Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème Chambre, 14 avril 2014, 13NC01024

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
  • Numéro d'affaire :
    13NC01024
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Décision précédente :Tribunal administratif de Besançon, 9 avril 2013
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000028855839
  • Rapporteur : Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
  • Rapporteur public :
    M. WIERNASZ
  • Président : M. LAPOUZADE
  • Avocat(s) : DSC AVOCATS - SCP DUFAY SUISSA CORNELOUP WERTHE
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Chronologie de l'affaire

Conseil d'État
2021-07-05
Cour administrative d'appel de Nancy
2019-04-25
Cour administrative d'appel de Nancy
2019-04-09
Cour administrative d'appel de Nancy
2018-01-16
Tribunal administratif de Besançon
2017-10-12
Cour administrative d'appel de Nancy
2016-06-07
Conseil d'État
2014-11-28
Cour administrative d'appel de Nancy
2014-04-14
Tribunal administratif de Besançon
2013-04-09

Texte intégral

Vu la requête

, enregistrée le 4 juin 2013, complétée par un mémoire du 21 février 2014, présentée pour la commune de Lantenne-Vertière, représentée par son maire, élisant domicile..., par la société d'avocat DSC ; La commune de Lantenne-Vertière demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1100775 du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de la SCI Le Chanais, la délibération en date du 8 avril 2011 par laquelle le conseil municipal de la commune a décidé d'acquérir une parcelle cadastrée ZH 37 ; 2°) d'annuler la délibération du 8 avril 2011 ; 3°) de mettre à la charge de la SCI le Chanais une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le remboursement de la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridictionnelle ; Elle soutient que : - le jugement est irrégulier parce qu'il n'est pas suffisamment motivé ; - l'acquisition en litige poursuit un intérêt public communal parce qu'elle permet, d'une part, la création d'une réserve foncière permettant la compensation des propriétaires et exploitants agricoles impactés par l'extension de la carrière exploitée par la société Wienerberger, d'autre part, d'assurer des recettes communales complémentaires, et ne ressort pas d'un intérêt privé ; - les frères A...ont assuré la présidence de l'association foncière depuis sa création en 1967 ; - la SCI n'a pas contesté la décision prise par la SAFER de céder la parcelle à la commune ; - la circonstance que la délibération ne soit pas motivée ne démontre pas l'absence d'intérêt public communal ; Vu le jugement et la délibération attaqués ; Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2013, présenté pour la SCI Le Chanais, représentée par son gérant, ayant son siège social au 6, route de Besançon, à Franois (25770), par Me C..., Elle conclut au rejet de la requête et d'enjoindre à la commune de saisir le juge du contrat afin de solliciter l'annulation de la vente de la parcelle cadastrée section ZH n° 37 intervenue entre la SAFER de Franche Comté et la commune de Lantenne Vertière ; Elle soutient que : - le jugement est suffisamment motivé ; - la commune ne poursuit aucun intérêt public communal dès lors que la délibération en litige ne fait pas référence à la constitution de réserves foncières ; la commune ne poursuit qu'un intérêt : la conclusion d'un contrat de fortage avec la société Wienerberger en lieu et place de la SCI Le Chanais qui exerce cette activité depuis 1979, aux fins de percevoir les recettes de la vente d'argile en lieu et place de la SCI ; - la commune n'est pas fondée à invoquer le fait que la SCI était titulaire d'une promesse de vente sur cette parcelle, et qu'elle n'aurait pas concrétisé la vente dès lors que la vente n'a pu être régularisée suite au refus d'autoriser la déviation d'un chemin d'exploitation passant sur ladite parcelle ;

Vu l'ordonnance

du 3 décembre 2013 portant clôture de l'instruction au 19 décembre 2013 ; Vu l'ordonnance du 20 décembre 2013 portant réouverture de l'instruction ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code général des collectivités territoriales ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2014 : - le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller, - les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public, - et les observations de Me B...pour la commune de Lantenne-Vertière, et de Me C... pour la SCI Le Chanais ;

Sur la

régularité du jugement : 1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " les jugements sont motivés " ; 2. Considérant que le jugement attaqué, après avoir cité les dispositions des articles L. 1112 et L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales, a rappelé les aspects financiers de l'opération ainsi que la conclusion d'un bail de cession du droit d'exploitation, a noté que la commune soutenait qu'elle avait la volonté de créer une réserve foncière et d'obtenir des recettes supplémentaires, a estimé qu'il ne ressortait pas de la délibération et d'aucune autre pièce du dossier, que la commune ait poursuivi un intérêt public communal ; que le jugement attaqué, qui est ainsi suffisamment motivé, n'est pas entaché d'irrégularité ; Sur les conclusions à fin d'annulation : 3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Le Chanais, dont le gérant est M.A..., a pour objet l'acquisition, la propriété, l'administration et l'exploitation par bail ou autre convention de fortage des tènements fonciers situés sur la commune de Lantenne-Vertière, et qu'elle possède plusieurs terrains dont elle permet l'extraction d'argile, selon une convention de fortage conclue avec la société des tuileries et briqueteries Albert A...SA, aujourd'hui dénommée société Wienerberger, convention de fortage conclue jusqu'au 8 août 2044 ; que si par délibération en date du 8 avril 2011, dont l'objet est " contrat SAFER pour l'achat de terrains : extension carrière Wienerberger ", la commune de Lantenne-Vertière a décidé " de se porter acquéreur auprès de la SAFER de la parcelle 37 d'une surface de 8ha 26a 86 ca (après réception de l'arrêté préfectoral autorisant l'extension de la carrière) pour un montant de vente de 138 065,68 euros auxquels s'ajoutent 31 703,35 euros d'indemnités d'éviction de l'exploitant actuel ", l'intérêt public qu'elle invoque, à savoir l'obtention de recettes complémentaires par la conclusion d'un contrat de fortage ne relève pas d'un intérêt communal ; 4. Considérant, d'autre part, que si la commune soutient dans ses écritures que ladite acquisition lui permettra de constituer des réserves foncières destinées aux propriétaires et exploitants agricoles touchés par l'extension de la carrière exploitée par la société Wienerberger, une telle motivation ne ressort d'aucune des pièces du dossier ; 5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Lantenne-Vertière ne justifie d'aucun intérêt de nature à motiver l'acquisition des terrains dont il s'agit ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de la SCI Le Chanais, ladite délibération ; Sur les conclusions aux fins d'injonction : 6. Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution " ; 7. Considérant que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement que la nullité dudit contrat soit constatée par le juge ; qu'il appartient au juge de l'exécution, saisi d'une demande d'un tiers d'enjoindre à une partie au contrat de saisir le juge compétent afin d'en constater la nullité, de prendre en compte la nature de l'acte annulé ainsi que le vice dont il est entaché et de vérifier que la nullité du contrat ne portera pas, si elle est constatée, une atteinte excessive à l'intérêt général ; 8. Considérant que l'annulation de la délibération du 8 avril 2011, par laquelle le conseil municipal a décidé d'acquérir une parcelle cadastrée ZH 37 est de nature à conduire le juge du contrat à constater la nullité de la convention conclue, sur la base de ladite délibération, entre la commune de Lantenne-Vertière et la SAFER ; qu'eu égard à la gravité du vice l'affectant, la constatation éventuelle de sa nullité, ne peut être regardée comme devant porter une atteinte excessive à un intérêt général, dont l'existence n'est en l'espèce pas démontrée ; que, dans ces conditions, l'annulation de la délibération du 8 avril 2011 implique qu'il soit enjoint à la commune de Lantenne-Vertière de saisir le juge du contrat afin qu'il constate la nullité de la vente de la parcelle cadastrée section ZH n° 37 intervenue entre la SAFER de Franche Comté et la commune de Lantenne-Vertière ; Sur les conclusions relatives à la charge des dépens et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative: 9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; 10. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la SCI Le Chanais qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la commune de Lantenne-Vertière la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il en est de même des conclusions relatives au remboursement de la somme de 35 euros que le requérant a dû exposer au titre de la contribution pour l'aide juridictionnelle ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Lantenne-Vertière une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à verser à la SCI Le Chanais au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Lantenne-Vertière est rejetée. Article 2 : Il est enjoint à la commune de Lantenne-Vertière de saisir le juge du contrat afin qu'il constate l'annulation de la vente de la parcelle cadastrée section ZH n° 37 intervenue entre la SAFER de Franche Comté et la commune de Lantenne-Vertière. Article 3 : La commune de Lantenne-Vertière est condamnée à verser à la SCI Le Chanais une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lantenne-Vertière et à la SCI Le Chanais. Copie en sera adressée pour information à la SAFER de Franche-Comté. '' '' '' '' 5 13NC01024