me Maud EGLOFF-CAHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1757 et assistée par Me MAI Thibault, avocat au barreau de COLMAR ,toque: 26.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine BERTRAND, Présidente de chambre

Madame Valérie GERARD, Conseillère

Madame Madeleine HUBERTY, Conseillère

Rapport ayant été fait par Madame Valérie GERARD, Conseillère , conformément à l'article 785 du Code de procédure civile,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Coline PUECH

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine BERTRAND, président et par Madame Sabrina RAHMOUNI, greffier présent lors du prononcé auquel a été remis la minute par le magistrat signataire.

********

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS GYMA est propriétaire d'un bâtiment industriel situé à [Localité 1] dans lequel elle exploite une activité de fabrication, de conditionnement et de stockage de produits alimentaires.

En 1996, des travaux d'extension des bâtiments de production ont été entrepris comprenant notamment la mise en place d'un carrelage anti-acide, d'un carrelage quartzé et de panneaux sandwichs.

La SA GYMA a souscrit une assurance dommage ouvrage auprès de la SA UAP, devenue AXA France IARD.

Sont intervenus dans cette opération de construction':

- La SARL ECC, actuellement en liquidation judiciaire, en qualité d'entreprise générale et maître d''uvre, assurée au titre de la responsabilité décennale par la SA AXA France IARD,

- La société EGE, actuellement en liquidation judiciaire, assurée auprès de la MAF, en qualité de bureau d'études, intervenue à la demande de la SARL ECC en qualité de sous-traitante,

- La société ISOLATION DU SUD (ISOSUD) sous-traitante de la SARL ECC pour le lot bardage intérieur et extérieur, assurée par la SA L'AUXILIAIRE,

- La société TATA STEEL pour les bardages extérieurs.

La réception des travaux a été prononcée le 30 juin 1996 avec des réserves n'intéressant pas le présent litige. Les réserves ont été levées le 16 août 1996.

Divers désordres sont apparus, notamment des désordres affectant les carrelages.

Une déclaration de sinistre a été réalisée le 29 octobre 2001 pour les carrelages anti-acide et un rapport d'expertise amiable déposé le 15 avril 2002. La SA AXA France IARD a formulé une proposition d'indemnisation le 19 septembre 2002 qui a été jugée insuffisante par la SAS GYMA.

Les opérations d'expertise amiable ont repris avec l'assistance d'un sapiteur et un rapport complémentaire a été déposé le 8 mars 2005 prévoyant le remplacement total du carrelage.

Le cabinet SARETEC était alors désigné contradictoirement en qualité de maître d''uvre pour la mise en 'uvre de la solution réparatoire et il estimait le coût définitif des travaux de reprise à 2'502'330,43 euros HT.

La SAS GYMA a mis l'assureur dommage ouvrage en demeure de lui régler cette somme et la SA AXA France IARD, par courrier du 11 mai 2006 a opposé un plafond de garantie.

Divers autres désordres concernant les bardages, les dallages quartzés et les panneaux sandwichs sont survenus courant 2005. Un rapport préliminaire de l'assureur dommage-ouvrage a été établi le 27 juillet 2005 et la SA AXA France IARD a opposé un refus de garantie.

La SA GYMA a obtenu la désignation de M. [S] [Z] en qualité d'expert par ordonnance du 20 décembre 2006 et la SA GYMA a saisi le tribunal de grande instance de Paris en indemnisation de ses préjudices.

Le rapport d'expertise a été déposé le 23 décembre 2010.

Par jugement du 28 mars 2014, le tribunal de grande instance de Paris a statué en ces termes':

«'I- Sur les fins de non-recevoir

Rejette les fins de non-recevoir relatives au défaut de qualité et d'intérêt à agir de la société GYMA SAS,

II- Sur les désordres relatifs aux carrelages antiacides

Dit que la responsabilité de la société ECC est engagée au titre des désordres relatifs aux carrelages antiacides sur le fondement de l'article 1792 du code civil,

Dit que la compagnie AXA FRANCE doit sa garantie tant au titre de la police dommages ouvrage qu'au titre de la police de responsabilité décennale souscrite par la société ECC,

Dit que les garanties souscrites s'appliqueront dans les termes et limites des polices souscrites, lesquelles prévoient l'app1ication de franchises par assuré et par sinistre dont les montants sont fixés aux termes des conditions particulières de la police,

Rejette l'ensemble des demandes principales et en garantie formées à l'encontre de la société EGE ainsi que de la MAF en qualité d'assureur de la société EGE,

Dit que le préjudice de la société GYMA SAS occasionné par les désordres relatifs aux carrelages antiacides s'élève aux sommes de :

- 685.762 euros au titre des travaux réparatoires,

- 1.464.914 euros au titre de la réparation des préjudices consécutifs relatifs au montage d'un bâtiment tampon, la réalisation de l'atelier tampon, pour accueillir le process de production pendant le temps des travaux réparatoires (fabrication puis conditionnement), puis le démontage de la zone tampon et du bâtiment modulaire,

- 280.910 euros au titre des honoraires de maîtrise d''uvre,

- 68.622 euros au titre de l'assurance dommages ouvrage,

- 16.895 euros au titre des mesures conservatoires d'urgence déjà réalisées,

Dit que la société GYMA SAS supportera 30% de ces préjudices qui correspond à sa part de responsabilité,

Condamne par conséquent la compagnie AXA FRANCE en qualité d'assureur dommages ouvrage et d'assureur de la société ECC à payer à la société GYMA SAS au titre de la réparation des désordres relatifs aux carrelages antiacides les sommes de :

- 432.733 euros au titre des travaux réparatoires, déduction faite de la somme de 47.300 euros versée à titre de provision le 27 janvier 2005 par la compagnie AXA FRANCE à la société GYMA,

- 1.025.440 euros au titre de la réparation des préjudices consécutifs,

- 196.637 euros au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre,

- 48.035 euros au titre de l'assurance dommages ouvrage,

- 11.826 euros au titre des mesures conservatoires d'urgence déjà réalisées,

Dit que les sommes précitées seront actualisées au jour de la présente décision en fonction de l'évolution de l'indice BT01 entre la date du rapport de l'expert, le 23 décembre 2010 et celle du présent jugement du 28 mars 2014,

Dit que les sommes précitées seront en outre augmentées des intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

Rejette l'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties,

III- Sur les désordres relatifs aux bardages extérieurs

Rejette la fin de non-recevoir relative à la prescription de l'action formée par la société TATA STEEL venant aux droits de la société CØRUS BATIMENT ET SYSTEMES,

Dit que la responsabilité de la société TATA STEEL venant aux droits de la société CORUS BATIMENT ET SYSTEMES est engagée au titre des désordres relatifs aux bardages extérieurs sur le fondement de l'article 1641 du code civil,

Dit que le préjudice de la société GYMA SAS occasionné par les désordres relatifs aux bardages extérieurs s'é1ève à la somme de 53.434 euros,

Dit que la société GYMA SAS supportera 50% du préjudice correspondant à sa part de responsabilité,

Condamné la société TATA STEEL venant aux droits de la société CORUS BATIMENT ET SYSTEMES à payer à la société GYMA SAS au titre de la réparation des désordres relatifs aux bardages extérieurs la somme de 26.717 euros,

Dit que la somme précitée sera actualisée au jour de la présente décision en fonction de l'évolution de l'indice BT01 entre la date du rapport de l'expert, le 23 décembre 2010 et celle du présent jugement du 28 mars 2014,

Dit que la somme précitée sera en outre augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

Rejette l'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties,

IV- Sur les désordres relatifs au dallage quartzé

Dit que la responsabilité de la société ECC est engagée au titre des désordres relatifs au dallage quartzé sur le fondement de l'article 1147 du code civil,

Dit que les garanties souscrites, auprès de la compagnie AXA France par la société ECE ne sont pas mobilisables au titre des désordres relatifs au dallage quartzé,

Par conséquent, rejette l'ensemble des demandes formées par la société GYMA SAS à l'encontre de la compagnie AXA FRANCE en qualité d'assureur de la société ECC,

V- Sur les désordres relatifs aux panneaux sandwiches intérieurs isolants

Rejette l'ensemble des demandes formées par la société GYMA SAS au titre des désordres relatifs aux panneaux sandwiches isolants,

VI- Sur les autres demandes

Constate qu'aucune demande n'est dirigée à l'encontre de la société SOCOTEC et de son assureur la SMABTP, et les met hors de cause,

Condamne la compagnie AXA FRANCE à payer à la société GYMA SAS la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette l'ensemble des demandes plus amples ou contraires formées par les parties,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

Condamne la compagnie AXA FRANCE à payer les dépens de la présente instance, en ceux compris les frais d'expertise.'»

La SA AXA France IARD a interjeté appel le 15 juillet 2014.

La SAS GYMA a interjeté appel les 24 avril et 15 juillet 2014. Les instances ont été jointes.

Par ordonnance du 5 juin 2014, le désistement de la SA AXA France IARD à l'égard de la SA SOCOTEC a été constaté.

Par ordonnance du 4 septembre 2014, le désistement de la SA AXA France IARD à l'égard de la SA L'AUXILIAIRE, la SAS TATA STEEL France BATIMENTS ET SYSTEMES, la SAS ISOSUD représentée par son liquidateur Me [J] et la SMABTP a été constaté.

Vu les conclusions de la SA AXA France IARD du 23 septembre 2015,

Vu les conclusions de la SAS GYMA du 23 septembre 2015,

Vu les conclusions de la MAF du 9 janvier 2015,

Vu les conclusions de la SA SOCITEC du 13 janvier 2015,

Vu les conclusions de la SAS TATA STEEL du 8 janvier 2015.

L'ordonnance de clôture du 17 septembre 2015 a été révoquée et une nouvelle ordonnance de clôture rendue le 24 septembre 2015.


MOTIFS DE LA DÉCISION


Devant la cour le litige est limité aux dispositions du jugement concernant le carrelage antiacide. Le montant du préjudice subi par la SAS GYMA tel que fixé par le tribunal de grande instance de Paris dans la décision déférée n'est pas discuté, ni le caractère décennal des désordres.

- La fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la SAS GYMA':

La MAF soulève, à nouveau mais à titre subsidiaire, le défaut de qualité à agir de la SAS GYMA.

C'est par d'exacts motifs, que la cour adopte, que les premiers juges ont rejeté cette demande. Le dirigeant de l'entreprise conserve ses pouvoirs d'administration aux termes des articles L622-1 et L622-3 du code de commerce et l'administrateur n'a qu'une mission d'assistance. Dès lors la SAS GYMA a conservé sa capacité d'agir en justice et le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir.

- Les responsabilités':

La responsabilité de la société ECC, en application de l'article 1792 du code civil n'est pas discutée.

La responsabilité du maître d'ouvrage':

La SAS GYMA conclut à l'infirmation du jugement ayant retenu qu'elle avait une part de responsabilité de 30% dans les dommages subis.

Les locateurs d'ouvrage ne peuvent être exonérés de la présomption de responsabilité pesant sur eux en application de l'article 1792 du code civil qu'en démontrant une immixtion fautive du maître de l'ouvrage notoirement compétent, une acceptation des risques par ce dernier ou une faute ayant concouru pour partie à la réalisation des dommages.

En l'espèce, il convient de relever que l'assureur dommage ouvrage n'a proposé qu'une indemnité de 47'000 euros pour la seule surface de 250 m² de l'extension réalisée en 1996, manifestement insuffisante pour procéder aux travaux de réparation nécessaires, alors même que les constatations de l'expert amiable conduisait à considérer que les désordres allaient évoluer et se généraliser. Par ailleurs, aucune indemnisation n'était proposée pour les dommages immatériels, même plafonnés. L'insuffisance des premières préconisations de l'expert amiable résulte du rapport de M. [G] [N] du 8 mars 2005, qui évoque des reprises partielles déjà effectuées mais avec un résultat décevant et qui conclut «'il est donc illusoire de procéder à un remplacement partiel des zones concernées, le remplacement total apparaît inévitable'».

Dès lors, même si le maître de l'ouvrage avait fait procéder aux reprises préfinancées par l'indemnité provisionnelle reçue de la SA AXA France IARD, les désordres auraient connu la même ampleur. Il ne peut être reproché à un maître d'ouvrage de n'avoir pas pallié les carences de l'assureur dommage ouvrage dont le rôle est justement de préfinancer les travaux de réparation.

Il n'y a donc pas d'abstention fautive du maître de l'ouvrage.

Ni la «'spécificité de l'organisation'» de la SAS GYMA, ni son «'attitude peu conciliatrice'» évoquées par l'expert ne constituent des fautes qui seraient en relation avec les désordres et aucune des constatations de l'expert ne permet de retenir, comme les premiers juges l'ont fait, que la SAS GYMA aurait manqué à son obligation d'entretien.

Aucune faute du maître de l'ouvrage en relation avec la survenance des désordres ou leur aggravation n'est démontrée et le jugement doit être réformé sur ce point.

La responsabilité de la société EGE':

La SAS GYMA et la SAS AXA France IARD concluent à la réformation du jugement ayant rejeté leurs actions contre la MAF, assureur de la société EGE en soutenant que cette dernière était le maître d''uvre de l'opération de construction.

La MAF conclut à la confirmation du jugement sur ce point en faisant valoir que la société EGE n'est intervenue que pour des missions ponctuelles en qualité de sous-traitante de la société ECC.

Il résulte des pièces produites aux débats et notamment des pièces annexées au rapport d'expertise':

- qu'un contrat d'ingénierie a été conclu entre le BET EGE et la société ECC le 6 novembre 1995 pour un montant total de 144'720 euros TTC pour les missions «'établissement avant-projet, permis de construire, étude structure, plans d'exécution, détails techniques, établissement DCE, conduite générale de chantier, établissement de situations, recollement, pilotage'»,

- que le BET est mentionné comme faisant partie de l'équipe ingénierie au titre des missions économiste, fluides techniques et coordination de chantier, document établi par la société ECC,

- que les procès-verbaux de chantier sont établis par la SA EGE en qualité de coordonnateur, la société ECC y figurant en qualité d'entreprise générale,

- que les propositions de paiement des entreprises sont signées du BET EGE, maître d''uvre, la société ECC figurant sur l'en tête du document en qualité de maître d''uvre.

Ces documents établissent clairement que la SA EGE est intervenue pour des missions de maîtrise d''uvre en qualité de sous-traitante de la société ECC.

Sa responsabilité ne peut être engagée à ce titre sur le fondement de l'article 1792 du code civil, mais sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour faute prouvée s'agissant des tiers ou sur le fondement contractuel, s'agissant de la SA AXA France IARD en sa qualité d'assureur de la société ECC.

La SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur de la société ECC, qui n'agit que sur le fondement de l'article 1792 du code civil doit en conséquence être déboutée de son appel en garantie qui ne peut être uniquement «'fondé'» sur l'article 334 du code de procédure civile.

Elle est en revanche recevable, en qualité d'assureur dommage ouvrage, subrogée dans les droits du maître de l'ouvrage pour les sommes qu'elle justifiera avoir réglées à ce titre, à être relevée et garantie intégralement.

La SAS GYMA, qui a invoqué les articles 1382 et suivants du code civil, doit prouver la faute commise par la SA EGE.

La SA EGE, qui devait les plans d'exécution, le dossier de consultation des entreprises et la conduite générale du chantier aux termes de son contrat, devait s'assurer que les joints de carrelage étaient adaptés au process de nettoyage utilisé dans l'usine et que les joints effectivement réalisés étaient conformes au CCTP. L'expert a constaté que la SA EGE n'avait pas sollicité et donc n'avait pas vérifié les fiches techniques des produits mis en 'uvre. Cette défaillance dans sa mission a concouru à la survenance des désordres et sa responsabilité est donc engagée.

- La garantie de la SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur dommage ouvrage':

La SAS GYMA soutient que la SA AXA France IARD encourt les sanctions prévues aux articles L 242-1 et A 243-1 du code des assurances pour avoir notifié simultanément le rapport préliminaire et sa position sur la garantie.

L'A 243-1 du code des assurances, dans sa version applicable au litige, s'agissant d'une police conclue antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 19 novembre 2009 portant actualisation des clauses-types en matière d'assurance-construction, dispose : « dans un délai maximum de soixante jours courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre réputée constituée, l'assureur, sauf s'il a fait application des dispositions du deuxième alinéa du d) du 1°, sur le vu du rapport préliminaire établi par l'expert et préalablement communiqué à l'assuré, notifie à celui-ci sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties du contrat ».

Il n'est pas contesté que le 3 mai 2002, la SA AXA France IARD a notifié le rapport d'expertise préliminaire du 15 avril 2002, concomitamment à sa prise de position sur la garantie et que l'assuré a mis la SA AXA France IARD en demeure de lui régler la somme de 2'502'330,43 euros correspondant au coût des travaux à entreprendre tel que déterminé par le cabinet SARETEC.

L'assureur ne peut valablement notifier à son assuré, dans le délai qui lui est imparti, sa décision sur le principe de sa garantie sans lui avoir préalablement communiqué le rapport préliminaire. Cette communication préalable n'est pas réalisée si elle intervient simultanément avec la prise de position de l'assureur sur la garantie.

Faute de notification valable du rapport dans le délai imparti, la SA AXA France IARD encourt les sanctions édictées à l'article L242-1 du code des assurances.

La SA AXA France IARD est par conséquent déchue du droit de se prévaloir, pour les dommages couverts par l'assurance de dommage obligatoire, de causes de non-garantie ou d'un plafond de garantie et il doit être appliqué un taux d'intérêt au double du taux légal à compter de la mise en demeure du 3 mai 2006. Le jugement doit être infirmé sur ce point.

La SAS GYMA ne conteste pas que la construction d'un bâtiment tampon et son démontage à l'issue des travaux réparatoires constitue un dommage immatériel consécutif à un dommage matériel garanti.

Les sanctions de l'article L242-1 du code des assurances sont limitatives et ne peuvent être appliquées aux garanties facultatives souscrites dans le cadre du contrat d'assurance dommage ouvrage. L'application de ces sanctions est donc limités aux sommes dues au titre des garanties obligatoires et ne prive pas la SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur dommage ouvrage du droit d'invoquer le plafond contractuel applicable aux dommages immatériels consécutifs.

En l'espèce ce plafond est fixé dans les conditions particulières à la somme de 1'000'000 francs soit 152'449,02 euros et il doit être appliqué tant aux sommes nécessaires à la construction et au démontage du bâtiment tampon qu'aux frais annexes correspondants.

Les sommes dues par la SA AXA France IARD en sa qualité d'assureur dommage ouvrage s'établissent comme suit':

Garanties

Travaux réparatoires

Maîtrise d''uvre 10%

Assurance dommage ouvrage 3%

TOTAL

Garantie Obligatoire

685 762 €

68 576,20 €

20 572,86 €

774 911,06 €

Garanties Facultatives

1 464 914 €

146 491,40 €

43 944,42 €

1 655 352,82 €

limité à 152 449,02 €

La somme de 774'911,06 euros sera indexée sur l'indice BT 01 du coût de la construction entre le 11 avril 2006 et le 3 mai 2006 et assortie des intérêts au double du taux légal à compter du 3 mai 2006.

Le jugement déféré doit être infirmé en ce sens.

- La garantie de la SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale de la société ECC':

La SA AXA France IARD soutient que sa garantie n'est pas mobilisable, son assurée, la société ECC, n'ayant pas déclaré que son marché excédait le plafond prévu à l'article 8 des conditions particulières, soit la somme de 868'349 euros HT.

La SAS GYMA soutient qu'il s'agit d'une demande nouvelle irrecevable en cause d'appel. Or la demande de la SA AXA France IARD tendant à voir appliquer une clause de son contrat n'est pas une demande nouvelle dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que ses demandes formées en première instance visant à voir limiter sa garantie aux «'aux limites contractuellement définies, notamment de plafond'» telles qu'elles résultent de ses dernières conclusions visées en page 13 du jugement déféré.

Contrairement à ce que soutient la SA AXA France IARD, la sanction de ce défaut de déclaration n'est pas la non-assurance mais la réduction proportionnelle prévue à l'article L113-9 du code des assurances.

En tout état de cause, l'expert a établi en page 24 de son rapport (cf.annexe7 du rapport) que le montant total du marché de travaux s'était établi à la somme de 5'090'980,31 francs soit 776'114,95 euros HT.

La facture de la société ECC du 18 juillet 1996 (pièce 13 de la SA AXA France) et l'accord pour des travaux supplémentaires à hauteur d'un million de francs (pièce 14 de la SA AXA France IARD), sont des pièces unilatérales qui ne rendent pas compte de la réalité du marché de travaux réellement réalisé.

Le marché réalisé par la société ECC n'excédant pas le plafond prévu par les conditions particulières, il n'y a pas lieu d'appliquer la réduction proportionnelle.

La SA AXA France IARD soutient que les garanties facultatives du contrat souscrit par la société ECC ne peuvent s'appliquer en raison de la résiliation du contrat le 1er janvier 1997.

Le contrat stipule en son article 16.1 que «'Chaque garantie s'applique aux réclamations et déclarations notifiées à l'assureur durant la période de validité du contrat définie à l'article 30.3 et se rapportant à des faits ou événements survenus avant la fin de ladite période, pour autant que ni le souscripteur, ni l'assuré, ni son assureur n'en ait eu connaissance avant la conclusions du contrat, et dans la mesure, en ce qui concerne les seuls garanties définies aux articles 5 et 7, où ils sont relatifs à des travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant ladite période.

Les garanties, définies aux articles 5 et 7 sont maintenues après la fin de la période de validité du contrat sans paiement de cotisation subséquente'».

Le contrat a été souscrit et résilié avant la loi n°2003-706 du 1er août 2003 qui est par conséquent inapplicable à la présente espèce.

En application des dispositions antérieures, cette clause n'est pas valable, le versement de primes pour la période d'effet du contrat ayant nécessairement pour contrepartie la garantie des dommages qui trouvent leur origine pendant cette période. Il n'est pas discutable que le fait dommageable est l'exécution défectueuse de son marché par la société ECC et que cette exécution a eu lieu pendant la période de validité du contrat. C'est donc à juste titre, par des motifs pertinents, que les premiers juges ont rejeté ce moyen, le jugement doit être confirmé sur ce point.

Enfin, la SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur de la société ECC soutient que le plafond contractuel applicable aux dommages immatériels est de 162'785,06 euros et que sa condamnation à garantie ne peut donc aller au-delà pour les sommes concernées.

La SA AXA France IARD invoque l'article 5 des conditions particulières du contrat souscrit par la société ECC qui stipule que pour les dommages immatériels non consécutifs à des dommages matériels (article 13 des conditions générales) le plafond de garantie est fixé à 569'600 francs, soit 162'785,06 euros. Cet article 13 vise «'la responsabilité civile pour préjudices causés à autrui'», ces préjudices «'ne consistant pas en dommages construction, dommages matériels intermédiaires, dommages matériels ou dommages immatériels visés aux articles 5, 7, 8, 9, 10 et 11 qui précèdent'».

Or il est rappelé que la responsabilité de la société ECC est engagée au titre de sa responsabilité décennale et que les dommages immatériels dont la SAS GYMA demande réparation, sont des dommages immatériels consécutifs aux dommages matériels relevant de la garantie légale. Le plafond invoqué par la SA AXA France IARD n'est donc pas applicable à la présente espèce et sa garantie, en qualité d'assureur de la société ECC est acquise pour le tout. Le plafond pour les dommages immatériels consécutifs est défini par l'article 17.1.2 b à «'mille fois le dernier montant de la cotisation annuelle du tarif pour la période d'assurance pendant laquelle se situe la date du sinistre'» et n'est à l'évidence pas atteint puisque la cotisation annuelle est fixée à 11'392 francs et que le plafond s'élève par conséquent à 11'392 x 1000 = 11'392'000 francs soit 1'736'699,20 euros.

- Sur la garantie de la MAF':

Le contrat souscrit par la SA EGE auprès de la MAF le 1er juillet 1994 a été résilié le 25 novembre 1966. La police garantit la responsabilité décennale et quasi délictuelle de la SA EGE.

La MAF soutient que pour les dommages immatériels la garantie a cessé de plein droit à compter de la résiliation du contrat et que la réclamation de la SA GYMA est postérieure.

Or le versement de primes pour la période d'effet du contrat a nécessairement pour contrepartie la garantie des dommages qui trouvent leur origine pendant cette période et la MAF doit en conséquence sa garantie pour l'ensemble des dommages.

- Les recours en garantie':

La SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur dommage ouvrage sera garantie des sommes réglées au titre des dommages matériels et immatériels, à l'exception des intérêts au double du taux légal fixés en application de l'article L242-1 du code des assurances par la SA AXA France IARD en qualité d'assureur de la société ECC et par la MAF, sur justification du règlement des sommes au maître de l'ouvrage.

Compte tenu des manquements respectifs de la société ECC et de la SA EGE, le recours en garantie de la MAF s'exercera dans les proportions suivantes':

- ECC 80%

- EGE 20%

- Les conclusions de la SA SOCOTEC et de la SAS TATA STEEL':

La SA AXA France IARD s'est désistée de toute action contre la SOCOTEC et la SAS TATA STEEL et le désistement a été constaté par ordonnances des 5 juin et 4 septembre 2014. La SAS GYMA ne formule aucune demande à leur encontre dans ses conclusions.

La MAF, qui a fait assigner la SA SOCOTEC sans formuler aucune demande à son encontre, sera condamnée à lui verser la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le maintien de la SAS TATA STEEL contre laquelle un désistement a été formalisé à l'initiative de la SA AXA France IARD et contre laquelle la SAS GYMA ne formait aucune demande, n'était pas nécessaire et elle sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS



La cour,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 28 mars 2014 au titre des dispositions concernant le carrelage anti acide en ce qu'il a':

- rejeté l'ensemble des demandes principales et en garantie formées à l'encontre de la société EGE ainsi que de la MAF en qualité d'assureur de la société EGE,

- dit que la société GYMA SAS supportera 30% de ces préjudices correspondant à sa part de responsabilité,

- condamné par conséquent la compagnie AXA FRANCE en qualité d'assureur dommages ouvrage et d'assureur de la société ECC à payer à la société GYMA SAS au titre de la réparation des désordres relatifs aux carrelages antiacides les sommes de :

- 432.733 euros au titre des travaux réparatoires, déduction faite de la somme de 47.300 euros versée à titre de provision le 27 janvier 2005 par la compagnie AXA FRANCE à la société GYMA,

- 1.025.440 euros au titre de la réparation des préjudices consécutifs,

- 196.637 euros au titre des honoraires de maîtrise d''uvre,

- 48.035 euros au titre de l'assurance dommages ouvrage,

- 11.826 euros au titre des mesures conservatoires d'urgence déjà réalisées,

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum la SA AXA France IARD en qualité d'assureur dommage ouvrage, la SA AXA France IARD en qualité d'assureur de la société ECC et la MAF à payer à la SAS GYMA':

- 685.762 euros au titre des travaux réparatoires,

- 1.464.914 euros au titre de la réparation des préjudices consécutifs relatifs au montage d'un bâtiment tampon, la réalisation de l'atelier tampon, pour accueillir le process de production pendant le temps des travaux réparatoires (fabrication puis conditionnement), puis le démontage de la zone tampon et du bâtiment modulaire,

- 280.910 euros au titre des honoraires de maîtrise d''uvre,

- 68.622 euros au titre de l'assurance dommages ouvrage,

- 16.895 euros au titre des mesures conservatoires d'urgence déjà réalisées,

Dit que l'obligation de la SA AXA France IARD en qualité d'assureur dommage ouvrage est toutefois limitée à la somme de 152 449,02 euros pour les dommages immatériels et leurs frais annexes, tels que rappelés dans les motifs de la présente décision,

Dit que la somme de 774'911,06 euros sera indexée sur l'indice BT 01 du coût de la construction entre le 11 avril 2006 et le 3 mai 2006 et assortie des intérêts au double du taux légal à compter du 3 mai 2006,

Dit que la garantie de la MAF s'exerce sous réserve de l'application de la franchise contractuelle,

Dit que la SA AXA France IARD en sa qualité d'assureur dommage ouvrage sera garantie par la SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur de la société ECC et par la MAF, sur justification des sommes réglées au maître de l'ouvrage, à l'exception des sommes réglées au titre du doublement des intérêts au taux légal,

Rejette le recours en garantie formé par la SA AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur de la société ECC,

Dit que la MAF, assureur de la SA EGE sera garantie par la SA AXA FRANCE IARD assureur de la société ECC à hauteur de 80%,,

AUTORISE, en application de l'article A 4° de l'annexe 2 figurant sous l'article A243-1 du code des assurances, la SA AXA France IARD, en sa qualité d'assureur dommage ouvrage, à contrôler si les travaux de réparation sont bien effectués par la société GYMA avec l'indemnité versée par ses soins et si le bâtiment tampon est démoli à la suite des travaux de réfection du carrelage,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SA AXA France IARD à payer à la SAS GYMA la somme de 8'000 euros,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la MAF à payer à la SA SOCOTEC la somme de 3'000 euros,

Dit n'y a voir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SAS TATA STEEL,

Condamne la SA AXA France IARD aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT